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      "Jacquie et Michel", “French Bukkake”: Ces enquêtes qui font vaciller le porno français

      news.movim.eu / HuffingtonPost · Tuesday, 14 June, 2022 - 16:17 · 5 minutes

    En France, le porno amateur fait l'objet de plusieurs enquêtes judiciaires après plusieurs vagues de révélations sordides sur les dessous de l'industrie. (Photo d’illustration) En France, le porno amateur fait l'objet de plusieurs enquêtes judiciaires après plusieurs vagues de révélations sordides sur les dessous de l'industrie. (Photo d’illustration)

    PORNOGRAPHIE - Le travail de la justice suit son cours dans le milieu français du X. Ce mardi 14 juin, le label pornographique français Jacquie et Michel est de nouveau dans le viseur de la justice française, après la garde à vue du propriétaire du site , Michel Piron, ainsi que de quatre autres personnes.

    Ces mesures font suite à une enquête ouverte en 2020 après de nombreux signalements d’associations comme Osez le féminisme, les Effronté-es et le Mouvement du Nid au sujet de pratiques sexuelles abusives contre des actrices dénonçant des “pratiques sexuelles hors normes et douloureuses” alors qu’elles n’étaient pas consentantes.

    Les cinq personnes placées en garde à vue ce mardi sont entendues dans le cadre d’une enquête préliminaire “pour des faits supposés de proxénétisme, complicité de viol et complicité d’agressions sexuelles entre 2009 et 2015”. Un épisode judiciaire qui remet le sujet des dérives du secteur au centre du débat dans l’Hexagone.

    Jacquie et Michel, “tête de gondole du secteur pro-amateur”

    C’est en 2020 que cette question a trouvé une première caisse de résonance avec la publication en février d’une vidéo par Konbini , dévoilant “les coulisses sordides” de l’industrie du porno dite “amateur”. La grande spécialité du site Jacquie et Michel , qui a fondé son succès et sa réputation sur l’achat de vidéos amateur à petit prix pour les diffuser ensuite sur son site.

    Mais le site avait été épinglé dès 2018 par le journaliste Robin d’Angelo dans le cadre du livre-enquête “Judy, Lola, Sofia et moi”. Il racontait comment il s’était introduit dans l’industrie, avant de gravir les échelons pour atteindre finalement les plateaux de tournage du site français, que Robin d’Angelo décrit comme “la tête de gondole du secteur ‘pro-amateur’”.

    Son enquête dénonçait l’absence récurrente du consentement des actrices sur les tournages et le non-respect du droit du travail. Il évoquait aussi dans ce livre la situation de grande précarité et de vulnérabilité d’un grand nombre d’ entre elles , contraintes d’accepter des situations de domination extrêmes sans avoir été prévenues à l’avance. Des faits révélateurs de pratiques devenues courante dans ce milieu. “Les actrices n’ont pas le pouvoir de dire non”, expliquait le journaliste du JDD dans une interview accordée à Hugo Clément .

    Pour se dédouaner, le site fondé en 1999 utilise son statut de diffuseur pour rejeter à chaque fois les accusations à son encontre. “Le groupe Jacquie et Michel n’a jamais produit ou réalisé de films et n’est que diffuseur de films réalisés par des producteurs indépendants”, expliquait ainsi Nicolas Cellupica, l’avocat de la marque “J&M”, propriété du groupe Arès, détenteur de nombreux sites et revues autour du X.

    “J&M”, la partie émergée de l’iceberg

    D’un côté, le sombre quotidien des actrices, de l’autre, le rôle prépondérant des producteurs. Fin 2021, Le Monde s’était également penché sur cette industrie. Dans une enquête au long cours intitulée “Plaintes contre X”, le quotidien tentait notamment de comprendre le rôle des producteurs dans les dérives du porno, entre méthodes proches du proxénétisme pour recruter des filles sur les tournages “par des stratagèmes élaborés” et extorsion d’argent auprès d’actrices pour retirer des vidéos mises en ligne sans leur consentement.

    Car au-delà de la tête de gondole “J&M” se cache une autre affaire emblématique. Depuis fin 2020, une enquête agite tout particulièrement l’industrie du X. Elle concerne la plateforme “French Bukkake” , spécialiste du porno amateur trash. Après des révélations du Parisien , le site a lui aussi fait l’objet de mises en examen contre ses producteurs. Plus d’une cinquantaine de victimes ont depuis été identifiées par les enquêteurs.

    Et ce sont pas moins de douze personnes, dont les producteurs stars “Pascal OP” et “Mat Hadix” (par ailleurs producteur pour “J&M”) qui sont poursuivies dans ce dossier exceptionnel par son ampleur. Parmi les chefs d’accusation: “traite d’être humains aggravée”, “viol en réunion” ou “proxénétisme aggravé”. Des qualifications criminelles que l’on retrouve dans les affaires liées au porno français ces dernières années, tant le besoin de faire toujours plus trash prédomine pour attirer plus de visiteurs.

    De timides solutions mises en place

    “Les enquêtes judiciaires sur Jacquie & Michel et French Bukkake ont mis quelques types hors d’état de nuire, mais d’autres vont arriver, prophétisait l’actrice et productrice Nikita Bellucci lors d’une enquête de 20 Minutes en 2021. Il ne faut pas se faire d’illusions. Tout le monde serre les fesses en attendant que cela se tasse. Mais il y aura d’autres dérives…”

    Pour contrebalancer ces scandales qui agitent l’industrie porno, une première mais timide “révolution” du secteur à vue le jour: la mise en place de chartes déontologiques pour défendre un porno plus ”éthique”. À commencer par Jacquie et Michel. Le site indiquait le 20 novembre 2020 que sa charte aurait pour but de “protéger l’ensemble des participants à la réalisation de contenus susceptibles d’être distribués et diffusés par ses différents studios.”

    Même son de cloche pour Dorcel qui, en avril 2021, s’est entouré de l’actrice Liza Del Sierra, du sociologue Alexandre Duclos et de l’avocat Matthieu Cordelier afin d’ élaborer une charte contenant 18 propositions “pour améliorer la qualité de vie au travail des professionnels du X et évoluer vers une production plus responsable”.

    À voir également sur Le HuffPost: Une boutique Jacquie & Michel à Paris visée par une manif anti-porno