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      Retraites : quelques motivations à l’opposition au report de l’âge légal

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 1 February, 2023 - 04:30 · 15 minutes

    Avec un taux de syndicalisation de 10,8 % déclaré en 2022 , et même si tous les syndicats sont d’accord, ces derniers ne pèsent objectivement pas bien lourd. C’est probablement sur ce constat que compte le gouvernement pour faire passer sa énième tentative de stabilisation financière du régime des retraites en France.

    Il est vrai que l’examen de la pyramide des âges, de l’espérance de vie et du taux de natalité en France n’incite pas à l’optimisme quant à la survie du régime actuel des retraites . Point n’est besoin de consulter le COR ou tout autre institut pour constater que le rapport entre le nombre de personnes à la retraite et le nombre de personnes en activité augmente et continuera à le faire, ce qui en régime de répartition entraîne mathématiquement soit une diminution des pensions, soit une augmentation des cotisations. À moins qu’on s’accorde sur la décision de déplacer l’âge où l’on passe de la période d’activité à celle de la retraite. Il ne devrait d’ailleurs même pas y avoir de débat sur le sujet tant l’évidence saute aux yeux. D’ailleurs, la plupart des pays qui nous entourent ont largement remonté cet âge et poursuivent cette tendance sans qu’apparemment les salariés de ces pays ne s’opposent avec détermination à cette mesure de bon sens, comme cela se passe singulièrement en France.

    Alors, pourquoi chez nous cette opposition apparemment unanime et à vrai dire complètement surréaliste ?

    La réponse n’est pas la même suivant le clan qui s’y oppose.

    Les insoumis

    Ils sont par principe opposés à tout ce que propose le gouvernement. Ils voient tout d’abord dans l’opposition à cette mesure une occasion de déclencher la pagaille dans le pays, ce qui peut peut-être leur donner l’opportunité de prendre une partie du pouvoir, et/ou de le retirer à l’équipe actuelle. Ils sont de ce fait totalement imperméables au simple calcul démographique et d’ailleurs n’en ont rien à faire puisque leur objectif (la pagaille) est ailleurs. Ils ne changeront donc pas d’avis sur le sujet.

    Le Rassemblement national

    Il suit le même chemin que les Insoumis mais pour des raisons totalement contraires. En effet, ses dirigeants comptent probablement sur l’effet que produira la pagaille provoquée par la décision de remonter l’âge de la retraite pour récupérer les voix des électeurs qui désirent voir l’ordre et la discipline régner à nouveau.

    La CFDT

    Au départ, son secrétaire général Laurent Berger a vu l’opposition à l’augmentation de l’âge de départ en retraite une posture lui permettant de conforter sa position aux élections professionnelles. Devenue ensuite le premier syndicat de France, la CFDT a conservé cette revendication ressentie comme très porteuse pour ses adhérents, (surtout pour ceux qui ne s’intéressent pas à la démographie, mais plutôt à leurs conditions personnelles). Aujourd’hui, Laurent Berger ne peut de toutes façons plus se dédire. Il est même obligé de pousser en avant sa position, ce qui pourrait devenir un boulet lourd à porter selon l’évolution des choses…

    La CGT

    Elle considère que le raccourcissement du temps de travail est démontré par l’Histoire. En bonne marxiste, elle préfère s’appuyer sur l’idéologie plutôt que sur les conditions réelles. On peut penser qu’elle finira par s’écraser sur la réalité exactement comme l’a fait l’URSS en son temps.

    Le manifestant de base

    Ni syndiqué, ni encarté à aucun parti, il participe aux manifestations et ne réfléchit peut-être pas trop à l’évolution des conditions démographiques. Il pense que ce sont « les autres » qui paieront, et aussi que puisque le système a marché jusqu’à présent, il doit pouvoir continuer à le faire au moins pendant toute la durée de sa propre retraite. C’est une position somme toute très pragmatique, surtout si on se rapproche de l’âge en question et qui n’a peut-être pas été assez prise en compte par le Président…

    Cependant, tous les acteurs de la comédie des retraites ont aussi plusieurs autres raisons, dont certaines ne sont pas ouvertement exprimées, de s’opposer à la réforme telle qu’elle est présentée par le gouvernement. Voici quelques-unes de ces motivations, certaines ouvertement exprimées d’autres soigneusement gardées cachées.

    Augmenter la place de l’État

    Que se passe-t-il si les dépenses représentées par les pensions versées dépassent les recettes représentées par les cotisations ?

    Eh bien c’est l’État qui paie la différence en mettant en place, bien entendu, un nouvel emprunt. Or, c’est exactement ce que ces syndicats désirent : que les retraites soient rendues aussi indépendantes que possible des cotisations salariales et soient plutôt payées par l’impôt puisque c’est à cela qu’aboutit finalement le système de l’emprunt. Il ne faut donc surtout pas toucher à la situation actuelle de déficit permanent. L’ iFRAP constate d’ailleurs que si les employeurs publics cotisaient au même taux que les employeurs du privé comme ils devraient logiquement le faire, un besoin de financement résiduel de 30 milliards apparaîtrait qui devrait logiquement être couvert par une subvention d’équilibre bien identifiée. Ce chiffre est structurel et récurrent. Mais bien évidemment, pour les politiques au pouvoir il vaut mieux masquer ce déficit sous une couche bien épaisse de postes comptables mis en place pour la circonstance…

    La réaction unanime de la gauche qui soutient la revendication des syndicats n’a pas d’autre motivation que celle d’étendre encore un peu plus l’emprise de l’État sur l’économie.

    Se refaire une santé sur le dos du président

    C’est le calcul des syndicats et particulièrement de la CGT et de la CFDT.

    Pour ces deux syndicats, l’homme à abattre c’est Macron. S’ils arrivent à ruiner son deuxième quinquennat, voyez donc tout ce que ce succès peut représenter pour ces organisations qui représentent surtout elles-mêmes à l’heure actuelle, mais qui jouissent de fait d’un pouvoir aussi exorbitant qu’injustifié au vu de leur représentativité.

    Reconnaissons cependant que le premier round a été remporté haut la main par ces organisations qui n’espéraient sans doute pas autant de la première journée de manifestations.

    Maintenant, il s’agit de conclure et ce ne sera sans doute pas aussi facile : si le rapport des voix ne change pas, la réforme des retraites sera votée par les députés sans que le recours au 49-3 soit nécessaire. Mais si celui-ci change, par exemple si certains républicains changent d’avis à la suite de la manifestation de jeudi dernier, il pourrait ne pas y avoir suffisamment de voix pour que la réforme soit acceptée.

    Dans ce cas, seul l’article 49-3 permettrait au gouvernement de faire passer la loi sans aucun amendement. Ne resterait alors à l’opposition que le recours au Conseil constitutionnel.

    Tenir compte des « carrières longues »

    Un argument contre la réforme, apparemment d’ailleurs accepté par le gouvernement, est ce que la CFDT nomme la « prise en compte des carrières longues ».

    D’après cet argument, il serait normal qu’une personne ayant commencé à travailler tôt, disons à 16 ans, soit autorisée à prendre sa retraite plus tôt que celle qui a fait des études et a donc commencé plus tard à travailler. L’égalité consistant, toujours d’après cet argument, à rendre égaux pour tous les temps d’activité professionnelle considérés comme une contrainte à partager également.

    Analysons donc plus précisément le temps qui s’écoule entre le moment où la première personne commence à 16 ans à travailler et le moment où la seconde commence à son tour, à 23 ans.

    Pendant ces sept ans, la première est occupée à un travail rémunéré et la seconde généralement à faire ses études, lycée, puis fac ou prépa + école supérieure. Peut-on réellement considérer que la période d’études de la deuxième a été un paradis en comparaison de la même période mais de travail salarié, de la première ? Dans mes souvenirs, la période de la prépa a été celle où je me suis le plus arraché. J’ai connu plusieurs camarades qui ont lâché prise ou sont tombés malades à l’époque à cause de la pression excessive qu’ils ont eu à subir durant cette période. Connaissez-vous beaucoup de jeunes au travail qui tombent malades à cause de ce travail ? Remarquons au passage que d’après sa biographie , il semble que monsieur Berger n’ait pas connu lui-même dans ses études la période des concours…

    En réalité, cette différence dans le cours d’une vie, examinée au moment de la retraite, c’est-à-dire après une quarantaine d’années, n’a réellement plus aucune signification et ne peut donc être considérée comme un motif de retraite anticipée malgré l’apparente unanimité dont cette mesure semble bénéficier, ce qui prouve d’ailleurs que les tenants de celle-ci n’ont pas beaucoup réfléchi au problème…

    Tenir compte de l’« usure du corps »

    Les adversaires du report de l’âge de départ sous-entendent dans leur discours un autre argument.

    D’après elles mais sans que cela soit jamais clairement exprimé, les facultés physiques et mentales des travailleurs seraient plus ou moins affectées après soixante ans, justifiant la mise à la retraite à cet âge. Évidemment, cet argument ne peut être présenté directement car ce serait quelque part une insulte envers ceux qui se rapprochent de cet âge.

    Cependant, pour avoir traversé cette période il y a longtemps déjà, je peux assurer que l’usure du corps dont on parle, si elle commence en réalité bien plus tôt en ce qui concerne par exemple la vue, ne devient gênante pour certaines activités que bien plus tard, disons largement après 70 ans. Pour les activités plus intellectuelles, je dirais plutôt après 80 ans, et j’en veux pour preuve le présent article…

    En réalité et dans la grande majorité des cas, il existe donc une très large plage d’âge après l’âge actuel légal de départ en retraite pendant laquelle on peut continuer à travailler sans aucune difficulté. D’ailleurs, d’innombrables exemples, surtout parmi les professions libérales, viennent confirmer cette affirmation. Le problème vient plutôt du fait que ceux qui s’expriment sur la question de l’âge de départ, gouvernement compris, ont elles-mêmes, pour la plupart, un âge bien inférieur et sont donc sans expérience personnelle réelle.

    Par ailleurs, je ne conteste évidemment pas du tout l’usure provoquée par certains emplois comme le port de charges lourdes ou le travail de nuit mais j’entends qu’il s’agit d’un autre débat, non généralisable.

    Défendre le fonctionnariat

    Certains syndicats, et la CGT en particulier, exploitent pour leur compte l’inquiétude sourde de certains fonctionnaires ou assimilés qui voient progresser l’idée que certaines tâches dévolues à ce qu’on appelle le « service public » peuvent très bien être assurées avec succès par le privé.

    D’ailleurs, en faisant quelquefois appel au privé, le gouvernement essaye de s’affranchir de règles jugées par trop contraignantes comme par exemple à la SNCF l’impossibilité de faire assurer plusieurs tâches différentes par la même personne. L’ouverture à la concurrence du trafic ferroviaire voyageur et le succès sur la ligne Paris-Milan de Trenitalia est sûrement un exemple qui renforce cette inquiétude.

    Mais en réalité, ce que les syndicats veulent surtout défendre c’est tout simplement la sécurité de leur emploi de fonctionnaires.

    Défendre les « régimes spéciaux »

    Vous êtes-vous demandé pourquoi les employés du gaz et de l’électricité ainsi que les employés des raffineries étaient particulièrement en pointe dans la lutte contre la réforme des retraites ?

    C’est tout simple : il défendent bec et ongles leur « régime spécial ». Eh oui : ils ne sont pas fonctionnaires mais bénéficient d’un régime de retraite tout à fait équivalent. Par exemple, le montant de leur retraite est calculé sur leur salaire des six derniers mois et non pas sur les 25 meilleures années comme dans le reste du privé. Ces petits avantages font de ces heureux bénéficiaires des privilégiés très combatifs contre la réforme qui veut supprimer ces avantages.

    Pour remporter la victoire, le gouvernement a l’intention de faire jouer la « clause du grand-père » qui consiste précisément à n’appliquer la réforme qu’aux nouveaux entrants, ce qui signifie que l’application réelle de cette réforme n’aura lieu qu’au moment où les nouveaux entrants partiront à la retraite, soit dans plus de quarante ans…

    Donner du travail aux seniors

    On feint souvent de déplorer le chômage des seniors c’est-à-dire des personnes proches de la retraite. L’explication de cette situation particulière est simple.

    Sous l’influence très marquée du statut de l’emploi public , quel que soit son travail, le salaire augmente en fonction de l’âge. En effet, même sans aucune amélioration de la qualité de leur travail ou de leur expérience, les fonctionnaires, suivis en cela par certains des salariés des grandes entreprises, sont assurés d’une augmentation automatique de leur salaire dans le temps. Par ailleurs, on ne voit que très peu de salaires qui diminuent. Le résultat très négatif pour les seniors est que pour le même poste l’employeur préfère toujours un jeune, les salaires attendus par le futur employé pouvant aller du simple au double et même au-delà par le simple effet de l’application des conditions d’âge. Le phénomène est particulièrement marqué dans les grandes entreprises où les emplois sont souvent pourvus par mutation interne.

    Pour améliorer l’emploi des seniors, il suffirait de déconnecter les salaires de l’âge du salarié en supprimant les augmentations automatiques. Mais il s’agirait certainement d’une véritable révolution, et je veux bien parier qu’en France, les seniors continueront probablement encore longtemps à rechercher un emploi…

    Question subsidiaire

    Cette grève générale à laquelle la gauche rêve, est-elle licite ?

    En effet, la question ne semble pas avoir été débattue. Si on se réfère à la jurisprudence, le mouvement de grève ayant pour objet la manifestation de l’opposition à une réforme des retraites n’avait pas été jugée illicite au moment de la tentative d’Alain Juppé en 1995. Ce fait sert de base aux syndicats pour assurer que les mouvement de grève qui concernent la question sans doute très politique de l’âge du départ à la retraite seront considérés comme des grèves pour motif professionnel ; la grève pour motif politique étant en effet tout simplement illégale.

    Cependant, il existe de profondes différences entre la situation de 1995 et celle d’aujourd’hui, ce qui fait que les certitudes syndicales ne sont peut-être pas aussi solides que ça.

    En conclusion

    Il me semble qu’une question simple comme : « acceptez-vous de travailler un peu plus longtemps (deux ans sur 40) afin que pendant les dix prochaines années vos cotisations retraite ne soient pas augmentées et que vos futures retraites ne soient pas diminuées ? Sinon, préférez-vous la diminution des retraites ou bien l’augmentation des cotisations ? » pourrait faire l’objet d’une votation à la Suisse sous la forme d’un QCM puisqu’il est demandé une réponse à trois questions, et sous réserve que ces questions soit bien conformes à la Constitution.

    Cette votation serait destinée à tous les Français, l’occasion (manquée jusqu’à aujourd’hui) de réfléchir enfin sur le vrai problème des retraites. Il conviendrait d’accorder au moins six mois à un an aux Français pour réfléchir calmement à la question. Cependant, tant que l’on s’obstinera à garder comme un totem le système de retraite par répartition, il faudra périodiquement faire une nouvelle réforme. Et les retraites seront de plus en plus maigres, l’âge de la retraite de plus en plus tardif et les cotisations de plus en plus lourdes.

    Il faut savoir que le système de la répartition qui avait été choisi initialement par le gouvernement de Vichy et repris en 1945 dans le programme du Conseil National de la Résistance, où l’argent des cotisations sert à payer immédiatement les retraites était à l’époque très intéressant pour les deux raisons suivantes :

    1. Il ne demandait aucun financement immédiat au gouvernement. ( tu parles d‘une aubaine ! )
    2. Le rapport du nombre de cotisants sur le nombre des retraités était alors très favorable. (ce n’est plus du tout le cas aujourd’hui).

    La répartition n’a pas été choisie pour d’autres motifs.

    En revanche, il y a aujourd’hui une raison non avouée de la conserver à tout prix : pour le gouvernement c’est une façon une façon de garder la main sur le sort de tous les salariés , ce qui n’est pas mince, et sans doute fondamental pour lui. D’où le mythe de la solidarité entre générations inventé pour la circonstance, mais qui n’a aucune réelle consistance.

    Si les Français veulent vraiment reprendre pour eux-mêmes une partie de la Liberté, premier mot de la devise de la République, il doivent se débarrasser rapidement de cette répartition, système injuste et économiquement non performant qui ne présente d’avantages que pour nos gouvernants.

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      Macron : y a-t-il encore un pilote dans l’avion ?

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Monday, 23 January, 2023 - 04:15 · 6 minutes

    Lorsque M. Macron a été élu en 2017 beaucoup de Français mais aussi d’Allemands, ont pensé que la France allait enfin se réformer. Mais beaucoup ont rapidement déchanté, moi le premier.

    Il avait été reçu chez Ethic , le mouvement de Sophie de Menthon, alors qu’il était encore conseiller économique de François Hollande, mais sur le départ et pour cause : sa prestation avait bluffé une grande partie de la centaine de patrons qui l’avaient alors reçu.

    Un discours enchanteur

    Son discours de deux heures avait été convaincant.

    Les 35 heures étaient une folie, il fallait libérer l’entreprise française en baissant drastiquement les charges et en supprimant un maximum de contraintes : tout ce qu’un patron espérait entendre depuis une quarantaine d’années.

    Il n’avait pas caché que ses relations avec le président de la République s’étaient tendues. Peu de temps après, il démissionnait et envoyait à Sophie un mail qui en gros disait : « Vous allez être contente, je rejoins votre « clan » je vais créer mon entreprise ».

    Il a confirmé ce discours à l’occasion d’ une interview parue fin août 2014 dans Le Point .

    Changement de programme

    Quelques jours après ce papier, à la demande expresse de Manuel Valls qui fit pression auprès du président, Emmanuel Macron était ministre de l’Économie en remplacement d’Arnaud Montebourg et sa « cuvée du redressement ».

    Et là, oh stupeur, son discours opère un virage à 180° : les 35 heures devinrent « pas si mal » et adieu les idées libérales… Pour moi c’en était donc fini de ce personnage. En changeant en quelques jours de convictions il démontra qu’il avait adopté la stratégie d’un vrai politicien. Il est vrai qu’à cette époque il ne détenait pas « les pouvoirs ». Mais c’est le cas aujourd’hui et c’est devenu encore pire. Il a été réélu par défaut par les Français qui ne lui ont pas donné la majorité absolue à l’Assemblée et ça ressemble fort à une Bérézina !

    Si jusqu’à ce jour sa gestion de la guerre en Ukraine n’est pas critiquable, en revanche la gestion économique est une suite d’erreurs ou de mesurettes dont l’efficacité ne sera pas au rendez-vous.

    Crise de l’énergie

    Vouloir faire plaisir à une poignée d’écolos afin d’obtenir leurs faveurs a été un très mauvais calcul dont le pays paie les graves conséquences et les paiera encore une bonne décennie, avec de la chance.

    Croire les prédictions hallucinantes d’une consommation d’électricité divisée par deux d’ici 2050 en s’engageant parallèlement dans une décarbonation de l’énergie est un manque coupable de réalisme.

    Surtout quand le « en même temps » s’accompagne d’une autre décision stupide de réduction drastique de la seule énergie zéro carbone. Il n’était certes pas à l’origine de ce projet mais il a bien signé l’ arrêt d’une centrale reconnue par l’Autorité de sûreté nucléaire comme une des plus fiables en France.

    Malgré le revirement des écolos, le mal est fait. La note sera démentielle pour le pays car les décisions malheureusement prises trop tardivement d’augmenter sensiblement le nombre de centrales EPR n’auront d’effets qu’à trop long terme.

    Crise inflationniste

    Certes nos présidents successifs ne peuvent être tenus directement responsables de l’inflation. Mais la gouvernance d’Emmanuel Macron a abouti à une envolée non maîtrisée des dépenses. Le niveau de charges liées à un surendettement va rendre la dette française insoutenable avec un coût qui dépassera les 100 milliards d’euros par an.

    Le « quoiqu’il en coûte à la française » a été tellement mal calibré qu’il a permis aux Français d’augmenter leur bas de laine de près de 200 milliards d’euros de plus qu’une année normale, tandis que nos voisins ont à l’inverse davantage soutenu leurs entreprises.

    Retraites et temps de travail

    Voici 40 années que les Français prennent leur retraite au minimum cinq ans avant les autres ; 50 années que le taux de chômage français est pratiquement le double de celui des autres pays européens ; que les jours de congés et d’arrêts de travail pour grèves ou maladies placent là encore le pays sur le podium européen.

    Résultat : les Français travaillent dans leur vie active 30 % de moins que les Allemands mais ce ne serait pas encore assez, ils en veut encore plus avec le même revenu que nos voisins.

    Aujourd’hui certains veulent faire croire aux Français que nous pouvons nous le permettre, que le prélèvement de 15,45 % du salaire brut (6,9 % charges salariales + 8,55 % charges patronales) est tout à fait raisonnable.

    La vérité est que le coût réel pour un salarié est beaucoup plus élevé car il ne prend pas en compte la participation de l’État au financement des retraites par un prélèvement sur son budget ou par la dette.

    Pour intégrer cet écart il y a un calcul très simple consistant à utiliser une autre donnée qui est le nombre d’actifs cotisants pour un retraité (c’est le principe de la répartition, les cotisations d’aujourd’hui servent à payer les retraités d’aujourd’hui).

    En 2022 ce rapport est de 1,7 actif cotisants pour un retraité ( source chiffre clé retraites)

    En partant de la retraite moyenne, soit 1500 euros (source ministère des Affaires sociales) nous pouvons certifier que la participation pour un salarié est de 1500 euros : 1,7 = 882 euros si on rapporte ce chiffre au salaire moyen qui est de 2500 euros. Le salarié paie en moyenne 35 % de son salaire, directement et indirectement.

    Avec un ratio de 1,2/1 prévision pour 2050 ( source carrière et parcours professionnels) ce sera (en euros constants) 1500 euros : 1,2 = 1250 euros soit 50 % de son salaire !

    Pourquoi ces chiffres ne sont-ils pas mis en avant ?

    Pour conclure

    Mal maîtriser son sujet est toujours source de contestation.

    Les représentants du peuple devraient suivre une formation économique obligatoire en y associant des chefs d’entreprises et mettre en place une Small Business Administration , comme aux États-Unis, qui permet de retoquer une loi préjudiciable à l’entrepreunariat.

    Il ne faut plus faire les réformes indispensables par petites étapes car cela multiplie d’autant le nombre de conflits. Si en 2010 l’âge de départ à la retraite était passé de 60 à 65 ans, les conflits qui se préparent et qui risquent de déstabiliser le pays auraient été évités alors que le moment est déjà critique avec les crises à répétition que nous connaissons.

    Il faut réglementer les démonstrations comme celle des Gilets jaunes, limiter les lieux de manifestation, prioriser la liberté de travailler sur le droit de grève et rendre son organisateur responsable en cas de débordement.

    L’histoire récente nous apprend que plus le Français est favorisé par rapport aux pays européens plus il devient contestataire et en demande toujours plus . Il faut donc rapidement le mettre au niveau de la moyenne européenne.

    Le président de la République doit faire preuve de courage.

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      Retraites : généraliser la capitalisation collective et provisionner

      Institut Economique Molinari · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 12 January, 2023 - 04:30 · 5 minutes

    Par Cécile Philippe et Nicolas Marques.

    Si la réforme 2023 des retraites ne tue pas toute velléité de préparer la réforme structurelle qui reste nécessaire, on pourra conclure que le jeu en valait la chandelle.

    La réforme actuelle va dans le bon sens, avec le recul de l’âge de la retraite ou l’abandon du projet gouvernemental qui visait à contrôler l’Agirc-Arrco, en l’empêchant de collecter ses cotisations. Mais elle passe à côté du vrai défi, la démographie . La baisse de la natalité rend insoutenable le financement de nos aînés par la seule répartition qui représente plus de 98 % des retraites.

    À l’origine de la répartition, en 1941 et 1945, il y avait un choix contraint par les circonstances du moment, à savoir l’érosion du capital par l’ inflation consécutive à la guerre. Pour autant les autorités savaient que la répartition a un coût élevé. Son efficacité dépend de la fécondité qui baisse structurellement. Aussi le gouvernement de la Libération a hésité à mettre en place un système mixte combinant répartition et capitalisation. Les spécialistes ne pensaient pas que le temps verrait le tout répartition gravé dans le marbre. Il était évident que le financement des retraites s’adapterait progressivement aux réalités démographiques.

    Malheureusement, les générations suivantes ont fait de la répartition un totem indéboulonnable , tout en diminuant l’âge de départ à la retraite ce qui a rendu l’édifice encore plus instable.

    La loi du 14 mars 1941 qui a introduit la répartition précisait :

    Lorsque le nombre des retraités croît avec l’élévation de l’âge moyen de la population, le service massif des pensions impose un fardeau insupportable aux éléments productifs.

    C’est la raison pour laquelle, sous Vichy comme à la Libération, l’âge de départ à la retraite a été fixé à 65 ans alors que certains rêvaient d’un départ plus précoce à 60 ans.

    L’ordonnance du 19 octobre 1945 ajoute :

    L’insuffisance de la natalité entraîne un vieillissement lent et progressif de la population. Or, les retraites sont supportées par les travailleurs en activité ; la fixation d’un âge trop bas de l’ouverture du droit à la retraite ferait peser sur la population active une charge insupportable.

    Il y a bien longtemps qu’il aurai fallu épauler la répartition d’une dose de capitalisation collective pour diminuer le coût exorbitant du financement du système actuel, comme nous avons eu l’occasion de le défendre dans une étude publiée en 2019 en partenariat avec Contrepoints .

    Mais il n’est pas trop tard pour bien faire. La baisse de fécondité doit être prise en compte. Il s’agit d’un défi qui concerne toute la société française, privé comme public, jeunes comme vieux. Pour réduire ce risque systémique, il va falloir faire preuve une intelligence collective.

    Ce sera d’autant plus important que nos sociétés regorgent de risques collectifs mal appréhendés (pandémie, santé, énergie, éducation…)

    Les problèmes ne sont pas identiques dans le privé et le public

    Il faut donc les appréhender avec des méthodes différentes.

    Dans le secteur privé

    Comme l’indiquent les chiffres du Conseil d’orientation des retraites, les comptes sont quasi équilibrés voire excédentaires. C’est grâce notamment à des institutions vertueuses comme l’Agirc-Arrco . Depuis 1947 elle gère de manière paritaire les retraites des salariés sans recours à l’endettement. Cependant, le taux de rendement de la répartition s’érode avec la fécondité et les cotisations retraite ont atteint des niveaux parmi les plus élevés au sein de l’Union européenne (28 % du salaire brut vs 22 % dans l’UE).

    Par conséquent, il est urgent d’introduire – sur le modèle du fonds de pension des fonctionnaires (ERAFP) – une capitalisation collective. Elle épaulera la répartition et donnera accès à tous les salariés de France aux rendements des marchés financiers, ce qui permettra de généraliser le partage des profits par le haut. Il faudrait aussi profondément réformer la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav). Contrôlée par un État qui ne comprend pas le temps long, elle ne dispose pas de réserves permettant d’amortir les chocs, à l’opposé les régimes par répartition bien gérés en France (Agirc-Arrco…) ou à l’étranger (Suède, États-Unis…)

    Dans le secteur public

    S’agissant des fonctionnaires, l’État ne dispose pas de caisse de retraite puisqu’il a fermé celles des ministères en 1853 et n’a rien fait depuis.

    Il se contente d’assurer le paiement des retraites des fonctionnaires, selon l’adage « l’État est son propre assureur ». Dans les faits le budget, donc le contribuable, est garant d’un régime de retraite à prestations définies informel, sans aucun mécanisme permettant d’éviter l’envolée des coûts. Pas de points, de réserves ou provisions, de gestion paritaire permettant de responsabiliser les parties… L’État a besoin tous les ans de 57 milliards d’euros pour payer les pensions dont 33 milliards s’apparentent à une subvention d’équilibre. L’État « finance » les pensions avec des « cotisations » de 85 % du traitement indiciaire (et même 135 % pour les militaires), contre 28 % dans le privé, en raison d’une pyramide des âges particulièrement déséquilibrée (0,9 actif/retraité).

    Cette situation, qui appauvrit les contribuables comme l’État, doit évoluer.

    La meilleure piste est de provisionner progressivement des retraites des personnels publics au sein du Fonds de réserve des retraites (FRR) en commençant par les nouveaux fonctionnaires. Cette méthode est employée depuis plus d’un siècle par la Banque de France ou le Sénat. Elle permet de créer de la valeur sur les marchés et de limiter le recours aux prélèvements obligatoires pour financer les retraites.

    Ces changements structurels ne sont pas à l’ordre du jour de la réforme actuelle. Il faudrait qu’ils le soient lors de la prochaine. Souhaitons-nous que la réforme 2023 passe le plus rapidement possible et ne dissuade pas les volontés réformatrices : le défi reste à relever.

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      Les Français et la maladie du « Toujours Plus »

      Claude Sicard · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 3 January, 2023 - 04:30 · 9 minutes

    L’année 2022 s’achève et on s’interroge avec inquiétude sur ce que nous réserve la nouvelle année. Toutes les économies européennes sont très fortement affectées par les répercussions de la guerre menée par les Russes en Ukraine et le FMI vient d’abaisser de 2,5 % à 2 % ses prévisions pour la croissance mondiale . Il révèle dans sa dernière note que « le ralentissement le plus marqué interviendra dans la zone euro ».

    En France les handicaps pour surmonter les difficultés qui se profilent ne manquent pas : le secteur industriel amoindri ne représentant plus que 10 % du PIB fait de la France le pays le plus désindustrialisé d’Europe Grèce mise à part ; la dette structurelle toujours croissante est supérieure au PIB ; le taux de chômage est le plus élevé d’Europe ; les dépenses publiques sont en proportion du PIB beaucoup plus importantes que partout ailleurs.

    Nos dirigeants n’ont donc pas devant eux une page blanche.

    Et il existe de surcroît un élément sous-jacent jamais évoqué qui est une donnée sur laquelle les dirigeants n’ont aucune prise : la sociologie du peuple français.

    Le rôle de la sociologie en matière économique

    La sociologie joue un rôle extrêmement important dans les processus et les phénomènes économiques.

    Dans La grande transformation , Karl Polanyi , un économiste anthropologue austro-hongrois dont les travaux sont très appréciés par les économistes de l’École de Toulouse énonce qu’il ne peut y avoir de relations économiques sans relations sociales.

    Dans L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme , paru en 1905, Max Weber avait expliqué que la différence profonde de performances économiques entre les pays du nord de l’Europe et les pays du sud tient au fait que les uns sont protestants alors que les autres sont catholiques. Selon lui, c’est l’éthique protestante qui a fait le succès du capitalisme : chez les protestants on accumule pour investir et non pas pour consommer. La France fait partie de ce que certains experts à Bruxelles appellent malicieusement les « pays du club Med ». Nos dirigeants se voient contraints de faire avec cette donnée qui est par nature inchangeable. Max Weber a fait le constat que lorsque dans un pays il y a une partie protestante et une autre catholique c’est toujours la partie protestante qui est la plus prospère.

    Au-delà de cette spécificité culturelle il existe en France un syndicalisme d’opposition qui est la conséquence, selon de nombreux auteurs, de la loi de Waldeck Rousseau du 21 mars 1884 qui a donné une base légale aux syndicats mais les a écartés des sages sentiers de l’administration des choses.

    En Allemagne et dans les pays scandinaves les syndicats et le parti socialiste collaborent. Il y a même un système de cogestion des entreprises chez notre voisin allemand. Dans les pays scandinaves, les conflits se règlent par le dialogue. C’est aussi le cas de la Suisse où depuis l’accord conclu en 1937 instituant « La Paix du travail », il n’y a plus jamais de grèves.

    Dans le cas de la France, il faut se rapporter à la Charte d’Amiens de 1906 qui a fondé le syndicalisme français : elle valorise l’expropriation capitaliste et la lutte des classes avec comme moyen d’action la grève générale. Ainsi, en France, l’inconscient prolétarien est révolutionnaire. Cette Charte a constitué jusqu’ici l’ADN du syndicalisme français. Aussi, les conflits entre les syndicats et le patronat n’ont-ils  pas cessé d’agiter la société. Il est impossible de les énumérer tous ici mais on ne peut manquer de rappeler l’épisode du Front populaire de 1936 qui a abouti à la semaine de 40 heures et des congés payés : dans toute la France des usines furent occupées et le drapeau rouge flottait sur bon nombre d’entre elles.

    Avec ces innombrables luttes contre le pouvoir et le patronat les Français ont obtenu des avantages sociaux importants inscrits dans la législation du pays. Le Code du travail français est ainsi très volumineux et particulièrement rigide et nuit au bon fonctionnement des entreprises.

    Les pays scandinaves et la Suisse sont pris comme exemples de pays où l’économie est dynamique et prospère :

    Population active

    • France……………….. 45,9 %
    • Pays scandinaves… 50 % – 55 %
    • Suisse………………… 57 %

    Durée de vie active

    • France……………….. 35,6
    • Pays scandinaves… 41
    • Suisse………………… 42,4

    Heures de travail par an

    • France……………….. 1402
    • Pays scandinaves… 1662
    • Suisse………………… 1831

    Durée hebdomadaire du travail

    • France……………….. 35
    • Pays scandinaves… 37 – 38
    • Suisse………………… 45 – 50

    Jours de grève

    • France……………….. 1000
    • Pays scandinaves…    114
    • Suisse…………………        1

    On voit comment s’est organisé le pays pour faire fonctionner sa machine économique par comparaison avec les pays scandinaves et la Suisse.

    Dans le cas de la France :

    • taux de population active anormalement bas ;
    • durée de vie active plus courte ;
    • nombre d’heures travaillées par an inférieur ;
    • propension à recourir à la grève particulièrement élevée.

    Il manque à la France au moins 4 millions de personnes au travail sachant que les chômeurs sensés rechercher activement un emploi sont comptabilisés dans la population active.

    En France, ceux qui ne sont pas au travail sont portés par la communauté nationale et vivent de subsides fournis par la population active. Fin octobre 2022 Pôle Emploi comptait 6 198 310 inscrits toutes catégories confondues (A, B, C, D et E), dont 3 091 900 inscrits en catégorie A.

    Il en résulte des performances économiques très inférieures à celles des pays scandinaves et de la Suisse. Paradoxalement, le pays se situe au 24e rang seulement du classement des nations du World Hapiness Report de l’ONU de l’année 2019, entre le Mexique et le Chili alors que les pays pris ici en exemple sont tous en tête du classement.

    Finlande

    • PIB/capita………….. 53 654 dollars
    • Dette/PIB……………   72,4 %
    • Dép. Soc/PIB………. 54,9 %
    • World Happiness….  N° 1

    Suède

    • PIB/capita………….. 61 028 dollars
    • Dette/PIB…………… 42,0 %
    • Dép. Soc/PIB………. 50,2 %
    • World Happiness…. N° 7

    Danemark

    • PIB/capita………….. 68 007 dollars
    • Dette/PIB…………… 33,2 %
    • Dép. Soc/PIB………. 51,0 %
    • World Happiness…. N° 2

    Norvège

    • PIB/capita…………..  89,154 dollars
    • Dette/PIB……………  36,2 %
    • Dép. Soc/PIB……….  18,0 %
    • World Happiness….  N° 3

    Suisse

    • PIB/capita…………..  91 991 dollars
    • Dette/PIB……………  42,4 %
    • Dép. Soc/PIB……….  17,5 %
    • World Happiness….  N° 6

    France

    • PIB/capita…………..  43 659 dollars
    • Dette/PIB……………  113,5 %
    • Dép. Soc/PIB……….  59,2 %
    • World Happiness…. N° 24

    Quand la France va-t-elle pouvoir se réformer ?

    Ces données conduisent à conclure que la France a un immense besoin de se réformer mais ses dirigeants sont très loin de s’atteler à la tâche.

    Les dépenses publiques sont à un niveau très supérieur, en proportion du PIB, à ce qu’elles sont partout ailleurs (51,9 % du PIB contre 34,9 % pour la moyenne OCDE ).

    Les hôpitaux publics sont fortement déficitaires, leur dette s’élève à 30 milliards d’euros.

    Le COR prévoit que le déficit des caisses de retraite va s’élever dans les prochaines années à 0,5 voire 0,8 point de PIB.

    Le pays a perdu près de la moitié de son secteur industriel qui ne représente plus que 10 % du PIB alors qu’il devrait se situer au moins à 18 %.

    De toutes parts, la population réclame davantage de médecins et d’infirmières, davantage de juges, de policiers et de gardiens de prison, davantage de postiers, etc.

    Les revendications pour l’augmentation du pouvoir d’achat sont permanentes. Les 35 heures instaurées par Martine Aubry ont fait partout des dégâts considérables et aucun autre pays n’a adopté une telle mesure.

    Les Français ne parviennent pas à réaliser que le PIB par habitant est bien inférieur à celui des voisins du nord et veulent faire fonctionner la machine économique avec des ratios inférieurs des éléments clés intervenant dans le processus de création de richesse à ce qu’ils sont dans les pays où les PIB par tête sont élevés.

    Cette maladie du « toujours plus » qui affecte les Français avait été déjà dénoncée en 1982 par le journaliste et essayiste François de Closets dans Toujours plus . Ce livre a eu à l’époque beaucoup de succès. François Mitterrand l’avait qualifié « d’ouvrage salutaire ».

    François de Closets écrivait :

    « Les Français se proclament tous défavorisés, réclamant plus d’argent, mais aussi plus de droits, d’avantages, de loisirs, et de garanties ».

    En 2006, il est revenu à la charge avec Plus encore !

    Il serait bon que nos dirigeants veuillent bien s’en inspirer.

    Cet esprit revendicatif s’était traduit par ce bouleversement extraordinaire qu’a été la Révolution de 1789 qui a aboli la royauté et accompagnée des cruautés et des massacres qui ont marqué cette période. Cette grande révolution s’est inscrite dans le roman national : elle est une date clé de l’histoire de France. Elle est louée aux jeunes générations, à l’école, comme un élément positif et on utilise donc la grève voire l’organisation de mouvements populaires violents pour s’opposer au pouvoir. Le marxisme est venu se greffer sur ce fond culturel. Vladimir Lénine avait parlé de « révolution permanente » et cette idéologie a eu beaucoup de succès en France. Les évènements de Mai 68 en ont été une illustration parfaite, mettant à mal une fois de plus l’idée même d’autorité. Plus récemment le mouvement des Gilets jaunes a beaucoup agité le pays.

    Les pouvoirs publics doivent donc faire avec cette donnée de la sociologie française. Alain Duhamel a analysé la psychologie politique des Français dans Les pathologies politiques françaises dont il dit « qu’elles incitent le pouvoir à avancer en crabe ».

    Il s’agit donc bien d’avancer mais avec précaution. Le premier pas consisterait à expliquer avec franchise aux Français où nous en sommes plutôt que de dissimuler en permanence la situation du pays.

    Un récent sondage Harris Interactive indique que six Français sur dix sont pessimistes sur l’avenir du pays, mais on ne leur a jamais expliqué quels étaient les défis à relever. Ils ne comprennent pas pourquoi le pays va mal et se dressent contre les dirigeants. Ils doivent pourtant comprendre les raisons pour lesquelles ils doivent faire des efforts et faire preuve de civisme. Nous n’en sommes hélas pas là pour l’instant. Dès qu’une occasion propice se présente, on déclenche une grève avant même de négocier et la direction de l’entreprise prise au piège doit céder. Une fois de plus, la SNCF vient d’en faire l’expérience, au moment où la population a le plus besoin de se déplacer.