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Reconfinement : Pas-de-Calais puni, Seine-Saint-Denis épargnée
Frédéric Mas · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 5 March, 2021 - 09:50 · 4 minutes
Par Frédéric Mas.
Le Pas-de-Calais devrait endurer de nouveaux confinements le week-end et la fermeture de ses grandes surfaces de plus de 5000 m2 alors que le taux d’incidence du covid-19 du département est comparable à celui de Seine-Saint-Denis, qui elle est épargnée par les restrictions.
L’annonce a suscité la protestation d’élus du Pas-de-Calais qui ont dénoncé le deux poids deux mesures du gouvernement et le caractère punitif des nouvelles restrictions.
Vaccination en retard, confinement le week-end chez nous et pas ailleurs avec les mêmes chiffres : mais qu’est-ce que le Pas-de-Calais a pu bien faire pour être traité de la sorte ?
— Daniel Fasquelle (@DFasquelle) March 4, 2021
Vaccination: pour le maire de Boulogne-sur-Mer, « à situation sanitaire égale, tous les départements ne sont pas traités de la même façon » pic.twitter.com/J957RujcTM
— BFMTV (@BFMTV) March 4, 2021
C’est que l’action du gouvernement ne prend pas appui sur des raisons uniquement sanitaires, mais aussi, comme l’indique FranceInfo , sur un « argument social » . Citant le journaliste de France 2 Jean-Baptiste Marteau, France Info rapporte :
« Le taux d’incidence n’est pas le seul critère pris en compte, […] la concertation avec les élus locaux a joué dans la balance, et il semble que ceux du Pas-de-Calais étaient beaucoup plus favorables à l’idée d’un confinement, ce qui n’était pas du tout le cas en Île-de-France. Deuxième argument : être confiné dans le Pas-de-Calais ou dans une cité de Seine-Saint-Denis, ce n’est pas la même chose »
Reconfinement : pas d’unanimité chez les élus locaux
Les vives protestations des maires de Boulogne-sur-Mer, Hesdin ou du Touquet indiquent que la décision de reconfiner était loin de faire l’unanimité des élus locaux.
Triple peine pour le Pas-de-Calais (et que pour le 62!!!) :
– couvre feu
– confinement le week-end
– on attend toujours les vaccins annoncés à grand coup médiatique il y a un mois et demi (3 % de vaccinés dans le PDC, un échec du gouvernement) rappel en Israël : 60 % vaccinés https://t.co/0i1m89J6Wo— Steeve Briois (@SteeveBriois) March 4, 2021
Le préfet du Pas-de-Calais Louis Le Franc avait préconisé le reconfinement le week-end dès mardi, appuyant la demande de certains élus comme celle du maire de Calais Natacha Bouchart (LR). Arguant d’un taux élevé d’occupation des lits (97 %) en réanimation et d’un taux d’incidence deux fois supérieur à la moyenne nationale, madame Bouchart estimait qu’il n’y avait pas le choix.
Fallait-il reconfiner autoritairement toute la région alors que la situation montrait une certaine hétérogénéité, comme l’indiquent les différentes voix qui se sont élevées ? Que penser de mesures restrictives de liberté prises sur critères politiques, et non scientifiques ?
Le constat de l’urgence sanitaire jugé au doigt mouillé
Les restrictions aux libertés seraient plus mal vécues en Seine-Saint-Denis que dans le Pas-de-Calais. Le virus serait-il sensible aux exigences de justice sociale, épargnant les plus pauvres et punissant les plus riches ? On savait depuis une déclaration de M. Delfraissy, que le virus était « diabolique » et « intelligent », nous ne savions pas qu’il était en plus socialiste.
Jean-François Delfraissy: « On a affaire à un virus diabolique et beaucoup plus intelligent qu’on ne le pense » pic.twitter.com/ktLd94kZJV
— BFMTV (@BFMTV) January 24, 2021
Mais vivre en Seine-Saint-Denis est-il plus infernal que de vivre dans le Pas-de-Calais, en se fondant sur un critère social ? Si nous acceptons de prendre ce propos au sérieux, observons que selon l’Insee le Pas-de-Calais et la Seine-Saint-Denis se situaient respectivement à la 94 e place et à la 99 e place du classement des départements les plus pauvres de France sur 104 en 2017.
L’État ne serait-il pas tout simplement en train de rationaliser sa faiblesse quand il s’agit d’assurer ses missions essentielles ? L’état du régalien en Seine-Saint-Denis n’est pas vraiment comparable à celui du Pas-de Calais. Un rapport sénatorial de 2018 observait déjà que la Seine-Saint-Denis était « championne des agressions, des violences physiques et du trafic de stupéfiants » .
Face à l’explosion de la violence, les rapporteurs observaient que l’administration préconisait même de fermer les postes de police la nuit alors que les besoins allaient grandissants. « Il paraît effarant, lorsque la délinquance et la criminalité augmentent, que les services de police diminuent. » notent les rapporteurs.
Sauf si on a abandonné tout espoir d’y faire régner le droit. Est-ce que parce que l’État a démissionné en Seine-Saint-Denis, et qu’il y est désormais incapable d’y faire appliquer ses consignes les plus basiques, qu’il a évité le reconfinement ?
L’ultra-violence : « En Seine-Saint-Denis, il y a quatre fois moins de policiers qu’à Paris », regrette @jclagarde . @SoMabrouk @MA2TBE2L #Europe1 pic.twitter.com/I8XrmEQMVU
— Europe 1 (@Europe1) October 15, 2018
Il semblerait donc que ce soit sur des critères politico-sociaux plus que scientifiques que le gouvernement reconfine le Pas-de-Calais et épargne la région parisienne. Cela porte un nom : arbitraire. Céder aux multiples féodalités politiques et administratives n’efface pas la responsabilité du gouvernement dans cette nouvelle attaque adressée à l’État de droit et à l’isonomie libérale.