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      Les athlètes transgenres renvoyées au débat de l'équité en compétition

      news.movim.eu / HuffingtonPost · Tuesday, 21 June, 2022 - 12:11 · 7 minutes

    Le 21 juin, l’IRL a annoncé que les femmes transgenres ne pourront pas participer aux matches de rugby à XIII tant que n’aura pas été établie une “politique d’inclusion complète”. Le 21 juin, l’IRL a annoncé que les femmes transgenres ne pourront pas participer aux matches de rugby à XIII tant que n’aura pas été établie une “politique d’inclusion complète”.

    GENRE - C’est au tour de l’International Rugby League (IRL) de se positionner sur la question de la participation des transgenres aux compétitions sportives internationales. Ce mardi 21 juin, l’organisme a annoncé que les femmes transgenres ne pourront pas participer aux matches de rugby à XIII tant que n’aura pas été établie une “politique d’inclusion complète”.

    Les autorités de l’IRL ont dit avoir besoin de consultations et de recherches supplémentaires pour finaliser une nouvelle politique pour 2023, invoquant un “risque juridique, pour la réputation et le bien-être” du jeu et des joueurs.

    En attendant, leur communiqué indique, avec ces mots, que “les joueuses passées de sexe masculin à féminin (transsexuelles) ne peuvent pas participer aux matchs internationaux de rugby féminin”. Cela signifie que les transgenres ne pourront pas participer en novembre à la Coupe monde de rugby féminin qui aura lieu en Angleterre.

    Cette annonce intervient deux jours après celle de la Fédération internationale de natation, qui a décidé de créer une “catégorie ouverte” pour les femmes transgenres . Auparavant, la Fédération nationale d’athlétisme s’était positionnée sur le sujet, avec pour règle que les femmes transgenres présentent un taux de testostérone suffisamment bas pendant au moins douze mois avant une compétition.

    Des arguments contestés

    Ce sujet soulève une polémique qui ne date pas d’hier entre ceux qui défendent le droit des sportives transgenres à concourir librement en tant que femmes et ceux qui estiment que ces athlètes bénéficient d’un avantage physiologique injuste.

    Des arguments contestés par certains chercheurs. “C’est un discours courant dans le milieu du sport, estimait dans un précédent article du HuffPost Lucie Pallesi, doctorante en STAPS à l’université Paris-Saclay et autrice d’une thèse sur la transidentité et le sport de compétition qui évoque des “pseudo-arguments scientifiques sans fondements”. Pour cette dernière, les records des sportifs masculins s’expliquent plutôt par des raisons sociales que biologiques.

    “Tous les records olympiques sont le fait d’hommes, reconnaissait également la socio-historienne du sport Anaïs Bohuon. Mais ces records s’inscrivent dans une histoire et ne sont pas la résultante de quelque chose de naturel”.

    Elle rappelle ainsi que les femmes ont historiquement été “limitées à certaines pratiques sportives qui ne sollicitaient pas la robustesse et la force, mais plutôt la grâce et l’élégance” dans le but, notamment de ne “pas mettre en danger leurs organes reproducteurs”. Résultat: les femmes ont “un siècle de retard sur les hommes”.

    “Le sport moderne, né au XIXe siècle, repose sur une vision sexiste de l’humanité”

    “Il est évident que quand on demande aux grandes joueuses de tennis de faire deux sets plutôt que trois comme les hommes, ou quand les poids, les distances sont allégés et réduits, elles ne vont pas s’entraîner ou se muscler de la même manière et n’auront pas la même endurance”, renchérit Anaïs Bohuon.

    Avant d’ajouter: “Un avantage physique dans le monde du sport est indéfinissable. Outre l’aspect génétique et physiologique qui entre forcément en compte, personne ne le nie, il y a aussi tout un ensemble de facteurs qui peuvent jouer comme la socialisation ou les composantes familiales, environnementales ou économiques. Mais c’est un ensemble indissociable.”

    Un avis partagé par le professeur de civilisation américaine à l’Université de Rouen et spécialiste de l’histoire du sport Peter Marquis qui confirme “qu’on ne sait pas expliquer la performance sportive”.

    Il n’existe par aucune preuve scientifique ou statistique que des femmes trans aient écarté des femmes cisgenres. Peter Marquis, professeur de civilisation américaine à l’Université de Rouen et spécialiste de l’histoire du sport

    “Certes en moyenne les femmes ont moins de muscles et sont moins rapides, mais ce ne sont pas les moyennes qui font les performances”, ajoute-t-il, estimant que “le sport moderne, né au XIXe siècle, repose sur une vision sexiste de l’humanité”. Pour lui, ce qui explique le mieux ces différences pourrait être “l’investissement financier”, en référence à l’argent investi pour les compétitions masculines en comparaison avec les féminines.

    Au sujet des athlètes trans précisément, le professeur assure d’ailleurs qu’il “n’existe par exemple aucune preuve scientifique ou statistique que des femmes trans aient écarté des femmes cisgenres”.

    “Au niveau élite, les championnats du monde, les compétitions olympiques... les sportives transgenres ne remportent pas plus” de médailles, avait précédemment balayé auprès de l’ AFP Éric Vilain, expert auprès du Comité international olympique.

    “Il y a énormément de facteurs qui entrent dans la fabrique d’un athlète, détaille ce professeur de génétique humaine. Une athlète transgenre qui va faire du basket sera en moyenne plus grande donc ça peut être un avantage, mais en gymnastique elle sera peut-être trop grande.”

    Megan Rapinoe, joueuse de football américaine, gagnante des Jeux Olympiques et lesbienne, s’est positionnée sur ce sujet dans Time magazine : “Montrez-moi les preuves que partout les femmes trans acquièrent toutes les bourses d’études, dominent tous les sports et gagnent tous les titres. Je suis désolée mais rien de tout ça n’arrive. Donc nous devons commencer à être inclusifs, point.”

    Les conditions du CIO

    Le comité olympique (CIO) s’était d’ailleurs penché sur cette question dès 2003. Dans leur rapport, les médecins du CIO se prononcent pour la participation des personnes transgenres aux compétitions sportives correspondant à leur genre vécu, sous trois conditions: que des changements anatomiques aient été réalisés, un changement de sexe à l’état civil et que les traitements hormonaux puissent être vérifiés pour “minimiser les avantages liés au genre dans les compétitions sportives”.

    Ces recommandations ont ensuite évolué en novembre 2015 juste avant les Jeux olympiques de Rio, avec une spécificité: les hommes trans peuvent désormais participer sans restriction aucune aux compétitions masculines, mais les femmes trans doivent en revanche se soumettre à des tests pour prouver que leur taux de testostérone ne dépasse pas un certain seuil (10 nmol/L de sang), au moins un an avant la date de la compétition. Des règles qui ont été appliquées lors des Jeux de Tokyo en 2021.

    “Il n’est pas prouvé quelle serait la molécule clé de la réussite sportive et de la performance” Anaïs Bohuon, historienne du sport

    Mais la testostérone impacte-t-elle réellement la performance physique? Rien ne le prouve selon les experts interrogés en mai 2021 par Le HuffPost .

    “Il n’est pas prouvé quelle serait la molécule clé de la réussite sportive et de la performance”, assure Anaïs Bohuon. On produit plein d’autres hormones qui peuvent contribuer à un avantage physique. Il faut aussi prendre en compte le rythme cardiaque, la taille, l’élasticité musculaire, etc.”

    Le taux de testostérone

    La question du taux de testostérone est régulièrement invoquée dans le cas des athlètes hyperandrogènes -disposant d’un taux de testostérone trop élevé-, comme la Sud-Africaine Caster Semenya, interdite notamment de concourir aux Mondiaux d’athlé de Doha . Il était demandé aux athlètes hyperandrogènes de suivre un traitement pour faire baisser leur taux de testostérone afin de pouvoir concourir sur des distances allant du 400 mètres au mile (1609 m).

    “Michael Phelps, le nageur américain, produit naturellement moins d’acide lactique qu’une personne lambda, ce qui lui permet de s’entraîner pendant des heures sans se sentir fatigué, notait Selaelo Mametja, de la World medical association, en mai 2019 pour le média Sciences et Avenir . Cela lui donne un avantage dans les compétitions, mais pour autant, la Fédération internationale de natation ne lui demande pas de modifier ses hormones. Nous admirons Michael Phelps pour sa singularité, pourquoi pas Caster Semenya?”.

    S’il convient évidemment de ne pas confondre la situation des athlètes transgenres et hyperandrogènes, certaines questions se croisent tout de même. Pour Anaïs Bohuon, on rejette “les femmes de ces compétitions sportives pour des raisons philosophiques, parce que ça remet en cause nos définitions de la binarité et de ce que ça veut dire que d’être une ‘vraie femme’ autorisée à concourir”.

    À voir également sur Le HuffPost : Comment la vie d’Olivia Ciappa a changé avec sa transition de genre

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      Elliot Page se confie sur les années qui ont précédé sa transition

      news.movim.eu / HuffingtonPost · Friday, 3 June, 2022 - 11:29 · 4 minutes

    Dépression intense, anxiété, attaques de panique... Elliot Page sur les années qui ont précédé sa transition Dépression intense, anxiété, attaques de panique... Elliot Page sur les années qui ont précédé sa transition

    TRANSITION - “Je me battais avec la nourriture. Dépression intense, anxiété, crises de panique sévères. Je ne pouvais pas fonctionner.” Dans une longue interview accordée au magazine américain Esquire , Elliot Page est revenu sur les années -et les difficultés- ayant précédé sa transition, entamée publiquement en 2020.

    Né au Canada en 1987, il témoigne notamment du harcèlement dont il a été victime enfant. Lors de ses années collège, il change d’établissement scolaire chaque année, mais rien ne change pour autant.

    “Le harcèlement vous met dans une situation où, plus tard, vous avez tellement de choses à désapprendre, souligne-t-il. Si l’on se moque de vous, que l’on vous traite de tous les noms au quotidien, il est impossible que cela ne pénètre pas en vous, surtout si vous ressentez déjà beaucoup de honte. Il suffit que quelqu’un ouvre la bouche pour que vous la ressentiez déjà.”

    “Je ressemblais aux autres garçons, ce que j’étais”

    Il joue au foot avec ses camarades de classe. Jusqu’au jour où les groupes sont séparés en fonction du genre. Et qu’il se retrouve du côté des filles. “J’étais si désemparé, si démesurément désemparé. J’ai crié à ma mère: “S’il te plaît, encore une année, encore une année!” (...) Je ressemblais aux autres garçons, ce que j’étais.” Elliot Page continuera à jouer au football pendant des années, mais “l’amour pour le sport [n’est] plus là.”

    Des années plus tard, si en public sa carrière s’envole, avec le succès mondial du film Juno , en 2007, en coulisses l’acteur ne va “pas bien”. “J’aimerais que les gens comprennent que cette merde a littéralement failli me tuer”, affirme-t-il.

    A l’époque, l’acteur ne sait pas vers qui se tourner pour parler de son mal-être. “Au début de ma vingtaine, je ne savais pas comment dire aux gens à quel point j’étais malade, se souvient-il. Je pense à des moments où les gens m’ont dit: “Non, tu dois porter une robe” à des moments très, très, très importants.” Comme lors de la Première de Juno au Festival international du film de Toronto, à laquelle il souhaitait porter un costume.

    “Je ne pouvais pas fonctionner”

    Au fil des années, son mal-être grandit. Sur le tournage du film “Inception” (2010), il ne parvient pratiquement pas à quitter l’hôtel dans lequel il se trouve. “Je me battais avec la nourriture. Dépression intense, anxiété, crises de panique sévères. Je ne pouvais pas fonctionner”, témoigne encore Elliot Page.

    “Certains jours, je n’avais qu’une seule réunion, je quittais ma maison pour m’y rendre et je devais faire demi-tour, admet-il. J’étais incapable de lire un scénario -je ne pouvais pas. Lire est l’une des choses que je préfère faire. Je ne pouvais pas lire, je ne pouvais pas aller au bout d’un paragraphe.”

    À certaines périodes de sa vie, il perd beaucoup de poids, subit des crises d’angoisse et s’effondre plusieurs fois. “Toutes ces choses qui pourraient très facilement conduire à la mort et qui le font statistiquement, reconnaît-il. Tout cela est une manifestation de ce traumatisme et de ce malaise qui est un problème disproportionné pour les personnes transgenres.”

    En 2014, Elliot Page fait son coming-out gay, et en 2020, son coming-out trans . Il ne s’attendait pas alors à ce que les réactions soient si fortes. “J’ai reçu de l’amour et du soutien de la part de nombreuses personnes et de la haine, de la cruauté et du vitriol de la part de tant d’autres, se confie-t-il. La transphobie est juste tellement, tellement, tellement extrême. La haine et la cruauté sont tellement plus incessantes.”

    “Qu’est-ce que j’ai appris de ma transition? Je n’exagère pas le fait que la plus grande joie, c’est vraiment de se voir soi-même. Je sais que j’ai l’air différent des autres, mais pour moi, je commence tout juste à me ressembler.”

    Elliot Page travaille en ce moment sur ses mémoires qui devraient sortir en 2023 sous le titre de “Pageboy”.

    À voir également sur Le HuffPost : Avant Miss France 2022, Miss Trans France appelle à plus de modernité