• Co chevron_right

      Le Starship de SpaceX, un géant réutilisable pour Mars

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Saturday, 22 April, 2023 - 03:00 · 8 minutes

    Imaginez qu’après chaque traversée de l’Atlantique on jette les avions à la mer. C’est un peu ce qui se passait avant l’arrivée de SpaceX sur le marché et la mise en pratique de l’idée géniale d’Elon Musk de récupérer puis de réutiliser le lanceur (premier d’une fusée de deux, trois ou quatre étages).

    Depuis les V2 allemands de la Seconde Guerre mondiale , une fusée lancée était une fusée perdue (du moins dans ses éléments constitutifs). C’était l’époque où la pollution était une notion inconnue, où l’on disposait d’autant de métal que souhaité et où les usines tournaient sans trop de problème d’approvisionnement en métaux ou ergols (carburant + comburant). Sur cette lancée, si l’on peut dire, les fusées américaines de la grande époque de la conquête de la Lune (fin des année 1960/début des années 1970) étaient également jetables et donnaient satisfaction puisqu’on ne comptait pas les dollars dépensés et qu’on jetait aussi à peu près tout.

    L’euphorie des premiers succès passés, on se dit que, tout de même, on pourrait faire des fusées comme des avions pour les seuls vols habités. Cela donna la navette spatiale, « the Shuttle », qui fut en service entre 1981 et jusqu’en 2011 (retraite un peu forcée après 135 vols pour des raisons de sécurité). Cet avion-fusée a rendu de grands services (sauvetage du télescope Hubble) mais il a coûté extrêmement cher en entretien. Il s’agissait notamment de réviser une à une la totalité des tuiles de protection thermiques après chaque vol. Et ce fut d’ailleurs un bloc de mousse de protection qui avait heurté une de ces tuiles au décollage qui provoqua la catastrophe de la navette Columbia (7 morts).

    Quand il lança ses premières fusées en 2010, Elon Musk était animé par l’objectif Mars comme Tintin par l’objectif Lune. Et, sans aucun complexe (c’est un de ses traits de caractère) il voulut que sa fusée soit récupérable et réutilisable (il fallait évidemment qu’elle le soit pour revenir de Mars). Il commença ses lancements en 2006 et en 2015 il réussit sa première récupération (après plusieurs échecs ou demi-succès, mais c’est comme cela qu’il fonctionne). On était au vingtième vol et c’était un Falcon 9 (le seul lanceur dont la société disposait. Aujourd’hui SpaceX a lancé 216 Falcon 9 et Arianespace 84 Arianes 5 (depuis 2006). La différence est claire et la cause de la différence, c’est le coût aggravé par le fait que plus on lance moins le lancement coûte cher puisqu’on fait des économies d’échelle.

    Le deuxième étage du Falcon 9 n’était pas récupérable mais cela n’avait pas vraiment de sens pour plusieurs raisons.

    Premièrement la combustion des ergols du premier étage se termine très rapidement (trois minutes dans le cas du Starship) car il s’agit de s’arracher de la gravité terrestre à partir d’une vitesse nulle et pour ce faire non seulement de gagner en vitesse mais aussi en altitude, le plus vite possible. Après son utilisation, le premier étage se trouve donc à la verticale, très proche de son site de lancement. Au contraire le deuxième étage va prendre de la vitesse essentiellement à l’horizontale, en prenant lentement de l’altitude en fonction de sa vitesse qui le soustrait de plus en plus à la gravité. Il faudrait beaucoup d’ergols pour revenir sur le site de lancement très éloigné et à une vitesse initiale beaucoup plus élevée (peut-être pourrait-on le faire après une orbite complète ?).

    Deuxièmement, dans une fusée classique le deuxième étage est un exhausteur d’altitude qui ne comporte ni beaucoup de métal, ni beaucoup de moteurs. Il est donc de ce fait moins intéressant.

    Troisièmement, toujours dans une fusée classique, le deuxième étage en porte un autre (un module de service) qui lui-même en porte un autre (la capsule ou le satellite ou la sonde) même si l’expression « deuxième étage » est réservé exclusivement à cet exhausteur d’altitude. Le problème de la récupération est ainsi segmenté en plusieurs sous-problèmes. Si on lance un satellite, on ne va pas le récupérer, ce qui ne sera pas le cas d’une capsule si elle porte des passagers. Quant au module de service, il peut aller très haut, très loin, à une distance ou il ne sera pas plus récupérable que la sonde qu’il a lancée.

    Pendant la mise en place chez SpaceX de l’innovation/révolution qui consistait à récupérer le premier étage, les institutionnels, NASA ou ESA, regardaient sans comprendre qu’ils étaient en train de perdre le marché, obnubilés par leur crainte que la fiabilité du lanceur récupéré ne serait jamais suffisante et par le fait que pour revenir se poser sur le sol terrestre, un lanceur devait utiliser entre 10 et 15 % des ergols embarqués.

    Les lanceurs réutilisables : une bonne idée

    Compte tenu de l’évolution des coûts et donc des prix des lancements, vu également l’allongement du track-record positif de SpaceX, ces mêmes institutionnels finirent par se dire que cette réutilisation des lanceurs n’était peut-être pas une mauvaise idée.

    Mais le retard accumulé est considérable. À ce jour aucune fusée de la NASA construite par ULA (United Launch Alliance = Boeing + Lockheed Martin) n’est récupérable et l’ESA envisage la récupération/réutilisation pour les années 2030. D’ici là tout le marché, sauf protection très coûteuse, sera pris par SpaceX. C’est d’ailleurs presque déjà le cas sauf pour les lancements d’organisations captives pour des raisons politiques (l’ESA utilise forcément les services d’Arianespace).

    Mais Elon Musk voulait aller plus loin. Il voulait aller sur Mars et c’est pour cela qu’il décida de créer un lanceur lourd adapté pour ces missions lointaines avec un nouveau concept de deuxième étage qui devient un second étage. Ce second étage fait un bloc de tous les segments supérieurs des fusées car il a besoin de conserver leurs fonctions. Si on veut envoyer des hommes sur Mars , il faut s’organiser pour qu’ils puissent revenir et donc que le second étage qui va les emporter sur Mars puisse en revenir en bon état, avec le minimum d’entretien sur place et qu’il puisse être approvisionné sur place en ergols pour bénéficier de l’énergie suffisante pour le voyage (moins que pour l’aller car la gravité martienne est nettement plus faible que la gravité terrestre).

    Par la même occasion, il faut que le vaisseau spatial puisse revenir avec un module de propulsion type deuxième étage propulsif classique, avec un module de service classique pour assurer toutes sortes de fonction nécessaires à l’habitat mais pas seulement (correctif d’attitude notamment) et avec un habitat. À noter qu’il est totalement exclu d’apporter sur Mars les ergols nécessaires au retour car il faudrait doubler la masse qu’il conviendrait d’arracher à la gravité terrestre à l’aller (ergols suffisants pour repartir de Mars plus les réservoirs pouvant les contenir). Cela reviendrait à trimbaler avec soi un corps mort inutile pendant la moitié du voyage (qu’il faudrait en plus maintenir pendant deux ans à des conditions de températures particulièrement basses).

    C’est ainsi donc qu’est né le concept de ce Starship et de son lanceur SuperHeavy dont on peut espérer assister au premier vol orbital cette semaine. Avec lui, le deuxième étage et les autres sont intégrés et la récupération entre dans la fonction elle-même du vaisseau spatial.

    Si le Starship peut voler, le concurrent, également conçu et fabriqué selon des principes traditionnels par ULA, nommé SLS ( Space Launch System ), celui qui a mené à bien la première mission Artemis autour de la Lune, deviendra complètement obsolète. En effet il n’aura pas une capacité d’emport comparable. Sa capsule, Orion, a un volume pressurisé de 19,57 m 3 dont un volume habitable de 9 m 3 alors que le Starship aura un volume viabilisable de 1100 m 3 , habitable pour plus de 800 m 3 . Par ailleurs Orion serait totalement incapable de repartir de Mars après y être descendu. Il faudrait qu’il reste en orbite en étant assisté de l’équivalent d’un appendice léger, l’équivalent du module lunaire  (LEM) du temps d’Appolo pour descendre sur Mars puis remonter à l’orbite. Inutile de dire que ses capacités d’emport ne pourraient être qu’extrêmement limitées en volume et en masse (deux personnes et quelques équipements, comme un rover pour les transporter). En second lieu le coût du SLS se monte à plus de quatre milliards de dollars alors que celui du Starship atteint juste le milliard. Bien sûr c’est un coût initial et il diminuera si l’on construit plusieurs fusées ; mais c’est mal parti pour le SLS étant donné qu’il n’est et ne sera pas réutilisable.

    Donc le SLS n’est qu’une solution provisoire en attendant que le Starship soit prêt. Quant à l’Europe/ESA, on en reparlera plus tard quand elle aura réussi à faire un lanceur réutilisable. Mais pour le moment elle n’est définitivement pas dans la course et ne tiendra dans les années qui viennent que parce que ses fusées seront payées par les impôts des contribuables.

    • Co chevron_right

      Exploration spatiale européenne : en route pour les mystères de Jupiter

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Monday, 17 April, 2023 - 03:15 · 14 minutes

    Ça y est, elle est partie ! La mission JUICE de l’ESA a quitté la Terre ce vendredi 14 avril de la base de Kourou en Guyane, pour le monde de Jupiter (le nom derrière l’acronyme est « JUpiter ICy moons Explorer »). Voir les détails du lancement en fin d’article.

    Pour l’Europe, c’est l’événement astronautique de l’année. L’objet de la mission est de chercher à savoir jusqu’à quel niveau de complexification vers la vie ont pu mener les « astres-océan » que sont Europa, Ganymède et Callisto, les plus grosses lunes de la « géante gazeuse » qu’est Jupiter. La mission sur place durera quatre ans, le vaisseau passant de l’orbite de l’une à l’orbite de l’autre. Mais il lui faudra malheureusement cheminer huit années pour parvenir dans l’environnement jovien qui n’évolue pourtant que de 590 à 966 millions de km de la Terre (Mars, de 56 à 400 millions).

    C’est en 2004 que tout a commencé, quand l’ESA a entrepris de consulter la communauté scientifique des pays membres pour choisir l’orientation de son futur programme « Cosmic Vision 2015-2025 » (sur des thèmes extrêmement vagues ou complétement ouverts selon le point de vue).

    En 2007, l’ESA a ensuite lancé un « appel à missions » pour déterminer quelle devrait être la mission majeure (de classe « L ») de ce programme.

    En 2012, trois propositions ont été retenues pour étude plus approfondie (phase de « définition ») : JUICE, NGO et ATHENA. Finalement JUICE a été choisie et les deux autres ont été reportées.

    ATHENA (Advanced Telescope for High Energy Astrophysics) qui doit étudier avec un capteur à rayon X l’accumulation de la matière dans les galaxies ainsi que la formation et l’évolution des trous noirs, pourrait faire l’objet d’une seconde mission « L ».  Mais telle que prévue elle coûte trop cher et elle a été remise à l’étude en 2022.

    NGO (New Gravitational wave Observatory), dédiée à l’étude des ondes gravitationnelles (adaptation de LISA) reste « en suspens ».

    Tout ça pour dire que les progressions se font très lentement au milieu de beaucoup de concurrence, de beaucoup de bavardages et de beaucoup de précautions, notamment financières, au-delà même du raisonnable (même si une bonne définition est évidemment indispensable). L’explication est sans doute à rechercher dans le nombre des intervenants et le poids des administrations.

    En route vers Jupiter

    Ceci dit l’étude des mondes de Jupiter est passionnante et elle est tout à fait faisable sur le plan astronautique. Sur le plan scientifique les équipements d’observation embarqués nous font espérer une poussée magnifique de connaissances nouvelles.

    Sur le plan astronautique, c’est une fusée Ariane 5-ECA d’Arianespace qui a effectué le lancement d’aujourd’hui. La version « ECA » est la plus puissante de la gamme de ces lanceurs. Elle permet de placer 21 tonnes en orbite basse terrestre et 10,5 tonnes en orbite géostationnaire. Sur trajectoire interplanétaire c’est environ moitié moins. En l’occurrence cela suffit mais de justesse pour la masse à injecter qui sera de 5,2 tonnes (dont 285 kg d’instruments scientifiques). C’est cette version d’Ariane qui a lancé le télescope JWST vers le point de Lagrange L2 le 25 décembre 2021. JUICE était son 84ème et avant-dernier lancement (il aurait été impardonnable de le rater !).

    Le problème, comme évoqué en introduction, c’est la durée du voyage (pour ceux qui, comme moi, attendent avec impatience les données).

    Les missions précédentes ont été nettement plus rapides :

    • Galileo, lancé par la navette-spatiale de la NASA, arriva dans l’environnement de Jupiter en 6 ans
    • Cassini, lancé par un Titan-IVB de Martin Marietta y parvint en 3ans (et de Saturne en 6 ans)
    • Juno, lancé par un Atlas V 551 de Lockheed Martin y parvint en 3 ans

    Huit ans pour JUICE c’est donc vraiment beaucoup. L’explication est que la masse de la sonde ne permettait pas d’aller plus vite et qu’on ne veut pas non plus aller trop vite pour pouvoir se faire capturer par la force gravitationnelle de Jupiter sans avoir à freiner. Par ailleurs, on a voulu économiser au maximum les ergols pour le voyage puisqu’on aura besoin une fois arrivé « sur place », d’une quantité supérieure aux précédentes missions pour circuler d’une lune à l’autre (35 survols prévus !).

    Pour réduire au maximum cette consommation on va y substituer au maximum de l’énergie « naturelle », celle qu’on peut obtenir par assistance gravitationnelle (dans un sens positif, d’accélération, qu’on appelle l’effet de fronde). C’est une opération délicate car il faut s’approcher de l’astre (tomber vers lui) pour bénéficier de la force de son attraction qui va augmenter la vitesse, suffisamment mais pas trop pour qu’elle corresponde exactement à l’ellipse que l’on souhaite parcourir pour parvenir au mieux à l’astre suivant. Le moment de la libération permettra de réorienter la fusée.

    Dans le cas de cette mission, l’assistance gravitationnelle suivra un programme « EVEE ». Cela veut dire que la propulsion chimique sera complétée par les impulsions gravitationnelles successives de la Terre (E), de Vénus (V) puis deux fois de la Terre (EE). La première manœuvre aura lieu en août 2024 en utilisant le système Terre/Lune.

    Quoi qu’il en soit du voyage, les objectifs sont passionnants. Il s’agit d’abord d’étudier les zones habitables de Ganymède (comme « objet planétaire et habitat potentiel »), Europa (en insistant sur les zones les plus récemment actives) et Callisto (comme témoin du système le plus ancien de Jupiter), les trois lunes abritant un océan sous une carapace de glace. Il est notable que le fond de ces océans soit constitué de roches, ce qui doit permettre sous l’effet de l’énergie tellurique, imprégnations, enrichissements, évolutions des molécules organiques qu’ils peuvent contenir. On veut en même temps explorer le système de Jupiter comme archétype des systèmes de planète géante gazeuse (son atmosphère, sa magnétosphère et son système de satellites et d’anneaux). Ce sera en fait la suite de la mission JUNO de la NASA (2016-2021-2025).

    Ganymède va être étudié par de nombreux survols à basse altitude. C’est un satellite particulièrement intéressant du fait non seulement de son océan sous surface mais aussi de sa magnétosphère, le seul satellite du système solaire à en générer une, et de sa taille puisque c’est le plus gros des satellites avec un diamètre de 5268 km (plus que Titan, D = 5149 km ; mais nettement moins que Mars, D = 6779 km et beaucoup plus que notre Lune, D = 3475 km). JUICE devrait terminer sa course en s’écrasant sur Ganymède (et donc en transmettant un supplément d’informations). Jusqu’à la fin, l’altitude minimum des survols sera de 500 km (pour référence, l’ISS orbite la Terre à environ 400 km).

    Europa, bien connue pour sa surface de glace blanche (mais un peu sale, ce qui précisément nous intéresse) et réfléchissante, va être scrutée dans les régions où les rejets d’eau et de matière souterraines (le « sale » ci-dessus) apparaissent les plus récents et l’on va essayer de déterminer la composition chimique des matériaux autres que la glace apparaissant dans les nombreuses fissures, tout en analysant aussi précisément que possible les processus de remontée de ces matériaux en surface. L’altitude minimum sera de 400 km.

    Callisto (la deuxième en taille avec D = 4820 km) est une lune particulière en ce qu’elle est la plus éloignée de Jupiter et de beaucoup puisque son orbite est à 1 882 700 km de Jupiter (notre Lune est à 385 000 km de la Terre) alors que la deuxième, Ganymède, évolue à 1 070 000 km. Elle a donc été beaucoup moins transformée par Jupiter que les autres, par force de marée (ou par radiations), comme en témoigne d’ailleurs sa surface extrêmement cratérisée (qui est aussi une indication sur l’épaisseur de la croûte recouvrant son océan interne). Elle peut donner de ce fait des informations sur la période la plus ancienne du système jovien et servir de référence pour comparaison avec Ganymède. Le survol le plus bas sera effectué à seulement 200 km (à noter qu’un passage bas dépend de la vitesse, autrement la sonde s’écrase) !

    Les différents équipements de la mission

    Pour exploiter ces différents passages à basse altitude, la sonde sera équipée d’un grand nombre d’équipements, pertinents et à la pointe de ce que l’on sait faire aujourd’hui :

    • Imaging system (JANUS),
    • Visible-IR Imaging spectrometer (MAJIS),
    • UV Spectrograph (UVS),
    • Sub Millimeter Wave Instrument (SWI),
    • JUICE Magnetometer (J-MAG),
    • Radio and Plasma Wave Instrument (RPWI),
    • Particle Environmental Package (PEP),
    • Laser Altimeter (GALA),
    • Ice Penetrating Radar (RIME),
    • Radio Science Experiment (3GM),
    • VLBI Experiment (PRIDE).

    Je les évoque ci-dessous :

    JANUS va nous fournir des cartes géologiques détaillées à haute résolution et imagées avec les altitudes (DTM) et donner le contexte des autres données observées. Il opérera dans les longueurs d’ondes du spectre visible et du proche infrarouge. Il bénéficie du know-how des caméras des missions Bepi-Colombo, Dawn, Rosetta et Mars Express.

    MAJIS va ajouter une dimension spectrométrique à l’image, avec une précision jamais atteinte (1280 bandes spectrales dans le segment 0,4 µm à 5,7 µm, soit de l’IR moyen à l’IR profond). Mais pour analyser les différentes atmosphères et leurs interactions avec l’espace, JUICE sera aussi équipée d’un spectromètre,

    UVS , opérant de l’autre côté du visible, dans l’ultraviolet (55 à 210 nm, UV lointain et UV extrême).

    Dans l’atmosphère de Jupiter, SWI mesurera et dressera la carte des températures et des vents Doppler (verticaux) ; il étudiera les molécules CO, HS, HCN, H 2 O, présentes dans la stratosphère de cette planète géante. Il caractérisera les atmosphères ténues des lunes galiléennes. Il mesurera également les propriétés thermophysiques et électriques des surfaces et sous-sol de ces mêmes astres et les corrèlera avec leurs propriétés atmosphériques et les traits géographiques.

    Le magnétomètre J-MAG permettra de mieux comprendre la formation des lunes, de caractériser leurs océans souterrains (profondeur, étendue, conductivité), et permettra de considérer le comportement d’un astre magnétisé en rotation rapide comme Jupiter, et la façon dont il accélère les particules qu’il émet. Il permettra aussi de caractériser la petite magnétosphère de Ganymède. En surface d’Europa, il pourra détecter et caractériser d’éventuels dégazages.

    RPWI disposera de sondes de Langmuir qui lui permettront de mesurer la température, la densité électronique et le potentiel du plasma circulant entre Jupiter et ses lunes et en particulier de mesurer comment les océans des satellites et les ionosphères réagissent aux variations très fortes de la magnétosphère de Jupiter.

    Le PEP permettra la mesure et l’imagerie des densités et des mouvements des particules énergétiques neutres (ENA) et du plasma dans tout le système de Jupiter (NB : les particules peuvent atteindre une énergie se mesurant en plusieurs MeV).

    GALA est spécifique à Ganymède. Il va mesurer l’effet de marée exercé par Jupiter sur cette dernière et déduira des déformations de la croûte, l’épaisseur de celle-ci et l’importance du volume de l’océan sous-jacent.

    Le rôle de RIME (Radar for Icy Moon Exploration) s’explique de lui-même. Il concerne au premier chef Europa. Compte tenu de ses caractéristiques visibles et de sa position dans le système de Jupiter (chaleur interne par effet de marée), cette lune est la meilleure candidate pour disposer de l’océan capable de faire évoluer les molécules organiques au plus loin vers la vie. RIME est la continuation des radars MARSIS et SHARAD opérant en orbite autour de Mars. Il aura une pénétration allant jusqu’à 9 km. C’est nettement moins que l’épaisseur de la banquise d’Europa qui peut faire entre 80 et 170 km mais cela donnera une vision en 3D de cette banquise (et ce qu’il conviendrait de faire si l’on veut commencer à la sonder).

    3GM étudiera tous les effets que peut avoir la gravité dans le système de Jupiter : effet de la planète sur ses lunes, effets des lunes entre elles.

    PRIDE étudiera tout ce qui peut être mesuré par effet Doppler à l’intérieur du système de Jupiter et de ce système vers les autres astres du système solaire, par la mesure précise des positions et déplacements du vaisseau spatial sur le cadre de référence ICRF (International Celestial Reference Frame).

    Enfin les organisateurs de la mission ont insisté pour la coordination et la synergie des différents instruments embarqués (« Synergistic payload capabilities ») ce qui est judicieux pour un ensemble aussi riche.

    Cet orchestre absolument magnifique (on peut en effet comparer ces instruments scientifiques embarqués à des instruments de musique joués en harmonie du fait de la coordination et de la synergie ci-dessus mentionnées) doit nous permettre d’avancer considérablement dans la compréhension du système de Jupiter. On se rend bien compte que ce système, animé par un cœur violent, la redoutable planète-reine elle-même, est un milieu très hostile de par son environnement radiatif. Mais la nature est bien faite. Si elle existait dans les océans souterrains, la vie bénéficierait d’une protection contre ces forces destructrices du fait de la présence d’une carapace de glace (et d’ailleurs ces océans n’existeraient pas sans ces carapaces) et de la chaleur interne des lunes stimulée par les forces de marée générées par la masse de Jupiter. On peut toujours espérer.

    L’énergie à bord est fournie par 85 m 2 de panneaux solaires. Les corrections d’attitudes et les impulsions pour changer de direction (principalement insertion en orbite de Jupiter puis insertion en orbite de Ganymède) seront faites grâce à 3650 kg d’ergols (mono-méthil hydrazine – MMH – brûlant dans un mélange d’oxydes d’azote -MON). Poussée maximum 425 Newton.

    Les participants scientifiques (« JUICE Science Working Team ») à cette mission sont évidemment très nombreux. Ils sont ressortissants de plusieurs pays membres de l’ESA : Allemagne, Italie, France,  Grande Bretagne, Suède, Suisse, Pays-Bas, Belgique mais aussi États-Unis et Israël.

    Le décollage a eu lieu à l’heure prévue, 14 h 15 (avec un jour de retard compte tenu du temps orageux hier). Les deux boosters latéraux se sont détachés à 14 h 18. La coiffe protégeant la sonde s’est ouverte et a été évacuée à 14 h 20. La séparation du premier étage s’est faite à 14 h 22. L’allumage du second étage a eu lieu à 14 h 24. La séparation de la sonde et du second étage a eu lieu à 14 h 42. L’acquisition du signal radio a eu lieu à 15 h 05. Le déploiement des panneaux solaires a eu lieu à 15 h 50. Comme on dit en Franglais « All is nominal ! »

    Le moment le plus délicat de la mission, après le décollage et après les multiples recherches d’assistance gravitationnelle, sera l’insertion en orbite de Jupiter mais malheureusement nous n’en sommes pas encore là.

    Au-delà, en m’éloignant de la science jusqu’aux rives de la science-fiction, je ne peux m’empêcher de me souvenir que c’est dans ce cadre grandiose qu’évoluait l’un des monolithes-relais de l’épopée 2001 Odyssée de l’Espace conçue par l’esprit fertile d’Arthur Clarke et merveilleusement mis en images et en musique par le génial Stanley Kubrick.

    JUICE rencontrera-t-elle un monolithe ? Ce serait bien sûr une révolution pour nous, l’ouverture d’une porte splendide vers l’infini et vers la vie ailleurs. On peut toujours rêver.

    https://www.cosmos.esa.int/web/juice

    https://www.esa.int/Space_in_Member_States/Belgium_-_Francais/JUICE_prochaine_grande_mission_scientifique_de_l_Europe

    https://saf-astronomie.fr/la_mission_juice_esa/

    https://sci.esa.int/documents/33960/35865/1567260193381-ESA_SPC%282012%2920_rev.-1_JUICE_SMP.pdf

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Jupiter_Icy_Moons_Explorer

    https://www.space.com/why-take-juice-spacecraft-eight-years-reach-jupiter

    • Co chevron_right

      La cryptomonnaie décryptée (3) : les différents types de cryptomonnaies

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 12 March, 2023 - 04:30 · 8 minutes

    Par Yannick Chatelain et Antoine Roche 1 .

    Première partie de cette analyse ici .
    Seconde partie de cette analyse ici .

    En plusieurs étapes, nous vous proposons de rendre la cryptomonnaie à la portée de tous.

    Après « La blockchain est une révolution », « Les Smart Contracts », nous vous proposons de découvrir les différents types de cryptomonnaies actuellement en circulation.

    Les cybermonnaies dans le monde

    Les données communiquées par Statista et Investing montrent que le nombre total de crypto a été multiplié par 75 entre 2013 et 2021, passant d’un peu plus de 60 à plus de… 4500. Après l’explosion des cryptos ce nombre avait depuis doublé… pour atteindre en 2022, un record avec pas moins de 10 400 cryptomonnaies.

    Comme le soulignait Statista le phénomène intéressait alors de plus en plus d’investisseurs et pour cause : le bitcoin avait vu sa valeur multipliée par 30 entre avril 2017 et avril 2022 ! Et avant « la crise des crypto » qui a été largement médiatisée, ce qui a contribué à engendrer une chute de l’offre et fortement inquiété – à tort ou à raison –  ces derniers.

    À l’heure où nous écrivons on dénombre 8029 devises.

    Pour avoir une visibilité exhaustive de l’offre et des plus importantes cryptomonnaies par capitalisation, par volume d’échange, etc. il vous suffit d’accéder au classement proposé par Coingecko ou Coinmarketcap . Dans le top cinq des plus prisées et – sans grande surprise – ce sont celles dont vous avez probablement entendu parler : Bitcoin ( BTC ), Ethereum ( ETH ), Teher ( USDT ), Binance Coin ( BNB ), USD COIN ( USDC ). Si le chiffre reste conséquent, le quantitatif est à la baisse après avoir atteint un sommet historique.

    Lorsque vous vous intéressez à une cryptomonnaie il est important de savoir quel est son but, son utilité, et comprendre son fonctionnement afin de prendre des décisions éclairées. Voilà pourquoi nous vous proposons dans le paragraphe suivant une description de quelques-unes des catégories prédominantes.

    Nous nous permettons de mettre des astérisques en fonction du risque, celui-ci variant naturellement en fonction de la connaissance du sujet. Une asterisque représente un risque moindre ; cinq astérisques représentent un risque très élevé pour un néophyte, mais non figé et à même d’être réduit au fur et à mesure du développement de son expertise.

    Cryptomonnaies : les catégories phares

    Les cryptomonnaies de couche 1 (dites Layer 1) *

    Les cryptomonnaies de couche 1 sont utilisées pour effectuer des transactions financières de manière décentralisée, rapide et peu coûteuse. Elles peuvent être utilisées pour acheter des biens et services en ligne, envoyer de l’argent à l’étranger, investir dans des projets à long terme et bien plus encore. Les cryptomonnaies offrent également la possibilité de créer des contrats intelligents programmables, qui peuvent faciliter des transactions commerciales complexes sans avoir besoin d’intermédiaires.

    ex : BTC , ETH , BNB , MATIC , AVAX , XTZ , SOL

    Les stablecoins *

    Les stablecoins sont des cryptomonnaies conçues pour maintenir une valeur stable en étant indexées sur des devises ou des actifs sous-jacents tels que l’or ou le dollar américain. En réalité, ils sont utilisés pour faciliter les transactions financières en ligne en offrant une alternative moins volatile que les cryptomonnaies traditionnelles, les stablecoins sont de fait plus rassurants. Ils permettent également de transférer des fonds rapidement et à moindre coût, sans nécessiter d’intermédiaires. En outre, ils peuvent servir de « valeur refuge » pour les investisseurs lors de périodes de forte volatilité du marché des cryptomonnaies.

    ex : USDC , USDT , BUSD , DAI

    Les mèmecoins (**** niveau expert)

    Les mèmes coins sont une forme de cryptomonnaie qui tirent leur nom de leur origine dans la culture Internet des « mèmes ». (ndla : un mème est un élément culturel reconnaissable, reproduit et transmis par l’imitation du comportement d’un individu par d’autres individus, L’Oxford English Dictionary définit le mème comme « une image, une vidéo, un texte, généralement de nature humoristique, qui est copié et diffusé rapidement par les internautes, souvent avec de légères variations » Exemple : cliquez ici ». Ils sont utilisés dans la réalité pour des activités telles que la collecte de fond, le trading et la spéculation sur des actifs numériques uniques et souvent humoristiques. Les Mème coins sont généralement basés sur des blockchains de couche 1 existantes telles que Ethereum et peuvent offrir des avantages tels que la propriété décentralisée et la rareté numérique. Cependant, ils sont également soumis à une forte volatilité et peuvent être considérés comme extrêmement risqués.

    Ex : DOGE , SHIB , BONK

    Les DeFi et leur cryptomonnaie (**** niveau expert)

    Les tokens DeFi sont des cryptomonnaies émises sur des blockchains décentralisées qui permettent aux utilisateurs de participer à diverses applications. Ils ont une utilité en fournissant des droits de gouvernance, en permettant le staking (un mécanisme de consensus appelé « Proof of Stake » (POS) qui permet de garantir que les transactions sont fiables :  vérifiées et sécurisées sans l’intervention d’une tiers :  banque ou autre intermédiaire)  et la fourniture de liquidité, et en facilitant l’accès à divers protocoles et services DeFi. Les tokens DeFi permettent également l’emprunt et le prêt décentralisés, le trading et la gestion d’actifs.

    Ex : CAKE , INSUR , SNX , YFI

    Gouvernance (DAO) et leurs cryptomonnaies… (****niveau expert)

    Une organisation autonome décentralisée ou DAO (de l’anglais decentralized autonomous organization ) est une organisation qui se fixe une mission et qui fonctionne grâce à un ensemble de Smart Contracts . Ces derniers établissent et « proposent » des règles de gouvernance à une organisation ! En ce sens et bien que très balbutiant à ses débuts, le réseau Bitcoin, « peut être considéré comme le premier exemple de DAO ».

    À la différence d’une organisation traditionnelle la DAO n’a pas de hiérarchie ! Aucune ! Pas de gouvernance au sens usuel ! Dans une DAO, pas de supérieur qui décide ou donne son aval… Non ! OUBLIEZ ! Elle est une organisation gérée par un code et des programmes informatiques ce qui la rend parfaitement autonome. Elle analyse seulement les Smart Contracts établis et les positions des parties prenantes. Tout est alors stocké et accessible de façon transparente sur la blockchain et le plus souvent les décisions sont prises au sein d’une DAO par le biais de propositions. Si une proposition est votée par la majorité des parties prenantes elle est ensuite validée par la « matrice ». Point ! Spoiler : c’est la théorie mais en pratique les DAO en sont encore à un stade rudimentaire et se développent mais aucune n’est encore totalement décentralisée et autonome.

    Les cryptomonnaies qu’utilisent ces DAO (ex : SDAO, UNI, AAVE, CRV, MKR,…) offrent différentes utilités additionnelles au droit de vote et il faut toujours vous renseigner précisément dans la documentation de l’entreprise pour en comprendre les tenants et aboutissants.

    NFT les tokens non fongibles (****niveau expert)

    Un NFT, pour non fungible token est un token non fongible et non divisible ; et oui, tout cela en un seul Token, rassurez-vous, derrière tous ces termes de l’univers crypto, les choses sont plus simples qu’il n’y paraît : cela signifie que contrairement à un actif dit fongible, c’est-à-dire qui est n’est pas unique et qui est interchangeable contre un actif du même type, ce type de token (jeton) est unique !

    Il correspond à un certificat de propriété pour son détenteur, que ce soit un bien virtuel, logiciel, jeux vidéo… ou physique : biens immobiliers, œuvre d’art, etc.  Comme la cryptomonnaie, il est émis sur une blockchain , majoritairement Ethereum (ETH). Et il n’est pas divisible, comme nous l’avons précisé, ce qui veut dire que contrairement à la plupart des cryptomonnaies, par exemple le bitcoin (BTC) qui peut être divisé en 100 millions de Satochis la plus petite unité de compte en bitcoin), un NFT ne peut pas l’être…

    ex : CryptoPunks, BAYC…

    Les coins de metaverse et de gaming (expert *****, sauf si vous maîtrisez cet univers)

    Les coins de metaverse et de gaming sont des cryptomonnaies conçues pour être utilisées dans des mondes virtuels tels que les jeux vidéo et les plateformes de réalité virtuelle. Ils sont utilisés dans la réalité pour acheter des biens et services virtuels, tels que des skins, des personnages et des objets, ainsi que pour participer à des transactions de joueur à joueur. Les coins de metaverse et de gaming peuvent offrir des avantages tels que la propriété décentralisée, la transparence et la possibilité de gagner de l’argent en jouant à des jeux. Cependant, ils sont également soumis à une forte volatilité et peuvent être considérés comme très risqués.

    ex : SAND , MANA , AXS , DIO , GALA

    Quelques règles de prudence avant de se lancer

    Nonobstant les astérisques que nous attribuons, qui sont fluctuantes selon votre niveau d’expertise, comme le rappelle le ministère de l’Économie et des Finances et de la souveraineté industrielle et numérique la cybermonnaie « ne dispose pas d’un statut légal n’ont pas à ce jour de statut légal explicite et leur encadrement par les pouvoirs publics reste embryonnaire ».

    Aujourd’hui, et pour se retrouver sans se faire arnaquer, lorsqu’il s’agira de vous lancer, la plus élémentaire des prudences recommandées par le ministère et par vos serviteurs est de consulter le site de l’AMF qui vous aide à vous retrouver dans ce dédale et qui recense tous les sites d’arnaques à la cybermonnaie. Si vous souhaitez investir dans les crypto-actifs, sachez que l’AMF recense les sites risqués liés aux cybermonnaies au sein de la liste noire de l’Autorité des Marchés Financiers . Avant de vous lancer, pensez toujours à la consulter.

    Voilà pour cet article, n’hésitez pas à revenir à nos articles précédents sur la blockchain et les Smarts Contracts . Ils rendront la compréhension de ces nouveaux éléments plus aisée.

    Et rendez-vous pour l’épisode quatre : L’évolution de la DeFi , abréviation de decentralized finance (finance décentralisée). Nous vous le promettons, à la fin de ces articles vous disposerez de tous les éléments pour vous lancer… ou pas.

    « Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement,
    Et les mots pour le dire arrivent aisément » – Nicolas Boileau-Despréaux

    1. Antoine Roche , Ingénieur, chef de produit chez SingularityDAO.
    • Co chevron_right

      JO 2024 : la France médaille d’or de la surveillance dans l’UE

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 10 March, 2023 - 04:20 · 6 minutes

    Trente-huit organisations européennes et internationales 1 ont publié une lettre à l’attention des députés de l’Assemblée nationale pour les convaincre de refuser le projet du gouvernement français de légaliser la vidéosurveillance algorithmique en France.

    Selon ces organisations, il s’agirait de la toute première légalisation de la surveillance biométrique en Europe, portant la France au titre de championne de la surveillance dans l’Union européenne.

    Comme de nombreux projets du gouvernement, celui-ci se dessine sous couvert de bonnes intentions. Ainsi, on instrumentalise le besoin de sécurité lors des Jeux olympiques 2024 de Paris pour faire accepter une mesure qui trotte dans la tête de nos gouvernants depuis longtemps.

    Les dangers de l’article 7 du projet de loi relatif aux Jeux olympiques 2024

    À travers cette lettre, les 38 organisations soulignent le danger relatif à l’ article 7 de ce projet de loi.

    On peut y lire notamment :

    « À titre expérimental et jusqu’au 30 juin 2025, à la seule fin d’assurer la sécurité de manifestations sportives, récréatives ou culturelles, qui, par leur ampleur ou leurs circonstances sont particulièrement exposées à des risques d’actes de terrorisme ou d’atteinte grave à la sécurité des personnes, les images collectées au moyen de systèmes de vidéoprotection autorisés sur le fondement de l’article L. 252-1 du Code de sécurité intérieure et de caméras installées sur des aéronefs autorisées sur le fondement du chapitre II du titre IV du livre II du même code dans les lieux accueillant ces manifestations et à leurs abords, ainsi que dans les moyens de transport et sur les voies les desservant, peuvent faire l’objet de traitements comprenant un système d’intelligence artificielle. »

    Comme le souligne la Quadrature du Net qui relaie cette lettre de la société civile, cet article 7 « crée une base juridique pour l’utilisation de caméras dotées d’algorithmes en vue de détecter des événements suspects spécifiques dans l’espace public. »

    Cela signifie que « pour assurer la sécurité » de n’importe quel événement de grande ampleur, ou en cas de « risques d’actes de terrorisme », on autorise juridiquement l’utilisation d’une vidéosurveillance algorithmique intrusive. Cette mesure permet donc de piétiner des droits fondamentaux comme le droit à la vie privée, le droit à la liberté de réunion et d’association ou encore le droit à la non-discrimination.

    Le Comité européen de la protection des données et le Contrôleur européen de la protection des données ont déjà mis en garde

    Le 21 avril 2021, la Commission européenne a présenté sa proposition de règlement au Parlement européen et a u Conseil établissant des règles harmonisées concernant l’intelligence artificielle.

    Selon le Comité européen de la protection des données et le Contrôleur européen de la protection des données, la surveillance biométrique a de graves répercussions sur les attentes des personnes en matière d’anonymat dans les espaces publics. Elle a également a un effet négatif sur leur volonté et leur capacité d’exercer leurs libertés civiques car elles redoutent d’être identifiées, repérées ou même poursuivies à tort.

    En l’état, cette mesure menace l’essence même du droit à la vie privée et à la protection des données, ce qui la rend contraire au droit international et européen relatif aux droits humains.

    En juin 2021, le Comité européen et le Contrôleur européen de la protection des données concluaient le rapport comme suit :

    « Compte tenu de la complexité de la proposition et des problèmes qu’elle vise à résoudre, il reste beaucoup à faire pour que la proposition puisse donner naissance à un cadr e juridique fonctionnel, complétant efficacement le RGPD en protégeant les droits de l’homme fondamentaux tout en favorisant l’innovation. »

    L’inefficacité de la vidéosurveillance

    À la demande du Centre de recherche de l’École des officiers de la gendarmerie de Melun, une étude a été menée par Guillaume Gormand, chercheur au Centre d’études et de recherche sur la diplomatie, l’administration publique et le politique.

    Selon cette étude :

    Les résultats mettent en lumière une efficacité douteuse de la vidéoprotection, du moins au regard de la finalité que lui assignent les acteurs des politiques publiques de sécurité : prévenir la délinquance et aider à la résolution des infractions.

    Malgré cette efficacité toute relative, le gouvernement ne remet pas en question son projet de surveillance généralisée.

    La lettre publiée par les 38 organisations en conclut que ces restrictions de droits humains « constituent une violation des obligations incombant aux États en matière de droits humains en vertu de traités internationaux, et notamment du Traité international relatif aux droits civils et politiques et de la Convention européenne des droits de l’Homme. »

    Vers une société de surveillance toujours plus généralisée et banalisée

    Au nom de la sécurité, comme ça a été le cas depuis les attaques terroristes , le gouvernement intègre les nouvelles technologies à ses projets de surveillance, portant toujours plus atteinte aux libertés publiques et à la vie privée des citoyens. Les mesures d’urgence se sont également multipliées au travers de la gestion de la crise covid .

    Nous l’avons souligné à plusieurs reprises dans les colonnes de Contrepoints , l’état d’urgence et les « mesures d’exception » permettent au gouvernement de normaliser et de pérenniser des privations de liberté tout en promettant un retour à la situation antérieure qu’on a du mal à apercevoir.

    Ici, au nom de votre sécurité, même si l’efficacité des techniques concernées est contestée, les mesures de surveillance sont de plus en plus intrusives et entrent dans la norme.

    Si conformément à l’article 7 de la projet de loi, l’utilisation de la vidéosurveillance algorithmique est légalisée à titre expérimental et jusqu’au 30 juin 2025, nos libertés seront encore une fois méprisées. Il est grand temps de refuser ce premier pas vers une société où les logiciels de surveillance automatisée deviendraient la norme.

    1. Voici la liste des 38 organisations par ordre alphabétique : Access Now, International ; AlgoRace, Espagne ; AlgorithmWatch, Allemagne ; AlgorithmWatch CH, Suisse ; Amnesty International, International ; ApTI, Roumanie ; ARTICLE 19, International ; Association Nationale des Supporters, France ; Big Brother Watch, Royaume-Uni ; Bits of Freedom, Pays-Bas ; Centre for Democracy & Technology, Europe ; Chaos Computer Club Lëtzebuerg, Luxembourg ; Citizen D/Državljan D, Slovénie ; Civil Liberties Union for Europe, Europe ; Deutsche Vereinigung für Datenschutz e.V. (DVD), Allemagne ; Digitalcourage e.V., Allemagne ; Digitale Gesellschaft, Suisse ; Digitale Freiheit e.V., Allemagne ; Elektronisk Forpost Norge, Norvège ; Eticas Tech, Espagne ; European Center for Not-for-Profit Law Stichting (ECNL), Europe ; European Digital Rights, Europe ; Fair Trials, International ; Forum Civique Européen, France/Europe ; Football Supporters Europe, Europe ; Homo Digitalis, Grèce ; Human Rights Watch, International ; Irish Council for Civil Liberties, Irlande ; IT-Pol, Danemark ; Iuridicum Remedium, République tchèque ; Liberty, Royaume-Uni ; Panoptykon Foundation, Pologne ; Privacy International, International ; Privacy Network, Italie ; Share Foundation, Serbie ; Society Vrijbit, Pays-Bas ; Statewatch, Europe ; Today is a new day/Danes je nov dan, Slovénie.
    • Co chevron_right

      Comprendre la crypto en 3 minutes

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 9 March, 2023 - 04:00 · 1 minute

    Expliquer un sujet complexe comme le Metavers et la Blockchain sans dépasser trois minutes demande un vrai talent dont devront faire preuve les participants du concours d’éloquence organisé par Wallcrypt.

    Concours d’éloquence sur la blockchain

    Les participants du concours d’éloquence ne disposeront que de trois minutes pour convaincre sur un des quatres thèmes de la soirée : la Blockchain, les NFT , le Metavers ou la Tokenisation. Même si ces sujets sont de plus en plus familiers pour le grand public et pour les lecteurs de Contrepoints , il reste nécessaire de trouver celles et ceux qui sont capables d’en expliquer clairement les enjeux.

    Ce concours aura lieu dans le cadre du Virtuality Web3 Summit qui aura lieu les 16 et 17 mars au Carreau du Temple à Paris. Ce salon professionnel gratuit consacré aux applications de technologies émergentes comme la Blockchain, l’Intelligence Artificielle, les Metavers, la réalité virtuelle et la réalité augmentée. Ces technologies sont assez matures pour être utilisées mais il reste encore un travail pour les rendre pratiques et accessibles au plus grand nombre. Notons parmi les sponsors des grands noms comme Nomadic Labs, une des équipes de développement de la chaîne Tezos déjà évoquée dans Contrepoints , Microsoft , Lenovo ou encore Exaion, la filiale d’EDF consacrée au web3.

    L’organisateur du concours, Wallcrypt , est devenu une référence francophone dans la recherche d’emploi et la formation dans le domaine du Web3 et de la Blockchain. Notez en particulier le jeu de société pédagogique ou le livre dont chaque chapitre thématique a été écrit par un expert du domaine. L’autre volet du concours, la rhétorique, est assuré par l’ AFPAO , Association des Formateurs Professionnels en Arts Oratoires.

    Pour assister à cette joute oratoire et apprendre tant sur la technologie que sur les arts oratoires, rendez-vous donc à l’auditorium de 250 places du Carreau du Temple le 17 mars de 16 h 30 à 17 h 50.

    Lien d’inscription

    • Co chevron_right

      Après l’IA qui remplace les journalistes, l’IA qui remplace les politiciens ?

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 8 March, 2023 - 12:00 · 6 minutes

    Il ne s’est écoulé que trois mois depuis la mise en ligne de ChatGPT mais ces trois mois ont été riches en développement dans le domaine de l’intelligence artificielle. Comme on pouvait s’y attendre, les applications de l’IA dans tous les domaines s’accélèrent.

    Ainsi, sentant tout l’intérêt commercial d’une intégration de l’outil d’OpenAI dans son propre moteur de recherche, Microsoft vient-il de proposer aux utilisateurs de Bing de disposer d’un outil conversationnel basé sur les développements ayant donné naissance à ChatGPT.

    Cependant, quelques réglages restent manifestement à faire : le robot conversationnel a été plusieurs fois impliqué dans des échanges lunaires où une pointe d’agressivité pouvait même être détectée de la part de l’intelligence artificielle, clairement pas prête à se laisser expliquer la réalité.

    Ceci n’a pas empêché le même Microsoft de continuer ses développements sur d’autres aspects de l’intelligence artificielle, notamment avec Kosmos-1 , un modèle multimodal capable d’analyser le contenu d’images, de répondre à des questions sur celles-ci, de reconnaître des textes à partir de photos et même de réussir des tests de quotient intellectuel basé sur des opérations graphiques à partir d’instructions en langage naturel.

    Cette notion d’intelligence artificielle multimodale est importante car elle intègre différents modes de saisie tels que le texte, l’audio, les images et la vidéo et pourrait être une étape clé dans la création d’une intelligence artificielle générale (IAG) capable d’effectuer des tâches générales au niveau de l’Homme.

    Parallèlement, des applicatifs pratiques de ce qui existe déjà sur le marché sont actuellement mis en place, quelques mois seulement après que les principaux outils grand public sont sortis officiellement (MidJourney, StableDiffusion, ChatGPT, pour ne citer que les plus célèbres actuellement).

    On pourrait citer le cas de RadioGPT , cette radio automatique qui bénéficie des dernières évolutions dans le domaine en proposant une liste de lecture de tubes pop entrelardée de commentaires d’actualités, ces derniers étant produits par une collection automatique d’articles de presse et de factoïdes plus ou moins intéressants sur internet qui alimentent GPT3, le moteur informatique de ChatGPT. Le texte ainsi produit est alors envoyé vers un autre morceau de logiciel capable de reproduire des voix réalistes qui viendront fournir le commentaire sur la radio en ligne.

    Le résultat est une radio relativement basique mais dont le fonctionnement n’est pas très loin d’une petite radio locale produite par des humains. En multipliant les moyens et l’investissement initial, nul doute qu’on pourra arriver rapidement à des radios d’une bonne qualité, aptes à concurrencer des radios régionales au moins sur le plan de la masse salariale…

    Et il ne faut pas faire un grand pas en avant pour s’en persuader : on apprend en effet que ce genre d’externalité des intelligences artificielles produit déjà des conséquences palpables dans le monde du journalisme. C’est le cas en Allemagne où le groupe de presse Axel Springer commence déjà à supprimer des postes de journalistes , ces derniers étant – selon le patron du groupe – avantageusement remplacés par une intelligence artificielle.

    Du reste, peut-on s’en étonner lorsqu’on voit le niveau global du journalisme de nos jours ?

    Combien de ces journalistes se contentent de reprendre avec un brio discutable des dépêches officielles d’agence avec un don du copier-coller si précis que les mêmes fautes d’orthographe sont religieusement reproduites d’un articulet de presse à l’autre, d’un journal local à l’autre ? Combien de ces journaux, du reste, ne sont que l’adaptation locale minimaliste de nouvelles prémâchées, prédigérées, issues d’un complexe journalistique industriel de niveau national et qui fournit de l’information exactement comme une usine alimentaire produit du plat tout préparé à des milliers de petits restaurants qui n’ont plus de cuisine locale que leur four micro-ondes ?

    On est ici dans un mouvement inéluctable, et la disparition de ce journalisme-là n’est que la logique habituelle d’économie : la valeur ajoutée de l’humain – qui n’était dans ce cas qu’un opérateur tout juste utile pour la mise en page et les (rares) retouches locales – tendant vers zéro, remplacer celui-ci par un robot virtuellement gratuit n’est pas un chemin très complexe à imaginer.

    Au passage, on peut espérer que le lectorat finira par faire la différence entre la production de ces «journaux» qui ne tiennent que grâce aux subventions et à la publicité, et que ceci favorisera une reconcentration des journalistes (les vrais) vers ces entreprises d’information et d’investigation qui fournissent une analyse tangible, mesurable, et des enquêtes réelles et sourcées…

    Et pendant que les journalistes s’interrogent sérieusement sur l’avenir de leur profession, un autre développement concernant les politiciens est déjà visible, ici en Roumanie , où le gouvernement a décidé de se doter d’une intelligence artificielle, Ion, comme aide à la décision et assistant personnel, qui permet d’analyser rapidement les opinions des citoyens roumains sur différents sujets d’actualité et leur permet d’interagir avec lui.

    Il est bien évident qu’il ne s’agit pour le moment que d’un gadget qui se contente d’analyser les tendances statistiques de ce qui est visible sur les différents réseaux sociaux auxquels le robot a accès. Cela ressemble un peu à de la « politique en temps réel » avec tout ce que cela peut contenir de dérives néfastes dans l’impulsivité et l’instantanéité. Au-delà, l’assistant numérique du Premier ministre roumain pourrait être vulnérable aux armées de trolls et de bots sur ces mêmes réseaux sociaux. Inversement, rien n’interdit d’imaginer qu’utilisé habilement, ce même assistant puisse être utilisé pour orienter subtilement l’opinion publique : l’une se nourrissant de l’autre et réciproquement, il devient rapidement difficile de déterminer qui oriente vraiment qui…

    Mais l’introduction d’une béquille numérique pour un politicien s’inscrit dans une tendance claire où l’on pourrait assister à la disparition progressive de membres du cabinet d’un ministre, puis de tout le cabinet pour enfin, en toute logique, faire disparaître le ministre lui-même en étape finale.

    La question qui mérite d’être posée, dès à présent, est de savoir si ce serait vraiment une catastrophe. Le débat est ouvert et il n’est pas du tout tranché : la consternante médiocrité de nos politiciens actuels est une véritable ode à leur remplacement par n’importe quel autre procédé qui n’aura pas de mal à être mieux informé et qui pourrait même être plus équilibré. Ce n’est en rien garanti, mais le niveau est actuellement si bas que l’effort à produire n’est plus si grand.

    Du reste, quant à la remarque qui consiste à dire que le contrôle passerait simplement du ministre à celui qui a entraîné et qui maintient l’IA qui le remplace, elle oublie la quantité de ministres qui ne sont déjà que des marionnettes. On changerait alors de façade, pas de marionnettiste.

    Comme certains l’anticipaient il y a quelques décennies, les développements de l’intelligence artificielle sont de plus en plus rapides et rattrapent toutes les professions, notamment intellectuelles : au rythme actuel des développements et en tenant compte des tendances connues dans l’informatique, on estime que les modèles disponibles dans 10 ans seront au moins un million de fois plus puissants et capables que ceux actuellement sur le marché…

    Lorsqu’on découvre par exemple que certains chercheurs réussissent actuellement à reconstruire une image à partir de l’activité cérébrale d’un individu , on ne peut que s’interroger sur les possibilités immenses et les dérives catastrophiques qui s’offrent à nous.

    Sur le web

    • Co chevron_right

      Technologie : la France disparaît devant la Chine et les États-Unis

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 8 March, 2023 - 04:10 · 2 minutes

    La France fut jadis la patrie des inventeurs. Ce n’est plus le cas, selon l’étude du think tank australien Australian Strategic Policy Institute . Désormais, le centre de gravité technologique se situe dans le Pacifique entre les États-Unis et la Chine.

    Si un certain nombre de pays, surtout les Anglo-saxons, arrivent à maintenir une recherche scientifique de bonne qualité, la France tout comme l’Europe décrochent complètement.

    Une compétition acharnée entre les États-Unis et la Chine au niveau technologique

    La Chine et les États-Unis dominent sans partage dans les 44 secteurs technologiques de pointe. Avec un avantage pour la Chine qui se place devant les États-Unis dans la majorité des technologies avec un risque de contrôle monopolistique pour certaines d’entre elles (comme les batteries électriques et l’hydrogène).

    Ces deux pays sont aussi les plus à même à attirer des talents ( brain drain ) et ainsi s’assurer un vivier intellectuel pour la recherche et le développement technologique. Si les États-Unis continuent d’être la destination numéro un, l’étude mentionne qu’en Chine, un cinquième des papiers scientifiques à fort impact est écrit par des chercheurs issus des pays anglo-saxons.

    Anglo-Saxons et pays émergents dans le top 5

    Comme le mentionne l’étude, le Royaume-Uni et l’Inde se classent tous deux parmi les cinq premiers pays dans 29 des 44 technologies. La Corée du Sud et l’Allemagne sont parmi les cinq premiers pays pour 20 et 17 technologies, respectivement. L’Australie y figure pour neuf technologies, l’Italie (sept technologies), l’Iran (six), le Japon (quatre) et le Canada (quatre).

    On voit que les pays du Commonwealth (Royaume-Uni, l’Australie et le Canada) arrivent à se maintenir. De même les pays asiatiques comme l’Inde, le Japon et la Corée du Sud se situent à un niveau plus que raisonnable.

    Et la France ? Elle n’est dans le top 5 que dans deux domaines : l’énergie nucléaire (5 e après les Chinois, les Américains, les Japonais et les Indiens) et la gestion des déchets nucléaires (3 e après la Chine et les États-Unis). Elle est ainsi reléguée à une place similaire à celle de la Russie, Singapour, de l’Arabie saoudite, de la Malaisie et des Pays-Bas qui ne sont dans le top 5 que dans un seul domaine.

    Après une Europe sortie politiquement de l’Histoire, une Europe qui sort technologiquement de l’Histoire ?

    À l’exception de l’Allemagne, voire de l’Italie, l’Europe est quasiment absente. La France qui était jadis un cœur technologique suit désormais la voie de la Russie : un déclin technologique.

    Ironie du sort, l’Europe a mis au cœur de sa politique la transition énergétique. Sauf que le secteur des technologies énergétiques est entièrement dominé par la Chine. L’hydrogène, les batteries électriques et les supercondensateurs sont des technologies dont les Chinois ont le quasi-monopole.

    Si cette tendance se maintient, la France et plus généralement l’Europe vont très vite se retrouver sous contrôle énergétique de la Chine.

    • Co chevron_right

      TikTok : piratage de données ou piratage des cerveaux ?

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 7 March, 2023 - 04:10 · 8 minutes

    Un article de The Conversation

    TikTok est une application de médias sociaux, propriété de l’entreprise chinoise ByteDance . Le principe de TikTok, née en septembre 2016 sous le nom de Douyin (nom qu’elle a conservé à ce jour en Chine) repose sur le partage de courtes vidéos.

    Elle définit sa mission de façon très sympathique :

    « TikTok est la meilleure destination pour les vidéos mobiles au format court. Notre mission est d’inspirer la créativité et d’apporter la joie. »

    Aujourd’hui, du fait des récentes révélations sur son fonctionnement exact, elle inspire plutôt l’ inquiétude : les États-Unis et l’UE ont déjà interdit à leurs fonctionnaires de s’en servir, et d’autres mesures pourraient suivre.

    1,7 milliard d’utilisateurs sur TikTok

    Il faut garder à l’esprit que, comme toute entreprise chinoise, TikTok, apparue sur les smartphones des habitants des pays occidentaux en 2017, est tenue de servir les intérêts de la Chine et de répondre aux desiderata gouvernementaux.

    Si l’usage de TikTok est illimité pour les utilisateurs étrangers, en Chine, Douyin, sa version chinoise, est limitée à quarante minutes par jour pour les moins de quatorze ans . Ce n’est pas anodin. Nous y reviendrons.

    Autre particularité : c’est le gouvernement chinois qui décide des contenus qui seront mis en avant. Certains contenus sont pour le moins troublants et ciblent un public très jeune : en décembre 2022, le Centre de lutte contre la haine en ligne ( CCDH ), a démontré dans une étude que « l’algorithme du réseau social TikTok favorise la diffusion de contenus relatifs aux troubles alimentaires et à l’automutilation pour certains comptes ». Et ce, en fonction des publications vues et « likées » par les utilisateurs cherchant des contenus relatifs à « l’image de soi et à la santé mentale ». Est-ce le fait d’une modération insuffisante de la plateforme au regard de ses règles ? La question peut se poser !

    [ Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde . Abonnez-vous aujourd’hui ]

    Dans un tout autre domaine, la guerre en Ukraine, la propagande des mercenaires russes de Wagner sur TikTok et la désinformation afférente ont été récemment dénoncées dans un rapport de NewsGuard . Ici encore, au regard du positionnement du gouvernement chinois dans ce conflit, la question d’une véritable volonté de modération peut se poser.

    Comme le pointe Fabrice Ebelpoin , entrepreneur, professeur à Sciences Po et spécialiste des réseaux sociaux, autant la version chinoise propose massivement à ses utilisateurs « des vidéos sur le sens de la nation, l’unité, l’ambition personnelle mise au service du collectif, tout un tas de valeurs qui font la spécificité chinoise », autant aux États-Unis comme en Europe, « la plateforme est dédiée exclusivement à de l’ entertainment niais ou alors des choses qui peuvent prêter à confusion ». Et le professeur d’ajouter : « On est sur quelque chose qui peut s’apparenter à une destruction de l’état d’esprit de la jeunesse occidentale. »

    En 2022, TikTok comptait pas moins de 1,7 milliard d’utilisateurs actifs dans le monde .

    Pays comptant le plus d’utilisateurs de TikTok. Cliquer pour zoomer.
    Statista

    « Un cheval de Troie » à retardement ? Pas si sûr !

    En termes de confidentialité, si TikTok, comme d’autres réseaux sociaux, a accès à de nombreuses informations « traditionnelles » des utilisateurs – navigations, visionnages, conversations, listes de contacts, localisation, accès à leur appareil photo et au micro du mobile –, dans la mise à jour de sa politique de confidentialité, l’entreprise a précisé que les données des utilisateurs français (entre autres) étaient accessibles aux employés de la plateforme. C’est ce qu’a indiqué dans un billet de blog publié le 2 novembre 2022, Elaine Fox, « Head of Privacy Europe » pour la firme.

    Nous l’avons évoqué : aux États-Unis, depuis décembre 2022 le réseau social est banni des téléphones professionnels des membres la Chambre des représentants et des agences fédérales. Dans la même dynamique, le 23 février 2023, la Commission européenne a annoncé l’interdiction d’installer l’application sur tous les appareils professionnels de son personnel. Le 27 février, c’était au tour de la présidente du Conseil du Trésor canadien Monat Fortier d’annoncer l’interdiction d’utiliser TikTok sur les appareils mobiles du gouvernement du Canada , précisant que l’application disparaîtrait automatiquement de tous les appareils gouvernementaux et qu’il sera impossible de la réinstaller. La plupart des gouvernements qui, en Occident, « contraignent » ainsi leurs fonctionnaires mettent en avant « la protection des données ou encore une menace pour la sécurité nationale ».

    Dans certains pays, ce sont les usages de TikTok qui, selon les lois locales, peuvent amener des utilisateurs devant les tribunaux. Exemples parmi d’autres : en 2022 une Égyptienne se voyait condamnée à trois ans de prison pour ses vidéos sur TikTok . En février 2023, un couple iranien a été condamné à 10 ans de prison pour une vidéo de danse devenue virale .

    La France, où le réseau social fait l’objet d’une commission d’enquête au Sénat qui devrait bientôt rendre un rapport sur son fonctionnement, qualifié d’« addictif et d’opaque », ne fait pas exception : un influenceur a été condamné après sa vidéo de danse en crop top dans une église . D’autres pays restreignent l’usage de TikTok , jusqu’à des décisions plus radicales : l’application est ainsi interdite en Inde, au Pakistan ou encore en Afghanistan, et avait été interdite un temps au Bangladesh et en Indonésie… qui jugeaient le contenu diffusé « inapproprié et blasphématoire », le temps que TikTok revienne avec une version hautement censurée.

    Par ailleurs il existe de nombreux moyens de contourner les interdictions et les blocages : en Inde, deux ans apres l’interdiction gouvernementale de la plateforme chinoise en juin 2020, les applications « copy-cat » se sont multipliées : citons Josh , Chingari , MX TakaTak

    Piratage « traditionnel » : l’arbre qui cache la forêt ?

    Certes, les risques de piratage existent et des mises à jour peuvent intégrer des failles de sécurité volontaires, comme un programme backdoor . Toutefois, il convient à ce stade de faire plusieurs remarques.

    Nous pouvons raisonnablement nous interroger sur le caractère symbolique des décisions des administrations occidentales évoquées ci-dessus. Les fonctionnaires concernés possèdent des téléphones personnels – à moins qu’ils n’en soient dépossédés lorsqu’ils accèdent à ces institutions – et des échanges sensibles peuvent être effectués via ces téléphones privés. Donc, à première vue, un piratage massif à ciel ouvert pouvant bénéficier de l’aide des utilisateurs pourrait être possible lors d’une mise à jour, et rendre ces derniers complices de leur propre espionnage !

    La ficelle semble un peu grossière. Les services de renseignements disposent probablement d’autres méthodes et la véritable prudence dans les domaines sensibles va au-delà de la vigilance à l’égard d’une simple application pouvant potentiellement être utilisée à des fins d’espionnage.

    Quand on connaît, par exemple, le [potentiel de Pegasus], un puissant logiciel espion commercialisé par la société israélienne NSO, et qui était utilisé en 2022 par pas moins de 22 services de sécurité dans douze pays européens , l’intérêt premier de TikTok pour la Chine semble se situer ailleurs… et le gouvernement chinois paraît être intéressé par d’autres potentialités de l’application, à savoir celles liées à sa couverture mondiale démesurée. Par ailleurs les smartphones sont déjà en soi des outils d’espionnage de leurs utilisateurs, ce n’est pas une application, quelle qu’elle soit, qui change la donne.

    « Un cheval de Troie » visant… le « brain hacking » ?

    Les statistiques concernant les usagers en 2023 dans le monde sont les suivantes :

    • 56 % sont des femmes, 44 % des hommes.
    • 51,3 % de l’audience sont des femmes entre 13 et 24 ans.
    • 23,6 % des utilisateurs sont âgés entre 13 et 24 ans.
    • 40 % des visiteurs quotidiens se situent dans la tranche 15-24 ans.

    Les chiffres relevés par l’étude annuelle de Qustodio – un fournisseur de logiciels de contrôle parental – indiquent qu’en 2022, dans le monde, les enfants (4-18 ans) ont passé en moyenne près de deux heures par jour sur TikTok (1 h 47).

    Par-delà les contenus qui peuvent se révéler inappropriés – sans l’activation et le paramétrage d’une fonctionnalité mise en place par TikTok en 2020 sous le nom de « Family Pairing », qui permet aux parents d’avoir le contrôle sur les activités de leurs enfants –, un autre risque pernicieux existe, qui semble plus réaliste que les piratages de données évoqués par les institutions précitées, un risque qui concerne une population majoritairement jeune au travers de campagnes de manipulation des opinions publiques. Une sorte de « brain-hacking » déclenchable à l’envi…

    Le 2 décembre 2022, le directeur du FBI, Chris Wray, se préoccupait ainsi des possibilités offertes au gouvernement chinois de « manipuler le contenu et, s’ils le souhaitent, de l’utiliser pour des opérations d’influence », c’est-à-dire d’engager des campagnes d’ astroturfing à très grande échelle.

    Dans l’attente d’un réseau de substitution qui serait, lui, maîtrisé, l’Europe prépare peut-être son opinion publique à une interdiction pure et simple – une interdiction que Donald Trump appelait de ses vœux en 2020 pour les États-Unis . Par les mesures prises dernièrement, les Occidentaux adressent de façon concomitante au gouvernement chinois une exigence pour ne pas arriver à une telle issue : l’abrogation du contrôle par Pékin des contenus mis en avant. Une exigence qui s’apparente à un vœu pieux. C’était là, d’ailleurs ce qui expliquait la volonté de Donald Trump de contraindre TikTok à se faire racheter aux États-Unis par les groupes américains Oracle et Walmart, projet auquel Washington à finalement renoncé . Ce qui est plus réaliste, c’est un stockage de données respectueux de la souveraineté numérique des États de l’UE. Mais que les usagers se rassurent : Cormac Keenan, Head of Trust and Safety, chez TikTok le promet : la lutte contre la désinformation est une priorité de la firme ! The Conversation

    Yannick Chatelain , Professeur Associé. Digital I IT. GEMinsights Content Manager, Grenoble École de Management (GEM)

    Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’ article original .

    The Conversation

    • Co chevron_right

      Les JO 2024 face aux nouvelles mobilités aériennes urbaines électriques

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 2 March, 2023 - 03:40 · 1 minute

    Redon Agglomération fait partie des 500 premières collectivités labellisée s Terre de Jeux 2024 par le  comité d’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

    Objectif : faire du territoire une base arrière des Jeux et accueillir des délégations françaises et étrangères qui souhaiteraient venir s’entraîner durant l’Olympiade 2024.

    Si le rayonnement des Jeux Olympiques de Londres a profité à Dinard comme base arrière sur la côte  d’Émeraude en 2012, le pays de Redon peut pleinement s’inspirer de recommandations qui figurent  dans un rapport intitulé : « Paris 2024 : just deliver the Games ».

    On ne dira jamais assez l’effet majeur et transformateur d’un tel événement sur l’image qu’un pays  projette vers le monde, mais aussi sur l’image qu’un territoire industriel peut construire de lui-même.

    Marcel Quercia, inventeur du briquet à gaz et de la saga Flaminaire à Redon, a aussi fondé l’aérodrome  de la ville. Il en était le premier président. D’origine italienne, son père, Janvier Quercia était le  descendant de Jacomo de la Quercia, professeur de Michel-Ange.

    Les JO 2024 comme occasion de faire rayonner le pays

    Mobilité, tourisme et attractivité seront les clés du succès des Jeux Olympiques en 2024 qui feront la  fierté de notre pays.

    Il y a quelques mois avait ainsi lieu à Pontoise (Île-de-France) l’ inauguration du premier Vertiport intégré, épicentre de nouvelles mobilités aériennes durables. Les démarches administratives sont en cours pour implanter cinq vertiports à horizon 2024 en Île-de-France. Dans le domaine médical, les  groupes Aéroports de Paris et RATP travaillent avec l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) pour évaluer l’usage d’aéronefs légers au service de trois besoins de transports : le transport de  matériel biologique, de blessés légers ou de médecins spécialisés.

    Ces mobilités d’avenir sont-elles expérimentables dans le pays de Redon ?

    Grâce à son aérodrome, pôle historique autour des nouvelles mobilités aériennes, il est possible de regrouper une trentaine d’acteurs industriels, académiques ou réglementaires pour répondre à l’ensemble des enjeux à venir : aéronefs, opérations, infrastructures, gestion de l’espace aérien, acceptabilité.

    Voici quelques nouvelles que nous pouvons utiliser. Maintenant, architectes, ingénieurs et étudiants  en mobilité de demain : commencez à expérimenter.