• chevron_right

      Cette année encore, j'ai demandé ma mutation pour mieux enseigner. Cette année encore, c'est un refus - BLOG

      news.movim.eu / HuffingtonPost · Monday, 9 May, 2022 - 11:15 · 6 minutes

    Les dernières années été ont été éprouvantes à bien des égards pour notre profession et nous ne nous sentons ni estimés, ni respectés par notre ministère. Qu’avons-nous bien pu faire pour mériter un tel acharnement? Les dernières années été ont été éprouvantes à bien des égards pour notre profession et nous ne nous sentons ni estimés, ni respectés par notre ministère. Qu’avons-nous bien pu faire pour mériter un tel acharnement?

    ENSEIGNEMENT - Monsieur Blanquer, je me permets de vous adresser cette lettre pour vous signaler ma déception et mon incompréhension.

    Je fais partie des milliers d’ enseignants qui tentent vainement de muter d’année en année.

    Un résultat qui sonne comme un verdict

    Tous les ans, nous attendons avec fébrilité le mail qui nous annoncera le compte à rebours pour notre participation aux mutations interdépartementales du premier degré.

    Vous avez envie de raconter votre histoire? Un événement de votre vie vous a fait voir les choses différemment? Vous voulez briser un tabou? Vous pouvez envoyer votre témoignage à temoignage@huffpost.fr et consulter tous les témoignages que nous avons publiés. Pour savoir comment proposer votre témoignage, suivez ce guide !

    Les résultats tant attendus apparaissent comme un verdict, verdict qui nous semble de plus en plus acéré, catégorique et qui nous pousse vers la porte de sortie.

    Personnellement, je demande simplement à rentrer chez moi auprès de mon conjoint et de ma famille.

    Un grand nombre d’entre nous sait qu’à partir du 1er mars de cette année, nous nous retrouverons face au mur.

    Néanmoins, nous ne souffrons pas d’une perte de vocation . Nos profils sont divers et variés certains en poste, d’autres non. Certains en situation de handicap, d’autres conjoints de personnes mutées par leur entreprise quand certains souhaitent juste pouvoir choisir leur lieu de vie.

    Nous ne pouvons plus justifier de remettre en question nos couples, nous ne pouvons plus justifier de laisser nos parents souffrants seuls, nous ne pouvons plus supporter de sécher nos larmes et celle de nos proches les dimanches quand nous partons.

    Autant de profils différents qui sont tous toujours animés par l’envie d’enseigner

    De perpétuer ou de retrouver ces moments partagés avec nos élèves. Cette fierté dans le regard de celui qui réussit à déchiffrer ses premiers mots, ses premières phrases.

    L’exaltation des élèves après la présentation de la pièce de théâtre devant le public.

    La première, mais pas la dernière participation de cette élève en mathématiques . Lui qui était persuadé d’être “mauvais”, c’est d’ailleurs souvent la première chose qui nous aura dite…

    Le regard confiant des parents lorsque leurs enfants leur diront pour la première fois à quel point ils adorent l’école. Les larmes parfois quand nous sommes les témoins de bouleversements dans leur vie.

    Des instants fugaces qui s’enchaînent inlassablement de jour en jour, de semaine en semaine, deux mois en mois, d’année en année. Tous ces instants qui donnent du sens à notre fonction, qui nous construisent en même tant que nos élèves.

    Tous les ans, le doute et l’injustice

    Pourtant, tous les ans, le doute nous envahit à l’approche de cette période de mutation. Au fil des ans, nous constatons que le que le nombre de postes proposés chute dramatiquement, tout comme le taux de satisfaction.

    En 2021, sur 17.179 participants (5% des professeurs d’école), seulement 3614 mutations ont été accordées, soit un taux de satisfaction de 21,04%. En 2020, ce taux était de 23,31% et en 2019 de 23,47%. Ce taux de satisfaction n’a plus dépassé les 30% depuis 2010.

    En 2010, le taux de satisfaction pour les personnes handicapées bénéficiant des 800 points était de 96,22%, celui des agents séparés de leur conjoint atteignait 65,9 %.

    Aujourd’hui les barèmes d’entrée dans une grande partie des départements sont tellement hauts que 800 points peuvent être considérés comme un “petit” score. Ces barres d’entrées sont élevées car le nombre d’entrées et de sorties est de plus en plus limité. On enregistre pourtant un nombre de participants sensiblement similaire chaque année (entre 16.000 et 17.000 depuis 2010).

    Personnellement, je demande simplement à rentrer chez moi auprès de mon conjoint et de ma famille.

    Le département de la Creuse est pourtant favorable à ma demande de retour face au cruel manque d’enseignants dans ses écoles. Cependant, le département de l’Essonne dans lequel j’exerce est également déficitaire il devient rare d’avoir l’accord d’une mutation. Ayant “seulement” 300 points, je sais d’avance que je vais devoir continuer à vivre à plus de 300 kilomètres de ma famille et j’ai bien peur de ne pas en être capable moralement, physiquement et financièrement.

    Démissions, absence de remplaçants, classes vides...

    Le Ministère est le seul à décider du nombre de postes ouverts au mouvement dans les départements. Autour de nous, nous observons des classes sans enseignants, des demandes par petites annonces de personnes non formées. Et ce, bien avant la crise du Covid.

    Depuis quelques semaines, nous recevons dans nos boîtes mail académiques les circulaires pour les démissions, les ruptures conventionnelles, les mises à disposition, des congés parentaux… Des classes donc partiellement vides à la rentrée de septembre.

    Nous savons pertinemment que les départements sont en flux tendu, qu’il manque des remplaçants partout et qu’à la semaine de la rentrée, nous verrons sur Pôle emploi ou Le bon coin pulluler des annonces pour recruter des remplaçants et nous… Rien.

    Néanmoins vous annoncez le recrutement tous les ans de nouveaux enseignants alors que le dédoublement des classes de grande session/CP/CE1 n’est pas achevé. Nous retrouvons tous dans notre entourage un collègue qui a abandonné, qui est parti. Le nombre de démissions dans l’Éducation nationale a triplé en quelques années et comprenez bien que nous ne démissionnons qu’en dernier recours. En 2016, 3,18% de démissions sur l’ensemble de la profession.

    Épuisement et incompréhension

    Pour rappel, les professeurs des écoles correspondent à la moitié des effectifs de l’enseignement public et nous sommes 5% vouloir muter tous les ans. Il n’est pas difficile de faire le lien entre le manque de mobilité et l’augmentation des démissions.

    Le ton de cette lettre semble certes accusateur mais entendez bien nous sommes juste épuisés et nous ne comprenons pas le choix qui est fait de bloquer la mobilité des personnels.

    Les dernières années été ont été éprouvantes à bien des égards pour notre profession et nous ne nous sentons ni estimés, ni respectés par notre ministère. Qu’avons-nous bien pu faire pour mériter un tel acharnement?

    Nous avons répondu présents pour assurer nos élèves le moins de rupture dans leur scolarité, pour limiter les effets délétères de la situation sanitaire sur la santé psychique, pour assurer le respect des valeurs de la République et former nos futurs concitoyens.

    Est-ce trop de demander un geste en notre faveur? Ne suffirait-il pas pourtant d’augmenter la dotation de postes au mouvement interdépartemental pour régler bon nombre de problèmes? Pourquoi pas nous? Nous sommes titulaires, présents, volontaires, formés…

    ____________

    Ce témoignage, initialement publié sur le compte Instagram de Maîtresse Agate , a été republié sur Le HuffPost avec l’accord de son autrice.
    ____________

    À voir également sur Le HuffPost: Ces profs en colère ont manifesté pour la première fois

    • Co chevron_right

      L’image des enseignants : je t’aime, moi non plus

      Patrick Aulnas · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 7 March, 2021 - 04:35 · 4 minutes

    enseignants

    Par Patrick Aulnas.

    Il y a 870 000 enseignants du primaire et du secondaire en France et 90 000 enseignants du supérieur. Leur nombre a explosé depuis la Seconde Guerre mondiale parce que la société elle-même a profondément évolué. Cette évolution rapide a modifié l’image des enseignants dans la population, mais aussi l’image que les enseignants se font d’eux-mêmes.

    Petit aperçu de la situation  actuelle.

    Un enseignant est-il proche d’un bibliothécaire ?

    L’image des enseignants est contrastée et parfois fondée sur des préjugés. Une étude de la Varkey Fondation de 2018 analyse la perception du monde enseignant par les opinions publiques de 21 pays. Les réponses sont assez consternantes pour qui connaît bien le système éducatif, ses forces et ses faiblesses.

    L’une des questions concernait la profession à laquelle celle d’enseignant était la plus comparable. Pour la France, la profession de bibliothécaire est placée en première position (28 % des réponses). Une telle perception montre clairement la méconnaissance du métier d’enseignant dans le public.

    La noble activité de bibliothécaire n’exige pas la performance quotidienne, à la fois physique, psychologique et intellectuelle du métier d’enseignant. Autrement dit, transmettre des connaissances à un groupe de jeunes élèves ou étudiants est une activité à forte intensité. Un enseignant qui devient bureaucrate a l’impression de se reposer et il s’ennuie vite.

    Pour la Chine, le résultat à la question précédente est le suivant : 38 % des personnes interrogées comparent la profession d’enseignant à celle de médecin. Comparaison France-Chine éloquente !

    Une bonne image des enseignants dans l’opinion publique

    Pourtant, au pays de Molière, sondage après sondage, l’image des enseignants dans l’opinion publique n’apparait pas dévalorisée. Les enseignants sont plus sévères sur eux-mêmes que les Français dans leur ensemble. Nombreux sont ceux qui souffrent du décalage entre niveau culturel et statut social.

    Selon un sondage Odoxa de 2018, 57 % des Français ont une bonne opinion de l’Éducation nationale en tant que structure et 42 % une mauvaise. Mais l’opinion sur les personnes travaillant dans l’Éducation nationale est meilleure : 69 % de bonnes opinions contre 30 % de mauvaises.

    En ce qui concerne les qualificatifs s’appliquant aux enseignants, 73 % des Français les jugent compétents, 62 % soucieux de leurs élèves, mais seulement 50 % les jugent efficaces.

    Un métier moins prestigieux que beaucoup d’autres

    Mais les enquêtes sur le ressenti des enseignants eux-mêmes font apparaître une focalisation sur la perte de prestige de leur profession. En 2016, une étude du Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco) avait interrogé un panel d’étudiants de troisième année de licence.

    La moitié d’entre eux, tout en envisageant de devenir professeur, classait la profession d’enseignant parmi les moins prestigieuses d’une liste de quinze métiers. Les métiers jugés prestigieux étaient magistrat, ingénieur ou avocat.

    Un sondage Ipsos de 2020 fournit des précisions sur l’état d’esprit des enseignants. 69 % d’entre eux se disent satisfaits de leur métier, mais 59 % pensent que le système éducatif français fonctionne plutôt mal. Surtout, 82 % des enseignants estiment que leur rémunération et leur carrière ne témoignent pas d’une juste reconnaissance de leur travail.

    Enseignants : de l’intellectuel au travailleur social

    Pour comprendre le monde enseignant, une perspective historique n’est pas inutile. Les instituteurs de la III e République (1870-1940), les fameux « hussard noirs » chargés d’alphabétiser la population, bénéficiaient d’un prestige important dans les milieux populaires. Ils en étaient souvent issus et leur profession représentait une promotion à la fois sociale et culturelle. Quant aux enseignants du secondaire, ils avaient pour élèves les enfants de la bourgeoisie.

    Seulement 1 % d’une classe d’âge obtenait le baccalauréat en 1881 et 2,7 % en 1936. Aujourd’hui plus des trois-quarts d’une génération atteint le niveau du bac. Les élèves n’appartenant plus à l’élite, le professeur ne se considère plus comme lui appartenant.

    Il existait jusqu’aux années 1950 un fossé entre le monde enseignant et les milieux populaires, tant du point du vue culturel qu’économique. Aujourd’hui, un artisan plombier gagne davantage qu’un professeur des écoles, un directeur financier beaucoup plus qu’un professeur d’université.

    Il y avait 7000 professeurs de l’enseignement secondaire en France en 1890 et 365 000 dans le seul second degré public en 2019. Profession rare auparavant, rattachée au monde de l’ intelligentsia , le professeur apparaît aujourd’hui comme un travailleur social ordinaire.

    Le plus beau métier du monde

    Cette cruelle réalité socio-économique ne doit pas cacher l’essentiel. Transmettre le patrimoine cognitif accumulé par l’humanité aux générations futures, n’est-ce pas l’un des plus beaux métiers du monde ? Sans aucun doute.

    Mais voilà ! Les enseignants ne sont plus les seuls. Il existe aujourd’hui mille façons d’apprendre. La formation se poursuit tout au long de la vie car les technologies et les qualifications évoluent plus rapidement que jamais. L’accès au savoir devient immédiat par le miracle de la numérisation de l’information et l’existence d’un réseau mondial en libre accès, internet.

    Nous assistons à une remise en cause fondamentale des modalités de la transmission. Nous sommes au tout début d’une évolution qui bouleversera l’enseignement.

    • chevron_right

      Mathias Poujol-Rost ✅ · Tuesday, 16 April, 2019 - 10:36

      Contact publication

    France 2 travestit une manif d'enseignants - Par Simon Mauvieux | Arrêt sur images