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      Les Républicains face à leur déclin

      The Conversation · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 5 January, 2023 - 03:50 · 6 minutes

    Par Olivier Guyottot.

    Éric Ciotti, président nouvellement élu du parti Les Républicains (LR) aura peu de temps pour savourer ce succès. Les défis qui l’attendent semblent nombreux et compliqués. Alors que plusieurs défections ont suivi l’annonce de sa victoire face à Bruno Retailleau avec 53,7 % des voix, le principal challenge sera sans doute de stopper le mouvement de déclin du parti entamé depuis l’élection d’Emmanuel Macron à la tête de l’État en 2017. L’enjeu est d’éviter à terme sa disparition.

    Les recherches en management s’intéressent depuis de nombreuses années à la situation des organisations qui font face à un déclin de leur activité. Elles tentent d’expliquer et de comprendre les pistes possibles pour les affronter. De fait, elles apportent un éclairage intéressant à la situation actuelle de LR et aux défis du nouveau leader de la formation politique de droite.

    Quatre stratégies possibles pour faire face à un déclin

    Les travaux de recherche en Sciences de Gestion ont mis en lumière quatre catégories de « déclins » auxquels peuvent faire face les organisations et les entreprises.

    Deux d’entre eux, l’érosion et la dissolution, évoquent un déclin progressif de l’activité de l’organisation. Dans le premier cas, celle-ci doit faire face à une réduction progressive et continue de son activité. Dans le second cas, un nouveau marché apparaît et remplace progressivement le marché principal. Les deux autres types de déclins, appelés contraction et collapse, concernent des phénomènes qui mettent en danger la pérennité de l’organisation de manière brutale. La contraction concerne ainsi une réduction soudaine mais limitée dans le temps d’une partie de l’activité. Le collapse est un effondrement imprévisible et inattendu de l’ensemble de celle-ci.

    Mais au-delà de la description de ces phénomènes, il convient surtout de bien identifier le type de déclin auquel l’organisation est confrontée, chaque situation nécessitant des stratégies, notamment managériales, différentes et adaptées.

    LR et le PS, grands perdants d’un nouveau système tripartite

    Avec l’avènement d’Emmanuel Macron et la création d’En marche, devenu aujourd’hui Renaissance , le système politique français est passé d’un modèle « traditionnel » dominé par le classique clivage droite/gauche à un système tripartite dominé par trois grandes forces : le Rassemblement National représente l’extrême droite et la droite nationale ; Renaissance rassemble centre droit, centre et centre gauche ; et la Nupes réunit les principales forces de gauche et d’extrême gauche du spectre électoral.

    L’avènement de cette nouvelle configuration a marqué le déclin plus ou moins progressif des deux partis dominants jusqu’alors sous la Vᵉ République , Les Républicains et le Parti socialiste. Au contraire de ces derniers, les premiers étaient parvenus à « limiter la casse » lors des législatives de 2017 en obtenant 112 députés . Mais les résultats des élections présidentielles et législatives de 2022, avec les 4,78 % de Valérie Pécresse et l’obtention de seulement 61 députés , ont marqué une nouvelle étape de leur déclin.

    Cet affaiblissement de LR sur la scène politique française est à la fois un phénomène progressif, qui a commencé en 2017 et qui a semblé s’amplifier depuis, et un phénomène soudain, dans la mesure où les dernières élections nationales, en particulier l’élection présidentielle de 2022, ont marqué une chute et une perte d’influence brutales et prononcées.

    La question de la vision et du leadership

    Face à cette situation, quelles possibilités s’offrent aujourd’hui à LR et à Éric Ciotti pour tenter d’endiguer la chute ?

    Les recherches ont montré que les manières de gérer les situations de déclin dépendaient de la nature de la crise . Dans le cas de déclins progressifs, il est conseillé de s’orienter vers de nouveaux marchés et vers de nouveaux critères de performance et d’utiliser des stratégies de coalition pour faire face aux tensions que la situation génère. Dans le cas de déclins soudains, il faut généralement s’appuyer sur un management autocratique, faire preuve de créativité et s’orienter vers des activités plus rentables, le temps que la situation s’améliore. Voire totalement changer d’activité dans le cas d’un collapse.

    LR étant un parti politique, il semble impossible pour lui de s’orienter vers d’autres activités que l’action publique en présentant des candidats aux élections . De même, les indicateurs de performance pertinents restent les résultats aux élections, même si des éléments comme le nombre d’adhérents peuvent aussi peser. L’ancrage territorial et les élections locales constituent sans doute cet « autre » marché sur lequel peut s’appuyer LR pour se maintenir à flot. C’est ce que le parti est parvenu à faire jusqu’à aujourd’hui. Mais LR ne pourra sans doute pas se permettre d’obtenir d’aussi faibles résultats aux prochaines élections présidentielles et législatives que ceux de 2022. Ses derniers membres et électeurs rejoindraient alors vraisemblablement définitivement le parti présidentiel pour les uns et le Rassemblement National ou Reconquête pour les autres.

    Dans tous les cas, les chercheurs s’accordent pour dire que les situations de déclin sont certainement les plus difficiles à affronter pour une organisation . Les questions de coalition d’un côté, et de vision, de leadership et de management de l’autre, restent les clefs du succès pour y parvenir. Ces deux dimensions constituent justement les points d’achoppement entre les forces en présence à LR. Les stratégies pour s’en sortir divisent en effet profondément ses responsables et ses membres. Tant sur la question des alliances (faut-il en faire et avec qui ?), que de la vision (faut-il d’abord se concentrer sur le renouveau du parti avant de choisir un candidat pour la présidentielle de 2027 comme le suggérait Bruno Retailleau ou déjà se projeter avec un candidat comme le souhaite Éric Ciotti avec Laurent Wauquiez ?) ou du leadership (faut-il imposer ses choix ou aller vers le consensus et le dialogue ?).

    Comme souvent dans les situations de déclins, les circonstances et la conjoncture, autant que la capacité à en tirer parti, joueront un rôle clef. L’impossibilité de se représenter en 2027 pour Emmanuel Macron comme la progression des idées et des thèmes de droite , dont LR ne parvient paradoxalement pas à profiter électoralement, sont des éléments connus… Mais d’autres ne manqueront pas de surgir. Et la capacité de LR à s’en saisir pour l’intégrer à sa stratégie sera cruciale.

    Si un candidat de droite issu de la « macronie » comme Édouard Philippe prenait le leadership du mouvement présidentiel et parvenait même à être élu président, sans doute face à un représentant du Rassemblement National, LR se retrouverait confirmé dans son statut de « petit » parti, avec des chances de survie réduites. Si un candidat représentant LR parvenait au contraire à reprendre le leadership électoral des idées de droite, il n’est pas impossible d’imaginer que LR reprenne la place qui était la sienne avant l’arrivée d’Emmanuel Macron. Mais un tel scénario nécessitera, à la fois, des mesures pour combattre le déclin graduel du parti et pour le relancer lors des élections de 2027. Sans cela, la disparition définitive des Républicains sera difficilement évitable.

    Olivier Guyottot , Enseignant-chercheur en stratégie et en sciences politiques, INSEEC Grande École

    Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’ article original . The Conversation

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      Éric Ciotti aurait-il eu aussi sa Pénélope ?

      Laurent Sailly · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 18 November, 2022 - 03:50 · 3 minutes

    À quelques jours des élections à la présidence des Républicains , le Canard Enchainé cité par Le Figaro accuse « Éric Ciotti [d’avoir] fait travailler la mère de ses enfants dans des conditions penelopesques » et affirme que celle-ci « a occupé jusqu’à trois emplois en même temps. »

    Des conditions « penelopesques » : Fillon-Ciotti, même combat ?

    Dans son édition du mercredi 16 novembre 2022, Le Canard Enchainé , dans un article intitulé « Ciotti a lui aussi sa Pénélope » (en référence à l’affaire Pénélope Fillon qu’il avait lui-même soulevé en 2017), pointe du doigt Caroline Magne, ex-compagne et mère des enfants du député LR des Alpes-Maritimes. Le journal satirique reproche à celle-ci d’avoir occupé de nombreux emplois aux côtés d’Éric Ciotti, dont celui d’assistante parlementaire de 2007 à 2016.

    Et Le Canard Enchainé d’énumérer l’ensemble de ses nombreuses fonctions :

    • Jusqu’en 2011 : attachée de presse puis directrice adjointe de Christian Estrosi , administratrice au conseil général des Alpes-Maritimes et membre d’une équipe de pilotage de la communauté urbaine de Nice. Le tout au moment où Éric Ciotti accédait au Palais Bourbon, à la mairie de Nice puis à la présidence du département de 2007 à 2009.
    • Entre 2012 et 2014, elle est employée par le Diocèse de Nice.
    • De 2014 à 2016, elle est directrice générale des services (DGS) de La Colle-sur-Loup.

    Il ne s’agit pas là de révélations à proprement parler puisque ces rôles étaient pour la plupart publics. Madame Magne était bien inscrite sur le site de l’Assemblée nationale comme assistance parlementaire d’Éric Ciotti. Ses responsabilités à la ville de Nice étaient également connues de tous et en particulier des journalistes locaux qui vantaient ses talents en communication.

    Alors que reproche Le Canard à Caroline Magne ? Éric Ciotti aurait obtenu pour son épouse d’alors plusieurs emplois, notamment dans des collectivités qu’il a pu diriger. Mais aussi et surtout, l’hebdomadaire estime que le poste d’assistante parlementaire aurait été un emploi fictif, à l’image de celui de Pénélope Fillon !

    La belle défense d’Éric Ciotti

    Dès mardi soir, Éric Ciotti a réagi par communiqué. Après la classique victimisation : « À la veille des élections à la présidence des Républicains, je suis une nouvelle fois bassement attaqué », il se défend avec intelligence sur les deux parties de l’accusation.

    D’une part il ne nie pas le cumul des différentes fonctions de son ex-épouse, assurant que le temps de travail de celle-ci ne dépassait pas un cumul de 44 heures de travail par semaine.

    D’autre part il confirme la présence de celle-ci à ses côtés « comme collaboratrice parlementaire en circonscription […] à temps partiel pour une durée de 5 heures 25 par semaine ». Ainsi il objecte l’argument du Canard selon lequel « Caroline Magne n’a pas laissé de souvenir » à l’Assemblée nationale.

    Que reste-t-il de la droite républicaine, libérale et conservatrice…

    Engagé à fond dans la campagne pour la présidence des Républicains, Éric Ciotti contre-attaque et dénonce ses « adversaires niçois [NDLA : Bruno Retailleau et Aurélien Pradié], [qui] au moment des élections législatives, avaient tenté la même manœuvre grossière en s’en vantant. »

    Sur France 2, son ancien allié et désormais opposant, Christian Estrosi (maire de Nice) a affirmé qu’il ne porterait « aucun jugement » et qu’il ne ferait davantage de « commentaires. »

    Les autres ténors de la droite, Laurent Wauquiez, Valérie Pécresse, Xavier Bertrand attendent soit de franchir le Rubicon macronien (tels Édouard Philippe, Alain Lemaire ou Gérald Darmanin) soit l’ouverture du bal des egos de 2027. Pendant ce temps, le pays sombre dans une dépression économique, sociale et civilisationnelle.

    La droite française est redevenue la plus bête du monde