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      Pollution : l’eau des villes et l’eau des champs

      Armand Paquereau · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 11 January, 2023 - 03:48 · 5 minutes

    La guerre des nitrates

    Depuis une trentaine d’années, elle alimente encore les chroniques malgré les preuves scientifiques de leur absence de toxicité. Les nutritionnistes ne proposent-ils pas de consommer des légumes, lesquels peuvent pour certains contenir cent fois plus de nitrates par kilo que le litre d’eau du robinet.

    Même si des études sérieuses amènent à constater les effets bénéfiques des nitrates sur l’inflammation, leurs capacités immunitaires et leurs implications dans la protection cardiovasculaire, la volonté des pouvoirs publics est de les traquer, comme la récente décision du gouvernement des Pays-Bas qui menacent de fermeture 500 à 600 fermes pour limiter les taux d’azote. L’agriculture est toujours présentée comme la responsable majeure de la pollution des eaux.

    D’où vient la pollution de l’eau ?

    Lassés par de tels illogismes quelques agriculteurs de la Coordination Rurale ont procédé, en présence d’un huissier le 24 novembre 2021 à des prélèvements d’eau aux exutoires (1) de trois stations d’épuration de villes moyennes en Charente.

    De même, le 28 février 2022 ils ont prélevé l’eau des exutoires de deux retenues collinaires du sud Charente, uniquement alimentées par le ruissellement des champs environnants.

    Ces analyses confiées le jour même du prélèvement à un laboratoire nantais accrédité COFRAC, ont recherché 120 produits chimiques ou biologiques potentiellement présents dans l’eau.

    Ces analyses ont trouvé 36 occurrences positives supérieures ou égales à la LQ ( limite minimum quantifiable pour chaque produit ) pour les échantillons citadins dont 11 sont communes avec les eaux agricoles dont on peut voir la comparaison des concentrations dans le tableau ci-dessous.

    Légende : < : inférieur au nveau de détection ; µg : millionième de gramme ; Mg : millième de gramme
    Produits Unité de mesure Station Angoulême Station Cognac Station Barbezieux Retenue collinaire 16320 Retenue collinaire 16190
    Nitrates (NO3) Mg/litre 2 5,6 14 22 <0,5
    Azote ammoniacal Mg/litre 2,3 1,1 0,5 0,034 0,017
    Azote Kjeldahl Mg/litre 5,3 3,5 2 0,5 0,8
    Phosphates Mg/litre 1,06 1,95 5,3 <0,020 0,096
    Phosphore total Mg/litre 1,3 0,94 1,7 0,048 0,044
    Glyphosate µg/litre 1 0,38 0,44 0,091 0,028
    AMPA µg/litre 3,4 2,1 2,5 <0,010 0,015
    N Acétyl AMPA µg/litre 0,6 0,62 0,21 <0,020 <0,020
    Fipronil µg/litre 0,028 0,032 0,029 <0,005 <0,005
    Diclofénac µg/litre 2,3 2,1 2 0,034 <0,010
    Caféine µg/litre <0,050 <0,050 <0,050 0,05 <0,050
    Demande biologique en oxygène Mg/litre 17 3,7 2 3,3 3,7
    Demande chimique en oxygène Mg/litre 71 41 20 19 19
    Oxygène dissous Mg/litre 7 7,6 8,4 12,8 12,7
    Matières en suspension Mg/litre 9 9 4 3,2 8,4
    E.Coli Nbre pour 100 Millilitres Nb/100ml 145 880 210 060 58 240 <38 <38
    Fosétyl µg/litre 0,02 <0,02 <0,010 <0,010 <0,010
    Plomb µg/litre 0,6 0,6 0,5 <0,4 <04
    Acétone µg/litre 33 48 33 <200 <200
    Acide fénofibrique µg/litre 2,5 0,55 0,37 <0,010 <0,010
    Acide Niflumique µg/litre 0,24 0,28 0,098 <0,010 <0,010
    Atenolol µg/litre 0,5 0,081 0,94 <0,050 <0,050
    Bezafibrate µg/litre 0,082 0,1 0,033 <0,010 <0,010
    Carbamazépine µg/litre 0,88 0,97 2,1 <0,010 <0,010
    Epoxycarbamazépine µg/litre 0,091 0,13 0,2 <0,010 <0,010
    Furosémide µg/litre 5,2 5 5,8 <0,010 <0,010
    Gemfibrosil µg/litre 0,2 0,11 <0,50 <0,050 <0,050
    Hydrochlorothiazide µg/litre 3,2 3 2,7 <0,020 <0,020
    Ketoprofen µg/litre 0,26 0,18 0,17 <0,050 <0,050
    Losartan µg/litre 0,46 0,09 0,18 <0,020 <0,020
    Metoprolol µg/litre 0,083 0,13 0,53 <0,020 <0,020
    Oxazepan µg/litre 4 4,8 4,5 <0,020 <0,020
    Rampril µg/litre 0,062 0,031 <0,02 <0,020 <0,020
    Sulfaméthoxzlole µg/litre 0,5 0,21 0,31 <0,020 <0,020
    Hydrazide maléique µg/litre 0,12 <0,050 <0,050 <0,050 <0,050
    cadmium µg/litre <0,02 0,03 0,03 <0,02 <0,02

    Entre les extrêmes citadins et agricoles, on constate que les eaux agricoles contiennent 36 fois moins de glyphosate et 227 fois moins d’AMPA (produit de désagrégation du glyphosate et des lessives), que les eaux citadines pour lesquelles les concentrations de tous les produits sont supérieures aux eaux agricoles, sauf pour les nitrates dont la date de prélèvement correspondait à une pluie sur un récent épandage sur une céréale du bassin versant, mais dont la concentration est plus de moitié inférieure aux 50 mg légaux.

    En ce qui concerne les Eschérichia Coli, les eaux citadines en contiennent au moins 5526 fois plus, les eaux agricoles étant en dessous de la LQ !

    Pour des raisons sanitaires les normes imposent aux agriculteurs des contraintes de stockage et d’épandage des effluents agricoles quand personne ne s’inquiète des rejets citadins autrement dangereux !

    Il faut constater que la réglementation impose aux agriculteurs des bandes enherbées au bord des ruisseaux pour limiter le ruissellement des nitrates dans l’eau des rivières. Pendant ce temps, rien n’est fait pour traiter les eaux pluviales des villes qui se déversent directement dans les cours d’eau, lessivant les excréments des animaux domestiques, les crachats des passants et les fuites des carters des voitures sur les surfaces bitumées imperméables.

    Rejet polluant dans la Touvre, 13 07 2005 Photo Armand Paquereau

    Pour les occurrences relevées uniquement dans les eaux citadines, elles concernent des métaux lourds et majoritairement des médicaments.

    Les chambres d’agriculture doivent prendre modèle sur cette initiative afin de faire éclater la vérité sur la pseudo-pollution agricole et faire cesser le dénigrement de l’agriculture pour le bien commun et l’intérêt général.

    Interrogations sur la pollution de l’air

    Outre la pollution de l’eau, de très nombreux communicants n’hésitent pas à attribuer la pollution de l’air à l’agriculture.

    Pour les pics de pollution qui se concentrent périodiquement au-dessus des villes, cette association écologiste explique très techniquement :

    « Pour résumer, il y a une convergence de polluants qui, en l’absence de vent et de pluie, se combine avec le rejet d’ammoniac issu de l’agriculture ».

    Reconnaître explicitement qu’en l’absence de vent, des polluants ruraux se concentrent sur les villes relève pour le moins d’un arbitraire aveugle et déterminé.

    Par exemple, lors des pics de pollution du 30 novembre au 17 décembre 2016 il n’y avait aucun épandage azoté en agriculture à cette période de l’année.

    Rétablir la vérité

    Il est nécessaire de rappeler que l’utilisation de l’azote en agriculture a accompagné et permis l’accroissement de la population mondiale en participant à la réduction de la famine et de la malnutrition.

    Persister à accuser l’agriculture de polluer et prendre des mesures comme la limitation des nitrates, alors qu’il est prouvé que ces derniers ne sont pas toxiques mais bénéfiques, est une faute gravissime que les générations futures ne nous pardonneront pas.

    Pire est de masquer à l’opinion les vraies sources de pollution, comme le démontrent les analyses précitées, en ne prenant aucune mesure efficace pour les limiter et laisser les effluents des villes s’écouler dans les rivières. C’est discriminatoire et criminel.

    1. Exutoire, endroit de sortie où l’eau des stations d’épuration rejoint le milieu naturel.

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      Renouvellement du glyphosate : chaos au niveau européen

      André Heitz · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 13 December, 2022 - 03:30 · 7 minutes

    Les États membres ne s’étant pas accordés, il est revenu à la Commission européenne de prolonger par un règlement d’exécution l’autorisation du glyphosate pour un an. Des eurodéputés français se sont illustrés par des commentaires étonnants.

    Rappels des faits

    L’autorisation en cours de la matière active glyphosate arrivait à échéance le 15 décembre 2022. L’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (EFSA) ayant annoncé qu’elle ne pourrait pas conclure sur le dossier de renouvellement avant juillet 2023, la Commission européenne a proposé aux États membres – conformément aux usages et au bon sens – de prolonger l’autorisation d’un an.

    Comme nous l’avons rapporté dans « Renouvellement de l’autorisation du glyphosate : le barnum à Bruxelles », la double majorité (des États et des populations) n’a pas été trouvée le 14 octobre 2021 en raison de trois votes contre (Croatie, Luxembourg et Malte) et trois abstentions qui ont le même effet qu’un vote contre (Allemagne, France et Slovénie).

    Rien ne change en appel

    La proposition a été soumise à un nouveau vote en appel le 15 novembre 2022. À situation inchangée, résultat identique…

    Contacté par EURACTIV , un porte-parole de la Commission a exprimé son « regret » que « malgré une majorité d’États membres soutenant la proposition de la Commission [21 sur 27] , la majorité qualifiée nécessaire n’ait malheureusement pas été atteinte ».

    Et d’ajouter que « la Commission a maintenant l’obligation légale de prendre une décision avant la date limite d’expiration de mi-décembre » , en confirmant qu’elle allait adopter le règlement d’exécution de prolongation. Notons que des observateurs des événements à Bruxelles ont eu des doutes…

    Six États membres – dont la France – nous aurons donc offert le spectacle affligeant de gouvernements refusant d’endosser, pour des motifs d’opportunité politicienne, une décision nécessaire.

    « Toutes les autres substances actives phytopharmaceutiques qui ont eu besoin de ce type d’extension administrative temporaire dans l’UE ont obtenu cette extension » , a déclaré le consortium Glyphosate Renewal Group dans un communiqué .

    Et « faire tomber » le glyphosate en rendant caduque une procédure de renouvellement en cours, fondamentalement par la faute des autorités, serait un désastre pour le fonctionnement et l’image de l’Union européenne.

    Le porte-parole des eurodéputés verts comprend…

    Martin Häusling , eurodéputé allemand et porte-parole du groupe des Verts/ALE, a déclaré :

    « Le glyphosate sera prolongé d’une année supplémentaire. C’était déjà une certitude avant le vote du comité d’appel d’aujourd’hui. La prolongation formelle d’un an est malheureusement nécessaire pour permettre à l’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (EFSA) de finaliser son avis sur la sécurité du glyphosate (peer review).

    J’espère que l’EFSA mettra ce temps à profit pour examiner tous les points critiques, par exemple si le glyphosate est cancérigène et si les effets du glyphosate sur l’environnement ne sont pas beaucoup plus importants qu’on ne le pense.

    Même si c’est difficile, nous donnons ce temps à l’EFSA pour un examen approfondi. Cette prolongation d’un an est, nous l’espérons, le début de la fin de l’autorisation du glyphosate. »

    … mais des eurodéputés français…

    Laissons M. Martin Häusling à ses rêveries. Des eurodéputés français se sont au contraire exprimés avec véhémence.

    Benoît Biteau – qui se présente comme paysan bio et agronome sur Twitter – a été astucieux dans un tweet du 15 novembre 2022 :

    « Va-t-on réautoriser le glyphosate [dans l’Union européenne] ? Les États devaient donner leur avis mais préfèrent se cacher derrière la décision de [la Commission européenne] .

    Avec [les Verts/ALE] , on assume : le glyphosate doit sortir de notre environnement et nous ferons tout pour qu’il ne soit pas réautorisé. »

    C’est une déclaration martiale qui reste donc au niveau des généralités. Mais compte tenu des éléments de l’évaluation à notre disposition c’est en quelque sorte « le glyphosate doit gicler, car tel est notre bon plaisir ». Pour M. Martin Häusling, au contraire, la fin de l’autorisation du glyphosate doit (ou devrait) résulter des éléments de l’évaluation finale.

    Éric Andrieu, du Groupe des socialistes et démocrates, et grand contempteur des pesticides (de synthèse, cela va de soi) et des lobbies de l’agrochimie, s’est exprimé à plusieurs reprises sur Twitter et dans la presse régionale méridionale.

    L’Indépendant a repris en titre une déclaration qui paraît curieuse le 16 novembre 2022 :

    « Le glyphosate autorisé un an de plus en Europe : le député européen PS Eric Andrieu dénonce un « manque de courage, pour ne pas dire de lâcheté » ».

    Cela donne dans le texte :

    « Je suis très déçu du manque de courage, pour ne pas dire de lâcheté, de certains États membres et de la Commission européenne qui, par leur manque de considération pour la santé humaine et la biodiversité prolongent l’autorisation du Glyphosate pour une année encore […] Le manque de sérieux des quatre États rapporteurs dont fait partie la France est aussi à dénoncer […] Il est inacceptable que la Commission européenne ait pu renouveler cette substance potentiellement cancérigène, comme il est inacceptable que depuis quatre ans, le travail d’études sur le Glyphosate ne soit pas terminé. Le principe de précaution et l’intérêt général sont à nouveau les victimes principales des lobbies de l’agrochimie, de la lâcheté de certains États membres et, à travers elle, de la Commission européenne. »

    La déclaration est aussi incohérente. À l’heure où j’écris, le renouvellement n’est pas encore acté. Et à quoi bon un « travail d’études » si un principe de précaution mal interprété doit prévaloir selon un Éric Andrieu qui aurait été ravi par une décision scélérate.

    Mais pourquoi ce malencontreux « manque […] de lâcheté » ? Dans Presse Agence – la lettre économique et politique de PACA , M. Éric Andrieu fait erreur sur le mécanisme des votes et la signification pratique de l’abstention :

    « Alors certes, les États membres de l’Union Européenne n’ont pas soutenu la proposition de la Commission européenne de renouveler pour un an l’autorisation du glyphosate, mais ils ne l’ont pas non plus rejetée ce qui a permis à la Commission européenne de faire plaisir aux industries agrochimiques ! […] Il faut arrêter l’hypocrisie !!! De nombreux gouvernements nationaux avaient donné comme consigne de s’abstenir dans le vote pour le renouvellement du Glyphosate. S’abstenir ou voter en faveur du Glyphosate donnait finalement le même résultat. Dès lors, honte aux États qui se sont cachés derrière l’abstention ; faire semblant de défendre l’environnement, la biodiversité et la santé humaine ne suffit pas. »

    Fin de la blague (en attendant la prochaine)

    La Commission a tenu parole. Son règlement d’exécution a été adopté le 2 décembre 2022 et publié le 5 décembre.

    Il faudra donc patienter quelques mois avant de voir, sans doute, une nouvelle représentation du barnum.

    Pour rappel, en 2016-2017, les États membres s’étant aussi trouvés en situation de pat, le président luxembourgeois de la Commission Jean-Claude Juncker s’était refusé à adopter le règlement d’exécution qui prévoyait initialement une réautorisation pour 15 ans (la durée habituelle) et avait entraîné les États membres dans des enchères descendantes. Celles-ci se sont arrêtées à cinq ans par la grâce d’un revirement allemand, le ministre de l’Agriculture Christian Schmidt ayant voté pour au lieu de s’abstenir, pour en quelque sorte se venger de Mme Barbara Hendricks.

    En guise de post scriptum : quo vadis Francia ?

    Il est assez plaisant – euphémisme – de voir la Commission européenne accusée de faire plaisir aux « industries agrochimiques » ou de sacrifier l’intérêt général au profit des « lobbies de l’agrochimie ». C’est un thème récurrent, alors même que Farm to Fork

    La proposition de règlement sur l’utilisation durable des pesticides – avec comme objectif principal une réduction de 50 % à l’horizon 2030 – suscite de vives inquiétudes pour nombre d’États membres. Euractiv a rapporté à l’issue du Conseil « agriculture et pêche » du 26 septembre 2022 :

    « « Par égard pour la qualité de la législation, je demande à la Commission européenne de procéder à une nouvelle évaluation d’impact fiable, en tenant compte des répercussions de la guerre en Ukraine, et de réexaminer les solutions juridiques proposées « , a déclaré le secrétaire d’État polonais, Ryszard Bartosik, au cours de la réunion. Il a également souligné que l’accent devrait être mis sur « la garantie de la sécurité alimentaire des citoyens de l’UE et la préservation de la souveraineté alimentaire « du bloc. »

    Ils sont maintenant 18 à demander cette étude, l’ Allemagne s’y opposant et soutenant les propositions de la Commission… La France ne figure pas parmi les dix-huit…

    Nous avons donc un ministre, à Paris, dont l’intitulé du poste s’étend – innovation – à la « souveraineté alimentaire », un ministre qui, à Bruxelles, ne défend pas la souveraineté alimentaire…

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      Glyphosate: Montchalin justifie son vote contre l'interdiction en 2018, la gauche s'étouffe

      news.movim.eu / HuffingtonPost · Tuesday, 24 May, 2022 - 10:11 · 4 minutes

    Montchalin justifie son vote contre l'interdiction du glyphosate en 2018, la gauche s'étouffe (Amélie de Montchalin le 23 mai 2022 par REUTERS/Christian Hartmann) Montchalin justifie son vote contre l'interdiction du glyphosate en 2018, la gauche s'étouffe (Amélie de Montchalin le 23 mai 2022 par REUTERS/Christian Hartmann)

    ENVIRONNEMENT - Elle “assume” et ne regrette pas son choix. Amélie de Montchalin , ancienne ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, et désormais ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires , était au micro de France Inter ce mardi 24 mai au matin.

    À cette occasion elle était interrogée sur son choix, en 2018, de voter contre un amendement qui visait à interdire le glyphosate , classé comme “cancérogène probable” par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) en 2021. Une décision qu’elle dit “assumer” aujourd’hui, car elle l’a fait pour “ne laisser personne sans solution”.

    “Sur le glyphosate, j’assume. C’est précisément la méthode que nous voulons pousser: on agit en Européen, on agit pour ne laisser personne sans solution. Oui, on fait de la recherche, on cherche des alternatives, on fait des investissements. Le plan France 2030, il y a des investissements en milliards pour qu’on ait des nouvelles techniques, pratiques, solutions, pour que nous puissions sortir des pesticides et autres”, a justifié la ministre de la Transition écologique.

    Elle poursuit ainsi:

    “Je ne regrette pas une chose: d’avoir considéré que ce sujet était européen. À l’époque, souvenez-vous, la France s’était battue pour que le glyphosate soit au maximum autorisé pour cinq ans - ça va arriver en 2023 - plutôt que pour dix ans. Oui, en tant que député, j’avais fait un choix tout à fait assumé: nous ne pouvons pas faire cavalier seul pour n’importe quel domaine que ce soit, sinon c’est notre économie, ce sont nos agriculteurs, que nous laissons dans la panade.

    Amélie de Montchalin précise par ailleurs que “pendant des années, on a imposé à nos agriculteurs des normes qui n’étaient pas imposées ailleurs. Le résultat: on a importé des produits qui n’appliquaient pas les normes, les Français consommaient des choses qui contenaient des produits qui n’étaient potentiellement pas autorisés en France”.

    La gauche s’étrangle

    Des explications qui sont loin de convaincre la gauche qui estime que les arguments de la ministre ne sont pas fondés et que les progrès en la matière ne sont pas visibles.

    “Montchalin ment. L’interdiction du glyphosate, ça devait être tout de suite. Macron a cédé pour dans 3 ans, puis pour dans 5 ans. Et dans 5 ans, juste un réexamen de la situation. Macron ne pèse rien en Europe”, dénonce Jean-Luc Mélenchon, candidat Premier ministre Nupes.

    “La ministre de l’Écologie qui assume son vote contre l’interdiction du Glyphosate. On est bien là”, tweete la candidate Nupes aux législatives à Paris Sandrine Rousseau.

    “Mon amendement sur le glyphosate, contre lequel vous avez voté en 2018, comportait toutes les dérogations nécessaires pour ne laisser aucun agriculteur sans solution”, contre le député écolo Matthieu Orphelin.

    “Pardon Amélie de Montchalin, mais le bilan de votre méthode: c’est l’inaction sur le climat comme sur le glyphosate. On consomme autant de glyphosate qu’au début du quinquennat précédent”, répond l’écologiste Samuel Leré, graphique sur l’évolution des quantités de glyphosate vendues à l’appui.

    En 2018, 11 députés LREM avaient voté pour et 34 contre sur un total de 35 voix pour et 42 contre. La présence d’Amélie de Montchalin au ministère de la Transition écologique n’est pas la seule à faire grincer des dents. Marc Fesneau , nouveau ministre de l’Agriculture, a, lui aussi, voté en 2018 contre l’interdiction du glyphosate. C’est également lui qui, dans un article de Challenges en 2020, avait traité les écolos et les vegan de “fous dangereux”.

    À voir également sur Le HuffPost: Le combat de Tran To Nga, victime de l’agent orange, face à l’industrie agrochimique

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      Le glyphosate sera-il remplacé par un produit miracle ?

      Christophe de Brouwer · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 2 July, 2020 - 13:50 · 8 minutes

    Par Christophe de Brouwer.

    Cette question me fut posée. Je vais tenter d’y apporter une réponse. Mais avant cela, quelques généralités sur les pesticides de façon à cadrer la réponse.

    Les pesticides, désignés parfois produits phytosanitaires ou biocides sont une classe de molécules extrêmement vaste et variée.

    Ces termes visent indifféremment les insecticides, les herbicides, les fongicides, les molluscicides, les rodenticides, etc. En matière de toxicité, ils peuvent être très différents les uns des autres.

    Au Moyen-Âge, on avait un produit pour tout, les sels d’arsenic. Au XVIIIe siècle ou peut-être avant, on utilisait les feuilles de tabac comme insecticide et notamment pour lutter contre les punaises. Mais c’est bien au XIXe siècle qu’a débuté l’utilisation de pesticides à grande échelle.

    Outre la nicotine et l’arsenic, jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale, on connaissait le pyrèthre (extrait du chrysanthème) et la roténone (extrait de racines de légumineuses).

    Les deux premiers composés sont des toxiques dangereux pour l’Homme, les deux derniers beaucoup moins.

    Ce n’est qu’en 1939 que Müeller redécouvrit le DDT , un organo-chloré. Il recevra le prix Nobel à juste titre, ce produit ayant sauvé des dizaines de millions de vies en éradiquant la malaria dans certains pays comme les USA et l’Inde, ou en tout cas les formes pernicieuses et mortelles de la malaria (le tristement célèbre falciparum ).

    À peu près au même moment sont découverts les organo-phosphorés qui sont des neuro-toxiques extrêmement puissants dans leur formulation d’armes chimiques, évidemment beaucoup moins dans les formulations actuelles que l’on trouve notamment dans nos supermarchés. Leur grand intérêt est d’être rapidement biodégradable, alors que les organo-chlorés sont persistants.

    Depuis, les produits phytosanitaires ont connu une expansion en quantité et en diversité tout à fait remarquable, dans leurs usages domestiques, agricoles ou industriels.

    Il est clair que leurs avantages ne doivent pas cacher leur toxicité humaine.

    Les pesticides visent des voies métaboliques cellulaires essentielles du vivant, comme la synthèse d’acides aminés et de protéines, d’acides nucléiques, des mécanismes cellulaires tels que ceux liés aux cytochromes, la division cellulaire. En théorie, le mieux est qu’ils agissent sur des cibles spécifiques qui ne se retrouvent pas chez les mammifères. Critère que rencontrent des herbicides comme l’atrazine, un poison de la photosynthèse ou le glyphosate , un poison de la synthèse de molécules essentielles par la voie shikimique, spécifique aux plantes.

    À l’inverse, la grande majorité des insecticides sont des neurotoxiques qui possèdent une activité variable chez l’humain (organochloré et phosphoré, carbamate, nicotine, pyréthrinoïdes…).

    Si c’était aussi simple, nous n’en serions pas aux polémiques actuelles. Mais la toxicologie s’enrichit de multiples voies d’action. Et notamment parmi celles-ci, depuis les années 1980, la notion toxicologique de disrupteurs endocriniens s’est imposé avec force.

    On se rappelle les accusations à l’encontre du bisphénol A , un plastifiant que l’on retrouvait dans les biberons en plastique et certains jouets ; interdit depuis, il n’était d’ailleurs pas le seul.

    Quasiment tous les pesticides sont des disrupteurs endocriniens plus ou moins efficaces. Mais ce ne sont pas les seuls, loin de là, ils sont en fait très minoritaires à ce niveau-là.

    Les disrupteurs endocriniens ont des effets complexes chez l’Homme que je vais résumer en :

    1. atteinte du système reproducteur (liés aux hormones)
    2. mutagène/cancérigène de type promoteur

    Entendons-nous bien, nous sommes tous exposés en permanence à des disrupteurs endocriniens et nous ne sommes pas tous devenus stériles et nous ne développons pas tous un cancer. Bien au contraire, notre espérance de vie a toujours tendance à augmenter, comme le nombre d’habitants sur cette planète. Remettons correctement les choses en perspective.

    En Europe nous avons connu dernièrement l’interdiction de divers pesticides d’origine soit naturelle, soit de synthèse, comme la roténone (molécule naturelle issue d’une légumineuse), ou le paraquat (qui était fort utilisé dans la culture des pommes de terre), ou le malathion/fenthion, deux organo-phosphorés beaucoup utilisés par exemple pour la conservation des grains en silo, et cela pose un problème aujourd’hui.

    Actuellement, nous assistons aux hésitations concernant le glyphosate, (l’ancien Round-Up®, Weedol®…), le produit phytosanitaire le plus utilisé au monde. Stricto sensu, il s’agit d’un composé organo-phosphoré qui ressemble à la glycine, un acide aminé essentiel à la vie, d’où son nom. Mais il ne possède aucune des propriétés toxiques des organo-phosphorés. Sa toxicité personnelle apparaissait en fait assez faible et de ce point de vue, son utilisation raisonnable était un bon compromis.

    En 2015, le Centre International de Recherche sur le Cancer, un organisme dépendant de l’OMS, basé à Lyon, a modifié son classement en 2A, c’est-à-dire comme cancérigène probable . En général, ce classement est acquis lorsque tant l’expérimentation animale que l’observation humaine sont concordantes et montrent un effet cancérigène net, avec cependant de façon marginale une ou quelques rares études, répondant évidemment à des critères de qualité, hésitantes et/ou négatives. L’examen de la monographie du glyphosate qui fut publiée lors du reclassement n’apparaît pas conforme à ce schéma général.

    Je ne vais pas ici entrer dans la polémique sur cette molécule, chacun peut en examiner les éléments contradictoires par lui-même.

    Par contre, ce qui était depuis longtemps en cause n’était pas tant le glyphosate en tant que tel, mais son adjuvant, un surfactant, le POEA, permettant à la molécule de pénétrer dans la plante, et qui s’est révélé être un disrupteur endocrinien franc, contrairement au glyphosate, qui apparaît peu actif de ce point de vue-là.

    On ne fait d’ailleurs pas assez attention aux adjuvants, comme par exemple le piperonyl butoxide qui accompagne souvent les pyréthrinoïdes, des insecticides, afin d’en ralentir le métabolisme par l’organisme vivant, sans discrimination !

    Revenons enfin au round-up® nouvelle formule. Il n’est pas le seul dans cette formulation. Son composé actif est aujourd’hui l’acide pélargonique, un extrait de géranium qui agit comme défoliant par dessication. Il aurait une toxicité aquatique plus prononcée que son prédécesseur. C’est une molécule naturelle, ce qui ne présage pas de sa toxicité humaine.

    Il est moins efficace que le glyphosate, il n’atteint que les feuilles (leur enlève la cuticule protectrice par effet corrosif) et non les racines, ce qui pourrait conduire à une multiplication de son application.

    Nous savons que les plantes se défendent en utilisant tout un arsenal de stratégies, le cas échéant par la fabrication de molécules parfois extrêmement toxiques pour l’Homme (la belladone ou la ricine par exemple), dont nous essayons dans certains cas de tirer profit (comme avec les antibiotiques).

    La question qui se pose ici est de savoir si le composé utilisé en remplacement du glyphosate, l’acide pelargonique, est toxique pour l’Homme.

    On sait qu’il peut être irritant et provoquer des brûlures externes, de l’appareil respiratoire ou digestif, c’est d’ailleurs son mode d’action. On ne s’étonnera donc pas de le trouver impliqué dans certains problèmes inflammatoires, ce qui est assez banal pour toute une série de produits. On trouve d’ailleurs un de ses composés (PAVA) dans des sprays récents d’autodéfense.

    En fait, c’est un nom compliqué pour un acide gras très simple, l’acide nonanoïque comportant 9 carbones en ligne. Sa production industrielle ne comporte aucune difficulté. On l’utilise depuis longtemps comme cosmétique, aromatique, plastifiant, dans des laques, etc. Mais c’est également une molécule qui serait active dans le traitement de crises convulsives.

    Si une recherche toxicologique dans la littérature médicale ( Pubmed et Sc ience direct ) revient quasi bredouille avec les termes « pelargonium acid », par contre l’utilisation des termes « nonanoic acid » (son équivalent) ou « medium chain fatty acid » (plus large) est un peu plus intéressante.

    Mais ce qui domine cette recherche bibliographique, c’est finalement la pauvreté des données : il en manque. Les données toxicologiques de type CMR (cancer, mutagène, reproduction) sont manifestement insuffisantes, même si les rares à disposition tendent plutôt à rassurer, de même concernant un éventuel effet sur le système nerveux central.

    D’une certaine manière, la conclusion est triviale et… non-conclusive. Nous sommes devant une de ces très nombreuses molécules utilisées depuis longtemps, dont les données toxicologiques bien qu’apparemment rassurantes restent disparates et parcellaires.

    Si vous me posez la question d’une amélioration sanitaire dans l’usage des pesticides grâce au remplacement du glyphosate par un acide gras à chaîne moyenne non ramifiée, en toute sincérité, je ne pourrais répondre : je ne suis pas convaincu.

    C’est cela qui est inquiétant dans le management sociétal de cette question, qui est réellement importante pour notre agriculture et nos agriculteurs. La science ne prime plus face à l’instrumentalisation de l’émotion sociale et complique toute décision objective.

    Article initialement publié en juillet 2019.

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      Contact publication

      CNT 31 · Thursday, 30 January, 2020 - 18:21

    Emmanuel Macron renonce à sa promesse d’interdire le glyphosate en 2021 https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/01/25/le-president-renonce-a-sa-promesse-d-interdire-le-glyphosate-en-2021_5414363_823448.html

    > le chef de l’État fait un geste en direction de la FNSEA

    https://mobile.twitter.com/OUPSI/status/1222418729335693317

    > J'aurais préféré qu'il fasse un geste en direction de la planète, mais bon, c'est sûr que çà ne lui rapporterait ni fric ni reconnaissance de Monsanto.

    https://framasphere.org/uploads/images/b2890c3a909409311f09.jpg

    Pour information, des camarades ont fait une proposition pour une autre agriculture :
    http://www.cnt-f.org/ftte/spip.php?article4

    #glyphosateFrance #glyphosateMacron #glyphosate #pollution #agriculture #fr