• chevron_right

      29 février : pourquoi on ne gagne pas plus d’argent en travaillant un jour de plus

      news.movim.eu / Numerama · Thursday, 29 February - 05:31

    Février 2024 est plus long que d'habitude. Il y a un jeudi 29, car c'est une année bissextile. Pour beaucoup, c'est un jour de travail. Cela signifie-t-il que l'on gagnera plus ou moins d'argent que d'habitude ?

    • chevron_right

      Pourquoi « NAVIGO » vous envoie des SMS d’arnaque

      news.movim.eu / Numerama · Wednesday, 25 October - 08:16

    Des SMS d'arnaques affichent en nom d'émetteur de véritables entreprises. La faute à un manque de contrôle dans les campagnes de marketing par message. [Lire la suite]

    Abonnez-vous aux newsletters Numerama pour recevoir l’essentiel de l’actualité https://www.numerama.com/newsletter/

    • chevron_right

      Droit, gastronomie et voyage solo : 4 comptes TikTok à suivre en août 2023

      news.movim.eu / Numerama · Sunday, 30 July, 2023 - 16:13

    TikTok ne manque pas de créatrices et créateurs de contenus. Numerama a sélectionné quelques chaînes TikTok pour ne pas vous lasser du réseau social, même pendant les vacances d'été. [Lire la suite]

    Abonnez-vous aux newsletters Numerama pour recevoir l’essentiel de l’actualité https://www.numerama.com/newsletter/

    • chevron_right

      Que risque-t-on légalement si on spoile ?

      news.movim.eu / Numerama · Tuesday, 11 July, 2023 - 11:35

    Avec le développement des plateformes de streaming, il est devenu beaucoup plus facile de spoiler des séries ou émissions, c'est-à dire de dévoiler une partie de l'intrigue à ceux qui ne l'auraient pas encore vue. Cette pratique n'est pas seulement agaçante, elle pourrait théoriquement apporter des ennuis sur le plan légal. [Lire la suite]

    Abonnez-vous aux newsletters Numerama pour recevoir l’essentiel de l’actualité https://www.numerama.com/newsletter/

    • Co chevron_right

      8 février 1873, « l’arrêt Blanco » ou l’histoire d’un mythe

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 24 February, 2023 - 03:40 · 9 minutes

    Le 8 février 2023, cela faisait 150 ans que la décision Blanco fut rendue par le Tribunal des conflits, le 8 février 1873.

    Selon un mythe républicain le mal nommé « arrêt Blanco » (l’arrêt du Conseil d’État arrivera le 8 mai 1974 or, le Tribunal des conflits ne rend pas des « arrêts ») marque le début d’un véritable droit administratif, autonome des règles du droit commun . Connu de tous les étudiants de droit qui sont allés jusqu’en deuxième année, la décision du Tribunal des conflits pose ainsi les bases de la compétence de la juridiction administrative et institue aussi un autre mythe, celui d’un droit administratif forgé exclusivement par la jurisprudence du Conseil d’État .

    Sans revenir sur tous ces mythes qui ont une raison d’exister, il conviendra de voir les apports de cette décision.

    Les faits

    Un petit rappel des faits s’impose.

    Le 3 novembre 1871, Agnès Blanco (en réalité Ignassia Blanco), une fillette âgée de 5 ans, est renversée et grièvement blessée par un wagonnet poussé par quatre ouvriers. Elle sera amputée d’une jambe. Le wagonnet appartient à la manufacture des tabacs de Bordeaux, exploitée en régie par l’État. Le 24 janvier 1872, le père d’Agnès Blanco dépose un recours en responsabilité civile pour des dommages et intérêts sur le fondement du célèbre article 1382 du Code civil (aujourd’hui 1240), devant le tribunal de Bordeaux. Il voulait engager la responsabilité de l’État afin que celui-ci, sur le fondement des articles précités, le dédommage pour les dommages causés à sa fille résultant directement de l’activité d’un service public.

    Or, en raison du principe établi dans les lois des 16 et 24 août 1790 et de celui du décret du 28 septembre 1873, le juge judiciaire ne pouvait troubler de quelque manière que ce soit l’activité administrative (article 13 de la loi précitée). À cet égard et en vertu de la théorie de l’ État débiteur le juge judiciaire ne pouvait donc prendre une quelconque sanction pécuniaire à l’égard de l’État (CE, 1855, Rotschild ). Dès lors, le préfet de la Gironde demandera au tribunal civil de Bordeaux de décliner sa compétence au profit du juge administratif, ce qu’il refusa. Face à ce conflit de compétence positive, le préfet adressera un déclinatoire de compétence devant le Tribunal des conflits, institution remise à jour par la loi du 24 mai 1872 (loi qui conférait au Conseil d’État son indépendance). Le Tribunal des conflits eu donc à trancher ce conflit de compétence.

    La question était alors fort simple. Pour reprendre les mots du commissaire du gouvernement David :

    « Quelle est, des deux autorités administrative ou judiciaire, celle qui a compétence générale pour connaître des actions en dommages-intérêts contre l’État ? »

    Le Tribunal des conflits commence par rappeler dans sa décision la thèse de l’État débiteur avec « l’interdiction pour les tribunaux ordinaires de connaître des demandes tendant à constituer l’État débiteur ».

    Puis, le Tribunal des conflits affirme :

    « La responsabilité, qui peut incomber à l’État, pour les dommages causés aux particuliers par le fait des personnes qu’il emploie dans le service public, ne peut être régie par les principes qui sont établis dans le Code civil, pour les rapports de particulier à particulier ».

    On voit déjà se mettre en place un raisonnement affirmant la spécificité du droit administratif comme ne pouvant pas être soumis aux règles de responsabilité du droit commun.

    Enfin, le Tribunal conclut :

    « Cette responsabilité n’est ni générale, ni absolue ; qu’elle a ses règles spéciales qui varient suivant les besoins du service et la nécessité de concilier les droits de l’État avec les droits privés ».

    Dès lors, la juridiction administrative est compétente pour engager la responsabilité administrative de l’État en raison d’une faute commise lors de l’activité d’un service public. (TC, 8 février 1873, Blanco, n°00012). Le Tribunal des conflits consacre alors le principe de la liaison de la compétence et du fond . Le Conseil d’État rendra donc sa décision le 8 mai 1874 condamnant l’État à verser à Agnès Blanco une indemnité annuelle et viagère de 500 francs (à compter du jour de l’accident), dont elle bénéficiera jusqu’à son décès.

    La portée

    La portée de cette décision est considérable. Du moins, si elle est considérable, ce n’est pas tant en raison du contenu de la décision en elle-même que des interprétations doctrinales qui l’ont suivi.

    Au fond, la décision Blanco ne fait qu’affirmer une seule chose : poser une « non applicabilité de principe du droit administratif » (P. Amselek), mais en aucun cas l’autonomie du droit administratif. Ainsi, à chaque fois qu’une situation semble relever du droit administratif et qu’un texte n’indique pas expressément la compétence du juge administratif, alors elle peut ne pas être soumise au droit privé. Mais ce n’est ni un principe ni une obligation.

    En effet, Blanco se trouve enserré autour des décisions affirmant la compétence du juge judiciaire pour connaître de la responsabilité de l’État quand ce dernier n’agit plus en tant que personne publique (TC, 11 janvier 1873, Joannon, Recueil Lebon , 1873, p. 20 ou encore, TC, 8 février 1873, Bransiet, Recueil Lebon , 1873, p. 70). Cette décision se place d’ailleurs dans le sillage des décisions Rotschild (1855) et Dekeister (1861), issues des périodes non-républicaines. De plus, la décision est très succincte. Elle marque pourtant en quelque sorte le renouveau du droit administratif. Du moins c’est ainsi que la doctrine la présente habituellement. Cette décision marque ainsi le commencement de l’élaboration d’un nouveau critère pour déterminer la compétence de la juridiction administrative.

    Ici, plusieurs écoles vont s’affronter.

    En premier lieu, pour certains grands professeurs de droit administratif, ce qui fondera la compétence de la juridiction administrative est le critère de la puissance publique, dont le grand juriste Maurice Hauriou sera le chef de file. Selon cette première approche :

    « L’administration a le double pouvoir d’imposer aux administrés des obligations et de recourir à la force matérielle pour les faire exécuter ; les règles juridiques qui définissent le cadre dans lequel elle est habilitée à se mouvoir, les conditions dans lesquelles elle peut faire usage de ses prérogatives,- ont de ce fait une nature et une portée irréductibles à celles des règles de droit commun » (J.Chevallier).

    L’arrêt Blanco permettra à cette école de quitter son empirisme traditionnel pour donner une formulation théorique claire à ce critère. En effet, par les conclusions du commissaire David, cet arrêt vise comme critère celui de la puissance publique.

    Dès lors que l’État agit comme « puissance publique », la juridiction administrative est compétente. Cependant, cette approche fut très critiquée notamment en créant une division factice et préjudiciable entre l’autorité et la gestion. Le nouveau critère du service public, emmené par Léon Duguit et Gaston Jèze, donnera une nouvelle assise au droit administratif.

    Selon ce courant le service public est défini comme « l’ensemble des activités qui doivent être réglées et assurées par les gouvernants en raison de leur importance sociétale ».

    Il ne s’agira pas ici de revenir sur les problèmes inhérents aux définitions du service public, « texture ouverte » (Hart) par nature. Mais il s’agira de voir comment ce second courant dit du « service public » a donné de nouveaux fondements au droit administratif.

    Ici, « l’attention se déplace des moyens d’action détenus par l’administration aux finalités de son institution. C’est dans la seule mesure où elle est au service du public et agit dans le sens de l’intérêt général, que l’administration est soumise à des règles exorbitantes du droit commun, dont le contenu et la portée ne peuvent être correctement appréciées que par un juge spécialisé » (J.Chevalier).

    Abandonnant la théorie du critère de la gestion publique propre au commissaire David, les partisans du critère du service public s’appuieront postérieurement sur la jurisprudence du Conseil d’État avec les arrêts Terrier (1903), Feutry (1908) et Thérond (1910).

    Cependant, l’idée d’affirmer que le critère du service public représente le seul et unique critère du droit administratif se révélera être une illusion.

    En effet, la jurisprudence administrative n’utilisera ce critère que pour les transferts de compétence aux collectivités locales mais non pour le reste. Ensuite, le Tribunal des conflits y apportera le coup de grâce en reconnaissant (même si le Conseil d’État l’avait fait en 1920) la possibilité d’une gestion privée des services publics, les fameux services publics industriels et commerciaux (TC, 22 janvier 1921, Bac d’Eloka ). Mais parler des disjonctions, entrecroisements et prolongements des différentes doctrines nous conduirait trop loin par rapport à l’objet du présent article. Nous dirons simplement qu’aujourd’hui encore, on ne trouve pas de critère unique pour fonder la compétence du juge administratif.

    Conclusion

    Au fond, si cette décision est mythique c’est surtout en raison des écrits doctrinaux qui l’ont suivi.

    En reniant avec sa tradition prérépublicaine, sous la IIIe République encore naissante, la doctrine administrative veut affirmer un droit administratif nouveau et républicain. Il faut pour ce faire trouver de nouveau fondements pour notamment justifier l’essor de l’État dans les activités privées. La décision Blanco sera redécouverte par les théoriciens du droit public qui, jusque-là, l’ignoraient complètement. Ainsi que ce soit Maurice Hauriou en 1897 ou Édouard Lafférière en 1887, ils ne citent pas la décision dans leurs différents ouvrages théoriques.

    On assiste alors en 1910 à une « restructuration du passé » par la création d’un mythe idéologique, fondant ainsi la spécificité du droit administratif. En effet, en écartant l’application d’un Code civil qui revêt pourtant une certaine aura, les théoriciens du droit marquent un affranchissement à l’égard de la doctrine civiliste. Ce mythe est encore aujourd’hui très tenace en raison de son évocation dans le GAJA ou dans les différents cours de droit administratif de deuxième année. Mais comme tout mythe, il a évidemment une utilité : celle d’affirmer la prégnance d’un droit administratif prétorien bâti par la seule force du Conseil d’État.

    Cette idée d’un droit prétorien a permis la création, par le Conseil d’État, de l’ensemble des différentes catégories du droit administratif, du service public administratif aux travaux publics en passant par les collaborateurs occasionnels du service public etc. Tout en se fondant sur ce mythe, le Conseil d’État a élaboré des principes généraux du droit (valeur supradécrétale et infralégislative) voire a pu dégager un principe fondamental reconnu par lois de la République.

    Cette décision montre enfin la difficulté pour la doctrine de systématiser des jurisprudences aux travers de critères et concepts uniques, invitant alors à une théorie analytique du droit en procédant à des efforts sérieux de clarification et de définition, pour rendre compte, de la manière la plus réaliste qu’il soit, du travail d’interprétation des juges.

    • Co chevron_right

      Une crise de la norme infecte notre droit

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Monday, 30 January, 2023 - 03:40 · 4 minutes

    Par Frédéric Peltier.

    Le débat sur les normes renaît de ses cendres régulièrement. Il y a trop de normes , elles sont trop complexes, inefficaces, paralysantes etc. etc.

    Le Sénat qui est l’assemblée des territoires vient de produire, le 26 janvier 2023, une résolution sous la plume de Rémy Pointereau pour dénoncer le poids et l’inertie de cette production bureaucratique qui s’abat notamment sur les décideurs politiques locaux. Tous se sentent cornaqués par ces règles dont l’application est de l’ordre du casse-tête chinois. Ces normes sont au final accablantes.

    Ce texte court du Sénat évoque une moyenne annuelle de 89 000 articles de loi et 242 000 articles de règlements qui viennent s’ajouter à un stock pléthorique des textes en vigueur rangé selon la méthode de l’empilage. À l’instar du Code de l’urbanisme, tous les codes prennent de l’épaisseur à chaque réédition annuelle.

    La lecture de cette résolution du Sénat fait néanmoins sourire. Pétri de bonnes intentions, les élus du Palais du Luxembourg qui participent activement à la prolifération normative en votant des lois qui renvoient aux décrets, lesquels renvoient à des règlements, des instructions ou des circulaires, soulignent les moyens embryonnaires du Conseil d’évaluation des normes créé en 2013 pour faire un peu de tri dans ce capharnaüm. Ils proposent que cet organisme s’inspire de son homologue allemand, Nationaler Normen kontrollrat, qui aurait selon le Sénat permis d’économiser 25 % des coûts administratifs à nos voisins depuis 2011 dont l’ingéniosité réglementaire n’a pourtant rien à envier à nos technocrates.

    C’est un peu par le petit bout de la lorgnette que ce rapport du Sénat appréhende cette profusion de normes en voulant en libérer les collectivités locales. La multiplication des normes est tout d’abord générée par le turbo normatif de l’ Union européenne avec sa fabrique de textes qu’est la Commission. Ainsi, c’est tout un champ normatif qui échappe au législateur français mais aussi à l’administration de notre pays. L’un des problèmes de cohérence normative est d’ailleurs que les technocrates hexagonaux n’ont pas renoncé face à ceux de Bruxelles. C’est souvent le concours d’intelligence.

    Le problème de l’hypernormalisation

    Mais surtout, l’hypernormalisation est un phénomène sociétal tellement puissant que la lutte contre l’étouffement des normes ne passera pas seulement par leur rationalisation ou l’étude rigoureuse de leur impact pour aboutir, le cas échéant, à l’abandon des règles inadéquates.

    Le problème majeur des normes est avant tout l’objectif commun de la plupart d’entre elles. Elles ont en commun de prétendre protéger. Les États, mais aussi l’Union des États lorsqu’il décident de collaborer comme en Europe, ont aujourd’hui la hantise du risque . L’encadrement de toutes les activités humaines par des normes est justifié par cet impératif de protection, dont l’idéal est le risque zéro. C’est ainsi que la norme qui se veut protectrice de celui à qui elle s’applique est aussi protectrice de celui qui l’applique, voire qui l’édicte. Tout le monde est alors protégé. S’il se passe quelque chose qui dépasse la norme, c’est la faute de personne, il n’y a pas de responsabilité, il n’y a pas de victime.

    La crise de la norme a fait l’objet d’un colloque organisé par le Conseil d’État fin 2022. Cet évènement a donné lieu à un concert de critiques sur une multiplication des règles au sens large, toujours plus détaillées, tatillonnes souvent, largement impuissantes à résoudre les problèmes qu’elles entendent vouloir régler, et au final contre-productives au plan économique et social, lorsqu’elles ne sont pas inutilement liberticides. La source du problème n’a toutefois qu’été à peine évoquée. La norme n’est que la déclinaison de cet adage qui veut que gouverner c’est prévoir. Donc celui qui ne prévoit pas tout serait un mauvais gouvernant.

    Les recours judiciaires en matière de responsabilité civile ou pénale contre les décideurs publics qui se multiplient ne sont que la conséquence de ce principe qui s’est ancré dans notre culture sociétale de protection qui va jusqu’au quoiqu’il en coûte. C’est aujourd’hui ce risque judiciaire qui est devenu l’affluent puissant d’un fleuve normatif toujours plus vigoureux.

    On ne peut pas tout à la fois attendre tout de l’État ou de la puissance publique et se plaindre de la prolifération des normes.

    C’est donc le modèle sociétal qui doit être questionné si l’on souhaite réellement lutter contre cette inflation normative qui va jusqu’à éteindre l’initiative individuelle. Se libérer des normes c’est accepter de prendre le risque qu’elles ne soient pas là pour nous protéger.

    La question centrale n’est donc pas celle de l’efficacité de la norme mais celle de l’acceptation de son retrait, c’est-à-dire de l’acceptation du risque que chaque individu peut assumer en son âme et conscience.

    • Co chevron_right

      Néonicotinoïdes : la CJUE pour vision rigoriste du droit

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 24 January, 2023 - 03:30 · 10 minutes

    Pour la Cour de justice de l’ Union européenne , des dérogations de 120 jours pour répondre à un besoin pressant de protection des cultures contre des ravageurs sont illicites dès lors qu’elles portent sur des produits phytosanitaires « interdits » par un règlement communautaire.

    On glosait et s’étripait en France sur un éventuel arrêté autorisant les semenciers à enrober des semences de betteraves d’un néonicotinoïde (imidaclopride ou thiaméthoxame) afin de protéger les plantes de betteraves contre les attaques de pucerons et, partant, les viroses appelées jaunisses…

    Et on attendait une nouvelle dérogation pour 2023 avec, le 20 janvier 2023, le feu vert d’un organe consultatif (un de plus permettant à nos gouvernants de diluer leurs responsabilités).

    Coup de tonnerre judiciaire le 19 janvier 2023

    Le dossier français a sans doute été clos par la Cour de justice de l’Union européenne par son arrêt du 19 janvier 2023 ( Communiqué de presse ; arrêt ; conclusions de l’avocate générale Juliane Kokott ).

    La Cour avait été saisie d’une demande préjudicielle – une question sur comment doit s’interpréter le droit communautaire – par le Conseil d’État belge dans une affaire introduite par Pesticide Action Network Europe ASBL, Nature et Progrès Belgique ASBL et un apiculteur. Il était reproché à l’État belge d’avoir indûment accordé des dérogations le 19 octobre 2018 pour des semences de betteraves sucrières.

    Cette dérogation – et d’autres accordées au fil du temps par, excusez du peu, 11 États membres pour la betterave sucrière et quelques autres cultures – trouve son fondement dans l’article 53 du Règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 21 octobre 2009, concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil :

    « 1. Par dérogation à l’article 28 et dans des circonstances particulières, un État membre peut autoriser, pour une période n’excédant pas cent vingt jours, la mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques en vue d’un usage limité et contrôlé, lorsqu’une telle mesure s’impose en raison d’un danger qui ne peut être maîtrisé par d’autres moyens raisonnables. »

    Selon l’article 28,

    « 1. Un produit phytopharmaceutique ne peut être mis sur le marché ou utilisé que s’il a été autorisé dans l’État membre concerné conformément au présent règlement. »

    Au terme de son analyse, la CJUE a conclu que l’article 53 doit être interprété en ce sens que :

    « il ne permet pas à un État membre d’autoriser la mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques en vue du traitement de semences, ainsi que la mise sur le marché et l’utilisation de semences traitées à l’aide de ces produits, dès lors que la mise sur le marché et l’utilisation de semences traitées à l’aide de ces mêmes produits ont été expressément interdites par un règlement d’exécution. »

    Un arrêt de portée très générale

    En bref et en généralisant, une dérogation ne peut pas être accordée pour un produit qui a été « expressément interdit… » dans la cadre de procédures particulières comme dans le cas de certains néonicotinoïdes et sans doute aussi de la procédure régulière d’approbation (ou de non-approbation) des matières actives phytopharmaceutiques.

    A priori , les possibilités de dérogation – de mesures d’urgence pour répondre à un danger phytosanitaire – sont ainsi limitées aux usages de substances autorisées pour une combinaison culture-ravageur pour laquelle il n’y a pas d’autorisation dans un État membre ; et selon une hypothèse fort périlleuse, aux produits n’ayant pas fait l’objet d’une demande d’approbation initiale ou de renouvellement d’approbation.

    Les premières ne relèvent pas du règlement communautaire ; pour les secondes, et notamment celles portant sur des substances qui ne se sont pas encore frottées à l’hypocondrie communautaire, on voit assez mal la CJUE refuser la primauté du « principe de précaution ».

    Intégrisme v. pragmatisme

    La CJUE avait le choix entre deux options : d’une part, une application fondamentaliste, intégriste ou rigoriste du droit donnant la priorité à la règle de droit qui veut que les exceptions et dérogations doivent faire l’objet d’une interprétation stricte, ainsi qu’à l’ambition affichée par l’ Union européenne d’assurer une protection élevée de (lire : assurer prioritairement) la santé humaine et animale, et l’environnement ; d’autre part, une application plus nuancée tenant compte des effets d’une dérogation ou du refus d’une dérogation.

    L’avocate générale Juliane Kokott avait plaidé vigoureusement pour la deuxième approche, en bref, celle de l’évaluation de la balance bénéfices-risques. Par exemple :

    « [il faut] une appréciation concrète, à la lumière du principe de précaution, de la question de savoir si les avantages pour assurer la compétitivité de l’agriculture résultant de l’utilisation d’un produit phytopharmaceutique en cause l’emportent sur les risques liés à l’utilisation du produit. […] »

    De son point de vue, il faut être plus prudent en cas d’effets nocifs pour la santé humaine et animale qu’en cas de « conséquences « simplement » négatives pour l’environnement ».

    L’enrobage des semences est un cas particulier puisqu’il s’agit d’une mesure préventive… et que le législateur a cru bon de poser une autre mine anti-économie à l’article 49 du règlement, lequel évoque des « réelles préoccupations selon lesquelles les semences traitées […] sont susceptibles de présenter un risque grave pour la santé humaine ou animale ou l’environnement […] ». Admirez au passage la formulation : les préoccupations doivent être réelles pour un risque, certes grave, mais hypothétique comme l’exige le mot « susceptibles ».

    Selon l’avocate générale :

    « […] l’autorisation d’urgence […] dépend non pas du caractère certain ou plausible de la survenance du danger qu’il vise à prévenir, mais du point de savoir si les avantages de cette utilisation l’emportent sur les inconvénients qu’elle présente. […] »

    Des conséquences potentiellement ravageuses

    La CJUE aura préféré asséner la massue juridique sur une filière maintenant en grand danger (et sans doute aussi sur d’autres).

    En 2020, la jaunisse a réduit le rendement moyen national de quelque 30 %, avec des pointes régionales ou locales à plus de 75 %. Si les producteurs arrêtent en nombre, ce sont les sucreries qui ferment… et les producteurs restants qui sont privés de débouchés et s’arrêteront donc aussi… Avec des conséquences en cascade .

    Pour la Confédération générale des planteurs de betteraves (CGB) :

    « La brutalité d’une telle décision, appliquée en l’état, risque d’entrainer des conséquences désastreuses et irréversibles dans nos territoires ruraux alors même que les politiques encouragent la souveraineté alimentaire, énergétique et la réindustrialisation de la France. »

    Capture CJUE

    ( Source et source )

    Les carences du législateur

    Aussi contestable soit-il s’agissant des ravages économiques et sociaux potentiels et aussi criticable soit-il s’agissant de l’approche choisie – qui n’aurait sans doute pas été retenue dans un système de common law –, l’arrêt de la CJUE met aussi en exergue les carences du législateur et, in fine , de l’approche politique générale.

    Selon le communiqué de presse de la CJUE,

    « Cette interprétation trouve son origine […] dans l’objectif de ce règlement, lequel vise à assurer un niveau élevé de protection de la santé humaine et animale ainsi que de l’environnement, et qui se fonde sur le principe de précaution, qui est l’un des fondements de la politique de protection d’un niveau élevé poursuivie par l’Union dans le domaine de l’environnement »

    La Commission et les États membres ont justifié leur interdiction de trois néonicotinoïdes – les règlements d’exécution (UE) 2018/ 783 , 784 et 785 du 29 mai 2018 – par des arguments tels que « des risques chroniques élevés pour les abeilles ne pouvant être exclus pour les betteraves sucrières », « un risque élevé ne peut être exclu pour la plupart des utilisations en plein champ » et « les abeilles couraient des risques chroniques et aigus dans les cultures suivantes pour toutes les utilisations en plein champ ».

    Qu’importe si, après coup, les États membres ayant adopté des dérogation aient révisé leur jugement et répondu aux préoccupations relatives aux cultures suivantes… qu’importent aussi les conclusions, positives, de l’EFSA sur les autorisations d’urgence (qui ne semblent pas avoir été versées au dossier judiciaire…)… la CJUE a excipé du principe de précaution tel qu’interprété (abusivement) dans l’Union européenne.

    Et maintenant ?

    Les législateurs – la Commission, le Conseil et le Parlement européen – entendront-ils le message implicite qu’il est impératif de réviser les fondements de la politique européenne fondée sur l’aversion du danger au profit d’une gestion des risques , comme le prône sur ce site, à longueur d’articles, M. David Zaruk ? Ainsi que sur une naïve bien-pensance s’agissant de la lutte contre les changements climatiques et l’érosion de la biodiversité, bref, le Pacte Vert et de la ferme à la table ?

    S’agissant plus spécifiquement de l’important secteur économique et social fondé sur la betterave sucrière, sont-ils prêts à réviser leurs positions et à transposer en droit communautaire – en règlements d’éxécution – les dérogations maintenant illégales ?

    Pour ce secteur – et d’autres – une des solutions à la crise réside dans la génétique. Une génétique faisant appel aux « nouvelles techniques génomiques », ou encore à des OGM « classiques », issus d’une transgenèse. Le législateur est-il prêt à revoir ses positions, ses dogmes et ses petites compromissions avec une mouvance antitechnologie d’autant plus puissante qu’elle est aussi biberonnée par les instances européennes ?

    Les professionnels doivent parler vrai

    Les professions sont aussi au pied du mur.

    Selon un bréviaire souvent lu, s’appuyant de manière sélective sur un communiqué du 2 juin 2021, l’ANSES aurait identifié vingt-deux solutions pour lutter contre les pucerons et la jaunisse dans les cultures de betteraves sucrières : quatre solutions « à court terme » et 18 autres moyens de lutte qui « devraient être disponibles dans un délai de deux à trois ans ».

    Des « solutions » ? C’est en grande partie du pipeau ! Et c’est sans comparaison avec les avantages de l’enrobage des semences.

    Dans un communiqué de presse navrant de platitude, le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire se gausse aussi de son engagement « dans un programme de sortie de néonicotinoïdes sur les semences de betterave et de recherches d’alternatives » et du « plan national de recherche et d’innovation (PNRI) ». Comme si cet arrêt de la CJUE aurait été bienvenu, n’eût-il été un peu prématuré…

    Comme si on pouvait mettre au point, en l’espace de trois ans (trois campagnes betteravières) « des solutions alternatives aux néonicotinoïdes, déployables à l’échelle de la sole betteravière de 400 000 hectares et techniquement et économiquement viables à l’horizon de 2024 » !

    Il y a une conclusion risible dans ce communiqué de presse :

    « L’année 2023 constitue la dernière année de mise en œuvre de la loi du 14 décembre 2020 relative aux conditions de mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques en cas de danger sanitaire pour les betteraves sucrières. »

    Non, les carottes sont cuites pour 2023… Sauf si le gouvernement français décide d’ignorer l’arrêt et de faire mettre en route une révision des règlements d’exécution témérairement adoptés sur la base, rappelons-le, d’une formidable manipulation (pour ne pas dire plus). En aura-t-il l’ambition ? Ou se contentera-t-il de « prendre acte », répudiant le si souvent affirmé « Pas d’interdiction sans solution » ?

    ( Source )

    Il est temps que les professions agricoles et connexes imposent le langage de vérité.

    • chevron_right

      Qui a le droit de lire les preuves sur un smartphone ?

      news.movim.eu / Numerama · Sunday, 11 December, 2022 - 08:05

    En cas de cybercrime, les magistrats ont-ils le droit de consulter des preuves sur un téléphone portable ? La frontière entre enquête et atteinte à la vie privée semble mince. Nathalie Devillier, docteure en droit, l'explique dans The Conversation. [Lire la suite]

    Abonnez-vous aux newsletters Numerama pour recevoir l’essentiel de l’actualité https://www.numerama.com/newsletter/