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      Après le remaniement, les enseignements du gouvernement Borne II

      news.movim.eu / HuffingtonPost · Monday, 4 July, 2022 - 11:40 · 6 minutes

    POLITIQUE - Un peu comme au football, le mercato s’achève pour Emmanuel Macron et Elisabeth Borne . Le tandem exécutif vient d’annoncer, ce lundi 4 juillet, son nouveau gouvernement “d’action” supposé capable de trouver des majorités de circonstance à l’Assemblée nationale pour faire voter ses lois.

    Entre les personnalités inamovibles, le besoin d’un nouveau souffle ou les difficultés de recrutement, cet étiage est le fruit de plusieurs jours de tractations à Matignon et à l’Elysée. Mais gare aux déceptions. Les promesses affichées avant les négociations ne sont pas pleinement au rendez-vous. Point de coalition ni de grosses prises à l’opposition, encore moins de gouvernement d’union nationale, comme le chef de l’État le laissait miroiter au lendemain des élections législatives .

    La nouvelle équipe gouvernementale, qui doit se réunir dès ce lundi après-midi, apporte certes, son lot de nouveaux profils mais elle ne devrait pas bouleverser les équilibres à l’Assemblée nationale . Dans un premier temps tout du moins.

    Le club des inamovibles

    Il y a, tout d’abord, ceux qui restent -en particulier sur l’aile droite. Gérald Darmanin (Intérieur), Bruno Le Maire (Finances) ou encore Sébastien Lecornu (Armées) sont à nouveau reconduits dans leurs fonctions. Présents au gouvernement depuis 2017, respectivement n°2, 3 et 5 dans l’ordre protocolaire, ils sont, plus que jamais, le carré de tête du chef de l’Etat et les poids lourds du vestiaire.

    Le locataire de la Place Beauvau récupère d’ailleurs le portefeuille des Outre-mer dans sa besace, laissé vacant depuis la démission de Yaël Braun-Pivet, la nouvelle présidente de l’Assemblée nationale . Sans surprise, Olivier Dussopt (Travail), Gabriel Attal (Budget), Éric Dupond-Moretti (Justice) ou Agnès Pannier-Runacher (Transition énergétique) restent en poste, comme leurs co-équipiers.

    Ils vont retrouver des têtes connues, ce lundi, lors du premier Conseil des ministres de l’ère Borne II. Sur les 21 ministres qui ont intégré l’équipe ministérielle ce lundi, 3 l’étaient déjà sous Jean Castex ou Edouard Philippe . Parmi les revenantes, Marlène Schiappa est nommée secrétaire d’État à l’Economie sociale et solidaire et à la Vie associative et Geneviève Darrieusecq devient secrétaire d’État chargée des Personnes handicapées.

    Les revenantes et le banc de touche

    La première fait son retour au gouvernement, après avoir indiqué, vendredi sur BFMTV que la chose n’était “pas d’actualité” . Son éviction au moment de la nomination d’Elisabeth Borne à Matignon avait guère surpris, tant, selon plusieurs échos parus dans la presse, la ministre, chantre de l’égalité entre les femmes et les hommes, n’avait plus les faveurs de l’exécutif. Comme sa collègue, Sarah El Haïry (MoDem), qui revient dans le jeu en tant que secrétaire d’Etat chargée de la Jeunesse et du Service national universel. Le poste qu’elle occupait déjà dans l’équipe de Jean Castex.

    Un air de déjà vu qui cache, pour partie, la difficulté pour Emmanuel Macron et Élisabeth Borne à attirer de nouveaux profils depuis un banc de touche quelque peu dégarni. Pas de grosse prise, ni de transfert sonnant et trébuchant. Yannick Jadot, par exemple, ou Fabien Roussel, les rares personnalités à gauche à s’être montrées ouvertes à une collaboration avec la Macronie, ne sont pas de la partie. “Les débauchages, cela ne marche pas”, a pris soin d’expliquer l’ancien candidat des Verts à la présidentielle juste avant l’annonce du remaniement. Dans cet esprit, les socialistes en rupture avec la NUPES, comme Carole Delga ou le député Dabid Habib, ne sont pas servis non plus.

    Même chose à droite. Les barons locaux Les Républicains pro-accord avec le président de la Républque, tels Christelle Morançais, Jean Rottner ou Catherine Vautrin, qui auraient pu prétendre à des fonctions gouvernementale, sont absents. Surtout, Emmanuel Macron et sa Première ministre n’ont pas réussi à décrocher des profils susceptibles d’entraîner des mouvements de plaques à l’Assemblée nationale. Était-ce seulement possible?

    Bayrou câliné, Philippe un peu moins

    Malgré cela, les différentes sensibilités présentes au gouvernement peuvent se satisfaire des nouveaux équilibres. Plus ou moins. À l’aile gauche de la Macronie, on peut par exemple noter la promotion d’Olivier Véran. L’ancien ministre de la Santé retrouve une forme de communication de crise avec le porte-parolat du gouvernement. Ou encore l’arrivée au ministère de la Ville et du Logement du maire de Clichy-Sous-Bois, Olivier Klein, ancien communiste puis socialiste, soutien du chef de l’Etat depuis la présidentielle 2017.

    Les tenants de l’aile droite peuvent quant à eux se satisfaire, en plus d’occuper la grande partie des postes les plus importants, de la nomination de Caroline Cayeux, la maire de Beauvais, aux Collectivités territoriales ou de l’arrivée de l’ancien LR Franck Riester aux Relations avec le Parlement. Plus pratique pour négocier avec Les Républicains, la principale force d’appui de l’exécutif au Palais Bourbon.

    Le poids de chacun est également respecté au sein même de la majorité. François Bayrou, qui n’a cessé de faire entendre sa propre petite musique -parfois en solo- depuis la nomination d’Élisabeth Borne, est choyé à travers ce nouveau dispositif. Trois représentants du MoDem viennent y rejoindre le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau. Outre les retours de Sarah El Haïry et Geneviève Darrieusecq, le député des Yvelines Jean-Noël Barrot est chargé du Numérique.

    Édouard Philippe est pour sa part un peu moins bien loti. Avec son groupe d’une trentaine de députés à l’Assemblée, l’ancien chef du gouvernement obtient une ministre délégué en plus, en la personne d’Agnès Firmin Le Bodo nommée au portefeuille de l’Organisation territoriale. L’autre membre du gouvernement estampillé Horizons, Christophe Béchu remplace quant à lui Amélie de Montchalin à la Transition écologique. Une belle promotion.

    Abad exfiltré, nouvelle doctrine sur les ministres accusés?

    Dans cet étiage, la société civile, un des marqueurs forts d’Emmanuel Macron, est également bien représentée. Après Pap Ndiaye à l’Education nationale, c’est François Braun, le patron des urgences de Metz, ex-“référent santé” d’Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle, qui se retrouve bombardé au ministère de la Santé, où il devra appliquer les propositions de la “mission flash” qu’il vient de remettre au gouvernement.

    Enfin, Elisabeth Borne et Emmanuel Macron ont fait le choix de se séparer de Damien Abad. Caillou dans leur chaussure depuis sa nomination, l’ancien député Les Républicains fait l’objet d’une enquête du parquet de Paris pour tentative de viols. Il est remplacé, au terme d’une interminable polémique, par le patron de la Croix Rouge Jean-Christophe Combe.

    Le début d’un changement de doctrine de la part du chef de l’Etat, rétif à se séparer de ses ministres mis en cause? Pas vraiment. Au contraire de l’élu de l’Ain, désormais ex-ministre des Solidarités, Eric Dupond-Moretti, mis en examen pour prise illégale d’intérêt, est confirmé à la Justice. Tout comme Chrysoula Zacharopoulou, la secrétaire d’État chargée du Développement, visée par deux plaintes pour viol déposées par des patientes de son cabinet de gynécologie. Les derniers vestiges du “en même temps”? À en croire sa nouvelle équipe, le concept cher au président de la République a encore de beaux restes.

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