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      La NUPES, une alliance fragile de partis en trois indices

      news.movim.eu / HuffingtonPost · Friday, 8 July, 2022 - 12:08 · 7 minutes

    Ces trois indices montrent que l'unité de la NUPES sera un combat Ces trois indices montrent que l'unité de la NUPES sera un combat

    POLITIQUE - L’avertissement du chef de bord. Jean-Luc Mélenchon, le leader de la NUPES , l’alliance des gauches à l’Assemblée nationale s’exprime dans un entretien à Libération , ce vendredi 8 juillet, et met en garde ses petits camarades contre toute désaffection. Gare à celui qui veut quitter la nouvelle coalition.

    “Désormais, il en coûtera très cher de descendre du train. Cela vaut pour tout le monde. Y compris pour nous insoumis”, fait valoir le troisième homme de la dernière présidentielle, pour qui cette union a “permis de dénouer une crise qui durait depuis une génération” à gauche.

    Pour l’instant, l’attelage semble tenir, malgré son score relativement décevant au soir du second tour des élections législatives . Comme un symbole, les différents partis qui forment la NUPES déposent une motion de censure commune contre le gouvernement d’Elisabeth Borne . Un premier motif de satisfaction après le refus des partenaires des insoumis de former un groupe unitaire à l’Assemblée nationale. Car derrière cette bonne entente, plusieurs épisodes montrent qu’il n’en faut pas beaucoup aux wagons de la coalition pour tanguer.

    Comme un doute sur la censure

    Sur leur premier texte, déjà. S’ils peuvent compter sur le soutien de leurs partenaires, les Insoumis ont passé du temps à les convaincre sur la motion de censure. “Je souhaite que toutes les décisions que nous prenons au nom de la Nouvelle union populaire écologique et sociale se prennent en commun”, expliquait ainsi Olivier Faure, le patron des socialistes, le 20 juin, “et non pas du seul fait des uns ou des autres”, un brin agacé par l’empressement de la France insoumise.

    Depuis, les différents chefs à plume se sont retrouvés autour d’une table pour aboutir à “une motion de défiance”, à mi-chemin entre la motion de censure et le vote de confiance. Une façon d’arrondir les angles -qui ne change rien sur la nature de la procédure- pour contenter le plus grand nombre. La socialiste Valérie Rabault, qui a pris ses distances avec la NUPES à plusieurs reprises, et qui aurait pu ne pas co-signer le texte selon l’AFP, s’y est finalement pliée.

    Le seul réfractaire vient, malgré tout, de ses rangs, en la personne de Dominique Potier. Le député de Meurthe-et-Moselle, membre du groupe PS, élu presque malgré lui avec le soutien de l’alliance des gauches, a refusé de s’associer à la motion de défiance. Comme le début d’un vent de fronde? “Il y a des débats en interne”, a ainsi résumé le chef des roses Boris Vallaud en présentant le texte, lundi après-midi, mais “la majorité a décidé de se rallier à cette proposition.”

    Différences de ton

    Censure ou défiance, le choix sémantique de la NUPES révèle aussi une différence de ton, entre des socialistes et écolos plus mesurés dans leurs expressions, que les insoumis. Quitte à engendrer quelques crispations. La journée de mercredi, celle du grand oral d’Elisabeth Borne à l’Assemblée nationale, est en cela un bon exemple, dans l’hémicycle et en dehors.

    À la tribune, c’est la dirigeante du groupe LFI, Mathilde Panot, qui s’est montrée la plus offensive pour fustiger la “stratégie” du “sauve qui peut” d’Elisabeth Borne, laquelle venait de prononcer son discours de politique générale. En Macronie, “l’essentiel est de simuler la démocratie pour mieux la bafouer”, a par exemple attaqué la députe du Val-de-Marne, en ciblant également le “forfait moral et politique” de la majorité à travers son vote pour l’élection de deux vice-présidents issus du Rassemblement national à l’Assemblée.

    Une charge qui fait écho à l’action organisée quelques minutes plus tôt par des députés LFI devant le Palais Bourbon. Masques sur la tête, une poignée d’élus a célébré le faux mariage d’Emmanuel Macron et Marine Le Pen puis l’enterrement du “front républicain”.

    De quoi décontenancer certains de leurs camarades... soucieux de ne pas être associés de trop près à ce genre de démonstration. “Ils ont l’habitude (...) et on peut leur reconnaître un certain talent”, s’amuse un député écolo bien que pas très fan de ce happening “un peu gênant” . “Le problème désormais c’est que toute la NUPES est associée à ça, sans distinction”, nous dit l’élu en parlant de “vision” différente du mandat de député.

    Des critiques stratégiques

    Une simple question de forme? Sans doute, sur ce point, mais les critiques perlent également sur le fond. Fabien Roussel, avant sa valse-hésitation sur la possibilité d’envoyer des communistes au gouvernement, n’a pas perdu de temps pour évoquer les “limites” de l’alliance des gauches.

    Celui qui a pris soin de s’afficher sur aucune des photos de famille de la NUPES pendant la campagne électorale a regretté, dès le soir du second tour, la stratégie de la Nouvelle Union, qui ne parle, selon lui, qu’à “une partie de la France, celle des villes et non celle de la ruralité”. “Ça n’a pas empêché non plus l’extrême droite de progresser fortement, et ça, ça m’interpelle, ça me questionne (...) On voit bien que nous avons atteint des limites dans ce que nous sommes en train de faire”, expliquait-il à ce moment-là.

    Surtout, le communiste, toujours prompt à faire entendre sa petite musique personnelle, n’est pas seul sur ce crédo. “Nous nous sommes entendus mais je constate qu’on n’a pas gagné les élections, donc ça veut dire qu’il faut travailler”, estime ainsi Boris Vallaud, le chef des socialistes à l’Assemblée, sur le site de 20 Minutes ce vendredi.

    Pour lui, la NUPES “doit continuer à bosser” sur “la question du décrochage économique et social des classes populaires rurales.” “Je suis d’accord avec ce que dit François Ruffin” sur ces enjeux, explique-t-il encore à propos des doutes émis par le député LFI un peu plus tôt.

    Le spectre de la dissolution

    L’élu de la Somme a déjà essayé d’orienter le débat sur l’avenir de la NUPES et sa stratégie électorale, trop tournée, selon lui, vers les urbains.  “C’est très bien d’avoir posé l’idée du troisième tour, d’une revanche sur Macron. Même si je ne pensais pas possible d’avoir une majorité”, expliquait ainsi le député-reporter dans un entretien fleuve dans les colonnes du Monde , le 22 juin dernier, en regrettant une forme “d’abandon” des “Frances périphériques, des “gilets jaunes” aux mains du Rassemblement national.

    “On ne doit pas devenir la gauche des métropoles contre la droite et l’extrême droite des bourgs et des champs, qu’on leur laisserait”, ajoutait celui qui exhorte son camp à “se retrousser les manches”, à se “concentrer sur la valeur travail”. Une forme de mise en garde... pour les prochaines échéances électorales? Elles pourraient venir plus tôt que prévu.

    Depuis les résultats des législatives, le spectre d’une dissolution pèse sur la scène politique. Agitée par Emmanuel Macron, quand il appelle ses députés à “ne pas avoir peur du risque ou du combat”, et rêvée par Jean-Luc Mélenchon pour rebattre les cartes, cette hypothèse en forme de terminus apparaît aujourd’hui comme le meilleur ciment de la NUPES. La gauche résisterait mal au déraillement de son alliance.

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