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      Une visite de Macron en Afrique sous l'ombre de la Russie

      news.movim.eu / HuffingtonPost · Monday, 25 July, 2022 - 05:01 · 5 minutes

    Emmanuel Macron, ici le 30 juin 2022, se rend en Afrique le 25 juillet 2022 pour une visite de quatre jours sur fond de guerre en Ukraine. Emmanuel Macron, ici le 30 juin 2022, se rend en Afrique le 25 juillet 2022 pour une visite de quatre jours sur fond de guerre en Ukraine.

    DIPLOMATIE - La priorité des priorités pour le chef de l’État? Trois mois après sa réélection, et un mois après la fin de la PFUE, Emmanuel Macron retourne pour quatre jours en Afrique , l’une de ses priorités diplomatiques.

    Il se rendra, pour la première fois, au Cameroun, poids lourd de l’Afrique centrale, au Bénin, confronté aux défis sécuritaires du Sahel, et en Guinée-Bissau. Le président délaisse ainsi l’ancien pré-carré français d’Afrique centrale dont le Gabon et la RDC qui, parallèlement, ont développé leurs relations politiques et économiques avec d’autres puissances comme la Chine, la Russie ou l’Allemagne.

    Ce déplacement de quatre jours permettra au président de réaffirmer son “engagement dans la démarche de renouvellement de la relation de la France avec le continent africain” , explique l’Élysée. Les enjeux seront divers. Au Cameroun, il y sera, entre autres, question de l’État de droit alors que Paul Biya est critiqué par la communauté internationale. Quant au Bénin, Emmanuel Macron devrait notamment y aborder la restitution d’œuvres d’art par la France l’an dernier.

    Mais pour le président, ce voyage c’est aussi “rénover” ses partenariats militaires sur le continent pour se maintenir dans la compétition stratégique exacerbée qui s’y joue entre puissances, Moscou en tête. Le chef de la diplomatie russe Sergeï Lavrov se trouvait d’ailleurs lui-même en Afrique ce dimanche.

    Crise alimentaire et influence militaire

    De fait, la guerre en Ukraine et la Russie planeront indéniablement autour de ce déplacement. Tout d’abord dans le contexte de la crise alimentaire , alors que Kiev et Moscou ont signé des accords parallèles sur l’exportation du blé cette semaine. Lesquels ont été immédiatement entachés de frappes russes sur le port d’Odessa.

    À ce titre, Emmanuel Macron devrait aborder entre autres l’initiative Farm lancée en mars avec l’Union européenne et l’Union africaine pour accroître la production agricole. La France compte soutenir des projets au Cameroun, qui dispose de nombreux atouts dans ce secteur.

    Mais, à Yaoundé où menace Boko Haram, et face à un Paul Biya avec qui les relations ont été tendues ces derniers mois, il sera aussi question de l’influence militaire croissante de Moscou.

    “Le président camerounais Paul Biya a envoyé, en plein conflit en Ukraine, son ministre de la Défense à Moscou signer un accord militaire de défense avec la Russie. Je pense que ça a dû faire énormément réagir à Paris. D’ailleurs, je crois qu’à l’époque le responsable Afrique du Quai d’Orsay Christophe Bigot s’était rendu à Yaoundé pour savoir ce qu’il se passait”, rappelle pour TV5 Monde , Antoine Glaser, spécialiste des rapports entre la France et les pays d’Afrique francophone.

    La présence tous azimuts de Wagner

    Enfin, c’est aussi via la situation au Sahel, région frontalière du Bénin et de la Guinée-Bissau, que Moscou pourrait s’inviter dans les discussions. Au cœur des enjeux: la présence du groupe Wagner , et ce, alors qu’Emmanuel Macron a fait part de sa volonté de “repenser d’ici à l’automne l’ensemble (des dispositifs militaires de la France) sur le continent africain”.

    Poussée hors du Mali par la junte au pouvoir depuis 2020, qui travaille désormais -même si elle s’en défend- avec le sulfureux groupe paramilitaire russe Wagner, l’armée française sera partie du pays à la fin de l’été, après neuf ans de lutte antijihadiste. Sa présence au Sahel sera divisée par deux, à moins de 2.500 militaires, et va muteri vers des “dispositifs moins posés et moins exposés”, selon les termes d’Emmanuel Macron, afin notamment d’éviter de prêter le flanc à un sentiment anti-français très inflammable.

    Mais la France n’entend pas renoncer à la lutte contre les jihadistes affiliés à Al-Qaïda et Daech. L’enjeu est fondamental: Paris entend éviter le déclassement stratégique face à ses adversaires.

    “Les Russes ont une vraie priorité opérationnelle de s’opposer aux Français dans le champ informationnel en Afrique. Ils exercent une forte pression pour essayer de nous chasser (via) les réseaux sociaux, par le biais de Wagner”, résume un général français à l’AFP.

    Les mercenaires de Wagner sont déjà implantés en Centrafrique et au Mali , avec une offre de service claire: sécurité anti-coup d’État et assistance juridique pour maintenir le régime au pouvoir, en échange de l’exploitation des ressources minières, soulignent à l’AFP des sources concordantes.

    Pas anodin alors que le président guinéen Umaro Sissoco Embalo s’apprête à prendre la tête de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), en première ligne face à la junte malienne.

    Présence russe sur les réseaux sociaux

    Enfin, la “galaxie Prigojine”, du nom du fondateur russe de Wagner réputé proche du Kremlin, est également très active sur les réseaux sociaux. Des messages qui sont notamment partagés en masse par des groupes antifrançais sur Facebook en Afrique, par exemple, relevait notamment RFI . Fin avril au Mali, un drone français a surpris des mercenaires mettant en scène un faux charnier à proximité d’une base française, pour faire accuser Paris de crimes de guerre via de faux comptes Twitter.

    Le camp pro-russe pousse même jusqu’à l’ingérence dans la vie politique française, selon deux sources proches du dossier. “Le camp russe nous a embêtés pendant les campagnes électorales (présidentiel et législatif), via des faux comptes pro ou anti-gouvernement au Mali, au Sénégal, au Bénin et en RCA. Mais ça n’a pas pris”, décrit un haut responsable. Une situation sous contrôle.

    Une influence qui ne se limite plus aux réseaux sociaux. Plusieurs observateurs ont noté que le site pro-Kremlin, Sputnik France, avait trouvé une seconde jeunesse en devenant Sputnik Afrique. Un second souffle que devra résolumment aussi trouver Paris lors de cette visite.

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