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      Le libéralisme, l’humanisme et l’antihumanisme

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 2 March, 2023 - 03:50 · 11 minutes

    Par Alexandre Deljehier.

    L’humaniste, de la Renaissance à nos jours, en passant par les Lumières, est un défenseur de la culture et de la dignité humaine : la perfectibilité et la liberté caractérisent la personne humaine.

    Si tous les humanistes ne sont pas libéraux – je pense aux socialistes George Sand, Victor Hugo et Jean Jaurès par exemple, bref, les humanistes de gauche – le libéral est forcément humaniste. L’humanisme est une refonte laïque de la métaphysique judéo-chrétienne ; il est donc normal de voir les libéraux reconnaitre l’autonomie de la volonté et défendre l’État de droit, contrairement aux nihilistes, davantage tentés par l’arbitraire politique.

    L’humanisme républicain ne faisant plus recette à gauche – la victoire de la France Insoumise sur le Parti socialiste , dans la lutte pour obtenir la place de premier parti politique de gauche, le prouve -, il est vital pour les libéraux d’insister sur l’humanisme afin de défendre leur vision du monde. Ainsi, le libéral se voit obligé de combattre le matérialisme et le nihilisme sur deux fronts : avec les marxistes et les libertins/libertaires, à gauche et le sociobiologisme (eugénisme et racisme) ou le nietzschéisme, à l’extrême droite. Il doit aussi se définir négativement pour se distinguer des autres tendances humanistes.

    L’antihumanisme de gauche

    La gauche antihumaniste prétend combattre deux ennemis : l’extrême droite et le libéralisme.

    Les marxistes défendent clairement une vision matérialiste du monde . Feuerbach, hégélien de gauche, source d’inspiration pour Marx et Engels, disait ceci : « l’Homme est ce qu’il mange » ! De fait, cela veut dire que l’Homme n’est qu’une machine biologique entièrement déterminée par son environnement ; donc une marionnette, un automate dénué de libre arbitre et d’esprit critique. Dès lors, il n’y aurait que des relations d’intérêts et de prédation entre des individus égoïstes ; ce n’est pas un hasard si, par exemple, Marx admirait le philosophe anglais Thomas Hobbes : ce dernier défend une vision cauchemardesque d’un monde régi uniquement par le rapport de force et des lois immanentes.

    Dans la lignée des libertins du XVII e et XVIII e siècles, l’extrême gauche fait l’apologie de la raison et de la science, non pas, comme les humanistes classiques, pour défendre l’humanisation de la nature, mais au contraire pour critiquer la culture. Cette dernière serait suspecte car source d’aliénation et de contraintes ; une supercherie mise en place par les dominants pour protéger leurs intérêts matériels. Les marxistes sont plus révolutionnaires que les libertins – ces derniers seraient plutôt utilitaristes et positivistes -, mais leur objectif demeure scientiste : il s’agit surtout de « déconstruire » la culture dominante pour enfin planifier les sociétés humaines selon des lois dites scientifiques, s’inscrivant ainsi dans la lignée d’un Francis Bacon ou d’un Saint-Simon .

    Inversement, nous ne verrons pas Sigmund Freud faire l’apologie des utopies sociales ou des révolutions prolétariennes, même si celui-ci considère que la culture engendre beaucoup de frustrations et de souffrances (pessimisme culturel). Ce clivage est notoire avec les marxistes/situationnistes, d’un côté et les « libéraux libertaires » hédonistes, de l’autre. Nous verrons d’ailleurs des libertaires, en bons révolutionnaires, s’enthousiasmer pour le règne de la technique ; selon ces tenants du posthumanisme, l’humanité est une chose périssable appelée à être dépassée grâce la science ; au nom des « intérêts de l’espèce », il s’agit de faire l’économie de la notion de dignité humaine.

    Pour cette gauche, l’Homme ne peut pas seulement vouloir devenir ce qu’il veut : pour faire advenir une véritable révolution, il faut changer certes l’environnement de l’Homme, mais surtout dépouiller l’humanisme de ses présupposés idéalistes sur le droit ; la conséquence logique de cet « humanisme théorique » est un antihumanisme en pratique. La dispute entre le marxisme et le libéralisme vient de cette mésentente sur la définition de l’Homme.

    Pour les matérialistes, le siège de la volonté serait le cerveau ; de même, la conscience en serait le produit. Ainsi, la volonté n’est pas autonome, libre, mais seulement déterminée par des causes extérieures. Par exemple, les violences masculines faites aux femmes seraient systémiques et donc, encouragées par la « culture du viol » ; elles ne relèvent pas d’un choix délibéré des agresseurs de faire du mal. Nous voyons bien que le refus du libre arbitre, présenté comme une révolution métaphysique par les matérialistes, est politiquement dangereux, et ce depuis l’Antiquité si l’on en croit Cicéron.

    L’hédonisme et l’ utilitarisme ont de fait, pour fondement la conviction que la loi morale peut être déduite à partir du monde sensible sans se référer alors à un hypothétique monde intelligible ( Beccaria , Helvétius, Bentham , Mill) : le bien est synonyme de plaisir des sens et le mal, synonyme de douleur et de souffrance. Les libertaires, socialisants ou non, par exemple, veulent « émanciper la matière de la tutelle de l’esprit » (Dejacque). C’est le point de départ du matérialisme, du collectivisme et du progressisme.

    L’antihumanisme de droite

    L’extrême droite est antihumaniste et antichrétienne dans le sens où elle critique également la culture.

    Dans la lignée de Nietzsche et de Calliclès, l’extrême droite estime que la culture est l’instrument des faibles pour se protéger des forts. De fait, c’est l’exact contrepied du marxisme. Les réductionnistes soutiennent cette idée : les comportements sociaux sont entièrement déterminés par la génétique et la biologie ; puisque les inégalités raciales et sociales sont naturelles, il n’y a pas besoin de culture. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre cette phrase prononcée dans le premier acte d’une pièce de théâtre donnée à Berlin pour le 44ème anniversaire de Hitler : « quand j’entends le mot culture, j’enlève le cran de sûreté de mon browning ». Des politiques eugénistes et racistes peuvent ainsi être justifiées au nom de cette conception matérialiste/naturaliste du monde (Arthur de Gobineau, Francis Galton…).

    L’antihumanisme de droite est observable sur le plan théorique et pratique.

    Le réductionnisme peut servir de caution intellectuelle à droite, mais l’antihumanisme de droite est rigoureux lorsqu’il s’inscrit en réaction au matérialisme. Il est même davantage perceptible, d’abord chez les nationalistes romantiques, puis chez Nietzsche et les fascistes : il faut faire l’économie de la morale mais aussi de la raison ; pour Nietzsche, le posthumain ou surhomme se serait émancipé du ressentiment et de la morale d’esclave. Là aussi, le refus nihiliste d’adhérer à une morale transcendante pour lui préférer l’immanence, le monde sensible, est manifeste, bien que le matérialisme soit combattu pour ses implications utopiques ; il n’est donc pas étonnant de voir des penseurs se réclamer du « nietzschéisme de gauche » (Palante, Goldman, Bataille, Camus, Foucauld, etc.).

    L’extrême droite critique les mœurs bourgeoises, mais non pour défendre plus de démocratie comme le font les socialistes, mais au contraire pour défendre une conception aristocratique et inégalitaire du monde, à l’opposé des idées issues des Lumières . Aussi, il ne faut pas se laisser berner par des labels allemands tels que « national-socialiste » ou « national-libéral » car il n’y rien de libéral ou de socialiste dans les idéologies d’extrême droite. Cette logique matérialiste se démarque du matérialisme classique, à vocation progressiste, car la recherche du bonheur n’est plus le référentiel de la « bio politique », du pouvoir utilitaire exercé sur les corps (Foucauld) ; Gobineau précisera qu’il ne se préoccupe pas de l’avenir du Milieu (environnement), mais plutôt de celui de la Race. Si la gauche fonde son matérialisme à partir des sciences naturelles et humaines afin de gagner en légitimité, les réductionnistes ne considèrent que les sciences naturelles (physique, génétique, biologie) pour expliquer le mystère de l’humanité.

    Le libéralisme est un humanisme classique

    Le libéralisme est un humanisme classique car il s’oppose au matérialisme. Le philosophe qui est allé le plus loin sur les implications politiques du libéralisme est Emmanuel Kant .

    Tout d’abord, il convient de définir le libéralisme sur le plan métaphysique.

    Pour les libéraux, l’Homme est un animal raisonnable même si la raison a ses limites – ce qui revient à critiquer le régime de la Terreur en 1793 et les régimes communistes -, il est donc un être de culture – ce qui revient à rejeter de facto les totalitarismes du XX e siècle. Pour Kant, il y a un progrès moral : l’Homme moderne possède désormais une connaissance accrue du Bien et du Mal. Toutefois, il n’est pas devenu plus vertueux pour autant. Si l’Homme est fait « d’un bois tordu » (Kant), donc mauvais par nature, cela interdit tout volontarisme en politique pour l’améliorer ou le perfectionner : la recherche du bonheur doit rester une démarche individuelle ; au début du XVIII e siècle Jonathan Swift se moquait déjà des ambitions utilitaires et matérialistes des réformateurs, dans son essai intitulé A modest proposal.

    La personne, perfectible et libre, peut toujours faire un mauvais usage de sa raison – c’est-à-dire préférer être esclave de ses passions, donc renoncer à sa dignité morale, plutôt de se rendre autonome et discipliner sa volonté – et pour ce faire, il est nécessaire de penser sa responsabilité sur le plan pénal et civil. L’objet du droit est la personne humaine. De fait, Emmanuel Kant, Benjamin Constant , Germaine de Staël, etc, postulent rationnellement l’existence de Dieu et l’immortalité de l’âme pour défendre la dignité humaine et morale de la personne et donc la doctrine moderne du droit (théisme philosophique, spiritualisme).

    Le libéral est donc un humaniste classique.

    Il se distingue des autres tendances dites humanistes dont la particularité est de prétendre concilier l’humanisme avec le matérialisme – qu’elles soient socialistes, existentialistes ou libertaires – car il fonde le droit sur l’autonomie du sujet et non sur l’indépendance individuelle. Les libéraux Friedrich Hayek et Isaiah Berlin opèrent cette différence. Hayek oppose, à tort ou à raison, l’individualisme anglo-saxon, empirique selon lui, de celui reposant sur la rationalité scientiste et le culte libertaire de l’originalité, qu’il prête volontiers aux Français et aux Allemands. De fait, l’indépendance est définie comme étant la possibilité de ne répondre que de soi, être détaché de tous liens. Aussi, dans l’assertion « tous les individus sont libres et égaux en droits », il faut comprendre ceci : tous les individus sont formellement libres, ils peuvent exercer leur libre arbitre dans la mesure où ils ne nuisent ou ne lèsent personne.

    Ce principe consacré dans la DDHC postule l’autonomie du sujet, la possibilité pour les individus de poser leurs propres lois (éthique), mais pas leur indépendance à l’égard des déterminismes sociaux et économiques ; par exemple, le locataire peut disposer de son appartement comme bon lui semble mais doit toute de même payer régulièrement un loyer au propriétaire du logement sous peine d’être expulsé. Berlin parle alors de liberté négative . L’indépendance vis-à-vis de l’État de droit reviendrait à renoncer aux garanties juridiques octroyées aux individus, sujets du droit.

    Aussi, quand ils se réclament de l’humanisme les antilibéraux de gauche ont tendance à défendre une vision matérialiste de la liberté (monisme matérialiste), par opposition aux libéraux pour qui la liberté se trouve dans l’idée, dans la perfectibilité humaine (dualisme matière-esprit).

    Conclusion

    Sur le plan métaphysique et politique, l’éthique libérale suppose la responsabilité morale, donc la connaissance du Bien et du Mal.

    Le relativisme moral ou indifférentisme moral peut être défendu par des matérialistes et des nihilistes, mais les libéraux rejoignent les conservateurs chrétiens et platoniciens dans la défense du réalisme moral, ainsi que de la responsabilité morale de l’Homme. Aussi, les libéraux peuvent nourrir de belles réflexions politiques et humanistes en ayant pour références des œuvres d’anticipation telles que Orange mécanique ou Minority report – surtout pour relier la question criminelle au principe de dignité humaine – et 1984 ou Soleil vert . C’est donc sur sa vision de la culture et de l’humanité que le libéral se distingue de ses adversaires et ennemis politiques, à gauche et à droite. Sur le plan politique et moral, l’enjeu est la défense de l’État de droit .

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      Pourquoi le libéralisme n’est pas une idéologie

      Johan Rivalland · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 4 January, 2023 - 03:45 · 7 minutes

    Les définitions du terme « idéologie » abondent. Mais plutôt que de vous en apporter une ici, il convient surtout de relever qu’entre le sens initial du mot et les sous-entendus qu’il recèle désormais, la prudence s’impose.

    En effet, alors que ce terme avait une signification précise au départ, se référant à la science des idées , il a très vite subi les coups de boutoir de Napoléon, se moquant des intellectuels peu au fait de la politique concrète, puis surtout de Karl Marx, qui en marquera profondément le sens péjoratif aujourd’hui dominant, la présentant comme une « illusion idéaliste ».

    Le libéralisme est-il une idéologie ?

    Mais c’est surtout, aujourd’hui, sur son caractère prescriptif que l’on insiste lorsque l’idéologie est évoquée. Raymond Aron opposait ainsi ceux qui prétendent vouloir « changer l’Homme », en poursuivant des utopies ou croyances illusoires toujours pleines de bonnes intentions , mais se heurtant au réel, à ceux qui se réfèrent aux faits et, à ce titre, peuvent apparaître comme des briseurs de rêves .

    C’est pourquoi il considérait que le libéralisme, par essence, est anti-idéologique, car non-prescriptif.

    En quoi le libéralisme n’est-il pas prescriptif ?

    Le libéralisme n’a pas pour prétention de vouloir changer le monde ou de promouvoir un quelconque idéalisme. Il n’est pas là pour fantasmer la réalité, changer l’Homme ou faire rêver.

    C’est pourquoi certains préfèrent parler de doctrine, d’autres de philosophie, ou encore d’humanisme (ou les trois à la fois). En ce sens que le libéralisme est avant tout une conception de l’être humain, basée sur des rapports de coopération volontaire, de solidarité spontanée, de respect, de tolérance. Et qui ne cherche pas à imposer ses idées, comme le font des idéologies totalitaires ou simplement étatistes, par nature.

    Correspond-il à une forme d’extrémisme ?

    Comme le nom l’indique, le libéralisme vise avant tout à défendre les libertés individuelles. Ce qui passe par l’importance accordée au droit (nous y reviendrons), à la défense de la propriété (nous aurons certainement également l’occasion d’y revenir ; pas facile de ne pas déborder sur les prochains volets de cette série, ni de faire court) et implique de concevoir les libertés politiques et économiques comme un tout (idem).

    Il ne s’agit donc pas d’un extrémisme , loin de là et bien au contraire. Plutôt de principes visant à garantir les libertés fondamentales, fragiles par nature .

    Quelles sont ses prétentions ?

    Contrairement à l’État-providence qui a quasiment comme prétention de prendre totalement en charge les individus de leur naissance à leur mort , de manière que l’on peut croire bienveillante , le libéralisme entend au contraire leur faire confiance et s’appuyer sur leur capacité d’initiative pour développer une société où vivre en harmonie , tout en se sentant responsable. Ce qui n’exclut pas, d’ailleurs, de venir en aide aux plus démunis, contrairement à ce que certains souhaitent laisser penser.

    Dans le premier cas (État-providence), le risque de despotisme n’est pas loin. Voici ce qu’énonçait Alexis de Tocqueville à son sujet, se référant ici à ses citoyens :

    « L’État travaille volontiers à leur bonheur ; mais il veut en être l’unique agent et le seul arbitre ; il pourvoit à leur sécurité, prévoit et assure leurs besoins, facilite leurs plaisirs, conduit leurs principales affaires, dirige leur industrie, règle leurs successions, divise leurs héritages, que ne peut-il leur ôter entièrement le trouble de penser et la peine de vivre ? […] il ne brise pas les volontés, mais il les amollit, les plie et les dirige […] il éteint, il hébète, et il réduit enfin chaque nation à n’être plus qu’un troupeau d’animaux timides et industrieux, dont le gouvernement est le berger. »

    Le libéralisme défend donc une vision contraire à celle de planisme, qui mène à la route de la servitude . Et une philosophie optimiste, pleine de confiance en l’homme, tout en étant consciente de ses limites, et profondément éthique. Loin de l’arbitraire des idéologies tendant à prendre en mains le destin des peuples.

    Les Français sont-ils majoritairement contre le libéralisme ?

    La falsification qui est faite de ce terme, notamment à travers les adjonctions de particule ( néo , ultra ), destinées à le décrédibiliser, peut laisser penser que oui.

    Maintenant, et au vu de ce que nous avons pu amorcer à travers les éléments développés ci-dessus, on peut imaginer que les valeurs du libéralisme sont très probablement compatibles avec ce que pense profondément une grande partie de la population.

    La crainte ou le rejet du libéralisme, à mon sens, résulte donc d’un grand malentendu, d’une ignorance entretenue par ses principaux ennemis et par ceux (très nombreux) qui jouent involontairement, du coup, la caisse de résonance de ces mensonges, de manière sincère, par ignorance réelle de ce qu’il est (même des personnes aussi sensées ou avisées qu’une Natacha Polony , véritablement obsédée et ennemie farouche depuis très longtemps de quelque chose qu’elle méconnaît et au sujet duquel elle se trompe de ce fait lourdement 1 ).

    Pour conforter l’idée, voici ce qu’en dit par exemple Jacques Garello dans son dernier livre (en reprenant la phrase complète de Francis Richard) :

    « Les idées libérales ne sont pas celles qu’on croit : beaucoup de Français se croient et se disent libéraux, mais ne le sont pas en réalité. À l’inverse, sont encore plus nombreux les Français qui sont libéraux mais ne le savent pas. Rien d’étonnant à cela puisque le libéralisme n’a que très rarement été enseigné, et presque jamais appliqué. Le libéralisme est ignoré, donc caricaturé, diabolisé, ou dévié.

    Libéral ? Pas libéral ?

    Car, en effet, au-delà de ceux qui se pensent anti-libéraux par simple ignorance, il existe aussi tous ceux qui se disent ou se sont déjà dits un jour libéraux, mais ne le sont qu’à la carte (je ne pense pas à un Emmanuel Macron, auquel vous aurez peut-être pensé spontanément, mais plutôt ou aussi à des politiques du type Jean-Pierre Raffarin ou tant d’autres du même acabit, libéraux un jour, et plus le lendemain, ou libéraux mais pas ultra-libéraux ou encore libéraux en politique mais pas en économie. Autant de points qui mériteraient d’être discutés, mais je m’aperçois que mon article finit par être à rallonge, alors que je le voulais court).

    Et nous revenons là à l’essence de notre sujet du jour (en attendant les volets suivants) : le libéralisme est-il une idéologie ?

    C’est parce qu’il ne l’est pas que rien ne sert de se présenter comme libéral sur tel plan et pas sur tel autre. Cela peut d’ailleurs se discuter, mais le fait est que nous parlons bien d’une doctrine, d’une philosophie qui, si elle n’est pas fermée et stéréotypée mais bien vivante et ouverte, révèle une essence profonde difficilement divisible ou modulable en fonction de ce qui arrange.

    Cette philosophie de la liberté s’oppose à tout ce qui assujettit d’une manière ou d’une autre des êtres ou des organisations, au risque de verser dans ce qui apparaît bien, si l’on fait référence au domaine économique, comme un capitalisme de connivence (là encore, nous aurons largement l’occasion d’y revenir, car il s’agit d’une source centrale du grand  malentendu).

    Et c’est aussi parce que beaucoup ont été déçus et se sont sentis floués par certaines idéologies auxquelles ils ont plus ou moins adhéré un temps par une sorte d’idéalisme bien compréhensible et parfaitement humaine, que certains d’entre eux, parmi les esprits les plus brillants ( Jean-François Revel , Jacques Marseille et d’autres encore, comme le rappelle un lecteur de l’article précédent) s’en sont détournés pour privilégier une approche plus philosophique (alors que les exemples inverses sont plus difficiles à trouver, comme ce lecteur le souligne).

    La liberté ne se décrète pas

    En conclusion de ce volet, et pour finir (même si je suis forcément très incomplet), on peut noter que la liberté que défend le libéralisme est quelque chose de spontané. Il ne s’agit pas d’un constructivisme , donc pas d’une idéologie. Ce qui n’exclut pas l’État, en tant que garant de ces mêmes libertés.

    Un article publié initialement le 7 avril 2017.

    1. Je découvre d’ailleurs, au passage, moi qui ai failli lui écrire gentiment il y a quelques mois en y ayant finalement bêtement renoncé par manque de temps, que Nathalie MP a justement écrit un article à ce sujet , que je vais m’empresser de lire avec délectation, où il est manifestement question de « malentendu »
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      Technophobie anti-Musk pure sur le plateau de « C ce soir »

      Thierry Berthier · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 4 November, 2022 - 04:30 · 4 minutes

    L’émission « C ce soir » de Karim Rissouli diffusée sur France 5 le 2 novembre nous a offert un extraordinaire moment de technophobie chimiquement pure. Le présentateur interrogeait un plateau d’invités autour de la question d’actualité « Les milliardaires menacent-ils la démocratie ? » et accessoirement « Elon Musk est-il fou ? ».

    Le premier invité, l’ économiste Daniel Cohen ouvre le bal sans détour en qualifiant Musk de triste « dingue populiste qui fabrique des bagnoles et envoie 3 fusées, à la solde de l’internationale populiste trumpiste » ; affirmation aussitôt confirmée par sa consœur Julia Cagé, dénonçant la vacuité du milliardaire américain qui, selon elle, a dépouillé les crédits de la NASA pour créer SpaceX sur son dos.

    Après plusieurs rebonds oratoires du tandem Cohen-Cagé, les trois autres invités essaient de contribuer au débat. Ils essaient d’expliquer à Karim Rissouli que la réalité est un peu plus complexe que celle renvoyée par les propos de comptoir d’un Daniel Cohen qui n’a manifestement pas assez travaillé son sujet et d’une Julia Cagé arrogante, habitée par la haine des milliardaires, de l’écosystème numérique dans son ensemble, des algorithmes toxiques et du capitalisme diabolique.

    Asma Mhalla et l’écrivain Nathan Devers parviennent difficilement à prendre la parole pour apporter un peu de nuance, d’intelligence et d’arguments face aux bouffées technophobes outrancières d’un Daniel Cohen dépassé par les enjeux technologiques et d’une Julia Cagé, passionaria d’un anticapitalisme hystérisé. Malheureusement, Karim Rissouli n’avait pas jugé utile d’inviter sur son plateau une parole alternative mesurée rappelant à tous que Musk est avant tout un génie visionnaire et un personnage romanesque.

    Le portait d’Elon Musk brossé par le duo Cohen-Cagé sur le plateau de France 5 est un modèle de désinformation, de négationnisme et de sous-estimation assumée des exploits technologiques réalisés par le créateur de Paypal, Tesla, Space-X, Open AI et Neuralink. Qui sont-ils pour réduire ainsi la dimension et l’œuvre d’un inventeur visionnaire, grand capitaine d’industrie, en le qualifiant de « pauvre constructeur de bagnole, cupide, stupide (il n’a qu’un seul livre dans sa bibliothèque selon Daniel Cohen), de complotiste et de libertarien » ?

    Le rachat de Twitter avait manifestement échauffé les esprits à un point d’ébullition interdisant toute analyse objective du personnage Musk.

    Pour comprendre à minima les motivations profondes d’ Elon Musk ou de Jeff Bezos , il convient de rechercher les racines spirituelles qui agissent sur lui comme un moteur d’innovation et de créativité. Elon Musk a lu les grands classiques de la science-fiction et se réfère souvent à l’ouvrage Fondation (1942-1944) d’Isaac Asimov. Il a lu également le chef-d’œuvre Cosmos de l’astrophysicien américain Carl Sagan (1934-1996), publié en 1980. C’est dans Cosmos que l’on peut lire, comprendre et mesurer toute l’étendue du projet technologique porté par Elon Musk ou Jeff Bezos.

    L’ échelle de Kardashev-Sagan structure la pensée d’Elon Musk et catalyse l’ensemble de ses séquences créatrices.

    Cette échelle permet de classer de manière théorique les différentes civilisations selon leur degré de développement technologique. Initialement composée de trois types, l’échelle de Kardashev a été complétée par Carl Sagan avec les civilisations de types IV et V.

    Le type I concerne une civilisation capable d’utiliser la totalité de l’énergie disponible sur sa planète d’origine pour une valeur estimée à 10 millions de milliards de watts (10^16 W).

    Le type II est relatif à une civilisation capable d’utiliser la totalité de l’énergie qu’émet l’étoile de son système solaire (10^26 W).

    Enfin, le type III concerne une civilisation en mesure d’utiliser l’intégralité de l’énergie présente dans sa galaxie d’origine (10^36 W).

    Elon Musk a pour ambition de contribuer à notre évolution vers une civilisation technologique de niveau I. Cette transition passe nécessairement par la conquête du système solaire (SpaceX et StarLink ), par la maitrise de l’énergie (programme nucléaire SpaceX), par la compréhension profonde du cerveau humain ( NeuraLink ), par l’avènement d’une intelligence artificielle généraliste (OpenAI). Elon Musk œuvre pour accélérer toutes les grandes convergences technologiques :

    • La convergence NBIC (Nanotechnologies, biotechnologies, informatique, sciences cognitives),
    • La convergence CKTS (convergence de la connaissance pour le bien-être de l’humanité, le recul de la mort, des maladies et des risques systémiques),
    • La convergence M-I (Matière-information) en connectant le cyberespace à l’espace physique.

    Ces différentes convergences sont intimement liées aux types de civilisations technologiques décrites par Carl Sagan en 1980. Elles sont aussi l’un des fondements de la pensée transhumaniste à laquelle Elon Musk se réfère constamment sans jamais la nommer. La science-fiction, quant à elle, s’inscrit comme un immense registre des potentialités d’évolutions de notre civilisation technologique à courts ou moyens termes.

    Notons que cette matrice spirituelle des types de civilisation et des convergences technologiques n’est pas réservée à l’Amérique du Nord mais est très largement partagée en Asie, Chine, Japon, Corée, en Russie et au Moyen-Orient avec des adaptations culturelles, géopolitiques ou religieuses locales.

    En conclusion, non, chers Daniel Cohen et Julia Cagé, Elon Musk n’est pas un « pauvre dingue vendeur de bagnoles » , il est celui qui améliore votre quotidien, celui qui ouvre une porte sur le Cosmos et sur le cerveau humain.

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      Pourquoi les hommes doivent libérer la parole publique, en particulier le 8 mars

      Mathias Poujol-Rost ✅ · Saturday, 18 March, 2017 - 17:04 edit

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    ( https://twitter.com/Mar_Lard/status/842762389049278468 )

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      “J'explique à un charmant monsieur pourquoi les mecs sont invités à se taire le 8 mars, ça peut en intéresser d'autres donc je poste ici”

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