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      Quand la Macronie instrumentalise l’avortement

      Olivier Maurice · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 27 November, 2022 - 04:00 · 5 minutes

    Avez-vous vu des hôpitaux pris d’assaut par des hordes de fanatiques brandissant des pancartes ? Des avions à destination de l’étranger bondés de jeunes filles désespérées ? Lisez-vous chaque jour des histoires affreuses d’arrière-cuisines transformées en salles d’interventions de fortune avec des aiguilles à tricoter ? Voyez-vous des affrontements dans la rue, dans les tribunaux, dans les salles de conseil municipal ? Observez-vous médusés des prises d’otages de médecins et d’infirmières ?

    Ne dites pas oui par pur esprit taquin, même si compte tenu de l’état de l’ hôpital public , on peut légitimement se poser des questions sur la sécurité relative des arrière-cuisines et des aiguilles à tricoter…

    Il n’existe aujourd’hui aucun danger sur une éventuelle remise en question de l’avortement et de la contraception en France. Ceux qui estiment que la légalisation de l’avortement est une très mauvaise chose représentent à peine 6 % de la population .

    Alors pourquoi ce besoin urgent et impérieux d’inscrire le droit à l’avortement dans la Constitution ?

    Pour créer un peu plus de fracture dans le pays ? Pour recommencer le coup du mariage pour tous ? Pour entrer dans l’histoire ? Pour accrocher une médaille à son revers ?

    Si c’est pour rejouer une centième fois la carte de la Sainte République Démocratique Laïque et Progressiste vs la Bête Immonde dopée à l’Opium du Peuple, hé bien c’est raté ! Même les infâmes fascistes grenouilles de bénitier (ou présentés comme tels) du RN veulent constitutionnaliser la loi Veil . D’ailleurs une énorme majorité de la population (81 % des hommes, 85 % des femmes) est favorable à l’autorisation de principe (donc sans condition autre que le libre choix) de l’avortement.

    Plouf, la tentative de démonstration de leadership éveillé de la Macronie se transforme en non-événement mais l’histoire en dit long sur l’incapacité de la majorité actuelle à gouverner.

    Populisme d’extrême centre

    Toute la stratégie politicienne de la Macronie repose sur une version tripatouillée de ce vieux slogan de l’ancien Front National : « ni droite ni gauche ». Mais alors que le FN d’il y a dix, vingt ans se présentait en solution alternative pour sauver la France (et le système français), la Macronie de 2022 se présente en solution raisonnable pour faire exactement la même chose.

    La raison contre la déraison. Voilà le niveau du débat.

    Tout l’édifice branlant qui détient actuellement le pouvoir repose sur une seule et unique chose : être le rempart qui protège le pays des einsatzgruppen et des Khmers rouges. C’est d’ailleurs pour cela que l’on dit d’Emmanuel Macron qu’il est libéral : pas pour ses idées et pour ses actions mais par pure paresse intellectuelle : « Voyons voir dans le Larousse et Le petit Robert comment on appelle les opposants aux divers totalitarismes… »

    La liberté encore une fois prise en otage

    Et voilà le débat sur la liberté encore une fois instrumentalisé et encore une fois sur un sujet totalement liberticide : comment expliquer aux autres ce qu’ils doivent faire, en particulier lorsqu’ils se trouvent dans une situation personnelle extrêmement difficile, en grande fragilité et devant prendre une décision très compliquée. Yaka Fokon ! Le slogan de tous les donneurs de leçon qui savent mieux que les autres ce qui est bon pour eux.

    La raison, la morale et la nécessité ne régleront jamais ce débat. Tout le monde a le droit d’avoir une opinion sur le sujet et absolument tout le monde a le droit d’en changer lorsqu’il se trouve face à la réalité et aux choix à faire. Écrire des romans de philosophie sur un sujet qui ne nous concerne pas en y agglomérant des positions de principe est à la fois totalement vain et extrêmement arrogant.

    C’est le boulot des autorités morales de fixer des principes comme c’est celui des proches d’élaborer sur les tenants et les aboutissants, tout comme c’est le boulot des médecins et des conseils divers et variés de proposer et d’apporter des solutions. Mais c’est aux individus de prendre les décisions qui les concernent et qui concernent ceux dont ils ont factuellement la responsabilité.

    Le gouvernement civil

    Tout comme c’est au gouvernement d’empêcher que tout ce petit monde ne se tape sur la figure pour imposer son avis par la contrainte. C’est la seule raison d’ailleurs très discutable et assez utopique qui pourrait justifier l’existence du gouvernement civil.

    Une action anti-avortement n’est pas en soi un crime contre la liberté : elle constitue un crime ou un délit dès que sa manifestation est violente, qu’elle trouble l’ordre public, qu’elle porte atteinte aux personnes ou effectue un chantage, exerce des pressions, harcèle…

    Bloquer une autoroute pour sauver la planète ou bloquer un centre de planning familial constituent exactement le même délit. Ce qui est grave, inacceptable et qui doit être sévèrement puni, c’est l’usage de la violence.

    Est-ce que l’inscription dans la Constitution va réprimer ces soi-disant désobéissances civiles ou pour être clair, ce genre de manœuvre pour faire l’intéressant et imposer ses idées ? Non : on préfère faire des beaux discours et écrire des lois, c’est bien plus facile que d’instruire et de punir les actes délictueux.

    Un État inutile, prétentieux et inefficace

    Quelle sera la manifestation concrète de l’inscription de l’avortement et de la contraception dans la Constitution ? Un ministère de la Vie sexuelle en charge de définir la normalité en la matière et de payer des fonctionnaires pour effectuer des contrôles et diffuser des spots radio sur les pratiques quotidiennes à effectuer ? Une version gamète des 5 fruits et légumes par jour et du contrôle fiscal ?

    La liberté n’est pas un droit. La liberté est un fait. Les hommes et les femmes naissent libres. On n’y peut rien, c’est comme cela.

    Confiez à l’État la protection d’une liberté et on sait très bien ce qu’il en adviendra. C’est comme lui confier la gestion du Sahara : au bout de trois mois, il y aura pénurie de sable.