• Co chevron_right

      Bilan économique : la France est sur une mauvaise pente

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 31 January, 2023 - 04:00 · 9 minutes

    On se souvient de la grave crise grecque en 2009. L’endettement du pays était devenu considérable et l’agence de notation Fitch avait abaissé sa note en dessous de A. C’était la première fois qu’une telle dégradation survenait dans un pays européen.

    Il s’ensuivit une panique en Europe. La zone euro fut jetée dans la tourmente et le FMI, la BCE et la Commission européenne durent intervenir à trois reprises. On imposa à la Grèce des mesures drastiques qui conduisirent au pouvoir en 2015 le parti anti austérité d’Alexis Tsipras . Après six années de crise le PIB se trouva réduit d’un quart et le taux de chômage monta jusqu’à 25 %. La Grèce se remit très difficilement de cette crise : il y eut plusieurs plans de sauvetage et le bilan social fut catastrophique.

    Il semble que la France se trouve sur la même pente que celle qui a conduit la Grèce à la faillite , avec une crise ayant duré de 2010 à 2015. Il avait même été envisagé sa sortie de l’Europe et de la zone euro.

    Pour l’instant la notation de l’agence Fitch classe la France en AA , ce qui est tout à fait honorable, mais avec la mention « perspective négative » ; sachant que la première catégorie comprend AAA, puis AA, et ensuite A, la France a tout simplement reculé d’un cran. Vient ensuite la catégorie des B avec à nouveau trois degrés différents ; puis enfin la catégorie F.

    Pourquoi craindre que le pays se trouve engagé sur la même pente dangereuse que la Grèce ?

    Il convient de distinguer d’un côté les éléments qui ont un caractère causal, c’est-à-dire de nature à expliquer la dégradation de l’économie du pays, et de l’autre ceux qui en sont la conséquence mais ne constituent pas moins des freins au redressement d’une économie mal engagée.

    Pour marquer les étapes de la dégradation de l’économie française, les points de repère seront la Suisse, un pays exemplaire à l’économie très dynamique et parfaitement équilibrée, ainsi que la moyenne de l’OCDE. Les données statistiques seront celles fournies par la Banque mondiale, pour l’année 2021, afin d’avoir des séries homogènes.

    Les éléments à caractère causal

    Nous retiendrons essentiellement les critères suivants :

    • Les dépenses en Recherche et Développement
    • Les taux d’industrialisation
    • Les taux de population active
    • Le solde de la balance commerciale
    • La durée de la vie active

    Les taux de R&D des pays

    Des dépenses de Recherche et Développement importantes caractérisent les pays développés qui investissent pour préparer leur avenir. Elles permettent de rester dans le peloton de tête grâce à l’innovation.

    Dépenses de R&D en pourcentage du PIB

    • Suisse….. 3,15 %
    • OCDE….. 2,96 %
    • France…. 2,35 %
    • Grèce…… 1,50 %

    Le taux d’industrialisation

    L’industrie est un élément clé pour créer de la richesse dans un pays depuis la première révolution industrielle. Des trois secteurs de l’économie , à savoir l’agriculture, l’industrie et les services (selon la classification de Colin Clark) c’est celui où le progrès technique augmente le plus vite. Le secteur secondaire est un secteur à forte valeur ajoutée et fournit aux pays l’essentiel de leurs exportations. Les taux d’industrialisation de la France et de la Grèce sont très faibles, ces deux pays sont les plus désindustrialisés de tous les pays européens.

    Taux d’industrialisation en pourcentage du PIB, y compris la construction

    • Suisse….. 24,6 %
    • OCDE….. 22,3 %
    • France…. 16,7 %
    • Grèce…… 15,3 %

    Le taux de population active

    On entend par taux de population active la proportion entre les personnes en emploi ainsi que les chômeurs, et la population totale.

    Taux de population active en pourcentage de la population

    • Suisse…… 57,0 %
    • OCDE…… 49,2 %
    • France….. 46,1 %
    • Grèce……. 43,5 %

    Le solde de la balance commerciale

    Les exportations réalisées par un pays présentent un double avantage : elles accroissent les marchés des entreprises locales et fournissent les devises permettant de financer les importations. Leur volume dépend de la nature et de la qualité de la production du pays et du dynamisme de ses entreprises.

    Solde de la balance commerciale en pourcentage du PIB

    • Suisse……………………  119 %
    • Union européenne….     0 %
    • France…………………… – 1,9 %
    • Grèce…………………….. – 7,7 %

    Durée de la vie active

    La durée de la vie active dépend de l’âge d’entrée dans la vie professionnelle et de l’âge de cessation d’activité professionnelle déterminé en fonction de l’âge légal de départ à la retraite.

    Durée de la vie active

    • Suisse………………….. 42,6 ans
    • Union européenne… 35,6 ans
    • France………………….. 35,0 ans
    • Grèce……………………. 33,2 ans

    Tous les graphiques ci-dessus montrent que la France se situe systématiquement à mi-chemin entre les moyennes OCDE et la Grèce. On aurait préféré qu’elle se place à gauche, entre les moyennes OCDE et la Suisse.

    Les éléments induits à caractère aggravant

    Les dépenses publiques

    On constate toujours dans les pays à l’économie en difficulté que les dépenses publiques sont importantes en regard du PIB. Les besoins de la population sont là et il faut les satisfaire : éducation, santé, appareil judiciaire, entretien et création des infrastructures, sécurité… et les PIB n’étant pas à la hauteur de toutes ces exigences, le taux des dépenses publiques est élevé.

    Dépenses publiques en pourcentage du PIB

    • Suisse…… 20,1 %
    • OCDE…… 34,9 %
    • France….. 51,9 %
    • Grèce……. 58,5 %

    Les prélèvements obligatoires

    Pour couvrir ses dépenses l’État procède à ce que les économistes appellent des « prélèvements obligatoires ». Ceux-ci sont de plus en plus importants à mesure qu’augmentent les dépenses publiques.

    Prélèvements obligatoires en pourcentage du PIB

    • Suisse…… 28,5 %
    • OCDE…… 34,2 %
    • France….. 47,6 %
    • Grèce……. 42,3 %

    La France se situe donc déjà au-dessus du niveau de la Grèce.

    Taux de chômage

    La conséquence d’une économie qui fonctionne mal est une proportion élevée de la population au chômage : la France est bien dans ce cas. Selon les estimations du BIT le pays compte 2 252 000 chômeurs ; les catégories A, B et C de Pôle emploi en totalisent un nombre bien plus élevé soit 5 163 000 chômeurs sensés être en recherche active d’emploi. Le taux est bien plus élevé que celui calculé par le BIT.

    Taux de chômage (BIT)

    • Suisse….. 5,3 %
    • OCDE….. 6,3 %
    • France…. 8,1 %
    • Grèce…… 14,8 %

    Endettement du pays

    Dans une économie dysfonctionnelle et donc à la création de richesse insuffisante, les États s’endettent pour boucler leurs budgets annuels. Le coût de la dette les alourdit chaque année un peu plus.

    Endettement du pays en pourcentage du PIB

    • Suisse…… 20,9 %
    • France….. 113,0 %
    • OCDE…… 129,3 %
    • Grèce……. 197,1 %

    Le cas de la France : attention danger !

    Le problème est que lorsqu’un processus de détérioration de l’économie s’installe il s’entretient de lui-même et le pays entre dans un cycle pernicieux. C’est précisément ce qui se produit en France depuis une vingtaine d’années. Tous les ratios se dégradent d’année en année. Les dépenses sociales ne cessent de croître régulièrement, d’où une augmentation constante des dépenses publiques et pour y faire face un accroissement constant des prélèvements obligatoires ; ceux-ci n’étant jamais suffisants, le recours régulier à de l’endettement est nécessaire et ne cesse d’augmenter.

    Les pouvoirs publics sont incapables de rompre ce cercle vicieux. Nous en arrivons au point où ce processus a atteint ses propres limites. Les prélèvements obligatoires étant parvenus à des niveaux insupportables il n’y a plus d’autre solution pour les pouvoirs publics que d’augmenter encore davantage la dette. C’est ce qui se produit dans notre pays : elle est passée de 2380 milliards d’euros à la fin de 2019 à 2916 milliards à la fin de 2022, soit un accroissement de 536 milliards en trois ans.

    Il faut comprendre quelle est l’origine du phénomène, ce que les pouvoirs publics ont été très longs à saisir et sans être certain qu’ils aient véritablement pris conscience du cercle vicieux dans lequel ils se trouvent enfermés.

    L’origine du problème est la grave dégradation du secteur secondaire, le secteur industriel . Les effectifs de l’industrie sont passés de 6,5 millions de personnes à la fin des Trente glorieuses à 2,7 millions aujourd’hui. Le secteur industriel français ne concourt plus que pour 10 % à la formation du PIB (chiffre hors construction), alors que ce taux devrait se situer à 18 % environ. En incluant la construction dans le secteur secondaire, il faut ajouter 5 à 6 points aux précédents ratios.

    Les pouvoirs publics se sont laissés piéger par la thèse d’évolution des trois secteurs de l’économie développée par Jean Fourastié dans son livre Le grand espoir du XX e siècle paru en 1949. Cet économiste a travaillé sur des séries longues et a raisonné nécessairement en termes d’emplois et non de valeur ajoutée. Certes, les effectifs du secteur industriel se réduisent mais en termes de valeur ajoutée il est toujours présent du fait que la valeur ajoutée par employé a fortement progressé. Cela a été mal compris et dans les universités a très vite enseigné qu’une économie moderne n’est plus constituée que par les activités de services. Les sociologues qui ont mal compris Jean Fourastié ont diffusé très vite le concept de « société postindustrielle », lequel s’est installé solidement dans les esprits, jusque chez les dirigeants du pays.

    Pour redresser la situation, il n’y a pas d’autre solution que de procéder au redressement du secteur industriel mais l’environnement n’est guère favorable : guerre en Ukraine, coût très élevé de l’énergie en Europe.

    De plus, en initiant l’ Inflation Reduction Ac t (IRA), le gouvernement de Joe Biden va subventionner les entreprises américaines en faveur de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Dans ce cadre, un budget de 369 milliards de dollars est prévu pour les épauler.

    À Bruxelles, Thierry Breton prépare une riposte : il évoque un plan à hauteur de 2,5 % ou 3 % du PIB de l’Europe des 27.

    Nous n’en sommes pas là : pour l’instant, les entreprises industrielles quittent l’Europe et la France est particulièrement affectée par ce mouvement.

    L’entreprise singapourienne REC Solar qui devait fabriquer en Moselle des panneaux photovoltaïques renonce à son projet pour se tourner vers les États-Unis.

    Le Chinois Quechen qui devait installer une usine à Marseille pour produire de la silice pour les fabricants européens de pneumatiques jette l’éponge .

    Le groupe industriel Safran qui devait créer un nouveau site de production près de Lyon pour les freins carbone destinés à l’aéronautique suspend son projet d’investissement.

    Le secteur industriel français est loin de se redresser et le plan « France 2030 » lancé en octobre 2021 par Emmanuel Macron « pour répondre aux grands défis de notre temps » est un dispositif complètement sous-dimensionné.

    Il serait souhaitable de ne pas en arriver à une situation à la grecque.

    Nombreux sont ceux qui n’ont plus les moyens d’accéder aux soins, des hôpitaux ont dû interrompre momentanément leur activité, les cas d’ infections au virus HIV ont augmenté de 50 % et le paludisme est réapparu en Grèce . Le port du Pirée a été vendu aux Chinois et celui de Thessalonique a été cédé à un consortium. Quatorze aéroports régionaux ont été repris par un groupe allemand. Et selon une étude britannique, depuis le début de la crise le nombre des suicides a doublé .

    • chevron_right

      Grèce : la tragédie qui n’en finit pas

      news.movim.eu / LeVentSeLeve · Sunday, 6 November, 2022 - 12:10 · 11 minutes

    En 2009, la crise de la dette grecque débutait. Depuis, de nombreux plans de « sauvetage » comprenant des « réformes » sous la tutelle de la « Troïka » (FMI, BCE et Commission européenne) se sont succédés. Si les banques ont effectivement été sauvées, le bilan social d’un tel programme est catastrophique. Fortement appauvrie, la Grèce est devenue un Club Med géant où les infrastructures stratégiques ont été privatisées et où les services publics ont été bradés. La population, elle, se résigne ou quitte le pays .

    Le 20 août dernier, la Grèce est sortie de la surveillance économique renforcée de la Commission européenne. Un jour qualifié d’« historique » par le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis, tandis que la Présidente de la Commission Européenne vantait la « résilience » de la Grèce et l’enjoignait à « envisager l’avenir avec confiance ». Le bilan des « réformes » et de ce programme d’« aides » est pourtant peu reluisant, pour ne pas dire catastrophique.

    Une saignée qui aggrave le mal

    Mis en place à la suite de la crise de la dette grecque, commencée en 2009, ce dispositif de surveillance avait pour but de vérifier que les « réformes nécessaires » (comprendre le dépècement de l’État grec) pour diminuer la dette publique étaient bel et bien mises en place. En échange de ces réformes, la Grèce recevait de l’aide financière internationale, notamment de l’Union européenne. L’objectif ? Réduire la dette publique, considérée comme dangereusement élevée. Pourtant, étant donné la chute du PIB, c’est-à-dire de la production de richesses, la dette est aujourd’hui bien plus élevée qu’au début du programme de surveillance : alors que le PIB de 2009 s’élevait à 237 milliards d’euros, il est tombé à 182 milliards en 2021. En conséquence, le niveau de la dette, en % du PIB, se maintient à un niveau toujours bien plus élevé que celui de 2009 : fin 2021, celui-ci était de 193 % du PIB tandis que fin 2009 il était de 127% du PIB.

    Ce bilan catastrophique se lit aussi sur le taux de chômage : celui-ci est passé de 10 % fin 2009 à plus de 13% fin 2021. Ce fléau touche plus particulièrement les jeunes : le taux de chômage des moins de 25 ans dépassait les 36 % en avril 2022 tandis qu’en décembre 2009 il était de 29%. Ce qui entraîne qu’une partie importante de cette jeunesse, surtout la plus diplômée, émigre : entre janvier 2008 et juin 2016, la Banque de Grèce estime que plus de 427.000 grecs ont quitté leur pays alors que la population de la Grèce se situe légèrement en-dessous des 11 millions d’habitants.

    De manière corrélée, le taux de suicide a aussi augmenté : celui-ci est passé de 3,6 pour 100 000 habitants en 2009 à 5,1 en 2019 . Les coupes successives dans le budget de la santé n’y sont sans doute pas étrangères : le budget de la santé était d’environ 4,3% du PIB en 2009 alors qu’en 2020, ce budget se situait à 3,6% du PIB. En tenant en compte de la chute du PIB entre ces deux dates, cela signifie en clair une coupe dans le budget de la santé de 4 milliards d’euros. Soit un peu moins de la moitié des 10 milliards estimés nécessaires pour sauver la Grèce début 2010.

    En plus des coupes sévères dans les pensions des retraités grecques et des coupes dans la fonction publique , une autre des « réformes » demandées était la privatisation d’infrastructures clés du pays. Ainsi, le célèbre port d’Athènes, le Pirée, a été privatisé au profit du groupe chinois de transport maritime Cosco en échange d’une promesse d’investissement qui n’a pour l’heure toujours pas été tenue, provoquant la colère des travailleurs locaux. Cette acquisition par un groupe chinois est aussi teintée d’une cruelle ironie pour l’Union européenne qui ne cesse de répéter son ambition de s’opposer à la Chine.

    Le Pirée n’est pas le seul port à avoir été privatisé. Il en est de même du deuxième port grec, Thessalonique , tandis que d’autres ports régionaux, comme ceux d’Alexandroupolis et d’Igoumenitsa, semblent destinés à suivre cette même voie… Il faut ajouter à cette liste de privatisations celles de 14 aéroports régionaux au profit du consortium allemand Fraport-Slentel et celles à suivre cette année de l’autoroute Egnatia (la plus longue du pays, reliant l’ouest de la Grèce à la Turquie) et des infrastructures de l’entreprise gazière DEPA . Seule la privatisation des sites archéologiques et des musées grecs, qui toucherait aux racines même de l’identité grecque, a pour l’heure été empêchée .

    En parallèle, la Grèce s’est désindustrialisée au profit du secteur tertiaire, la part de l’emploi dans le secteur industriel, en % de l’emploi total, chutant de 22% en 2009 à environ 15 % en 2019 tandis que la part du secteur des services passait de 67% en 2009 à 73% en 2019 . En particulier, le secteur du tourisme est en plein essor, le nombre de touristes annuel étant passé de 15 millions en 2009 à 34 millions en 2019 , chiffre qui pourrait être dépassé cette année. Mais un tel développement du tourisme fait craquer les fragiles infrastructures (d’eau, d’électricité, etc.) grecques tandis que le prix de la vie, et a fortiori des vacances, monte en flèche pour les locaux. Une grande part d’entre eux s’est donc vue privée de vacances au sein de leur propre pays. L’organisation d’une « réserve » (1) grecque est donc sur de bons rails.

    Toutes ces « réformes » ont été entreprises dans le but de recevoir de l’aide internationale, c’est-à-dire celle de la zone euro et du FMI. Au total, alors que début 2010 on estimait à 10 milliards d’euros l’apport nécessaire pour sauver la Grèce, celle-ci aura reçu 273 milliards d’euros d’aide ! Quand le remède aggrave la maladie…

    La raison d’un tel gaspillage d’argent public et d’un tel massacre social ? Les banques allemandes et françaises étaient très exposées à la dette grecque. Au lieu d’annuler une partie de celle-ci, c’est-à-dire de faire en sorte que le secteur privé subisse quelques milliards de pertes, on a préféré déverser de l’argent public. Ce qui a permis in fine aux banques allemandes et françaises de se dégager de ces titres de dette risqués. Ainsi, comme d’habitude, les acteurs privées qui justifient leur intérêts par le risque qu’ils prennent ont en réalité vu leurs pertes être socialisées.

    La mise en marche de la machine infernale

    La crise de la dette grecque a commencé en 2009. Celle-ci est en réalité une conséquence de la déréglementation financière commencée dans les années 1980. Lorsque, en 2008 la crise des subprimes éclate avec la chute de la banque Lehman Brothers, tout le secteur financier mondial se crispe, les flux de capitaux sont bloqués, la confiance se rompt. Les gouvernements publics décident alors d’injecter massivement de l’argent public dans le sauvetage des banques. C’est en particulier le cas de la Grèce.

    Dans le même temps, les investisseurs délaissent les actifs peu sûrs pour les dettes souveraines des États, des actifs sûrs puisque les États ne peuvent pas disparaître. Le principal défaut des actifs pour ces investisseurs à ce moment-là est que ceux-ci ne rapportent pas assez : leurs taux d’intérêts sont trop faibles. Mais c’est sans compter sur la publication d’un rapport établissant que les déficits grecs sont plus importants que prévus du fait de dissimulations effectuées sous la tutelle de la banque Goldman Sachs .

    Il n’en faut pas plus aux marchés financiers pour lancer la machine infernale. Une attaque spéculative débute, les taux d’intérêts de la dette grecque grimpent. La perspective d’un défaut sur la dette grecque apparaît à tous les acteurs. La troïka (la Commission européenne, le FMI, la BCE) intervient et conclut un accord en 2010 avec Giórgios Papandréou, le premier ministre issu du Mouvement socialiste panhellénique (le Pasok). Celui-ci doit mettre en place un programme d’austérité visant à « maîtriser les dépenses publiques » pour réduire le déficit grec.

    En 2011, face à un mouvement populaire anti-austérité et alors que la troïka continue d’exiger la saignée du pays, M. Papandréou évoque la possibilité d’un référendum. Celui-ci abandonne rapidement l’idée, se rendant compte que les élites européennes n’hésiteraient pas à pousser la Grèce vers la porte de sortie.

    Syriza, le faux espoir

    Jusque début 2015, les « réformes » se succèdent. En parallèle, le mouvement populaire anti-austérité s’est développé. Finalement, la coalition de gauche radicale Syriza, avec à sa tête Aléxis Tsípras, remporte les élections législatives de janvier 2015. Dans son programme, plusieurs mesures sont avancées pour sortir de la crise de la dette : suspendre le paiement de la dette, en effectuer un audit pour évaluer la part qui est illégitime, appeler à la participation citoyenne, décréter la fin du mémorandum d’austérité.

    Cependant, il faut noter que la campagne de 2015 de Syriza ne s’est pas faite sur une rupture avec l’Union européenne. Le but a toujours été de négocier avec la troïka mais à aucun moment n’a été envisagé une sortie de l’euro ou de l’UE. Les élites européennes, en premier lieu duquel la Banque centrale européenne, vont exploiter cette faille. Moins de 10 jours après la victoire de Syriza, la BCE ferme le principal canal de financement des banques grecques .

    La tension va continuer à s’accroître durant les six premiers mois de 2015 sans, toutefois, que ni Aléxis Tsípras, ni Yanis Varoufakis, son ministre des finances, ne remettent en cause leur conviction pro-européenne et ne radicalisent l’opinion publique grecque vis-à-vis de l’UE. Ce faisant, ils ne tiennent pas compte de l’épisode de 2011 et la sortie de l’Union ne reste qu’une idée dans quelques têtes de l’aile gauche de Syriza.

    La machine infernale écrase le peuple grec

    Et ce qui devait arriver, arriva. Dans la nuit du 26 au 27 juin 2015, après des négociations pour un autre plan d’« aide » pour la Grèce, Tsípras fait part de son intention de soumettre au référendum du peuple grecque le projet proposé par la troïka. Si le oui l’emporte, Tsípras acceptera et l’austérité continuera. Si le non l’emporte, Tsípras refusera le projet. Mais ce référendum est promu par le gouvernement de l’époque comme un outil pour continuer les négociations et non comme une première étape pour sortir de l’Union, le but étant de faire advenir une « Europe solidaire ».

    À partir du 29 juin 2015, soit 6 jours avant le référendum, les banques grecques sont fermées du fait d’un défaut de liquidité provoqué par la BCE. Malgré cela, le « oxi » (non en grec) l’emporte de manière univoque : plus de 62% des suffrages exprimés se sont portés sur lui. Le 9 juillet, 3 jours après la victoire du « non », Tsípras envoie un projet reprenant les principales préconisations de la troïka (coupe dans les retraites, dans la fonction publique, hausse de la TVA …). Tsípras a dû choisir entre le peuple et la troïka. N’ayant pas mis en place les conditions matérielles suffisantes et étant pro-européen, un seul choix s’offrait à lui : renoncer à ses promesses et obéir à Bruxelles.

    Une autre voie était pourtant possible. Celle de la rupture avec l’Union en sortant de celle-ci. Les premières mesures qu’il aurait fallu prendre sont connues : retour de la souveraineté monétaire en se dotant d’une monnaie nationale, contrôle des capitaux, contrôle et nationalisation des banques, dévaluation du nouveau Drachme de l’ordre de 20 à 30%, mesures exceptionnelles pour s’assurer que les besoins de base de la population (nourriture, médicaments, carburants, etc.) soient assurés… La principale inconnue est la même que celle que connaît le Royaume-Uni à l’heure actuelle : celle de l’issue des négociations commerciales avec l’UE ainsi que leur durée. S’il faut bien sûr se garder d’un optimisme exagéré quant à la réussite d’une sortie de la Grèce de l’UE, les conséquences du maintien étaient elles certaines. Elles sont désormais sous nos yeux : les plans d’austérité n’ont fait qu’aggraver la situation. Bien évidemment, la troïka le savait : les exemples d’échec de la rigueur sont légion, de l’Algérie à l’Argentine en passant par l’Éthiopie ou le Kenya.

    Alors que la Grèce est désormais frappée de plein fouet par la crise sociale et que les méga-incendies se succèdent chaque été, aucun parti de gauche ne semble pouvoir incarner la colère populaire. La population est en effet totalement désabusée par les renoncements de Syriza. La crise énergétique et la dépendance énergétique de la Grèce à la Russie , en faisant exploser les taux d’intérêts de sa dette, ranime le spectre d’une crise financière. La tragédie va-t-elle se répéter ? Si aucune certitude n’est possible, on voit cependant mal pourquoi les élites européennes, qui ont toutes applaudi les mémorandums successifs, feraient des choix différents.

    (1) Frantz Fanon, Les damnés de la terre, La Découverte, janvier 2004

    • chevron_right

      Akropolis, Cascadia : 2 jeux de tuiles pour changer de Carcassonne cet été

      news.movim.eu / Numerama · Sunday, 14 August, 2022 - 07:50

    Akropolis et Cascadia

    Un peu délaissés, les jeux de placement de tuiles reviennent en force avec nos deux jeux de société de la semaine, Akropolis et Cascadia. [Lire la suite]

    Abonnez-vous aux newsletters Numerama pour recevoir l’essentiel de l’actualité https://www.numerama.com/newsletter/

    • chevron_right

      En Grèce, une empreinte géante pour dénoncer les destructions écologiques

      news.movim.eu / HuffingtonPost · Tuesday, 14 June, 2022 - 10:28 · 1 minute

    ENVIRONNEMENT - C’est un pas de géant pour l’écologie. L’artiste visuel grec The Krank a réalisé une empreinte géante dans la baie de Mongonissi sur l’île grecque de Paxos. Baptisée Footprint (empreinte en français), cette œuvre d’art dénonce les destructions écologiques causées par l’Homme, comme vous pouvez le voir dans la vidéo en tête d’article.

    Il a fallu 15 jours à l’artiste grec pour créer cette immense trace de pas, d’une superficie de 1000 m², présentée pour le Biennale de Paxos 2022. Cette représentation appuie sur le besoin imminent de trouver un point d’équilibre entre la croissance économique , le bien-être social et la préservation de l’environnement .

    S’ajoute à cela la pandémie de Covid-19 qui n’a pas disparu et qui continue de peser sur les discussions mondiales et le développement durable, comme le précise l’artiste grec sur son compte Instagram .

    L’œuvre partagée sur Behance , site internet sur lequel des artistes postent leurs créations, The Krank y a apporté plus de détails:

    “Sur le plan conceptuel, Footprint traite de la signification de la perte. La nature, les écosystèmes, la biodiversité sont dans un état variable avec un signe négatif. Le parallélisme qui émerge à travers l’éphémérité de mon travail, et de notre présence en tant qu’espèce, renforce le message que je voulais communiquer. Tout est fluide, et rien ne doit être considéré comme acquis.”

    À voir également sur Le HuffPost : Sur le climat, l’humanité a battu en 2021 les seuls records à ne pas dépasser

    • chevron_right

      Vangelis, compositeur pour "Blade Runner" et "Antartcia", est mort

      news.movim.eu / HuffingtonPost · Thursday, 19 May, 2022 - 17:19

    Greek composer and keyboard player Vangelis poses at his apartment in Paris, 9th June 1991. (Photo by Rob Verhorst/Redferns) Greek composer and keyboard player Vangelis poses at his apartment in Paris, 9th June 1991. (Photo by Rob Verhorst/Redferns)

    MUSIQUE -  Le compositeur grec de “Blade Runner” et des “Chariots de feu”, Vangelis Papathanassiou , surnommé Vangelis, est décédé à 79 ans, a annoncé ce jeudi 19 mai au soir le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis.

    “Vangelis Papathanassiou n’est plus parmi nous”, a tweeté le Premier ministre. “Le monde de la musique a perdu (l’artiste) international Vangelis”, ajoute son tweet.

    En France, le présentateur Nikos Aliagas a égalemsnt rapidement rendu hommage au compositeur : “Immense tristesse. Le compositeur grec Vangelis vient de s’éteindre, il avait 79 ans. Un génie s’en est allé... Bon voyage mon ami”.

    Plus d’informations à venir...

    À voir également sur Le HuffPost: TikTok va diffuser sa première comédie musicale originale

    • chevron_right

      Contact publication

      CNT 31 · Thursday, 4 February, 2021 - 11:01 edit

    “Combat syndicaliste” de janvier en libre téléchargement
    #Journal confédérale #CNT

    http://www.cnt-f.org/cnt31/spip.php?article1248

    Saisir l’Inspection du #Travail

    #Lutte des livreurs

    Fermeture de #Renault #Choisy

    #Répression - #Islamophobie

    #Sexisme au travail : aperçu des limites des recours #juridiques

    Réappropriation culturelle bourgeoise

    Infos internationales : #Congo, #étatsUnis, #Grèce

    #Commune de #Paris

    Jujitsuffragettes



    #actu #actualité #presse #médias #syndicalisme #syndicat #grève #social #société #politique #lutteDesClasses #capitalisme #ActionDirecte #Autogestion #Entraide #syndicalismeRévolutionnaire #AnarchoSyndicalisme #féminisme #racisme #antiracisme #licenciement #métallurgie #droit #transport #économie #histoire
    • chevron_right

      Contact publication

      CNT 31 · Wednesday, 28 October, 2020 - 10:44

    https://upload.movim.eu/files/7b4a27eed4cd52381dd25ae94920402e838b41d3/6GhvkP022ZoKmXdoj8P3wkGZ2FdzzokeZepA87X0/en-grece-comme-ailleurs-solidarite-antifasciste-09-28-2020-1024x538.jpg

    À Thessalonique, la police attaque les militants antifascistes

    Le 16 septembre 2020, la #police de #Thessalonique (#Grèce) a agressé des activistes lors d’une intervention de nettoyage des murs du centre-ville couverts d’inscriptions fascistes posées quelques jours auparavant par des groupes néonazis locaux poches d’Aube dorée. Les militant-e-s ont fait l’objet d’interpellations musclées et de maintiens en garde à vue, dans des conditions indignes.

    Le lendemain, alors que les agents de propreté de la mairie sont très facilement parvenus à effacer les slogans antifas, les croix gammées des fascistes restées présentes dans le quartier ont été « oubliées ».

    Solidarité internationaliste et antifasciste

    Plus d’infos : http://www.cnt-f.org/international/A-Thessalonique-la-police-attaque-les-militants-antifascistes.html

    #social #répression #politique #internationalisme #antifascisme #société #lutte #capitalisme #fascisme #actu #actualité
    • chevron_right

      Macron/Erdogan : La bataille du gaz en méditerranée.

      eyome · Sunday, 11 October, 2020 - 15:29