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      Carburants : prix, coûts, et bénéfices pour l’État

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 3 March, 2023 - 04:30 · 5 minutes

    Tandis que l’on nous promet un avenir radieux avec la généralisation du véhicule électrique , le prix du carburant pour les véhicules explose. La dernière fois l’augmentation des taxes avait suscité la révolte des Gilets jaunes qui a fait vaciller le pouvoir. Mais cette fois-ci tout le monde se tait puisque l’on a montré du doigt la guerre en Ukraine alors que des sommets inenvisageables hier ont été atteints.

    Sur un produit dont le prix était encore hier autour d’un euro le litre, on finit par remercier le Groupe Total de nous annoncer un plafonnement pour 2023 à 1,99 euro !

    La mémoire, l’analyse, le bon sens ont-ils à ce point déserté le pays pour que si peu de commentateurs fassent remarquer que les taxes prélevées désormais sur les produits pétroliers ont dépassé l’euro, c’est-à-dire que c’est bien l’État qui profite du prix élevé payé par tous les automobilistes et non pas les raffineurs et distributeurs. Pour chaque litre acheté l’État prélève plus d’un euro, c’est-à-dire le prix jugé insupportable par les révoltés d’hier !

    Quand on ajoute à ce constat celui du prix de l’électricité qui a atteint des sommets ces derniers mois dans l’incompréhension totale de tous les consommateurs, en particulier les artisans et les industriels, on se doit de réfléchir à ce paradoxe qui voudrait que l’État veuille se séparer des véhicules thermiques qui alimentent son budget tandis qu’il nous entraîne vers des véhicules électriques sans avoir maitrisé ni la montée de la production d’électricité ni le prix auquel ils pourront les alimenter !

    Tout semble indiquer que l’État utilise à fond la vache à lait actuelle du moteur thermique, se gave de taxes pétrolières, tandis qu’il condamne l’avenir de cette manne en lui substituant un produit dont il dénonce la pénurie potentielle de l’alimentation sans bien savoir quel profit pour son budget il pourra en tirer.

    On maltraite les consommateurs actuels mais l’avenir est opaque. On peut donc parler de politique de gribouille tandis que l’on exhorte les producteurs, raffineurs et distributeurs de produits pétroliers à « faire des efforts » comme s’ils étaient responsables du premier euro des taxes prélevées !

    Prenons donc un peu de hauteur

    Les énergies fossiles fournissent aujourd’hui plus de 80 % de l’énergie consommée dans le monde.

    Les alternatives ne sont pas nombreuses, elles tournent autour de l’énergie nucléaire et de l’utilisation de l’eau, du soleil et du vent sans oublier la géothermie et l’utilisation des déchets de toutes sortes. Bien évidemment, il faut lutter contre les gaspillages et améliorer les rendements, ce qui représente une des activités majeures aujourd’hui de la science, de la technique et de l’industrie.

    Notre pays s’est engagé dans une politique suicidaire d’éradication des fossiles en affaiblissant les alternatives qu’il avait développées, le nucléaire et l’hydraulique, et en souhaitant faire confiance à des sources d’énergie intermittentes, le solaire et l’éolien, qui ne répondaient en rien à nos besoins de pics de consommation puisque dépendant du vent et du soleil !

    En fait, sans le dire vraiment, nous avons engagé le pays dans une politique de décroissance, décroissance industrielle en parallèle à décroissance de production énergétique. On a beau jeu de célébrer aujourd’hui une nécessité de « sobriété », mais ce sont les risques de pénurie que nous constatons en incitant au changement de « modes de vie ».

    Et la politique d’augmentation des prélèvements partout où c’est possible ne mène nulle part ; elle appauvrit les entreprises, les font disparaître, réduit l’activité, réduit les salaires réels et donc le pouvoir d’achat, et surtout n’engage pas la réforme essentielle, celle de la réduction du train de vie de l’État, réduction des bureaucraties, réduction des normes et règlements, des contrôles, des sanctions et des punitions qui entravent la liberté et l’envie d’entreprendre.

    L’augmentation non maitrisée des taxes sur l’énergie, qu’elle soit pétrolière, gazière ou électrique permet aujourd’hui à l’État de ne pas s’interroger sur les économies structurelles à effectuer d’urgence pour que notre pays puisse survivre en maintenant sa prospérité. La pédagogie indispensable à effectuer est celle des coûts actuels de l’énergie et du passage de ces coûts -factuels- aux prix qui sont demandés aux consommateurs, en mettant fin à la politique désastreuse des chèques et des boucliers.

    Cette habitude est coûteuse, elle est aveugle et inefficace. C’est une politique de communication indigne d’un pays comme le nôtre. Il s’agit, non pas de satisfaire momentanément un électorat déboussolé par les peurs et les injonctions contradictoires mais d’engager l’avenir du pays sur la voie de l’énergie abondante, bon marché et souveraine, c’est-à-dire l’inverse de ce qui a été fait depuis bien longtemps.

    Expliquons d’abord qui gagne quoi avec les prix actuels de l’essence, du gazole, du gaz et de l’électricité. Que chaque profession indique ce qu’elle fait payer au consommateur français et que l’État expose à la population tout entière combien il prélève et quel usage il en fait. Cette présentation pourrait permettre à la population de comprendre d’où l’on part et quels sont les enjeux : les automobilistes, les routiers, les industriels, les commerces, les artisans, tous ceux qui souffrent quotidiennement de voir leurs prix augmenter ont le droit de savoir de quelle façon leurs efforts contribuent ou non au bien commun et au redressement du pays. Pour l’instant chacun se sent dans la peau du « cochon de payant » sans perspective de rétablissement.

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      La concurrence a favorisé le marché américain de l’électricité

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 28 February, 2023 - 03:50 · 4 minutes

    Un article de l’Iref-Europe

    Le marché américain de la production, du transport et de la distribution de l’électricité est ouvert à de nombreuses entreprises privées ou publiques, des utilities , régulées au niveau fédéral par deux agences qui coordonnent leur travail : la Federal Energy Regulatory Commission (FERC) et la Energy Information Administration (EIA). Une réglementation veille à éviter les abus de monopole territorial des réseaux qui gèrent le transport (lignes à haute tension), tandis que la production et la distribution d’électricité (lignes à basse tension), plus concurrentiels par nature, sont plus libres.

    Alors qu’antérieurement les utilities devaient en principe limiter leurs activités au seul domaine régulé et au territoire d’un seul État face à une crise énergétique, une loi de 1978, dite PURPA, a encouragé la concurrence, la fiabilité et l’efficacité de la production et de la distribution de l’électricité en favorisant la création de nouvelles centrales de production, des qualifying facilities (QFs), auxquelles les opérateurs électriques traditionnels, les utilities , étaient désormais obligés d’acheter une partie de leur électricité lorsque les prix affichés par les QFs permettaient de proposer une électricité moins chère pour le consommateur que si l’ utility s’était chargée elle-même de la production. Cette loi fédérale, dont l’application était confiée aux États fédérés, contribua à la construction de nombreuses centrales nouvelles et indépendantes de production d’électricité.

    En 1992, une nouvelle loi fédérale, Energy Policy Act (EPACT), a encore ouvert le marché de la production électrique à la concurrence en permettant à de nouveaux producteurs indépendants, les « Exempt Wholesale Generators », moins réglementés que les QFs et les compagnies traditionnelles, de vendre leur production ou même de l’électricité acquise ailleurs, à des acheteurs sur un ou plusieurs États via les réseaux électriques locaux auxquels les utilities devaient leur donner accès.

    D’autres lois subséquentes en 2005, 2007 (Energy Independence and Security Act), le Clean Power Plan en 2015… ont encore favorisé, notamment par des programmes d’aides publiques, la compétition intérieure et incité à la production d’énergies renouvelables.

    Globalement, la production d’énergie électrique aux États-Unis est bien réglementée tant au niveau fédéral, via l’organisme indépendant de contrôle, la Federal Energy Regulatory Commission, qu’au niveau des 50 États – avec leurs Congrès respectifs et leurs autorités de régulation locales : les Public Utilities Commissions . Une autre agence fédérale indépendante, Energy Information Administration (EIA), est chargée de fournir des données et des prévisions indépendantes du pouvoir politique, et des analyses permettant des décisions politiques appropriées. Mais globalement, la production, le transport et la distribution en gros de l’électricité sont beaucoup plus diversifiés et plus décentralisés qu’en France.

    Curieusement, le marché de détail offrant aux consommateurs la possibilité de choisir leur fournisseur géré au niveau des États, a été moins ouvert à la concurrence qu’en Europe. Des États importants avaient ouvert leur marché de détail à la concurrence : Texas , New York, Michigan, Ohio, Illinois, Pennsylvanie… mais ils ont été plus frileux après le scandale Enron et la crise de l’électricité en Californie au début des années 2000 que certains ont attribué à la libéralisation du marché. Il semble pourtant que cette crise a été surtout due à la réglementation du marché qui imposait des contraintes environnementales excessives aux producteurs, un prix plafond aux distributeurs d’électricité et empêchait ceux-ci de signer des contrats d’approvisionnement à long terme.

    Les tarifs d’électricité

    Le marché américain de l’électricité a permis d’offrir aux consommateurs des prix inférieurs à ceux de la France et leur augmentation de 2000 à 2020 a été en moyenne (tous secteurs confondus) de l’ordre de 25 % ainsi que l’indique ce tableau de l’EIA sur les prix de détail mensuels de l’électricité de 2000 à 2020 :

    En France, le tarif électrique est plus élevé, même le tarif réglementé, et il a connu des hausses de l’ordre de 70% de 2000 à 2020 :

    Prix de l’énergie en France

    Graphique évolution prix énergie – Source : Info énergie

    Mais contrairement aux États-Unis les prix ont flambé en France et en Europe depuis 2021 ainsi que l’indique le tableau ci-dessous (cf. le graphique de l’EIA ci-dessus) :

    Certes, la relative liberté de marché et le nombre important d’acteurs privés, y compris dans la production nucléaire, ont parfois causé des accidents de parcours aux États-Unis. La relative stabilité des prix de l’électricité y est due aussi à l’augmentation significative de la production du gaz de schiste à bas prix. Ayant de la peine à soutenir la concurrence avec ce gaz, de nombreuses centrales nucléaires ont été en difficulté et ont dû faire appel à l’argent public (Nex-York, Illinois, Ohio, Pennsylvanie) et/ou se placer sous la protection du  « chapter 11 » pour éviter les faillites, comme Westinghouse en 2017, tandis que certaines entreprises comme Santee Cooper et Scana Corporation stoppaient la construction de nouveaux réacteurs.

    Aux États-Unis le secteur de l’énergie électrique parvient néanmoins à réduire sensiblement sa production carbonée, la production venant du charbon et du pétrole ayant baissé de 50 % environ depuis 20 ans comme le montre le graphique ci-après :

    En définitive, avec toutes les imperfections du marché américain et le mélange parfois nocif de réglementation et de compétition qui y existe, la large privatisation du marché et la concurrence offrent au consommateur une énergie à meilleur prix et peut-être plus sécurisée que sur le marché hyper réglementé de l’Europe.

    Sur le web

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      La crise énergétique en Allemagne

      Jean Kircher · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 11 December, 2022 - 04:00 · 3 minutes

    Les Allemands sont durement touchés car ils payent plus cher que nous les folles décisions de leurs gouvernants Schroeder et surtout Merkel.

    Sous la pression de leurs gardes rouges 2.0, ils ont pris des options à long terme qu’ils regrettent amèrement aujourd’hui : gaz russe et abandon de la filière nucléaire.

    Quelles sont les réalités et les moyens pour s’en sortir ?

    Les Allemands ne paniquent pas comme nous… Concrètement le gouvernement avance : pour redresser le même désastre hospitalier que le nôtre, l’État débloque un budget de 8 milliards sur 5 ans alors qu’en France nos visionnaires débloquent 200 millions d’euros !

    Pour assurer le passage de l’hiver ils ont remis des dizaines de centrales thermiques en route en assumant le désastre CO 2 que cela provoque.

    Plutôt que de faire des discours ils agissent. À tel point que nous leur achetons des KW à raison de 6 millions d’euros par heure.

    « Il n’y a aucune indication de menace », affirme le ministère fédéral allemand des Affaires économiques et de l’Action climatique. L’Agence fédérale des réseaux considère comme « extrêmement improbable » l’hypothèse de crises.

    L’Allemagne fournit tout de même onze pays en électricité. Elle a d’ailleurs signé un accord avec la France visant à assurer son approvisionnement en électricité cet hiver (un comble !). Pour faire face à la demande, elle cite les « mesures de précaution » qu’elle a mises en place. Certaines centrales destinées aux urgences peuvent désormais produire de l’électricité. Leurs capacités ont été augmentées ainsi que dans les usines de biogaz. Des centrales à charbon fermées depuis plusieurs années dans un objectif de transition énergétique vers le renouvelable ont aussi été autorisées à rouvrir temporairement (source Paperjam).

    La Belgique est approvisionnée à 48 % par l’énergie nucléaire. La mise à l’arrêt des deux centrales belges prévue en 2025, va probablement être retardée.

    Par ailleurs les Allemands ont aménagé dare-dare un nouveau terminal gazier pouvant recevoir du gaz liquide.

    Par anticipation le réseau de distribution de gaz peut très rapidement être réutilisé dès l’arrivée de l’hydrogène. La France ne desservant que les villes en gaz aura du mal à faire de même.

    Dans la ville de Neuss, un groupe scolaire est devenu totalement autonome en mixant le biogaz d’une exploitation agricole voisine avec du photovoltaïque pour produire de l’électricité afin d’alimenter l’ensemble du site y compris la piscine olympique…

    M. Scholz se rend en Chine (sans beaucoup de succès d’ailleurs) et la ministre des Affaires étrangères va en Inde (plutôt fraîchement accueillie). En effet, le monde extérieur leur pardonne moyennement leurs frasques climatologiques pour les riches mais que les moins riches ne peuvent pas se payer. (voir Cop27)

    Et en France ?

    Bizarrement personne ne sait vraiment ce qui est prévu en France. Les débats tournent autour des centrales à l’arrêt avec toutes les polémiques autour de la culpabilité de tel ou tel président. Le gouvernement navigue entre annonces de catastrophes et messages rassurants du sieur Macron. Tout cela ressemble furieusement à une belle cacophonie doublée d’une bonne dose d’incompétence.

    Les Allemands eux se retroussent les manches et leur système fédéral décentralisé permet une réaction rapide plutôt que d’attendre la bénédiction du tout-puissant…

    Mais surtout grâce à ses excédents budgétaires et son petit endettement l’Allemagne détient un solide trésor de guerre ! Elle a les moyens et les subventions prévues pour la France en déconfiture vont maintenant être utilisées pour ses propres besoins y compris l’aide aux entreprises, les transports ferroviaires à prix très bas et plus généralement la meilleure manière de lutter contre l’inflation galopante. Tout en gérant l’arrivée de millions d’immigrés venant d’Ukraine.

    À la sortie on verra qui sera le gagnant dans cette affaire..

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      Électricité : des travaux d’Hercule surréalistes

      Michel Negynas · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Monday, 8 February, 2021 - 04:30 · 11 minutes

    électricité

    Par Michel Negynas.

    L’électricité n’est pas un produit comme les autres : il se gère en temps réel, ne se stocke pas, comporte des aspects de souveraineté régionale et de sécurité. Compte tenu des niveaux financiers requis, il  doit se planifier à long terme pour éviter soit un surinvestissement, soit des ruptures d’approvisionnement.

    Le contexte initial

    On peut distinguer trois activités dans le secteur électrique : elles ont chacune des caractéristiques qui leur sont propres :

    • La production peut être sans problèmes majeurs libéralisée et soumise à la concurrence… à condition quelle le soit vraiment. On verra qu’il n’en est rien.
    • Le transport et la distribution, ainsi que la gestion et la conduite des réseaux, pour des raisons évidentes d’optimisation, gagnen à être centralisées. Les myriades de câbles dans les rues arrière des blocs d’immeubles aux USA et au Japon en sont l’illustration. Toutefois, cela ne veut pas dire que l’opérateur soit obligatoirement public .
    • La commercialisation peut parfaitement être un terrain de saine concurrence sans conditions particulières autres qu’une règle anti trust. Mais cela ne représente que quelques pour cent des coûts.

    En outre, qu’on le veuille ou non, l’importance de la sécurité d’approvisionnement fait intervenir des notions d’indépendance vis-à-vis d’entités qui pourraient tirer profit, sur un plan géopolitique, de leurs fournitures énergétiques. C’est le cas pour la France, et pour une partie de l’Europe, de l’approvisionnement en gaz et en pétrole.

    Rappelons aussi que la continuité du service exige des moyens pilotables à hauteur des besoins à la pointe de consommation.

    Mise à part cette contrainte, où la politique intervient, une libéralisation doit tirer les prix au consommateur à la baisse, et favoriser l’investissement et l’innovation. C’est pourquoi l’Union européenne, avec l’approbation des États, a lancé en 1996 une série de règles visant à libéraliser le marché de l’électricité.

    La situation réelle du marché de l’électricité

    En fait, pour des raisons à la fois inhérentes à la nature de l’électricité et à l’histoire des équipements en place, il y a des problèmes dans l’application, et même de gros problèmes.

    • On l’a vu, le transport et la gestion du réseau est un monopole « naturel », le saucissonner ne conduit pas à l’optimum.
    • La commercialisation ne peut jouer que très faiblement sur les prix.
    • La production pilotable (qui est absolument indispensable) et à des coûts optimisés nécessite des investissements lourds, que seuls de très gros investisseurs peuvent engager (centrales thermiques de grande puissance, barrages). Les vrais acteurs en Europe ne sont pas très nombreux : EDF, ENGIE, E. On, Wattenfal, RWE… La concurrence sur les coûts bruts (pas ceux qui sont artificiellement modifiés par les lois) se fait plus entre filières qu’entre producteurs.

    Enfin, la notion de « terrain de jeux » n’est pas simple à définir, car il y a une limite physique aux territoires historiques : les interconnexions. Et l’on a institué des règles concurrentielles abstraites avant de penser aux détails du monde réel, comme souvent.

    Où cela devient schizophrénique

    Au moment même où l’Europe mettait en place cette libéralisation, deux contraintes supplémentaires montaient en puissance :

    • La lutte pour « sauver le climat », qui nécessitait de pénaliser réglementairement les émissions de CO2 et de favoriser des énergies dites renouvelables.
    • Le nuke bashing rendant très difficile l’investissement en équipements et en recherche pour la production nucléaire.

    Cette prétendue libéralisation s’est donc accompagnée d’une foule de règlements anti concurrentiels :

    • Marché de quotas de CO2 pour pénaliser la production fossile.
    • Avantages incompréhensibles pour les énergies intermittentes, pourtant incapables d’assurer un vrai service : obligation d’achat pour les réseaux, prix de vente au réseau imposé ou subventionné, coûts induits pris en compte par la collectivité.
    • Arrêt prévu du charbon et du nucléaire en Allemagne sans considération des coûts
    • Programme étatique de passer de 75 % à 50 % de nucléaire en France, sans justification réelle autre qu’électorale.

    Le résultat ne s’est pas fait attendre : plus personne n’investit dans des équipements de production pilotables. Les grands producteurs privés allemands ont tous scindé leurs sociétés en deux parties : une pour les renouvelables, afin de récolter les subsides, et une pour les pilotables, en perte et promises au fiasco, anticipant peut-être des filiales de défaisance, afin de se retourner un jour vers les États.

    Même les pétroliers se mettent aux renouvelables : car il ne fait aucun doute que tout ça augmentera la part du gaz, et parce qu’ils ne voient pas pourquoi ils ne profiteraient pas eux aussi du fromage.

    Les États ont quand même pris peur en voyant cela… en créant un troisième marché réglementé, un marché de capacités ; les propriétaires de pilotables peuvent ainsi vendre des « capacités » aux renouvelables intermittentes, sommées réglementairement d’en acheter.

    Ou est donc le « marché libre » censé faire baisser le prix de l’électricité au consommateur ? Il a doublé en Allemagne, il doublera en France pour les mêmes raisons. La structure des vrais opérateurs de production n’a guère changé, elle a juste fait apparaître une myriade de producteurs opportunistes d’ENR guère en mesure d’orienter le marché, sauf à y semer le chaos : voir la volatilité des prix de gros…

    Coté commercialisation, c’est la même chose : on a vu apparaître des vendeurs aux méthodes douteuses, guère capables d’offrir de vraies alternatives, puisqu’ils n’investissent pas et préfèrent acheter aux historiques.

    Électricité : le cas d’EDF

    EDF a deux problèmes : c’est un monopole historique, et il a des coûts « trop bas ».

    La vraie libéralisation aurait été de privatiser EDF et de le vendre par appartements. Pour de nombreuses raisons faciles à comprendre (souveraineté, technologies duales, contrôle de la sécurité) l’État français n’a évidemment pas souhaité le faire.

    Et qui aurait donc acheté des centrales nucléaires à EDF, dans le climat anti- nuke ? Peut-être des investisseurs chinois, ils n’attendent que ça, mais pas pour faire vraiment du business.

    D’ailleurs, le seul autre opérateur nucléaire français, ENGIE, essaye sans succès depuis plusieurs années de se débarrasser de ses centrales belges.

    Et c’est là que la schizophrénie des règles est à son comble : pour qualifier EDF de monopole à démanteler, la Commission européenne choisit le territoire français ; mais pour toute autre considération (conditions de marché, prix…) c’est l’ensemble France plus Allemagne plus Benelux qui est considéré. Or sur ce périmètre, EDF a 30 % du marché, alors que la définition d’un monopole est de 40 %.

    La France a protesté. Un compromis qui devait être temporaire a été trouvé : on définirait un prix coûtant d’EDF, qui devra vendre à ce prix le quart de sa production nucléaire à ses concurrents. Cela devait permettre de construire un réseau de concurrents qui investiraient grâce à leur marge, artificiellement créée, dans de nouvelles unités de production. Le tarif en question s’appelle ARENH (Accès régulé à l’énergie nucléaire historique.)

    On peut déjà noter que compte tenu des remarques ci-dessus, la concurrence des vendeurs aurait du être illusoire, car elle ne joue en théorie que sur les coûts de commercialisation, négligeables devant le reste.

    Mais les « concurrents » n’ont pas joué le jeu, comme on pouvait s’y attendre. Pourquoi prendraient-ils des risques en investissant, alors qu’ils se faisaient des marges assurées avec EDF ? Pire, selon les conditions des marchés spot , volatils à cause des fluctuations du gaz et des ENR, ils pouvaient jongler entre achats spots et le quota d’ARENH qu’ils avaient réservé annuellement.

    Le comble est né de la crise du Covid : avec la baisse de la demande, ils avaient trop d’ARENH, à des prix supérieurs aux prix spots . Ils ont demandé l’annulation de leurs contrats annuels, pour « cas de force majeure »… C’est encore en jugement. S’ils gagnent, ils auront inventé le commerce qui gagne à tous les coups !

    Et leur seule innovation, c’est « l’électricité verte », alors que 80 % de leur fourniture vient d’EDF.

    Évidemment, le développement artificiel des ENR n’arrange rien puisqu’il dirige les capitaux vers un secteur grassement rémunéré aux frais des consommateurs et des contribuables, avec des rentabilités à court terme, des engagements sur seulement 20 ans, et des coûts unitaires d’investissement faibles.

    Tout est donc réuni pour faire mourir EDF, sans qu’on sache comment le remplacer. Il est vrai qu’EDF y a mis aussi du sien : frais internes exorbitants, investissements repris d’AREVA avec des ardoises énormes…

    Mais sur un marché vraiment libéralisé, EDF pourrait profiter du fait que son programme nucléaire est amorti. (il a été financé uniquement sur emprunt, sans aide de l’État, contrairement à un mythe assez répandu). Il pourrait alors assainir son bilan pour réinvestir  dans le Grand Carénage et le prolongement des installations à 60 ans, voire à un nouveau programme.

    La suite, Hercule arrive

    Le temporaire de l’ARENH prend fin en 2025. La Commission européenne revient donc à la charge : il faut briser le monopole d’EDF. Plus vraiment pour établir une concurrence qui baisserait le prix au consommateur : cet argument serait risible, vu les résultats de la précédente « libéralisation » !

    Il s’agit juste maintenant d’obéir à un dogme dépouillé de toute rationalité. Certes EDF a encore un « monopole » en France, mais dans un marché européen tellement éloigné des règles libérales que c’est juste une situation surréaliste parmi tant d’autres.

    La solution qui est sur la table, le projet Hercule , fait l’objet d’intenses discussions. La Commission veut scinder EDF en deux parties, le nucléaire et le transport haute tension d’une part (la part qui sera en perte et en besoin d’intenses financements) et la distribution et les ENR d’autre part, (c’est-à-dire ce qui gagne de l’argent aux frais du contribuable et du consommateur). Elle souhaiterait évidemment une privatisation importante et la rupture des liens entre les deux sociétés.

    La question des barrages hydrauliques fait aussi débat : ce n’est pas un détail, cela représente 25 GW en France, et c’est indispensable pour assurer la continuité de service, surtout avec des ENR. Ce qui limite le degré de liberté d’opérateurs indépendants, ou, à tout le moins, nécessite des règles de servitude. Et l’eau a des usages multiples, pour le bien commun, autres que l’électricité, qu’il faut assurer eux aussi.

    Le gouvernement met sur la table une organisation scindée en trois entités : EDF bleu (le nucléaire et RTE, le réseau haute tension), EDF vert (les ENR et Enedis, le réseau de distribution, et le commerce), EDF Azur (les barrages hydrauliques) avec des liaisons qui resteraient fortes entre les entités.

    Mais la question du nucléaire reste entière. Une proposition pourrait être que l’entité dédiée vende son GWh nucléaire à prix plus ou moins réglementés (en rapport avec les coûts) en totalité sur le marché, son entité commerciale étant un acheteur comme un autre.

    Le vrai enjeu c’est le financement du renouvellement du parc du nucléaire. Les conditions ne permettent plus, comme dans les années 1980, à EDF d’emprunter seul à des taux avantageux. Or, vu la longueur des emprunts les taux sont un élément capital dans les coûts du GWh.

    De plus, la rentabilité du parc nucléaire ne peut que baisser, avec le développement frénétique des ENR, si l’obligation d’achat perdure : les autres producteurs, les pilotables, ne peuvent que moins produire. Tout ceci amène à conclure que si la France veut poursuivre dans le nucléaire, cela ne pourra se faire sans l’État : horreur pour la Commission européenne !

    Au gouvernement, personne ne croit que l’on puisse se passer du nucléaire (sauf peut être l’ADEME et Mme Pompili, et encore.) Il faut donc trouver une solution pour sauver la face. Une option vraiment privée serait sans doute chinoise. Mais l’heure est à la souveraineté nationale.

    La décision du renouvellement du parc sera prise en 2023… si Hercule convainc la Commission. Le premier nouvel EPR sera couplé en 2030, au mieux. D’ici là, la France, et l’Allemagne (qui aura arrêté nucléaire et charbon) auront sans doute acheté en catastrophe des centrales au gaz pour éviter la pénurie.

    Épilogue

    Ceci n’est pas une fiction inspirée d’Alice au pays des merveilles. C’est notre monde, c’est notre avenir. On peut en rire, tellement c’est surréaliste, on peut aussi en pleurer.

    Tant que les conditions faites aux ENR perdureront, le « prix de marché » reflétera davantage la météo que les performances des acteurs. On ne peut baser un marché libre là-dessus.

    On échafaudera des « Hercule » de plus en plus compliqués, de plus en plus shadockiens, pour corriger sans fin les corrections des corrections des dysfonctionnements créés de toute pièce par un système que plus personne ne contrôle.

    Pendant ce temps là, la Russie pousse son gazoduc et la Chine vend ses centrales  nucléaires.

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      Hausse des tarifs d’électricité : la Covid-19 a bon dos

      Michel Gay · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 13 January, 2021 - 04:00 · 4 minutes

    covid II

    Par Michel Gay.

    Alors que la sécurité d’approvisionnement diminue et que le gestionnaire du réseau d’électricité (RTE) envisage des coupures de courant cet hiver, la Commission de régulation de l’électricité (CRE) prévoit une nouvelle augmentation de 1,7 % de l’électricité le 1er février 2021 pour les particuliers.

    Elle sera même de 3,02 % pour les professionnels. Cette dernière hausse sera donc répercutée sur les produits manufacturés vendus ensuite aux particuliers.

    De qui se moque-t-on ?

    Selon la CRE, cette hausse serait alimentée par de nombreux facteurs, « presque tous » liés à la crise économique et aux conséquences sanitaires de la pandémie.

    Tout est dans le « presque tous » et dans la valeur relative accordée à ces facteurs dans cette hausse.

    La CRE évoquerait notamment « l’évolution des coûts de commercialisation due aux effets de la crise sanitaire liée au Covid-19 » et « l’augmentation du coût de l’approvisionnement en énergie » des fournisseurs sur le marché de gros.

    Mais ce ne sont que des causes secondaires…

    La cause principale, passée sous silence, est constituée par les énormes subventions attribuées par dizaines de milliards d’euros aux éoliennes et aux panneaux photovoltaïques.

    Mais le plus fort réside dans la justification de cette hausse par la CRE.

    Ainsi est-il indiqué que :

    « La hausse du prix de gros de l’électricité s’inscrit dans un contexte global de remontée du prix des commodités, avec des hausses du prix du charbon de 12 % » alors que le charbon n’existe pratiquement plus dans la production nationale d’électricité ( 0,3 % en 2019 ),

    « du prix du gaz (PEG) de 9 % » alors que le gaz représente moins de 8 % de la production d’électricité,

    « du prix du Brent de 19 % » alors que le pétrole est quasiment inexistant (0,4 %) dans la production française d’électricité,

    « et du prix du quota CO 2 de 20 % » alors que justement la production d’électricité émet peu de CO2 en France et que ces émissions sont stables ou en baisse !

    L’électricité avait déjà augmenté de 5,9 % le 1er juin 2019, de 1,23 % le 1er août 2019, de 2,4 % en février 2020, et de 1,54 % en août 2020.

    La faute à qui et à quoi ?

    Qui paie les milliards d’euros de subventions annuelles engagés pour 20 ans pour « soutenir » éoliennes et panneaux photovoltaïques ?

    Qui paie les milliards d’euros supplémentaires nécessaires pour alimenter les certificats d’économie d’énergie servant notamment à isoler (plus ou moins bien) les logements pour… un euro ?

    Qui paie les folies dépensières de certains de nos élus comme, par exemple, des routes solaires inefficaces et ruineuses ou des stations hydrogène superflues ?

    Qui paie pour intégrer dans la facture du réseau de RTE le raccordement de l’immense gabegie (25 milliards d’euros) des éoliennes en mer pour en diminuer artificiellement le coût total ?

    La Covid-19 et le nucléaire ont bon dos

    Accuser la Covid-19 et le nucléaire d’augmenter le coût de production d’électricité est un écran de fumée scandaleux alors que, dans le même temps, presque tous les « distributeurs » d’électricité viennent biberonner la production nucléaire bas tarif (42 euros par mégawattheure) que leur procure l’accès régulé à l’énergie nucléaire historique (ARENH).

    Ils demandent même une augmentation du plafond de l’ARENH dans le but de pouvoir concurrencer davantage le producteur EDF aux prix de production… trop bas !

    La Commission européenne veut niveler les prix de vente de l’électricité… par le haut pour favoriser la concurrence des entreprises danoises et allemandes dont le coût de production est trop élevé ! Le prix de vente de l’électricité dans ces deux pays y est deux à trois fois plus élevé qu’en France à cause des éoliennes et des panneaux photovoltaïques qu’il faut subventionner !

    De plus, les antinucléaires cherchent par tous les moyens à faire augmenter le coût de production du nucléaire sous des tracasseries diverses en apeurant la population avec des déclarations péremptoires et fausses ( Tchernobyl et son « nuage », Fukushima , incidents sans gravité montés en épingle à Fessenheim …)

    La facture va grimper

    Oui, notre facture d’électricité augmente avec le soutien financier inconditionnel des gouvernements successifs aux énergies renouvelables depuis 10 ans. Et c’était prévisible depuis 10 ans .

    Le pire est à venir car le gouvernement actuel, comme les précédents, ne fait rien pour enrayer la machine infernale de la désastreuse « transition énergétique » fondée sur les énergies renouvelables intermittentes et soutenue par la loi de transition énergétique pour la croissance verte d’août 2015.

    Seuls quelques parlementaires « audacieux » alertés par différents rapports de la Cour des comptes commencent à s’émouvoir de la facture démentielle pour les Français.

    Une Commission d’enquête sur le coût des énergies renouvelables présidée par le député Julien Aubert a rendu ses conclusions en juillet 2019 et souligne la gabegie financière des énergies intermittentes éoliennes et photovoltaïques.

    Les parlementaires découvrent l’ampleur de certains circuits financiers « autonomes » et la profondeur des sables mouvants où disparaissent inutilement par dizaines de milliards d’euros l’argent que les consommateurs paient par des taxes sur leur factures d’électricité, de gaz, et aussi de carburant , et par leurs impôts !

    Quelqu’un va-t-il enfin mettre fin à cette incroyable mascarade ruineuse pour les Français ?