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      Ces femmes et hommes que l'avortement a sauvés ou détruits, je les ai reçus dans mon cabinet de psy - BLOG

      news.movim.eu / HuffingtonPost · Saturday, 23 July, 2022 - 07:00 · 6 minutes

    L’avortement sur le divan n’est pas réservé à cette période. Beaucoup en parlent quand il est d’actualité ou quand il appartient au passé. Peu d’hommes en réalité quand il s’agit de se rappeler. Le fait que les femmes le vivent dans leur corps explique évidemment qu’elles soient les premières concernées. Cela ne devrait même pas se discuter ailleurs que dans les cabinets médicaux! L’avortement sur le divan n’est pas réservé à cette période. Beaucoup en parlent quand il est d’actualité ou quand il appartient au passé. Peu d’hommes en réalité quand il s’agit de se rappeler. Le fait que les femmes le vivent dans leur corps explique évidemment qu’elles soient les premières concernées. Cela ne devrait même pas se discuter ailleurs que dans les cabinets médicaux!

    AVORTEMENT - Alison vit en ce moment en France pour terminer une licence. Elle retourne à Chicago prochainement. Enfin, son projet ne semble plus aussi déterminé depuis le 24 juin “C’est plus que triste comme l’a dit Joe Biden , c’est un traumatisme . Imaginer qu’enceinte tu ne peux pas décider de ce qui se passe dans ton propre corps? Admettre que tu seras obligée de porter un enfant qui serait un accident !”

    Elle s’arrête un moment pour imaginer l’accident .

    “Pour mes deux sœurs aînées, attendre un enfant ça a été un bonheur. Le projet mené à terme avec des hommes qu’elles aimaient, c’est cela qui me semble désirable. Certainement pas assumer un inéluctable tel un fardeau… Je n’imagine pas pouvoir aimer un enfant présenté comme étant un accident !”

    Le choc de l’annonce outre-Atlantique

    Cette jeune femme et d’autres femmes sont sous le choc. Des Françaises également. “Une décision outre-Atlantique c’est pour nous d’ici peu, les vagues sont inéluctables. C’est pour ça que l’on est vent debout ici. Partout dans le monde on assiste à une mise sous tutelle des femmes. Mais qui doit décider de mon ventre? Je prends une contraception depuis le début de ma vie sexuelle. J’ai décidé de ne jamais avoir d’enfant. Le monde est trop dur. Et on voudrait m’imposer le contraire si par malheur ma contraception devait me trahir? Ah non. Quoiqu’il en coûte, je refuse d’être celle qui me soumettrait à ça. Je hais l’idée d’avoir quelque chose qui m’habiterait contre mon gré.” Caroline, une bonne trentaine d’années, est très agitée, très instable psychiquement en raison d’une enfance particulièrement sordide. “Vous avez entendu? J’ai dit “quelque chose!” Oh oui, j’avais bien entendu.

    La loi des hommes punirait des femmes parce qu’un rapport sexuel a des conséquences non désirées? Léa, une patiente

    Quelques hommes parlent aussi avortement sur le divan… Sébastien également une trentaine d’années… « Quand ma dernière compagne a été enceinte, nous avons décidé qu’elle avorterait. Notre couple battait de l’aile depuis bien longtemps et l’idée qu’un enfant arrive c’était inconcevable. Lui offrir cet univers ? Jamais de la vie. On sait bien que pour qu’un enfant se développe correctement il a besoin d’être désiré. Il a besoin de parents qui s’entendent bien. C’est irresponsable de ne pas penser à l’avenir pour lui et pour nous. En adultes, nous avons décidé d’un commun accord l’avortement et aussi de nous séparer. » Sébastien ajoute lors de la séance suivante : « C’est honteux que les hommes ne se prononcent pas massivement pour soutenir ce droit à l’avortement dans de bonnes conditions. Ce n’est pas sans nous que la plupart des femmes sont enceintes ! A part les fécondations in vitro elles sont enceintes parce qu’un homme a éjaculé ! Qu’ils assument… On dirait que seules les femmes sont responsables d’être enceintes. On dirait qu’elles ont fauté si elles ne veulent pas d’enfant suite à une relation sexuelle… On dirait qu’elles ont à prendre leurs précautions…. Mais où sont les hommes ? »

    Accident, fauter, assumer … Ces mots reviennent dans de nombreuses séances. L’influence des décisions politiques sur la vie intime s’entend de nouveau sur mon divan.

    C’est révoltant

    Pas une seule personne pour remettre en doute qu’un avortement se décide par qui le vit. « Il semblerait que les politiques ne comprennent rien à ce que vivent les gens » s’énerve Léa. La soixantaine bien entamée, Léa accompagne des femmes en difficulté. Elle en a vu des femmes souffrir pour de multiples raisons. Alors en rajouter par une « loi idéologique et absurde » la met carrément en colère. D’autres femmes sont abasourdies et muettes sous le choc.

    Sur le divan plusieurs femmes racontent leurs avortements. Je n’en ai jamais vu banaliser. C’est un événement dans une vie. Et comme tout événement il est plus ou moins bien vécu. Le rendre encore plus difficile serait-ce vraiment l’idée du siècle ?

    Léa raconte « Marlène doit avoir à ce jour 70 ans au moins. Je l’ai accompagnée quand on était ados. Elle a avorté quelques mois avant que la loi soit votée en France. Le gynéco véreux, dans son cabinet parisien lui a même fait des avances à la consultation précédant l’IVG. « Qu’est- ce que ça peut faire, tu es déjà enceinte ? » Répugnant… Le mépris. La honte pour elle. Léa a accompagné son amie le jour J. Elle n’oubliera jamais la douleur. Jamais les ongles qui se sont enfoncés dans la main que cette jeune femme tenait car le gynéco évidemment n’avait pas anesthésié celle qui ne voulait pas enfanter. Il a juste bien pris la coquette somme exigée. » Léa a les larmes aux yeux et c’est avec une voix déchirante qu’elle ajoute « La violence de l’acte doublée par la violence psychologique, c’est impossible de revenir à ça ! ». « La loi des hommes punirait des femmes parce qu’un rapport sexuel a des conséquences non désirées ? » poursuit Léa.

    Je me souviens d’une femme ayant avorté avec des médicaments il y a une dizaine d’années. Seule chez elle. Le mari ne voulait rien en savoir, il fallait juste qu’elle « le fasse passer ». Cette femme que nous appellerons Sylvie avait vécu le cauchemar car elle ne devait rien laisser transparaître de ce qui se passait pour elle. C’est cela aussi qu’entraîne un avortement illégal. En pire car puni.

    L’avortement sur le divan n’est pas réservé à cette période. Beaucoup en parlent quand il est d’actualité ou quand il appartient au passé. Peu d’hommes en réalité quand il s’agit de se rappeler. Le fait que les femmes le vivent dans leur corps explique évidemment qu’elles soient les premières concernées. Cela ne devrait même pas se discuter ailleurs que dans les cabinets médicaux !

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    Tous les prénoms ont été changés

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