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      L’effroyable emprise de Coca-Cola au Mexique et le pillage de l’eau

      alt.movim.eu / LaReleveEtLaPeste · Thursday, 30 November - 13:34

    La machine infernale de l’addiction est en marche à partir du moment où la marque use de tous les artifices pour séduire les habitants. Présente sur la totalité des étalages du village et vendue à un prix inférieur à celui des villes, il est aussi facile de se procurer du Coca-Cola que de l’eau.

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      En Occident, des élites révolutionnaires

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Saturday, 11 March, 2023 - 03:50 · 6 minutes

    Par Louis Anders.

    Il faut « réinventer notre pays » car « nous sommes entrés dans une nouvelle ère ». Il faut assumer une « conversion ». En un mot, nous avons besoin d’une Révolution. C’est précisément le titre du petit livre électoral signé par Emmanuel Macron lors de sa première campagne présidentielle. Celui qui avait été repéré par Jacques Attali à 29 ans, puis propulsé au secrétariat général de l’Élysée après un passage à la banque d’affaires Rothschild, est devenu en 2017 le plus jeune président de la Vème République. Dans son livre paru quelques mois avant le scrutin, Emmanuel Macron s’attardait souvent sur ce qu’il nommait des « transformations profondes ». Il y désignait une révolution numérique qui chamboulerait nos imaginaires, une révolution écologique censée transformer nos campagnes, et une révolution technologique qui « nous oblige tous ».

    « Cette évolution est inévitable », affirmait-t-il, et elle se distinguera par une ouverture accrue des frontières et la création d’une grande structure administrative européenne. Le futur président y disait sa « conviction intime » d’aller dans « le sens de l’Histoire ». Et gare à ceux qui ne voudraient pas « embrasser la modernité » : ce sont des ennemis. « Cette France, républicaine par nature, a des ennemis », terme cité pas moins de quatre fois et désignant notamment les mouvements politiques souverainistes et plus généralement ce qu’il appelle « les conservateurs passéistes ».

    « Une nouvelle ère »

    La virulence des propos peut étonner mais l’appel à la révolution s’est généralisé depuis longtemps parmi les élites au pouvoir.

    En 2015, c’est le banquier d’affaires Mathieu Pigasse, alors responsable mondial des fusions-acquisitions et du conseil aux gouvernements pour la banque Lazard, et actionnaire important du Groupe Le Monde , qui promouvait une réinvention économique et sociétale dans Révolutions .

    Plus près de nous, un autre financier antifrontières, le milliardaire George Soros , soutien de premier ordre de l’organisation UNITED qui appuie de nombreux groupuscules anti-identitaires, semblait se réjouir des bouleversements induits par la crise du Covid-19.

    En mai 2020, alors que de nombreuses régions du monde venaient tout juste de connaître leurs premiers confinements, il écrivait sur le site élitiste Project-syndicate :

    « Déjà avant la pandémie, j’avais réalisé que nous étions dans une période révolutionnaire où les choses impossibles ou même inconcevables en temps normal étaient devenues non seulement possibles, mais probablement absolument nécessaires ».

    Période révolutionnaire, ou Révolution à mener ?

    Les responsables cités naviguent sans cesse entre les deux notions, faisant souvent passer pour une nécessité historique un monde qu’ils souhaitent voir advenir. Ce mélange des genres assumé est particulièrement visible dans les rapports du Club de Rome, qui passe pour être le précurseur de la communication sur le réchauffement climatique d’origine anthropique.

    Le Club, qui n’a jamais caché ses aspirations à la planification mondiale depuis son premier rapport paru en 1972, publiait en 1991 The first global revolution , (« La première révolution mondiale »).

    L’ URSS était en train de disparaître. La voie était ouverte pour un nouveau monde et on pouvait notamment y lire :

    « Dans la recherche d’un nouvel ennemi pour nous unir, nous en sommes arrivés à l’idée que la pollution, la menace du réchauffement climatique, des pénuries d’eau, la famine et ainsi de suite, feraient l’affaire. Tous ces dangers sont causés par l’intervention humaine et ce n’est que par des changements d’attitude et de comportement qu’ils peuvent être surmontés. Le véritable ennemi est alors l’humanité elle-même. »

    Reset , l’autre nom de la révolution

    Promesse d’une ère nouvelle, revendication du sens de l’histoire, désignation d’ennemis… Cette tournure d’esprit pourrait ressembler à s’y méprendre aux discours révolutionnaires de 1793 ou à ceux des utopies politiques du XX e siècle. Au Forum économique de Davos , on utilise une expression directement empruntée à l’univers informatique pour désigner la révolution : le reset .

    Apparu pour la première fois en 2014 à Davos par la voix de Christine Lagarde, alors directrice générale du Fonds monétaire international, repris par le Premier ministre canadien Justin Trudeau dans une vidéo tournée en 2020, le reset a été officiellement annoncé par le fondateur et directeur du Forum, Klaus Schwab , dans un livre paru en juillet 2020 et écrit avec Thierry Malleret : Covid-19 : la Grande réinitialisation . Selon Schwab, la pandémie offrait « une rare mais étroite fenêtre d’opportunité pour réimaginer et réinitialiser notre monde ». Une telle remise à plat économique, sociale et politique, était censée nous mener vers « une nouvelle ère de prospérité ».

    Et les auteurs de prévenir :

    « Nous sommes à la croisée des chemins : une seule voie nous mènera vers un monde meilleur ».

    Le texte renvoyait notamment à l’Agenda 2030 imaginé par les administrateurs du Forum.

    « Réingéniérer l’avenir de la vie »

    Il y a 7 ans, le fondateur des réunions de Davos avait fait paraître un autre ouvrage qui appelait à une transformation radicale. Dans La Quatrième révolution industrielle , Klaus Schwab y montrait sa fascination pour les nouvelles technologies.

    Selon lui, elles n’impliquaient « rien de moins qu’une transformation de l’humanité » et elles aboutiront « à une fusion des technologies des mondes physique, numérique et biologique ». Ces « changements révolutionnaires » pourraient voir « l’unité familiale traditionnelle » être « remplacée par un réseau familial international ». Si le livre abordait diverses mutations possibles, alternant la conjugaison au futur et celle à l’impératif, il ne laissait planer aucun doute sur les velléités messianiques de l’auteur et de ses partenaires : « Nous créerons une véritable civilisation globale ».

    L’une des nouvelles têtes pensantes de Davos, Yuval Noah Harari , est encore plus radical dans sa manière d’aborder les sociétés humaines. Ce maitre de conférences à l’université hébraïque de Jérusalem était apparu au grand public en 2014 avec Sapiens , livre qui prétendait présenter « une brève histoire de l’humanité » en quelques centaines de pages. Deux ans plus tard, il assurait pouvoir décrire notre futur dans Homo deus . Mais ce sont dans ses allocutions à Davos et diverses interviews filmées que son matérialisme total et sa pensée eschatologique apparaissent avec éclat. Il y emprunte le même vocabulaire informatique que Klaus Schwab.

    Selon l’intellectuel, les êtres humains seraient devenus « des animaux piratables […]. Toute cette idée selon laquelle les humains ont un esprit, une âme, un libre-arbitre, c’est terminé ». Avec la puissance de la donnée électronique, nous pourrions bientôt « réingéniérer l’avenir de la vie […]. Si nous y parvenons vraiment, cela ne sera pas seulement la plus grande révolution dans l’histoire de l’humanité, ce sera la plus grande révolution en biologie depuis le tout début de la vie il y a quatre milliards d’années […]. Après quatre milliards d’années façonnées par la sélection naturelle, nous entrons dans l’ère de la vie inorganique façonnée par l’intelligence ». 1

    Ce type de citations auraient pu remplir un livre entier. Elles montrent que les esprits révolutionnaires n’ont pas de limites sur le plan intellectuel . Mais dans la pratique , à quoi faut-il s’attendre ?

    1. Interview par l’université hébraïque de Jérusalem en 2020. Conférence au Forum de Davos 2018.
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      Le libre échange contre la destructrice idéologie étatiste

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Saturday, 21 January, 2023 - 03:50 · 7 minutes

    Par Connor O’Keeffe.

    Après la crise financière de 2008, des appels ont retenti dans les publications de l’establishment et les bureaux exécutifs de Wall Street pour dire que nous assistions à la mort de la mondialisation. Ces appels se sont amplifiés et multipliés après le Brexit , l’élection de Donald Trump , la pandémie et l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Pourtant, les données semblent contester ce récit. Le commerce mondial a atteint un niveau record de 28 500 milliards de dollars l’année dernière et les projections prévoient une croissance en 2023. Le rythme devrait toutefois ralentir. Cette situation s’explique moins par un problème lié à la mondialisation elle-même que par les revers historiques qu’elle a subis.

    Avant de poursuivre, il est important de définir certains termes.

    La mondialisation se produit lorsque les sociétés du monde entier commencent à interagir et à s’intégrer économiquement et politiquement. Le commerce intercontinental vécu à l’époque de la marine à voile et via la route de la soie sont les premiers exemples de mondialisation. La mondialisation a réellement pris son essor après la Seconde Guerre mondiale et a reçu un nouvel élan avec l’adoption généralisée d’Internet. Il est important de noter que dans le discours courant la mondialisation inclut à la fois les activités économiques volontaires entre les peuples de différentes nations et les activités géopolitiques involontaires des États.

    En revanche, Ian Bremmer définit le mondialisme comme une idéologie qui appelle à une libéralisation du commerce et à une intégration mondiale du haut vers le bas, soutenues par une puissance unipolaire. Les étatistes croient que les échanges commerciaux entre les personnes sont littéralement impossibles sans États ; ce n’est que lorsqu’un groupe revendique le monopole légal de la violence, puis construit des infrastructures, assure la sécurité, documente les titres de propriété et sert d’arbitre final des conflits qu’un marché peut exister. Le mondialisme est l’application de cette perspective au commerce international. Les mondialistes pensent qu’une gouvernance mondiale descendante, appliquée et sécurisée par une superpuissance unipolaire, permet la mondialisation.

    Mais, comme les étatistes à une échelle plus locale, le point de vue mondialiste est logiquement et historiquement erroné. Le commerce mondial était déjà bien engagé avant la première tentative majeure de gouvernance mondiale, la Société des Nations, en 1919. L’objectif déclaré de la Société était d’assurer la paix et la justice pour toutes les nations du monde par la sécurité collective. Elle s’est effondrée au début de la Seconde Guerre mondiale et a échoué lamentablement. Mais le mondialisme en tant qu’idéologie a trouvé sa place après la guerre. L’Europe a été dévastée. Les États-Unis et l’URSS sont alors les deux seuls pays capables d’exercer un pouvoir à l’échelle mondiale.

    Ainsi commença l’ère de mondialisation la plus rapide de l’histoire. Le commerce a explosé alors que les gens se remettaient de la guerre. Le projet mondialiste a également pris son envol avec la création des Nations Unies et de la Banque mondiale. Le mondialisme n’est limité que par les différences idéologiques entre les deux superpuissances. L’URSS voulait soutenir les révolutions tandis que les États-Unis visaient une libéralisation du commerce du haut vers le bas – ce qui a éloigné les récents alliés et plongé le monde dans la guerre froide.

    Aux États-Unis, les « néolibéraux » et les néoconservateurs ont dominé le courant politique grâce à leur mission commune d’apporter les marchés et la démocratie au monde sous la menace d’une arme et financés par les contribuables américains. Heureusement pour eux, le rythme auquel leurs interventions à l’intérieur et à l’extérieur détruisaient la société américaine était plus lent que celui des Soviétiques. L’abolition des prix et de la propriété privée a finalement conduit à l’effondrement de l’URSS au début des années 1990. Avec la défaite de leur principal adversaire, les États-Unis ont réalisé l’un des principes centraux du mondialisme, l’unipolarité.

    Dès le début, l’establishment américain s’est gavé de sa nouvelle influence planétaire. Par le biais de nouvelles organisations internationales comme l’Organisation mondiale du commerce, des accords de « libre-échange » ont été introduits. Certains font des centaines de pages alors que tout ce que le libre-échange exige vraiment, c’est une absence de politique. Les États-Unis ont fait naviguer leur marine sur les océans du monde entier en promettant de sécuriser les voies de navigation à la manière des patrouilleurs des autoroutes mondiales. Grâce à la promesse d’une sécurité militaire américaine et au financement d’organisations de gouvernance internationale, les contribuables américains ont été contraints de subventionner le commerce mondial.

    Comme le souligne Murray Rothbard dans Man, Economy, and State with Power and Market , le commerce international n’existe pas dans un marché véritablement libre. Les nations existeraient toujours mais elles seraient des poches de culture plutôt que des unités économiques. Toute restriction étatique sur le commerce entre les personnes en fonction de leur localisation est une violation de leur liberté et un coût pour la société. La plupart des économistes du marché libre le comprennent et plaident en conséquence contre les restrictions étatiques. Mais les subventions au commerce international sont également contraires au marché libre. La position correcte du marché libre est l’absence totale de politique des deux côtés. Pas de restrictions ni de subventions. Laissez les gens choisir librement avec qui ils font des affaires. Il ne devrait pas y avoir de mainmise sur l’une ou l’autre extrémité de l’échelle.

    L’intégration économique était loin d’être le seul objectif du régime américain pendant sa période unipolaire. Trop de gens avaient acquis richesse, pouvoir et statut pendant la guerre froide en faisant partie de la classe guerrière américaine. Malgré l’effondrement total de l’URSS, la dernière chose que les États-Unis voulaient faire était de déclarer la victoire et d’abandonner leur position privilégiée. Au lieu de cela, les États-Unis se sont démenés pour trouver un nouvel ennemi afin de justifier le maintien de ces privilèges. Leurs yeux se sont posés sur le Moyen-Orient où ils allaient, à terme, lancer huit guerres inutiles qui ont tué toute notion d’un « ordre international fondé sur des règles ». L’unipolarité américaine a donné raison à l’Albert Jay Nock : les gouvernements ne sont pacifiques que dans la mesure où ils sont faibles.

    Ce désir institutionnel de guerre allait semer les graines de la destruction pour le moment unipolaire des États-Unis. Alors que les États-Unis éviscéraient toute notion de défense d’un ordre fondé sur des règles par leur aventurisme au Moyen-Orient, la tension couvait en Europe de l’Est et en Asie orientale. À la grande joie des entreprises d’armement et des élites de la politique étrangère, les gouvernements russe et chinois sont redevenus les ennemis des États-Unis.

    L’invasion russe de l’Ukraine en février a été une énorme victoire pour la machine de guerre américaine mais elle a également représenté un énorme pas en arrière pour le mondialisme. Les Russes ont fait sécession de l’ordre mondial que les États-Unis avaient dirigé pendant trois décennies. La réaction de l’Occident, fondée sur des sanctions strictes et un désinvestissement économique forcé, a creusé le fossé dans le système mondial.

    Personne ne sait ce que l’avenir nous réserve, mais le rêve mondialiste d’un système singulier de gouvernance mondiale est certainement anéanti dans un avenir proche avec la rupture du bloc russo-chinois. Il y aura de la douleur parce que tant de connexions entre les nations sont contrôlées par les gouvernements ; cependant, un degré significatif de mondialisation est toujours apprécié par les consommateurs du monde entier. Les données contredisent l’idée que la mondialisation est en train de s’inverser. Elle ne fait que ralentir alors que les gouvernements tentent d’entraîner les consommateurs dans leur quête de désinvestissement de l’autre côté.

    Malgré les affirmations selon lesquelles la mondialisation est morte, le commerce international est bel et bien vivant. Mais le mouvement vers un monde interconnecté ralentit alors que l’idéologie du globalisme connaît son plus grand revers depuis des décennies. L’amalgame étatiste entre la gouvernance mondiale unipolaire et le commerce international explique d’où viennent ces affirmations et pourquoi elles sont erronées.

    Sur le web

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      Mondialisation et mondialisme, il ne faut pas confondre

      Yves Ronsse · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 24 November, 2022 - 04:00 · 13 minutes

    « Mal nommer les choses, c’est ajouter aux malheurs du monde » ( Albert Camus ).

    Dans un article précédent , j’avais déjà souligné qu’il ne fallait pas confondre écologie et écologisme. Aujourd’hui on accuse souvent la mondialisation de maux qui en fait relèvent du mondialisme.

    La mondialisation est un phénomène essentiellement économique : ce terme désigne l’extension des échanges internationaux à l’échelle de la planète, dépassant donc celle d’un pays, d’un groupement de pays, d’un continent. Il est synonyme de globalisation. Ce phénomène fait partie de l’histoire évolutive de l’humanité et résulte des progrès incessants des communications et contacts entre groupes humains.

    Le mondialisme est une idéologie purement politique dont le but est d’uniformiser et homogénéiser le monde, d’effacer les différences civilisationnelles, les us et coutumes, les particularités des différents peuples de la Terre et in fine d’aboutir à leur réduction à un troupeau d’individus indifférenciés qu’il serait facile de gouverner en leur imposant des règles bureaucratiques identiques à l’aide de dispositifs contraignants plus ou moins automatisés : carte crédit social à la chinoise , carte empreinte carbone individuelle, pass vaccinal etc.

    S’il est vrai que la mondialisation rend possible le mondialisme, il n’est pas du tout inéluctable que ce dernier triomphe. On peut parfaitement profiter de la mondialisation en conservant la diversité des pays, leur richesse propre, les particularités des uns et des autres, notamment culturelles : échanger ne veut pas dire se couler dans un moule uniforme.

    La mondialisation est bénéfique

    Les échanges ont été un moteur du progrès de l’humanité depuis la nuit des temps : copier chez le voisin ce qui marche mieux que chez nous, l’échange des techniques les plus efficaces, le commerce des biens et des services, le passage du « sauvage » au « civilisé », du plus sommaire au plus complexe, du moins développé au plus développé… tout cela est une évolution naturelle qui s’épanouit aujourd’hui dans la mondialisation.

    Dans l’histoire récente, la mondialisation a en moyenne enrichi tout le monde et réduit significativement les inégalités entre pays riches du Nord et pays pauvres du Sud. Le taux de pauvreté a dégringolé, passant en moins de 20 ans de 70 % à 45 % sous le seuil absolu de 5,5 dollars par jour. Le PIB par habitant des pays développés (OCDE) a grimpé et le rapport entre les PIB par habitant des pays riches (OCDE) et celui des autres (non-OCDE) a baissé spectaculairement : de 20 en 1999, il est passé à 7,5 en 2018.

    À côté des effets indubitablement bénéfiques de la mondialisation pour l’humanité dans son ensemble, elle peut aussi avoir des effets négatifs pour certains groupes humains. Mais elle est un fait contre lequel certains groupes peuvent s’insurger, mener des combats de retardement, mais qu’ils ne peuvent pas arrêter, pas plus qu’on ne peut vider la mer avec une cuillère.

    Il est parfois tentant pour un pays de s’isoler, mais ce sera à son détriment. À titre d’exemple, il suffit de comparer les évolutions au XX e siècle de l’Argentine d’une part et d’autre part des pays du sud-est asiatique tels que la Corée du Sud , Singapour ou Taïwan .

    « Les politiques autarciques sont d’autant plus catastrophiques que ces économies en voie de développement sont petites. Le PIB total de l’Argentine [en 1998] correspondait à peu près à celui de la ville de Philadelphie. Imaginez ce qui arriverait si le conseil municipal décidait d’interrompre toute relation avec l’extérieur de la ville : les habitants de Philadelphie devraient alors produire l’ensemble des biens et services qu’ils consomment, fournir la totalité des capitaux nécessaires à leur développement, etc. Le niveau de vie des habitants s’effondrerait rapidement. C’est exactement ce qui s’est passé en Argentine; qui a vécu repliée sur elle-même pendant la majorité du XX e siècle, alors que les pays ouverts sur le monde, comme la Corée du Sud, Singapour et Taiwan ont enregistré des taux de croissance parmi les plus élevés du monde. » Nicholas Gregory Mankiw – Principes de l’Économie

    Il y a cependant, au sein des différents pays (notamment les plus développés) des groupes perdants  dans la mondialisation, comme aujourd’hui les classes moyennes européennes et américaines, ce qui explique largement qu’une mauvaise opinion sur la mondialisation se répande dans ces pays. Ces conséquences sont aggravées lorsque l’étatisme qui règne dans ces pays ne permet pas aux individus de développer librement leurs capacités naturelles et les handicapent dans la concurrence mondiale (voir la conclusion).

    L’idéologie du mondialisme s’est répandue dans les classes dirigeantes occidentales en dépit du fait que la civilisation occidentale avait jusqu’ici privilégié la liberté de l’individu et combattu victorieusement, mais au prix fort, les idéologies précurseuses du mondialisme : fascisme, nazisme, communisme .

    Cette victoire encore précaire est aujourd’hui menacée par le dernier avatar de ces idéologies, l’écologisme, lequel a trouvé dans le « réchauffement » climatique la reine des excuses pour imposer ses vues. Derrière toutes ces idéologies collectivistes se tient en embuscade le malthusianisme, un antihumanisme qui prône sous le nom de décroissance le génocide d’une bonne partie de l’humanité, en agitant la peur du manque de ressources face à la « surpopulation » 1 .

    Il est d’ailleurs curieux de constater comment cet antihumanisme renaît perpétuellement de ses cendres (Club de Rome, Ehrlich …) malgré les démentis que lui apporte la réalité, et arrive toujours à se greffer sur les nouvelles modes intellectuelles quelles qu’elles soient.

    Mais rassurez-vous bonnes gens, l’objectif de l’ écologisme malthusien , c’est-à-dire l’attrition de la masse humaine, sera obtenu progressivement et « humainement » – une « euthanasie » en quelque sorte – par des moyens « doux » : arrêt des soins coûteux qualifiés d’acharnement médical, abandon des recherches médicales, promotion de l’avortement, désincitation à la natalité, retour de la mortalité infantile ; tout cela autant que possible en obtenant le consentement volontaire des victimes et sinon par coercition à la chinoise (« nécessité fait loi » : c’est pour votre bien, c’est pour sauver la planète…).

    Les démocraties peuvent-elles réagir ?

    Si l’on suit les philosophes de l’ École machiavélienne qui ont beaucoup à nous apprendre sur les conditions de gouvernance des peuples, il est patent qu’aucun pays, même une démocratie, ne peut être gouverné directement par une majorité. C’est une simple impossibilité pratique.

    Il en résulte que ce sera toujours une minorité qui tiendra les rênes du pouvoir après avoir été élue par une majorité. La tentation permanente de la minorité gouvernante est de se transformer en oligarchie et de se maintenir au pouvoir, souvent en s’octroyant tous les moyens d’influencer le peuple. Dans un pays vraiment démocratique avec une bonne Constitution, le peuple est protégé par des contre-pouvoirs (d’où la séparation du législatif, de l’exécutif et du judiciaire) et il se produit régulièrement une alternance qui gêne la perpétuation d’une oligarchie.

    Mais l’évolution de la deuxième moitié du XX e siècle dans les États-nations a entraîné un gonflement de plus en plus important de l’État, sous le nom d’ État-providence , ce qui a résulté d’un côté dans une inefficacité croissante (l’État veut tout faire mais n’arrive plus à le faire bien), d’un autre côté dans la mise à disposition des oligarchies au pouvoir de moyens de plus en plus importants pour imposer leurs vues et éviter d’être remplacées. Quand un grand nombre de citoyens dépendent matériellement des pouvoirs publics pour gagner leur vie, il devient très difficile de se révolter.

    Une des conditions pour le maintien de l’oligarchie est la diminution de la liberté d’expression et la généralisation d’une bien-pensance politiquement correcte imprégnant les médias de masse subventionnés par l’État aux mains de l’oligarchie. Cela finit par rendre la propagande dans ce genre de démocratie assez semblable dans ses effets, sinon dans ses moyens, à celle qui règne dans les régimes collectivistes autoritaires.

    Cette évolution largement avancée au niveau de l’État-nation se poursuit naturellement au niveau international en donnant naissance à une sorte de caste supranationale qui englobe les oligarchies nationales et leurs délégués dans les organismes internationaux et qui vise la gouvernance mondiale . Elle s’empresse d’adopter l’idéologie mondialiste qui offre la plus magnifique justification pour imposer son pouvoir : « les problèmes sont mondiaux, donc nous devons trouver des solutions mondiales ». L’ exemple des COP est emblématique : des personnes non élues forment des délégations pléthoriques qui décident pour toute la population.

    La liberté individuelle se trouve ainsi face à sa plus grande menace : une sorte de dictature universelle qui verrait une alliance de fait entre les pays dits démocratiques et les dictatures collectivistes, bref l’ État mondial .

    Nous en voyons déjà les prémisses dans l’Union européenne dont l’ évolution négative est très inquiétante ; cette union à qui, justement, les États-nations d’Europe ont confié de plus en plus de prérogatives et qui, depuis quelques décennies, promeut et impose des politiques contre-productives nuisibles à l’intérêt de ses citoyens, à l’opposé des objectifs du projet européen initial, allant jusqu’à remettre en cause les précieux acquis de celui-ci.

    À l’origine le projet européen était enthousiasmant

    Il ne s’agissait que de coopérations entre un nombre réduit d’États-nations pour des bénéfices économiques clairs. Il a apporté à l’Europe paix et prospérité 2 . Mais progressivement, il s’est transformé en s’appuyant sur des institutions à l’apparence démocratique, Commission et Parlement, qui tentent de vider les États-nations de leur pouvoir d’action. Ceci au profit d’une caste supranationale de décideurs hors-sol, largement détachée de tout véritable contrôle démocratique, avec la complicité des oligarchies nationales au pouvoir dans les États-membres.

    La guerre en Ukraine avec les sanctions à l’encontre de la Russie fournit actuellement aux dirigeants des pays européens une belle excuse pour justifier et masquer les résultats catastrophiques de leurs décisions passées, notamment en matière de politique énergétique, laquelle conditionne tout le reste. La situation en Europe ne serait guère meilleure s’il n’y avait pas de guerre, tellement les stratégies (ou non-stratégies) appliquées ont été désastreuses pour les citoyens européens.

    Quand on considère un certain nombre de décisions (liste non exhaustive) que l’UE tente d’imposer, soit par réglementation, soit par pressions économiques et financières, on ne peut manquer d’être abasourdi et de se poser la question : pourquoi diable continuellement se tirer une balle dans le pied ?

    Sabotage de l’industrie nucléaire

    Sous l’ impulsion de l’Allemagne et en corollaire, c’est un gaspillage éhonté de moyens financiers pour promouvoir des énergies intermittentes inefficaces et somme toute inutiles.

    Désindustrialisation accélérée

    Elle est due notamment aux réglementations étouffantes et encore plus à l’augmentation insupportable du prix de l’énergie, entraînant une perte générale de compétitivité et une multiplication des délocalisations .

    Suicide annoncé de l’industrie automobile européenne

    L’Europe abandonne son avantage compétitif dans les moteurs thermiques pour laisser la place à la Chine. Celle-ci devient incontournable pour les véhicules électriques et ne dédaigne pas non plus de prendre la place des Européens dans les moteurs thermiques pour lesquels il y aura toujours une clientèle ailleurs qu’en Europe.

    Suicide annoncé du secteur agricole

    Une attaque vicieuse contre les paysans leur enjoint d’abandonner les techniques efficientes d’agriculture et d’élevage qui ont fait leurs preuves au profit de (non-)techniques biologiques. Certes sympathiques mais incapables de nourrir non seulement les Européens mais aussi le reste du monde, elles mettent en danger non seulement les exportations mais aussi la sécurité alimentaire de l’Europe.

    Nous pourrions aussi évoquer l’ interdiction imbécile des recherches sur les OGM , mais n’en jetons plus, ces errements ont déjà été amplement dénoncés dans Contrepoints et ailleurs.

    Mondialisation : que faire ?

    La question de Lénine (adaptable à toutes les circonstances) mérite d’être posée.

    La population de nos pays se révoltera-t-elle contre la caste alors que c’est elle-même qui l’a mise au pouvoir ?

    Restera-t-elle anesthésiée par la propagande politiquement correcte des médias aux ordres ?

    Avant d’agir, il faut comprendre. Qu’est-ce qui motive la caste, pourquoi agit-elle ainsi ? Comment s’est-elle ralliée au mondialisme comme un seul homme ?

    Dans son excellent livre Knowledge and decision , dont on doit regretter l’absence de traduction en français, Thomas Sowell montre qu’on commet souvent l’erreur d’analyser les processus de décision sur la base des résultats espérés ; si ceux-ci ne sont pas conformes à ce qu’on attend, on en rejette la faute soit sur les décideurs soit sur les circonstances extérieures, soit les deux.

    Il faut au contraire analyser les processus de décision sur base de leurs caractéristiques intrinsèques, c’est-à-dire à partir des contraintes qu’ils imposent aux décideurs et des incitants qui animent ceux-ci, autrement dit une analyse systémique du mécanisme, indépendamment du contenu.

    « … Par exemple, on souligne souvent l’inefficience ou la stupidité d’une bureaucratie en présupposant que les bureaucrates poursuivent les buts assignés par la législation qui a autorisé leur existence, mais on voit qu’ils répondent en fait aux incitants qui prévalent dans leur hiérarchie et qu’ils poursuivent leurs propres buts personnels ou organisationnels, ce faisant ils ne sont pas du tout inefficients, encore moins stupides […] Il s’ensuit que remplacer les personnes supposées inefficientes ou stupides par des personnes plus intelligentes […] ne permettra pas d’améliorer la réalisation des buts sociaux visés par la législation, tant que la structure des incitants et contraintes reste la même. »

    Il est donc manifeste que le système démocratique tel qu’il fonctionne actuellement en Europe et en Occident est vicié et inefficace. La cause est principalement le gonflement des structures étatiques, nationales comme supranationales.

    Il nous faut combattre pour revenir à une société authentiquement libérale, autrement dit libérée des chaînes mises en place par « ceux qui savent », faire confiance à la créativité et au bon sens des citoyens pour engendrer « l’ordre spontané » dont parlent les économistes de l’École autrichienne, tout en conservant un État minimal concentré sur ses véritables fonctions régaliennes .

    En paraphrasant Ronald Reagan, on peut dire :

    « L’État tel qu’il est devenu, hypertrophié, inefficace et tyrannique, n’est pas la solution, c’est le problème ».

    1. Ropert Zubrin –  « Merchants of despair », Encounter Books, 2013
    2. Herman Van Rompuy, Président du conseil européen – conférence à l’asbl « Belgium For Success » le 5/3/2015
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      La Russie : un pays en perte d’influence

      Yves Montenay · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 4 November, 2022 - 03:40 · 11 minutes

    Depuis le début de la guerre en Ukraine , les déclarations officielles russes perdent de plus en plus de crédibilité. Mais à l’inverse, on remarque une activité intense de Moscou sur les réseaux sociaux, dans la cyber-guerre, dans « l’achat » des personnalités politiques et dans des manifestations constellées de drapeaux russes dans certains pays africains… Finalement, l’influence russe est-elle en progression ?

    Commençons par un rappel historique.

    Une puissante nostalgie impériale

    La Russie a été un grand empire, et Vladimir Poutine veut marquer l’histoire en lui rendant son rang.

    Bien que pur produit du système soviétique, le président russe n’hésite pas dans ses discours à se référer à la Sainte Russie impériale et s’appuyer pour cela sur l’Église orthodoxe nationale.

    Les frontières de la Sainte Russie s’étendaient – en 1914, à la veille de la Première Guerre mondiale – de la Sibérie à la Pologne, en passant par l’Asie centrale, l’ensemble couvrant un territoire de 22 millions de km²

    En 1917 la révolution bolchévique fait éclater l’empire russe.

    Sous la pression allemande, le nouvel État cède dans un premier temps une partie de ses territoires en Pologne. Les pays baltes et la Finlande en profitent pour prendre leur indépendance. L’Ukraine, les pays du Caucase et d’Asie centrale tentent également de le faire, avant d’être repris.

    En 1945, sa contribution à la victoire finale contre le nazisme permet à l’URSS de reprendre une partie de la Finlande, de la Pologne et les trois pays baltes ; et de transformer en vassaux les États d’Europe centrale : Pologne, Tchécoslovaquie, Hongrie, Roumanie, Bulgarie et Allemagne de l’Est. Seules la Grèce et la Yougoslavie réussissent à échapper à son emprise.

    L’Empire éclaté Hélène Carrère d Comme la Sainte Russie, l’URSS et ses vassaux forment un empire regroupant un ensemble hétérogène de nations, de peuples, de cultures et de religions qui ne tenait que par la seule puissance du Parti communiste.

    Mais sa faiblesse fut décrite de manière prémonitoire dès 1978 par Hélène Carrère d’Encausse dans son ouvrage L’Empire éclaté : la révolte des nations en URSS :

    « Que restera-t-il de l’URSS à l’aube du III e millénaire ? De la réponse qui sera apportée à cette question dépend l’avenir d’une part importante du continent européen et l’équilibre du continent tout entier. Sans doute Gorbatchev doit-il résoudre le lancinant problème de l’économie soviétique. Mais, plus encore, il doit trouver une réponse à la révolte des nations. »

    L’épreuve de la guerre en Ukraine

    C’est en héritier de cette histoire séculaire que Vladimir Poutine annexe la Crimée en 2014, met la main sur le Donbass puis envahit Ukraine. Les deux premières étapes renforcent son idée de mollesse de l’Occident.

    Les proclamations officielles deviennent de plus en plus éloignées de la réalité, à commencer par « nous allons délivrer l’Ukraine d’une dictature nazie ». Je me crois revenu à l’époque de Brejnev.

    L’émotion déclenchée par l’invasion de l’Ukraine dans le grand public occidental décrédibilise les canaux russes, alors que jusque-là le scepticisme était limité à certains milieux politiques.

    Pourtant, depuis le début de la guerre en Ukraine, les sites diffusant de la propagande prorusse sur Internet se sont multipliés, et ce malgré le blocage décrété par la Commission européenne des médias russes favorables au Kremlin, comme RT ou Sputnik.

    C’est ce qu’a révélé une enquête de l’institut new-yorkais NewsGuard en août 2022, qui dénombre 250 sites diffusant de la propagande pro-Kremlin, une propagande russe que les médias occidentaux s’attachent cependant à déconstruire patiemment, notamment en documentant les massacres de Boutcha, en vue de futurs procès.

    Si le conflit ukrainien a été l’occasion de décrédibiliser la propagande russe en Occident, qu’en est-il en Asie et en Afrique ?

    L’influence de la Russie en Asie

    Les vieilles complicités avec l’URSS ont maintenant disparu.

    Mao et ses successeurs ont coupé les ponts depuis longtemps. Même le Vietnam, surtout depuis la mort de Hồ Chí Minh qui adhéra au Parti communiste en France dès 1924 ou l’Inde, surtout depuis la prise de pouvoir par les libéraux nationalistes de Narendra Modi .

    La Chine est officiellement alliée à la Russie , mais on sent bien que le prestige russe est atteint par les ratés militaires, et que la Chine ne veut pas payer son soutien à un perdant par une coupure de ses débouchés commerciaux en Occident.

    Le reste de l’Asie est encore plus réservé, notamment parce que contrairement à ce qui se passe en Chine l’information occidentale y est reçue. En sens inverse, l’Ukraine, c’est loin et mal compris. Les États se bornent donc à rechercher leur intérêt économique (du pétrole russe bradé, par exemple) et par ailleurs se cramponnent au principe de l’intangibilité des frontières parce qu’ils ont presque tous des mouvements séparatistes. Donc changer de place la frontière entre la Russie et l’Ukraine ne leur plaît pas.

    Même des États traditionnellement proches de la Russie, comme l’Inde ou ceux d’Asie centrale, restent évasifs malgré les appels du pied de Moscou.

    Reste l’Afrique.

    L’influence russe en Afrique

    Moscou avait préparé le terrain en attirant dès les années 1920 et 1930 les personnalités les mieux placées pour l’avenir. Il s’agissait de mettre en place la stratégie de Lénine de faire s’écrouler des pays capitalistes en les privant de leurs colonies.

    Certaines des personnalités approchées s’éloignèrent dans un deuxième temps de l’URSS comme Senghor au Sénégal ou Houphouët-Boigny en Côte d’Ivoire, et plus tard Nelson Mandela en Afrique du Sud.

    D’autres restèrent fidèles à Moscou et prirent le pouvoir à l’occasion des indépendances à partir des années 1950.

    Au milieu des années 1980, l’Union soviétique signe des centaines d’accords avec les pays africains. Environ 25 000 Africains sont formés dans les universités et les collèges techniques soviétiques, dans de multiples domaines, et des milliers sortent des académies militaires et politiques de l’URSS. Voir notamment les travaux de l’ELITAF .

    De même, un grand nombre de dirigeants africains bénéficient à titre personnel du soutien et de la formation proposés par l’URSS.

    C’est ainsi par exemple que le chef d’état-major Ahmed Gaïd Salah, ancien « homme fort » d’Algérie, décédé en 2019, a été formé à l’école d’artillerie de Vystrel, dans la banlieue de Moscou, tout comme son camarade de promotion, le général Benali Ben Ali, commandant de la garde présidentielle depuis 2015.

    Les liens avec le continent africain sont donc nombreux et anciens.

    À partir du milieu des années 2000, Vladimir Poutine ramène la Russie sur la scène africaine. Il officialise son influence par le sommet de Sotchi en octobre 2019 (étude de Thierry Vircoulon, chercheur associé à l’IFRI).

    Quand la situation est mûre sur le terrain, Evgueni Prigojine, oligarque proche de Vladimir Poutine, y installe la milice Wagner , ce qui dispense le Kremlin d’envoyer officiellement ses troupes. Cette milice est maintenant installée en Libye, au Soudan, en République Centrafricaine et au Mali. Elle s’est fait remarquer par des massacres de civils qu’elle a tenté d’imputer dans un cas à l’armée française. Elle est payée par un prélèvement sur les recettes des mines d’or de ces trois derniers pays et utilise les avions de transport de l’armée russe.

    Pour asseoir son influence en Afrique, Moscou entretient un sentiment anti-français par les réseaux sociaux et les illustre par les drapeaux russes brandis à toute occasion au Mali et au Burkina Faso. Reste à savoir qui fournit ces drapeaux et si ces manifestants sont payés par la Russie…

    Remarquons que Pékin utilise les mêmes arguments, à savoir de « protéger l’Afrique du néocolonialisme occidental » . Mais son action est différente : pas de mercenaires militaires Wagner, mais une participation aux contingents de l’ONU et une présence économique, allant d’un important commerce aux infrastructures, ce que la Russie ne semble pas en état de faire.

    Moscou et Pékin ont aussi en commun de rester discrets sur leur propre colonialisme. Nous avons parlé de l’empire russe, mais la Chine est également un empire asservissant le Tibet, Hong Kong, le Sinkiang, sans oublier l’annexion de fait des îles de la mer de Chine du Sud et les menaces envers Taïwan .

    Les États-Unis ont subi d’importants revers, mais…

    Pékin et Moscou profitent de la perte d’influence des États-Unis sur la scène internationale. Sur le plan militaire, leurs échecs en Irak, la décision du président Obama de ne pas intervenir en Syrie à l’été 2013 ou encore le désastreux retrait d’Afghanistan en août 2021, ont durablement écorné leur image de défenseur de la démocratie et des libertés dans le monde.

    De même, sur le plan diplomatique, les décisions du président Trump de retirer unilatéralement les États-Unis de l’Accord de Paris sur le climat, de supprimer les subventions à l’OMS et plus globalement de préférer les relations bilatérales aux échanges multilatéraux ont contribué à cette perte d’influence.

    Il reste que les universités américaines continuent d’attirer et de former les esprits les plus brillants de la planète tandis que les immigrants de tous niveaux continuent à affluer vers les États-Unis, alors que les Russes émigrent et que les Chinois sont bloqués chez eux.

    Les États-Unis ou l’Occident ?

    Remarquons que Xi Jinping et Vladimir Poutine fustigent de plus en plus souvent « l’Occident », plutôt que les États-Unis.

    C’est ainsi qu’en septembre 2022 Vladimir Poutine a lancé à une assemblée de dirigeants politiques et religieux russes :

    « L’Occident divise les peuples et n’agit que dans son intérêt, il pense pouvoir commander le monde. Ils ne veulent pas que nous soyons libres, ils veulent nous voir comme une colonie. Ils ne veulent pas d’une coopération égale mais d’un pillage, ils ne veulent pas nous voir comme une société libre mais comme une foule d’esclaves sans âme ».

    « Eux contre nous ». Vladimir Poutine présente la Russie comme une nation en danger et assiégée, contrainte de se défendre. Un état d’esprit assez proche de celui de Xi Jinping pour qui « La sécurité nationale constitue le fondement du renouveau de la nation » et qui dénonce régulièrement le danger des « idées occidentales ».

    La sécurité nationale remplace ainsi l’économie comme élément central de l’avenir de la Chine comme de la Russie, à mon avis, parce que les deux sentent que l’avenir économique peut leur échapper et que les aspirations de leurs propres peuples sont de plus en plus étrangères à leur système autocratique. Ils ripostent par un redoublement de propagande, sans que cette dernière génère pour autant de l’influence.

    Reste une dernière corde à l’arc de la propagande : le conservatisme social.

    Le conservatisme social et religieux, dernier atout de Poutine

    Vladimir Poutine s’appuie sur le désarroi des traditionalistes constatant que des repères aussi élémentaires que ceux du genre se trouvent remis en cause. Cela non seulement en Russie, mais aussi en Europe. Cette offensive conservatrice a de plus l’avantage de diviser les pays occidentaux.

    Ainsi une droite nationaliste, conservatrice et identitaire que l’on trouve en Hongrie avec Viktor Orban , en Italie avec Giorgia Meloni , en Suède avec le parti des Démocrates, ou encore en France avec le Rassemblement national, a généré une certaine sympathie pour la Russie. Mais là aussi, l’attaque de l’Ukraine a obligé à mettre cette sympathie de côté.

    Et il n’y a pas que l’Europe, car la réaction conservatrice se retrouve dans une grande partie des élites du reste du monde.

    Ces élites sont profondément choquées par la pression de l’Occident sur la liberté des minorités sexuelles et par l’idée, par exemple, qu’un homme puisse être transformé en femme, une aversion dont l’Occident n’a pas toujours pleinement conscience.

    Vladimir Poutine et Xi Jinping s’appuient sur ce sentiment pour leur influence.

    Ce conservatisme social est utilisé sur le plan interne par Pékin et Moscou pour limiter leur déclin démographique. Leur idéal est une « vraie femme » à la maison, élevant trois enfants.

    Ma conclusion personnelle est que si la politique d’influence russe ressemble quelque peu à celle de la Chine, qui impressionne davantage, il n’est pas du tout certain qu’elle soit efficace.

    La liberté d’information et d’expression occidentale la met face à ses contradictions, et si elle fait encore illusion en Afrique, cela ne devrait pas durer. Notamment au fur et à mesure que le coût financier et humain de Wagner sera ressenti par les Africains, et si nous lançons des actions plus résolues dans tous les domaines de l’information.

    Sur le web

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      Pourquoi l’Europe va s’appauvrir à vitesse grand V

      news.movim.eu / LeVentSeLeve · Tuesday, 25 October, 2022 - 16:44 · 8 minutes

    Dans un rare accès de lucidité, le commissaire européen Josep Borrell a récemment évoqué la fin à venir de la prospérité – certes très mal répartie – de l’Europe. Dans le monde multipolaire qui se dessine, le Vieux continent ne pourra plus compter sur l’énergie bon marché issue de la Russie et les marchandises peu chères importées de Chine. La dépendance croissante à l’égard de Washington, et tous les risques qu’elle comporte, ne semble pas davantage être prise en compte par les élites politiques, qui espèrent vainement un retour à la « fin de l’histoire ». Article d’Aaron Bastani pour notre partenaire Novara Media , traduit par Jean-Yves Cotté et édité par William Bouchardon.

    Le 10 octobre dernier, Josep Borrell, vice-président de la Commission européenne, a fait une des déclarations les plus importantes de 2022 . Tandis que le gouvernement britannique de Liz Truss essayait d’imiter la politique de Margaret Thatcher, et que les soutiens de l’opposition travaillistes rêvent d’un retour à 1997 (date d’une victoire écrasante de Tony Blair), il a fallu que ce soit un eurocrate qui assène quelques vérités dérangeantes.

    Le constat dressé par Borrell relève de l’évidence depuis une dizaine d’années, mais la classe politique ne s’en aperçoit qu’aujourd’hui : « Notre prospérité a reposé sur une énergie bon marché en provenance de la Russie », a-t-il déclaré, avant d’ajouter : « Les bas salaires des travailleurs chinois ont fait bien plus […] pour contenir l’inflation que toutes les banques centrales réunies. » Borrel a ensuite résumé en une seule phrase lapidaire le modèle économique européen des 30 dernières années : « Notre prospérité reposait sur la Chine et la Russie – l’énergie et le marché. »

    Venant d’un technocrate bruxellois, ce constat est pour le moins saisissant. Les énergies fossiles bon marché appartiennent au passé, tout comme les biens de consommations à bas prix . Ces trente dernières années, tout en devenant dépendante du gaz russe, l’Europe continentale a également bénéficié d’une faible inflation grâce à ses importations depuis la Chine, devenue l’atelier du monde. Pendant les trois décennies qui suivirent la chute du mur de Berlin, les Occidentaux aux faibles revenus pouvaient donc au moins se procurer toute une panoplie de gadgets et une énergie plutôt abordable. Désormais, cette époque est révolue.

    Pendant 30 ans, la faible croissance des salaires fut compensée par une abondance soudaine de biens bon marché, en particulier de produits électroniques, ainsi que par l’expansion du crédit.

    Au Royaume-Uni, cette période, qui s’étend des années 1990 à la pandémie de Covid-19, fut déterminante pour le phénomène politique que fut le blairisme – qui relevait davantage d’une chance historique que des compétences du New Labour ou de la Banque d’Angleterre. Ainsi, la faible croissance des salaires fut compensée par une abondance soudaine de biens bon marché, en particulier de produits électroniques, ainsi que par l’expansion du crédit. Dans la terminologie marxiste, ce système économique mondialisé et reposant de plus en plus sur la dette était la base économique qui permettait la superstructure de la « fin de l’histoire » (pour les marxistes, la superstructure désigne les institutions politiques et l’idéologie d’une époque, qui est déterminée par des rapports de production, appelés “la base”, ndlr). Si des thinks tanks ou des universitaires avaient déjà annoncé la fin de cette époque, le fait qu’un homme d’Etat à la tête de l’UE finisse par le reconnaître acte la mort définitive de cette ère.

    Les mauvaises nouvelles ne s’arrêtent pas là, car Borrell a ensuite souligné combien l’Europe continentale avait délégué sa défense aux États-Unis. La sécurité énergétique de l’Europe est un autre motif d’inquiétude, Borrell précisant également que le fait d’être moins dépendant des énergies fossiles russes ne devrait pas induire une plus grande subordination à Washington. « Que se passerait-il demain si les États-Unis, avec un nouveau président, décidaient d’être moins favorables aux Européens ? ». « On imagine aisément la situation dans laquelle notre dépendance excessive au GNL (gaz naturel liquéfié) importé des États-Unis poserait également un problème majeur. » Pour les atlantistes, c’est une question capitale : est-il souhaitable de remettre notre destin entre les mains d’un Donald Trump ou d’un Ron DeSantis (gouverneur républicain de Floride, fervent soutien de Donald Trump et potentiel candidat en 2024, ndlr) ? Veut-on qu’un individu comme Mike Pompeo décide si l’Europe peut ou non se chauffer ? Dépendre d’une puissance étrangère aussi profondément divisée n’est pas sans risques.

    Borrell a également insisté sur les défis politiques, à la fois internes et externes, auxquels l’Europe est confrontée. À l’intérieur, le danger vient de la progression continue de l’extrême droite, de Giorgia Meloni en Italie à Viktor Orban en Hongrie en passant par le parti Vox en Espagne. A rebours du discours bruxellois classique, il faut d’ailleurs souligner que Borrell n’a pas attribué ce phénomène à l’influence de puissances étrangères perfides, déclarant que la popularité de tels partis correspondent  « au choix du peuple » et non à « l’imposition d’un quelconque pouvoir ». Des propos qui visaient clairement le centre de l’échiquier politique, qui tend à être de plus en plus complotiste, voyant partout la main de Moscou. Si l’extrême-droite gagne du terrain, c’est bien parce que les crises sociales et économiques ne sont pas résolues, et non à cause des usines à trolls de Saint-Pétersbourg – quand bien même l’intelligentsia libérale voudrait qu’il en soit autrement.

    À l’extérieur, l’Europe est confrontée à la montée du nationalisme radical et de formes d’impérialisme dignes du xix e siècle, parfois jusqu’à l’annexion. Cela ne se limite pas à la Russie, qui après avoir annexé la Crimée en 2014 vient de s’emparer de territoires dans l’est de l’Ukraine, mais aussi de l’occupation turque dans le nord de la Syrie – un territoire que le ministre de l’Intérieur turc Süleyman Soylu a déclaré en 2019 comme « faisant partie de la patrie turque ». Ankara a également menacé d’envahir les îles grecques de la mer Égée . Le déclin de la superpuissance américaine signifie que nous entrons vraisemblablement dans une nouvelle phase, dans laquelle l’accaparement des terres vient s’ajouter à un monde multipolaire.

    Le déclin de la superpuissance américaine signifie que nous entrons vraisemblablement dans une nouvelle phase, dans laquelle l’accaparement des terres vient s’ajouter à un monde multipolaire.

    Tout cela est vu avec une profonde consternation dans les capitales européennes, Londres y compris. Alors que le modèle énergétique du continent se désagrège et face à la plus forte inflation depuis des décennies, le découplage avec la Chine semble acté, ce qui exacerbera la hausse des prix. Quand cela se produira, ce sera un tremblement de terre économique pour le consommateur européen, quand bien même des politiciens comme le conservateur britannique Iain Duncan se plaisent à durcir le ton . L’industrie automobile allemande est-elle désavantagée du fait de l’envolée des prix de l’énergie ? Assurément. Il en va de même pour d’autres pays, comme la France et l’Italie, qui ont déjà vu la ruine de leurs industries manufacturières au cours de ce siècle. Mais ajoutez à cela la disparition des biens de consommation bon marché – qui ont servi de palliatif à la stagnation des salaires pendant des décennies – et une vague massive de mécontentement est inévitable. En résumé, les Européens vont s’appauvrir très vite. Les hivers froids ne sont que le début.

    Ajoutons à cela les autres défis que doit relever l’Europe, comme le vieillissement de la population et la faiblesse de l’innovation. Non que l’Europe continentale soit menacée d’effondrement – bien entendu, elle demeure incroyablement riche – mais elle va relativement s’appauvrir. Le prestige de ses capitales va décliner, sauf en matière de tourisme, tandis que l’attrait mondial de sa culture et de son modèle social vont également s’éroder. Les plaques-tournantes mondiales des peuples, des idées et de l’énergie se situeront ailleurs – essentiellement en Amérique du Nord et en Asie. L’Europe deviendra la Venise des continents : belle mais désuète, un musée plus qu’un acteur de l’histoire.

    Pour le Royaume-Uni, désormais à l’écart de l’Union, cela est vrai à double titre. Le pays est un grand importateur net de produits alimentaires et d’énergies fossiles tout en ayant une classe politique qui – contrairement du moins à certaines du continent – refuse de s’atteler sérieusement à une politique industrielle. Pour l’heure, le réflexe des conservateurs britanniques est d’augmenter les réductions d’impôts, tandis que le New Labour ressasse que la mondialisation est une bonne chose . En définitive, ni l’un ni l’autre n’augmenteront le niveau de vie : les marchés punissent les zélateurs des premières, tandis que la mondialisation craque de toutes parts. La confrontation avec la Russie n’est que le début d’un effondrement plus vaste qu’aucun des partis n’a le courage d’admettre.

    L’inflation est là pour durer et, comme le reconnaît Borrell, il faut apporter des réponses sérieuses aux questions énergétiques, commerciales, de croissance et de sécurité. Dans chaque domaine, le bon sens de ces trente dernières années s’est évaporé. Y aura-t-il au Royaume-Uni un politicien d’envergure assez courageux pour le dire ? N’y comptons pas trop. Un État bipartite, avec un système hiérarchique de whips (parlementaires qui veillent à ce que les élus de leur parti soient présents et votent en fonction des consignes du parti, ndlr) qui écrase toute dissension, signifie que la liberté de pensée est une denrée rare à Westminster. Elle n’a pourtant jamais été aussi nécessaire.

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      Le virus a tué l’ordre libéral

      Daniel Hannan · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 5 March, 2021 - 04:40 · 4 minutes

    l

    Par Daniel Hannan .
    Un article du John Locke Institute

    Les choses ne reviendront pas à la normale. L’impact politique et psychologique de la Covid-19 durera des décennies. Le monde vers lequel nous nous dirigeons en ressortira plus pauvre, plus mesquin, plus crispé, plus autoritaire.

    Une épidémie se déclenche désormais dans nos cerveaux. Nous devenons plus prudents et moins tolérants à l’égard de la dissidence. Nous exigeons la fermeté de l’État. Et cette façon de penser ne changera pas quand le virus disparaîtra.

    Les changements suite à la Seconde Guerre mondiale

    Pensez aux changements politiques qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, ce fut  la dernière fois que les gens se sont sentis collectivement menacés à cette échelle. Les restrictions qui étaient censées être introduites dans l’urgence sont restées en place longtemps après la fin de l’urgence : rationnement alimentaire, cartes d’identité, conscription, économie contrôlée.

    Pourquoi ? Parce que les guerres et les épidémies nous renvoient à nos instincts de chasseurs-cueilleurs les plus primaires. Nous devenons plus repliés sur nous-mêmes, plus tribaux, plus collectivistes, plus hiérarchiques.

    En d’autres termes, les grandes perturbations de ce type nous rappellent à quel point l’ordre libéral est contre nature et combien l’individualisme et la prospérité des deux derniers siècles ont été fragiles et contingents.

    La mondialisation réduit la pauvreté, mais nous refusons de l’accepter

    « Le libre-échange, la plus grande bénédiction qu’un État puisse accorder à un peuple, est impopulaire dans presque tous les pays », écrivait Lord Macaulay en 1824. Depuis lors, les revenus mondiaux moyens ont augmenté, selon une estimation prudente, de 3000 %, alors qu’ils n’avaient guère augmenté auparavant.

    La mondialisation et l’ouverture des marchés ont permis de réduire miraculeusement la pauvreté. Prenez les mesures que vous voulez : alphabétisation, longévité, mortalité infantile, éducation des femmes, apport calorique, taille.

    Pourtant, sous l’emprise de nos instincts préhistoriques, nous refusons toujours de l’accepter. Nous nions l’évidence d’une prospérité croissante ; ou bien nous nous disons que l’augmentation du niveau de vie a un coût terrible, que la société est devenue sans âme et matérialiste, qu’il manque quelque chose.

    Chaque mouvement de protestation contre l’ordre libéral moderne – romantisme, existentialisme, fascisme, communisme, fondamentalisme religieux – est un cri torturé de notre homme des cavernes intérieur, qui aspire au collectivisme et à l’autorité du groupe social.

    En sortant de la chrysalide du confinement, nous nous trouvons subtilement transformés. La demande de gouvernements autoritaires de gauche et de droite est plus forte. Il y a davantage de protectionnisme, et donc plus de pauvreté. Il y a moins de tolérance à l’égard de la dissidence. Il y a davantage de politique identitaire, la forme ultime de collectivisme car elle définit les gens, non pas en tant qu’individus, mais en tant que groupe.

    « Ce n’est qu’au début du crépuscule que la chouette de Minerve prend son envol », écrivait Hegel. Il se peut que les idées que nous tenions pour acquises à l’époque moderne – que l’individu est plus qu’une simple partie d’un collectif, que les dirigeants ne devraient pas pouvoir établir les règles au fur et à mesure, que ceux que nous n’aimons pas pourraient encore avoir des choses utiles à dire, que nos relations les uns avec les autres ne devraient pas être définies par la naissance ou la caste – aient été une erreur, une exception.

    Nous arrivons peut-être, pour ainsi dire, à la fin d’un bref âge interglaciaire entre deux longues périodes glaciaires.

    Il est temps de célébrer l’ordre libéral

    Alors que les glaciers se retirent, marquons ce que nous laissons derrière nous. Célébrons le miracle extraordinaire qui a libéré la race humaine de dix mille ans de servitude et qui nous a élevés à un sommet de richesse et de bonheur qui était inimaginable jusque très récemment.

    Reconnaissons les résultats d’un système de marché qui a mis fin à l’esclavage, brisé les tyrannies, élevé le niveau de vie des gens ordinaires, des femmes libérées ainsi que des minorités, un système qui a défendu la dignité de l’individu.

    Célébrons le premier modèle économique qui a permis aux gens de progresser, non pas en aspirant le pouvoir en place, mais en offrant des services à ceux qui les entourent. Faisons le deuil, en passant, de l’ordre libéral qui, avant la pandémie, a épongé les dernières flaques de pauvreté sur cette planète.

    Reconnaissons ce moment capitaliste, où la raison a vaincu le dogme et où les personnes ordinaires ont pu profiter de modes de vie dont les rois médiévaux n’auraient pas pu rêver. C’est une prouesse d’autant plus remarquable qu’elle n’a pas été comprise ou appréciée. Ses bénéficiaires sont restés méfiants et hostiles jusqu’au bout.

    Ce n’est que maintenant, peut-être, alors que nous retournons à notre condition naturelle, que nous apprécions ce que nous perdons.

    Traduction par Justine Colinet pour Contrepoints de The Virus Has Killed the Liberal Order de John Locke Institute

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      La France, cet enfer néolibéral… Non mais vraiment ?

      Nathalie MP Meyer · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 17 February, 2021 - 04:30 · 9 minutes

    néolibéral

    Par Nathalie MP Meyer.

    Je crains que le débat économique en vue de la future élection présidentielle de 2022 ne soit très mal parti. Que l’on se tourne vers la droite ou vers la gauche de l’actuel Président, tout le monde s’accorde à dire que la France nage dans le « néolibéralisme » le plus destructeur depuis au moins trente ans et que l’arrivée d’Emmanuel Macron à l’Élysée a eu pour effet de pousser cette situation à son paroxysme.

    Il conviendrait donc de redresser la barre de toute urgence en redonnant en quelque sorte les pleins pouvoirs à l’État pour faire advenir enfin cette « justice sociale » et, nouveau, cette « justice climatique » qui toussent depuis trop longtemps dans les noires volutes de la mondialisation et de la course effrénée aux dividendes.

    Le mieux, c’est que même Emmanuel Macron en convient. Du « quoi qu’il en coûte » aux doctes discours sur la souveraineté industrielle de la France en passant par pas mal de renoncements sur la réforme de l’État, sans oublier la mise en avant ostentatoire de tout ce que l’État « décaisse » pour nous pour donner corps à un « bilan du quinquennat », il n’est plus question que de protéger les Français d’à peu près tout, dans un déluge de carottes (genre plan vélo ) et de coups de bâton (genre PV darmanesques et contrôles compulsifs de notre amie l’URSSAF).

    Mais difficile d’oublier qu’à une époque, le même Emmanuel Macron racontait non sans complaisance que « l’État n’a pas à payer tout » et que la France dépensait « un pognon de dingue » en minima sociaux. Difficile d’oublier qu’il a eu l’audace de baisser les aides personnalisées au logement (APL) de 5 euros par mois et qu’il a fait un cadeau aux riches de trois milliards d’euros par an en limitant l’assiette de l’ISF au patrimoine immobilier. Et difficile, enfin, d’oublier qu’il a mis fin aux recrutements au statut de cheminot et qu’il a tenté de supprimer les régimes spéciaux de retraite de la SNCF et de la RATP.

    Qui oserait prétendre que tout ceci n’est pas chez lui le signe irréfutable d’un ultra-libéralisme chevillé au corps et la preuve absolue que toute sa politique économique et sociale ne vise qu’à organiser tranquillement la casse du service public au profit des plus riches ?

    Le néolibéralisme, pour la gauche et la droite

    Que la gauche non-macroniste se complaise dans ce constat n’est guère étonnant. Pour elle, peu importe le niveau d’où l’on part, rien ne sera jamais assez collectiviste, étatique et redistributeur tant qu’elle ne sera pas au pouvoir. Comme chacun sait, la France ne pourra passer de l’ombre à la lumière que du jour où un « vrai socialiste » dans le prolongement actualisé du programme commun de la gauche de Mitterrand accèdera au pouvoir. 1981-2021 : un quarantième anniversaire à ne pas manquer !

    À droite, l’affaire est plus complexe. Si la tendance dirigiste et souverainiste incarnée par le général de Gaulle reste très présente chez les Républicains (LR), il existe aussi une fibre plus libérale qu’on pourrait résumer par la célèbre formule de Pompidou « Mais arrêtez donc d’emmerder les Français ! » et qui a notamment pris le dessus lors de la campagne présidentielle de 2017 avec la candidature de François Fillon.

    Mais à l’approche de l’échéance de 2022, force est de constater que la tendance initiale du parti est revenue en première ligne, avec encore plus de force si cela est possible. C’est ainsi que tous les ténors LR se succèdent depuis un an dans les médias pour nous expliquer qu’il faut revenir à la planification qui est « un point d’accord avec la pensée communiste, qui l’a d’ailleurs appliquée avec les gaullistes » ( Aurélien Pradié , Secrétaire général LR), qu’il faut « abandonner la pensée bruxello-budgétaro-néolibérale » et que la France a besoin d’un État-stratège (Julien Aubert, Twitter ), etc. etc.

    Le « néolibéralisme » nous détruit, mais comment ?

    Malgré cela, tous ne sont pas d’accord sur la façon dont le « néolibéralisme » nous détruit. Pour Pradié (ibid.) comme pour beaucoup de ses collègues et pour la gauche, ce sont les politiques d’austérité, ces économies sur l’argent public réalisées par « étroitesse d’esprit » , qu’il faut blâmer. Pour le député LR Olivier Marleix , en revanche – et je dois dire que celle-là, je ne l’avais jamais entendue – la dépense publique a bel et bien augmenté mais uniquement pour réparer socialement les méfaits de la mondialisation néolibérale, alors qu’il aurait fallu utiliser l’agent pour préserver les intérêts stratégiques du pays !

    M. Marleix a raison sur un point, la dépense publique n’a pas cessé d’augmenter, y compris depuis 2017. En 2019, elle a atteint la coquette somme de 1349 milliards d’euros , soit près de 56% du PIB . Par rapport à 2018, cela représentait une croissance de 1,5 % en valeur déflatée. Mais si l’on exclut la charge de la dette qui a beaucoup diminué du fait de la baisse des taux d’intérêt, la croissance annuelle des dépenses s’est établie à 2 % en déflaté.

    Difficile de parler d’austérité, sachant en outre que ce niveau est le plus élevé des pays du monde développé comme on peut le voir sur le graphique de l’OCDE ci-dessous (cliquer pour agrandir).

    néolibéral

    Dépenses publiques 2019 en % du PIB

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    Dépenses sociales 2019 en % du PIB

    Au sein de toutes ces dépenses, les dépenses sociales représentaient 31 % du PIB en 2019, à nouveau le plus haut niveau de l’OCDE. La France est incontestablement le pays champion de la redistribution.

    On sait que bon an mal an, 10 % des foyers fiscaux paient 70 % de l’impôt sur le revenu et 2 % paient plus de 40 % de cet impôt. Mais plus généralement, une fois que l’on tient compte de tous les transferts sociaux, on constate que le revenu mensuel moyen des 20 % les moins riches passe de 553 euros pour une personne seule à 933 euros après les effets de la redistribution. À l’inverse, le même revenu pour les 20 % les plus riches passe de 4566 euros à 3705 euros (chiffres 2018). Le rapport qui était de 1 à 8 avant redistribution tombe à 1 à 4 après. Qui dit mieux ? Personne.

    Face à tout cela, qu’il faut bien financer, on observe de la même façon que les prélèvements obligatoires (schéma ci-dessous à gauche) n’ont pas cessé d’augmenter et qu’ils placent une fois de plus la France en tête de ses voisins comparables : ils atteignaient 1070 milliards d’euros en 2019, soit 45 % du PIB contre environ 39 % pour l’Allemagne et les Pays-Bas et seulement 33 % pour le Royaume-Uni :

    Prélèvements obligatoires 2019 en % du PIB

    Évolution de la dette publique France

    Malgré ce niveau assurément confiscatoire – qui grimperait à 50 % du PIB si on y ajoutait les 100 milliards supposés de l’évasion fiscale que tous nos édiles se flattent de vouloir récupérer au nom de la justice fiscale et des valeurs de solidarité de la République – le gouvernement n’arrive pas à couvrir ses dépenses et il doit recourir à la dette publique (graphe de droite) qui n’est jamais qu’un impôt différé. À fin décembre 2019, elle frôlait déjà les 100 % du PIB (contre 60 % en Allemagne) et l’on s’attend à ce que l’année 2020 s’achève sur un taux de 120 % en raison des confinements et autres restrictions anti-Covid.

    Malheureusement pour nous, les services rendus en échange, santé , sécurité , éducation , recherche scientifique , transports publics, sont très loin d’avoir un niveau aussi élevé que les prélèvements qu’ils occasionnent pour les Français (tous les Français, n’oublions pas la TVA, première recette de l’État). S’y ajoutent de multiples débâcles en tout genre – Notre-Dame-des-Landes , informatisation de l’administration, scandale de la taxe à 3 % sur les dividendes, etc. – qui se chiffrent en centaines de millions payés pour rien par le contribuable.

    De plus, même sans parler Covid, la croissance économique se traîne depuis la crise de 2008 et le chômage reste chez nous plus élevé qu’ailleurs, à 8,4 % en décembre 2019 contre 3,2 % en Allemagne et aux Pays-Bas :

    néolibéral

    La France est un enfer, mais pas néolibéral

    Autrement dit, au vu de ces résultats, la France est certainement un enfer  comparativement à la prospérité observée chez ses voisins, mais elle n’a en aucune façon le profil « néolibéral » que les opposants à Emmanuel Macron se plaisent à décrire et ce dernier n’a nullement mené une politique qui nous en rapprocherait de près ou de loin malgré ses discours « penser printemps » des débuts – dans ce procès, les comptes publics témoignent hélas en sa faveur.

    Là où M. Marleix se trompe une seconde fois, c’est que la hausse constante de la dépense publique n’est pas comme il le pense la conséquence non préméditée d’avoir à réparer les dégâts du néolibéralisme mondialisé.

    C’est d’abord un choix conscient, assumé, revendiqué et constructiviste que la France a fait en 1945 dans la foulée du programme du Conseil national de la résistance en instituant la sécurité sociale, l’ENA et les comités d’entreprise, en créant le statut de la fonction publique et son emploi à vie , en nationalisant de larges pans de l’économie et en ayant recours à une forme de planification centralisée. Le modèle était clairement l’URSS et les hommes qui l’ont mis en place en France étaient des membres du Parti communiste comme Ambroise Croizat ou Maurice Thorez (référence de la gauche) avec la bénédiction du général de Gaulle (référence de la droite).

    Depuis, on a assisté à des périodes de privatisations, mais le concept de l’État stratège s’est imposé et le capitalisme n’est devenu acceptable que s’il agissait en connivence avec l’État. Dans le même temps, l’État est aussi devenu nounou : rien de la vie des citoyens ne doit échapper à sa sollicitude autoritaire. À ce titre, on peut citer à nouveau l’exemple caricatural mais vrai du plan vélo et de son stage gratuit de remise en selle . Et c’est Macron qui l’a fait ! Vous disiez néolibéral ?

    Véritable boulet attaché aux basques du secteur productif, ce système pèse sur l’innovation, l’emploi et le pouvoir d’achat, et impose ensuite constamment d’être réparé lui-même par encore plus de pansement social sur une jambe de bois. Et c’est ainsi qu’un pays arrive à un niveau record de dépenses publiques de 56 % du PIB.

    La bonne foi intellectuelle commanderait de parler, peut-être pas d’enfer, mais au minimum de dystopie socialisante. Mais ne rêvons pas. Le constat partagé par ignorance et/ou déni et/ou idéologie collectiviste par 99 % des Français et des politiciens, c’est que la France vit un enfer néolibéral qu’il est urgent de renverser. Et c’est parti pour 2022 ! Ça promet.

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      Livre : Économie mondiale, prospérité locale

      Guillaume Périgois · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 10 February, 2021 - 14:05 · 3 minutes

    économie

    Par Guillaume Périgois.

    Réactions à la pandémie, repli commercial américain entamé sous Donald Trump et prolongé par Joe Biden, montée des populismes hostiles à l’ouverture des frontières : le monde semble séduit par l’isolationnisme.

    La France n’est pas en reste : ses extrêmes conspuent la mondialisation et les investissements étrangers y sont régulièrement torpillés par Bercy pour mieux « protéger ».

    Mais protéger qui et de quoi ?

    Car voilà le paradoxe : la France doit 60% de son PIB au commerce international et ses régions sont conquérantes dans la mondialisation.

    Telle est la thèse du nouvel essai « Économie mondiale, prospérité locale – Comment les régions françaises réussissent dans la mondialisation » signé par le spécialiste du développement Guilhem Delon-Saumier et publié gratuitement par Librairal ce mois-ci.

    6 millions d’emplois en France

    Le commerce extérieur de la France représente en effet 60% de son Produit Intérieur Brut (PIB) et plus de 6 millions d’emplois, soit un actif sur cinq. Huit entreprises exportatrices sur 10 ont moins de 20 salariés.

    La France est aussi le premier pays d’accueil des investissements étrangers en Europe. Et ces investissements ne sont pas réservés aux grandes métropoles puisque plus de 4 investissements étrangers sur 10 sont réalisés dans des villes de moins de 20 000 habitants.

    Les régions Grand-Est et Auvergne-Rhône-Alpes championnes dans la mondialisation

    L’essai s’intéresse particulièrement aux deux régions de province les plus ouvertes au commerce international.

    Industrie pharmaceutique, industrie lourde, agriculture : la région Grand-Est est la championne de l’export. Et sur 12 500 entreprises exportatrices, plus de la moitié sont des PME/PMI.

    L’Auvergne-Rhône-Alpes brille par ses investisseurs étrangers, notamment dans l’industrie 4.0 et la santé. Plus d’un salarié sur deux y est employé par une entreprise multinationale.

    Les Français plus favorables au libre-échange que protectionnistes

    Nombreux sont ceux qui prétendent que la mondialisation tracasserait les Français à tel point que ceux-ci seraient fortement isolationnistes.

    Rien de plus faux. La population française est divisée sur la question, avec une majorité préférant le libre-échange.

    Selon un sondage OpinionWay pour Contrepoints commandé pour la publication de cet essai, 37% des Français estiment en effet que les barrières commerciales devraient être baissées (et 13% de manière unilatérale), 31% pensent qu’il faudrait les maintenir ou les augmenter et 29% sont sans opinion.

    « Il faut faire le point sur la réalité de notre commerce extérieur afin de rappeler que les partisans du libre-échange ne sont pas moins patriotes que les protectionnistes de tous horizons politiques » lance l’économiste et éditorialiste Jean-Marc Daniel dans la préface de l’ouvrage.

    COVID-19 : relocaliser ou diversifier ?

    La crise de la Covid-19, en ayant durement frappé l’économie
    internationale, a fait naître des doutes sur la capacité de notre pays à assurer la sécurité et la stabilité de ses approvisionnements.

    Pourtant, dans le contexte actuel de pandémie et de crise économique, les politiques commerciales de repli protectionniste augmentent les prix et créent des pénuries.

    L’autosuffisance n’est pas la solution selon l’auteur, Guilhem Delon-Saumier. Mieux vaut une plus grande diversité de sources d’approvisionnement afin d’avoir des voies de substitution en cas de défaillance d’un partenaire commercial, tout en maintenant les gains obtenus par l’intégration économique mondiale.

    Chiffres et exemples à l’appui, ce nouvel essai remet l’église hexagonale au milieu du village mondial. Laissons notre coq chanter !

    « Économie mondiale, prospérité locale – Comment les régions françaises réussissent dans la mondialisation » est publié par Librairal et est gratuitement accessible en cliquant sur ce lien.