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      Pourquoi les libéraux doivent soutenir le monde multipolaire

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 26 January, 2023 - 03:40 · 5 minutes

    Les tensions internationales actuelles ont accentué un débat qui existe depuis au moins une décennie entre deux visions du monde et des relations internationales : le monde unipolaire et le monde multipolaire. Quand les libéraux sont en désaccord en politique étrangère , cela s’explique souvent par un différend à ce sujet.

    Cet article a pour but de montrer que le libéralisme est contraire au concept de monde unipolaire et qu’il va dans le sens du monde multipolaire.

    Unipolaire vs multipolaire

    Pour rappel, par « monde unipolaire » est entendu un monde dirigé par un seul pôle de pouvoir, en l’occurrence celui du « liberal rules-based international order » centré autour de Washington D.C.. Cet ordre est un concept flexible, distinct du droit international même si les deux coïncident parfois. C’est le monde que les États-Unis, avec leurs alliés occidentaux, ont créé en 1945 et qu’ils ont essayé d’étendre après la chute de l’URSS en 1991.

    L’idée implicite est la suivante : les systèmes politiques occidentaux, les « démocraties libérales », ont une supériorité morale qui justifient que le monde soit dirigé par un seul pôle de pouvoir occidental – la capitale fédérale étasunienne. C’est donc par définition un pouvoir d’ambition hégémonique. Le monde unipolaire est un monde où les États-nations manquent d’indépendance ; ils sont dominés, pour leur propre bien, non seulement directement par le seul centre de pouvoir mais aussi indirectement par des institutions supranationales prêtant allégeance à cet unique pôle.

    Par « monde multipolaire » est entendu le contraire de celui décrit ci-dessus ; il s’agit d’un monde qui respecte beaucoup plus strictement le droit international, notamment tel qu’énoncé dans la Charte de l’ONU. Aucun jugement de valeur est appliqué aux systèmes politiques : au contraire, ceux-ci sont considérés comme conséquences d’une culture politique ainsi que d’une histoire ancienne et récente spécifiques. Le monde multipolaire n’est donc pas universaliste. Le pouvoir politique dans ce monde est dilué dans une multitude de pôles, et les États-nations ne sont pas assujettis aux institutions supranationales.

    Comme ces courtes descriptions le montrent, ces deux visions sont mutuellement exclusives. Ceci explique en grande partie les tensions parfois intenses qui sévissent actuellement dans les relations internationales.

    Et pourquoi pas unipolaire ?

    Il pourrait sembler étrange à première vue que les libéraux doivent préférer un monde multipolaire à un monde unipolaire.

    En effet, le monde unipolaire est centré sur la politique occidentale, réputée plus respectueuse de la liberté. De plus, les libéraux sont idéologiquement attachés à un monde ouvert, avec un minimum d’obstacles politiques et juridiques pouvant entraver le commerce entre entreprises et individus opérant dans différentes entités politiques. Les libéraux sont connus pour leur soutien du libre-échange, en prônant non seulement les bienfaits du « laisser-faire » mais également ceux du « laisser-passer », selon la maxime complète .

    En tant que libéral, ne serait-il pas alors naturel d’être en faveur d’un monde unipolaire où in fine une seule entité politique mondiale – possiblement bienveillante – gère le monde comme elle le souhaite, mais en assurant la paix et en affaiblissant alors les frontières politiques entre les États-nations ?

    La réponse à cette question est un Non retentissant.

    Soutenir le monde unipolaire est une erreur fondamentale du libéralisme classique, trop ancré dans une vision universaliste des valeurs occidentales du siècle des Lumières. Il n’y a jamais de garantie que l’unique pôle de pouvoir existant soit bienveillant et pacifique ; que faire s’il ne l’est pas ? En effet, le soutien pour le monde unipolaire s’explique souvent aussi par un manque de connaissance de la vraie nature de l’État fédéral américain qui s’est arrogé ce rôle d’unipolarité.

    De plus, le monde unipolaire n’est pas aussi libre que cela, ni économiquement, ni politiquement. Les exemples abondent de politiques antilibérales en Occident. Il n’y a jamais eu de volonté parmi les élites occidentales d’implémenter du vrai libre-échange, par exemple, entre l’Occident et les pays du Sud, au grand dam de ces derniers. Et politiquement, les problèmes de légitimité démocratique en Occident sont légion.

    Le monde unipolaire mène droit à la mondialisation politique qui est ni plus ni moins qu’une forme de fascisme au niveau international. Dès ses origines, il était injuste et instable, favorisant le système financier occidental basé sur le dollar américain. Différentes formes de coercition existent pour ceux qui ne coopèrent pas (l’utilisation de la menace militaire évidemment mais également le principe d’extraterritorialité des lois étatsuniennes, comme de la Foreign Corrupt Practices Act). Il est possible d’aller plus loin et de dire que de par sa nature même, le monde unipolaire ne peut exister sans des constantes interventions illégales et non sollicitées dans les affaires internes des pays qui ne souhaitent pas adhérer complètement aux positions politiques de l’unique centre de pouvoir. Ceci pour que le monde unipolaire soit non seulement maintenu, mais étendu.

    Non-intervention et décentralisation

    Le monde unipolaire va donc directement à l’encontre du principe de non-intervention qui est fondamental au libéralisme. Le principe de non-agression et donc l’échange pacifique entre nations, si important pour les libéraux, est bien mieux représenté par le droit international, aussi peu respecté soit-il.

    La décentralisation du pouvoir politique à l’intérieur des États est reconnue comme fondamentale par les libéraux. Ces mêmes libéraux devraient alors aussi, selon ce même principe, soutenir la décentralisation du pouvoir politique dans le concert des nations… ce qui équivaut à soutenir le monde multipolaire. Les bienfaits de la décentralisation ont été montrés par des historiens libéraux comme Ralph Raico et Donald Livingstone . La concurrence entre les petites entités politiques européennes pendant des siècles était fondamentale pour le développement économique et la libéralisation politique de ses sociétés.

    Le monde multipolaire n’est bien sûr pas une suffisante évolution d’un point de vue libéral à cause des étatismes qui y persistent. Mais c’est clairement un pas important dans une direction libérale par rapport au monde unipolaire. Les libéraux doivent donc rjeter ce dernier et soutenir le monde multipolaire pour toutes les raisons présentées ici. Cette position doit être exprimée fortement, même si elle est peu populaire actuellement. Car le monde multipolaire est encore peu compris et peu accepté par les Occidentaux, habitués à une position de domination.

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      Coupe du monde de football : la défaite du Maroc n’est pas celle de l’Afrique

      Jean-Michel Lavoizard · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 16 December, 2022 - 04:30 · 3 minutes

    Au lendemain d’une demi-finale attendue de la Coupe du monde de football, la défaite (par 2 buts à 0) de l’équipe du Maroc n’est pas plus celle de l’Afrique que la victoire des « pays du Nord », d’Europe, sur les « pays du Sud ».

    On ne s’étendra pas ici sur les allégations soutenues de corruption dans le processus d’organisation des championnats internationaux de football, y compris de cette Coupe du monde exotique et controversée au Qatar, que renforcent les scandales actuels de conflits d’intérêts, de trafic d’influence et d’enrichissement illicite au sein de l’Union européenne. La série Netflix bien documentée FIFA : Ballon rond et corruption , éclairante sur le règne croissant de l’argent sans odeur dans le milieu du football professionnel depuis cinquante ans suffit à dégoûter tout public exigeant sur les valeurs supposées saines du sport.

    Autre tendance, depuis l’Afrique on entend avec lassitude les nombreux et bruyants commentaires média politisés et idéologisés en provenance de la France sur cette Coupe du monde.

    Les « décoloniaux » français, Français de souche renégats ou d’adoption ingrats, voudraient imposer dans ce feuilleton mondialisé le scenario d’une revanche imaginaire. La vengeance fantasmée des pays du Sud (Noirs et métissés) où ils ne vivent pas, contre ceux du Nord (Blancs) où ils ne s’intègrent pas ; des opprimés qu’ils n’ont jamais été contre d’anciens dirigeants dont ils ne retiennent que les excès ; des victimes d’un passé qu’ils invoquent indument contre leurs exploiteurs dont ils convoquent injustement les descendants au tribunal mémoriel. Les Français éclairés d’aujourd’hui intenteraient-ils un procès contre l’Italie, au titre de dommages infligés par l’Empire romain dont les bienfaits de la colonisation ont largement contribué au développement ?

    Cette tentative idéologique de récupération et de manipulation s’appuie sur une vision simpliste, anhistorique et décontextualisée.

    En effet, cette vision assimile le Maroc, pays du Maghreb, à l’Afrique. Or, le continent africain se définit avant tout par sa diversité politique, ethnique et culturelle. Le projet de panafricanisme reste plombé par des ambitions rivales, nationales et claniques.

    Le roi Mohammed VI a fait sienne cette phrase de son père , Hassan II :

    « Le Maroc est un arbre dont les racines plongent en Afrique et qui respire par ses feuilles en Europe » .

    Or, depuis le ralentissement de la croissance économique en Europe, il mène une campagne très active de diplomatie politique et d’investissement économique sur le continent africain pour rejoindre la CEDEAO (Communauté Économique des Pays d’Afrique de l’Ouest), tout en maintenant des liens particuliers avec les pays du pourtour méditerranéen et une relation spéciale avec les États-Unis (premier pays à avoir reconnu le Maroc). Cette ambition dominante d’un puissant pays arabo-musulman souvent admiré et respecté en Afrique suscite toutefois une certaine crainte de domination auprès des populations d’Afrique noire, occidentale et centrale.

    Lors de cette demi-finale, tandis que l’équipe du Maroc (composée exclusivement de Marocains de souche) était unanimement soutenue par les pays musulmans d’Afrique, du Golfe et d’ailleurs, de nombreux Africains d’Afrique noire soutenaient ouvertement l’équipe de France pour la raison politique évoquée et du fait de sa composition ethnique très métissée dans laquelle ils se reconnaissaient.

    Dans La haine de l’Occident , essai publié en 2008, Jean Ziegler, ancien député socialiste de Genève et rapporteur spécial des Nations Unies pour le droit à l’alimentation, confondait les termes « Occident, Nord, Blancs » pour cibler et justifier la « méfiance viscérale » des pays de l’hémisphère sud face à leur arrogance et à leur aveuglement, et « l’exigence de réparations » de leurs « crimes historiques ».

    Soixante ans après les indépendances, cette rhétorique persistante et dépassée entre Nord et Sud exonère toute responsabilité des dirigeants et des peuples africains dans leur sous-développement chronique. On retiendra et soutiendra plutôt cet appel final et salutaire de Jean Ziegler :

    « C’est dans leurs cultures autochtones, leurs identités collectives, leurs traditions ancestrales, que les peuples du Sud puiseront le courage d’être libres. ».

    En attendant, on espère voir avant tout du sport de qualité dans la finale prochaine d’une Coupe du monde décidément très politisée.

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      « La Chute Finale » de l’Occident de Olivier Piacentini

      Finn Andreen · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 4 December, 2022 - 04:00 · 5 minutes

    L’Occident semble avoir accéléré son déclin dans une espèce de folie autodestructrice rarement égalée.

    Les sociétés occidentales subissent les conséquences de la scandaleuse gestion de la pandémie Covid-19 de leurs dirigeants politiques et souffrent d’une inflation des prix, auto-infligée par leurs propres sanctions contre la Russie.

    C’est dans ce contexte qu’il faut lire le dernier livre de Olivier Piacentini, La Chute Finale : l’Occident survivra t-il ? .

    Ce déclin ne date pas d’hier

    Comme l’explique avec beaucoup de verve M. Piacentini, ce déclin ne date pas d’hier.

    L’auteur en fait une vaste et riche revue d’un point de vue non seulement économique mais également politique et culturel en évoquant l’influence socialement destructive du relativisme et du postmodernisme provenant des USA, par exemple sous forme des attitudes woke .

    Qui parle de déclin parle d’abord de cimes déjà atteintes. M. Piacentini rappelle avec érudition les différents facteurs ayant permis la longue ascension de l’Occident, en rappelant l’influence des penseurs grecs, du christianisme, de la Renaissance, de l’État de droit, du libéralisme.

    Cependant, pour ceux qui croient en l’universalité des valeurs libérales et plus particulièrement en les bienfaits d’une politique libérale et d’une économie de marché au niveau mondial, l’auteur insiste peut-être un peu trop sur « l’exception de l’Occident ». Une telle exceptionnalité empêcherait alors le libéralisme d’être répliqué ailleurs car elle serait alors endémique aux conditions occidentales. Au vu du développement économique de l’Asie, cette soi-disant exception occidentale doit être remise en question.

    La position de l’auteur semble alors être davantage pro-occidentale que libérale, rappelant celle de Winston Churchill ou plus récemment celle de l’historien Niall Ferguson.

    L’auteur évoque la « domination de l’Occident […] pendant si longtemps ». Mais il est possible de dire que l’Occident ne se distingue réellement du reste du monde qu’après les révolutions agraires et sanitaires du XVII e siècle. En effet, la Chine représentait un quart de la richesse mondiale jusqu’au XVII e siècle. D’ailleurs, la science politique chinoise actuelle considère que le Chine a une grande avance sur l’Europe car elle s’est unifiée 2000 ans avant cette dernière…

    Une partie du déclin occidental est normale et inévitable. M. Piacentini devrait insister davantage sur ce point car il est relatif aux autres nations qui heureusement s’enrichissent aussi en profitant indirectement des avancées occidentales antérieures.

    Il est aujourd’hui évident que l’Occident a même été surpassé dans plusieurs secteurs de pointe, ce qui encore une fois devrait relativiser cette idée d’exception.

    Revoir le concept d’Occident

    Mais qu’est-ce que l’Occident ?

    L’auteur a presque une tendance à voir l’Occident comme une extension de la France. Une grande partie du déclin décrit dans le livre concerne justement la France que M. Piacentini connaît bien. Il semble considérer l’Occident comme une seule entité homogène et la personnalise même avec des phrases telles que : « l’Occident a peur » (p. 46) ou « l’Occident sûr de lui » (p. 61).

    Mais n’est-ce pas justement l’hétérogénéité et la pluralité de l’Occident une des raisons fondamentales de son succès initial ? En France, l’accent qui est mis sur l’universalité des Lumières est compréhensible mais parfois démesuré, comme Isaiah Berlin avait bien compris . Des historiens libéraux comme Ralph Raico et Donald Livingstone ont montré que justement le manque d’unité et la concurrence décentralisée des petites entités politiques étaient la clef pour leur développement économique et politique.

    De plus, l’Occident actuel est aujourd’hui loin d’être uni : la Russie s’en éloigne , les membres de l’Union européenne sont en sérieux désaccord et les États-Unis semblent vouloir s’enrichir aux dépens des Européens. Aussi, les succès des pays de l’Europe du nord par rapport à ceux du sud (y compris la France) montrent que cette richesse historique et culturelle de l’Occident loué par Olivier Piacentini n’est pas seulement un atout pour un pays mais aussi un poids qui souvent empêche les réformes et l’innovation. L’Italie en est l’exemple phare.

    L’État, toujours l’État

    Le déclin de l’Occident est inextricablement lié aux nocives idées étatistes qui dominent les institutions occidentales depuis des décennies déjà (quoique moins fortement aux États-Unis), comme le souhaitait Gramsci . Cet étatisme s’exprime par un consentement généralisé à un État social qui prélève massivement (p. 91), mais aussi à un État stratège qui s’implique aujourd’hui dans tous les aspects majeurs de la société, de la santé a l’immigration en passant par le marché du travail.

    Les libéraux estiment que ce développement a fait des ravages à tous les niveaux et impacte même la vitalité , au sens large, des sociétés occidentales. L’auteur reconnait et critique habilement ces symptômes au fil du livre mais néanmoins il affirme aussi, par exemple, que l’État crée « les conditions du développement, et participant a l’amélioration des conditions de vie » (p. 33). Or, le déclin de plus en plus rapide de l’Occident est au contraire inversement corrélé à l’interventionnisme de plus en plus exacerbé des États, comme l’explique l’École autrichienne .

    Comme pour beaucoup de livres publiés en France, La Chute Finale ne liste pas les auteurs cités et leurs œuvres, ni les mots clefs, comme dans les livres anglo-saxons. Il ne contient pas une seule référence ni même une table des matières. C’est dommage car M. Piacentini donne beaucoup d’informations à son lecteur sans que celui-ci puisse vérifier les sources. Une deuxième édition corrigeant ces défauts serait la bienvenue et permettrait de prolonger la vie de ce livre en laissant au lecteur la possibilité de s’y référer.

    L’auteur fait donc une excellente description des maux, tout autant économiques, politiques que culturels dont souffre l’Occident. Il termine en promettant des propositions pour résoudre ces graves difficultés dans un prochain ouvrage.

    La Chute Finale est un livre d’un style peut-être un peu trop lyrique pour un thème aussi sérieux. Mais il fait partie des grandes contributions politiques contemporaines françaises décrivant un déclin de l’Occident qui n’a rien d’inévitable. Car ce déclin a surtout à voir avec des politiques publiques qui semblent être un mélange d’incompétence et d’idéologie de la part d’une petite classe dirigeante perturbant sérieusement le développement naturel des pays occidentaux depuis maintenant plusieurs décennies.

    Olivier Piacentini, La chute finale : l’Occident survivra-t-il ? , Édition Godefroy, 2022, 248 pages.

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      Rupture entre l’Ukraine et l’Occident ?

      Auteur invité · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Saturday, 26 November, 2022 - 04:00 · 4 minutes

    Un article de rédaction de la Nouvelle Lettre

    Les deux dernières semaines ont été riches en joutes et jeux diplomatiques. Il y a eu d’abord le G20 à Bali (Indonésie) lundi et mardi derniers, puis la COP27 à Sharm El Sheick en Égypte, qui a pris fin avant-hier dimanche. La France était brillamment représentée à ces deux réunions par son président et plusieurs ministres.

    On s’est longtemps demandé si Vladimir Poutine allait y participer au G20. Il a préféré rester au Kremlin . En revanche Xi Jinping était bien là et Emmanuel Macron qui parle souvent au nom de l’Union européenne se devait de le rencontrer chaleureusement. Il est vrai que le chancelier allemand Olaf Scholtz s’était rendu à Pékin au début du mois sans en avertir quiconque – ce qui fait un peu bande à part et désordre. Les deux réunions de la semaine dernière ont été largement occupées à discuter du changement climatique – ce qui est inhabituel pour le G20 dont la vocation est traditionnellement économique.

    Mais les organisations internationales se doivent de contribuer à sauver la planète en gérant la transition énergétique, ce qui pose des problèmes à beaucoup de pays moins développés, notamment africains, qui aimeraient bien exploiter leurs ressources pétrolières et attendent une compensation financière massive.

    L’Ukraine à l’ordre du jour

    Mais venons-en au problème ukrainien très officiellement à l’ordre du jour du G20 mais qui s’est également invité à la COP27.

    Il a d’abord été question de la menace céréalière : Poutine va-t-il reconduire son accord pour laisser passer les céréales ukrainiennes par la mer Noire ? Mais il y a eu pire : la menace de Poutine de recourir à l’arme nucléaire. Est-ce cette menace (insensée), ou plutôt les bombardements massifs des Russes pour priver les Ukrainiens de toute énergie le jour-même où la ville de Kherson était reconquise par l’armée ukrainienne ? Toujours est-il que la tendance générale était à calmer le jeu entre les belligérants. Certes, Poutine a toujours été dénoncé pour avoir violé le territoire ukrainien et permis des crimes contre l’humanité, notamment à travers ses sous-traitants mercenaires du groupe Wagner. Pour la première fois au G20 aucun participant ne s’est rangé aux côtés de la Russie, tous ont appelé l’intervention des Nations Unies (mais la Russie exerce naturellement son veto au sein du Conseil de sécurité).

    Le résultat est que les discours du président Zelenski qui veut reprendre la Crimée envahie en 2014 contre toute règle du droit international passent pour des provocations inutiles chez certains Européens et maintenant aux États-Unis, pourtant en tête de l’aide militaire et financière aux Ukrainiens.

    Les pacifistes et les faucons

    Au niveau européen, les divisions se creusent de plus en plus entre les « pacifistes » partisans de négociations à tout prix et les « faucons ».

    Ces derniers sont les voisins immédiats de la Russie : Pologne, pays baltes, Finlande, Suède. Ils ne sont pas rassurés par une perspective de négociations qui passeraient à coup sûr pour une victoire de Poutine, assuré de conserver la Crimée et peut-être même les enclaves du Donbass.

    Les pacifistes sont ceux qui sont agités par la crainte d’un conflit mondial et d’une panne généralisée d’électricité dans les tout prochains mois. Une nouvelle peur vient de les assaillir : les habitants des villes et des régions sans électricité commencent à quitter leurs maisons et veulent émigrer le plus vite possible. Des millions de réfugiés pourraient ainsi chercher à trouver un havre hivernal dans des pays d’Europe. Qui pourra les accueillir et comment ? Les voisins immédiats comme la Moldavie, la Roumanie, la Pologne, les pays baltes, ont déjà accueilli beaucoup d’immigrés. Certains commentateurs ont même soutenu que les Ukrainiens faisaient un « chantage aux réfugiés » pour accélérer et amplifier l’aide à l’Ukraine.

    Toujours est-il que les Européens sont divisés, que Joe Biden ne veut pas soutenir les espoirs ukrainiens sur la Crimée. Y a-t-il réellement « fracture », comme on le dit facilement ? La division n’est pas tant entre Ukrainiens et Occidentaux mais au cœur du camp occidental. Théoriquement l’OTAN devrait être le lieu de concertation et de soutien permanent d’un peuple qui défend sa liberté contre une dictature barbare.

    Nous reconnaissons ne pas pouvoir avancer le moindre diagnostic à cette heure. Mais nous pouvons observer ces jours-ci que certains pays de l’Occident et certains leaders de grands pays, y compris le nôtre, semblent démotivés, hostiles au « va-t’en guerre » et préfèrent des négociations au lieu de défendre le droit international et la liberté de millions d’êtres humains. On déclame se réarmer pour l’avenir lointain mais aujourd’hui armes et munitions n’arrivent toujours pas assez vite en Ukraine.

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