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      Le paracétamol rend zen, qui l’eût cru !

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 22 January, 2023 - 03:30 · 3 minutes

    Par Jacques Henry.

    zen en jean credits Arsian (CC BY-NC-ND 2.0) zen en jean credits Arsian ( CC BY-NC-ND 2.0)

    Il est bien connu qu’une poussière dans l’œil amplifie la moindre contrariété au point qu’on peut devenir irascible. Une petite douleur nous rend plus sensible aux émotions. C’est le cerveau qui gère nos réactions et nous devons faire preuve d’une grande maîtrise de nous-même pour dominer nos réactions.

    D’ailleurs ces émotions peuvent être positives ou négatives, c’est selon. Le centre de gestion des émotions se trouve être le système limbique. En d’autres termes, tout ce qui se trouve à l’intérieur du cortex cérébral gère aussi la douleur, signal provenant le plus souvent du tronc cérébral car le cerveau lui-même est indolore. C’est schématique et un spécialiste dirait que j’écris n’importe quoi. Mais si on entre dans les détails, le cerveau étant un organe tellement complexe, on ne comprend plus rien.

    Toute cette introduction pour discourir du paracétamol ou acétaminophene, l’analgésique le plus populaire et le plus vendu dans le monde.

    Le paracétamol agit assez rapidement sur la douleur et son mode d’action est, encore schématiquement, supposé stopper les signaux indiquant une douleur remontant du tronc cérébral vers le cerveau mais après avoir été couplé à de l’acide arachidonique, modification qui le rend plus activement analgésique. Et quand on soulage une douleur, on devient également moins sensible aux émotions négatives. Si cela paraît logique, il n’en est pas de même de l’autre effet du paracétamol qui amenuise également les émotions positives et… la perception du plaisir.

    Système limbique / Jacques Henry

    Difficile à croire et pourtant une étude parue dans le journal Psychological Science tend à prouver que les choses se passent ainsi.

    Le paracétamol aurait-il donc plusieurs modes d’action, l’un au niveau de la transmission du signal de la douleur et l’autre au niveau du système limbique ? Et comment le prouver ou du moins obtenir quelques indications sur ces mécanismes ? Tout simplement en effectuant des tests simples sur un nombre suffisant de personnes afin d’être certain que le résultat final est encourageant pour une recherche plus approfondie.

    Le docteur Geoffrey Durso, un psychologue de l’Université de l’Ohio, a donc demandé à 82 étudiants en bonne santé et ne souffrant d’aucune douleur de prendre un gramme de paracétamol pour la moitié d’entre eux et un comprimé de placebo pour l’autre moitié. Une heure plus tard, le temps que le paracétamol soit actif sous forme d’ester d’acide arachidonique, le test a consisté à montrer à chaque personne une série de 40 photos choisies pour entraîner de fortes réactions émotionnelles, comme des photos d’enfants mourant de faim ou au contraire bien-portants et heureux et jouant avec leur petit chat. On a demandé aux étudiants de classer les photos de – 5 pour les plus négatives à + 5 pour les plus positives au niveau émotionnel. Puis on leur a demandé d’examiner à nouveau les photos et de les classer à nouveau de 1 à 10 selon leur niveau émotionnel.

    Les membres du groupe ayant reçu du paracétamol ont systématiquement noté comme moins négatives les photos suscitant pourtant une émotion dérangeante et moins positives les photos « joyeuses », en quelque sorte un nivellement des émotions. Il est certain que les différences entre groupe placebo et groupe paracétamol n’étaient pas immenses, loin de là, mais le résultat laisse clairement entrevoir que cette molécule chimique agit également sur le système nerveux central. Autrement dit quand on s’administre de bonnes doses de paracétamol on devient zen et tout vous glisse dessus comme l’eau sur les plumes d’un canard. Avis aux émotifs, mais pas d’excès non plus…

    Article publié initialement le 23 avril 2015.

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