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Quand Donald Trump imite Ségolène Royal
Pascal Avot · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 17 November, 2022 - 04:15 · 3 minutes
Hier, en sa fastueuse résidence de Mar-a-Lago, adossé à une forêt de drapeaux américains, fidèle à sa veste bleue, sa chemise blanche et sa cravate rouge, Donald Trump annonçait sa candidature à la prochaine campagne présidentielle.
Comme on pouvait s’y attendre, son discours long d’une heure a consisté à marteler ses thèmes favoris – immigration, sécurité, prospérité –, avec les formules-choc et le style qui ont fait sa gloire pour les uns, sa honte pour les autres. De toute évidence, Trump Saison 2 sera le sosie politique de Trump Saison 1.
Quand ils font leur retour sur le devant de la scène après une période de retrait relatif, les hommes politiques aiment annoncer qu’ils ont « changé ». Rien de tel chez Donald Trump – sinon aux yeux du Washington Examiner , qui titre : « Le nouveau Trump est un homme différent : désormais, c’est un loser. »
Déclaration fracassante de Trump
Une séquence a tout de même attiré notre attention.
Dans la deuxième partie de son discours, Trump a lancé une proposition pour le moins fracassante, au sujet du trafic de drogue : « Chaque dealer, au cours de sa vie, tue en moyenne 500 personnes. Je demanderai au Congrès une législation nous assurant que les dealers soient condamnés à mort. »
Passons sur le caractère éminemment fragile de cette statistique qui jette toutes les drogues, la marijuana comme le crack, dans le même sac. Passons également sur la bizarrerie juridique imaginée par Trump, consistant à exiger systématiquement, sans attendre les délibérations des tribunaux, la peine de mort pour un crime qui, aujourd’hui n’est même plus un délit dans certains États. Passons, car le pire est à venir.
Trump reprend : « Lors d’un voyage, j’ai demandé au président Xi : « Avez-vous des problèmes avec la drogue, en Chine ? » Il m’a répondu : « Non, non, non, non nous n’en avons pas. » Je lui ai demandé comment il faisait. Il m’a expliqué : « Justice-express. Si vous êtes pris en train de vendre de la drogue, vous êtes immédiatement jugé et avant la fin de la journée vous êtes exécuté. » Et, comble du comble, le public applaudit bruyamment la tirade.
Si bien que Donald Trump commet exactement la même faute grave que Ségolène Royal , qui avait déclaré lors d’un voyage en Chine en 2007 : « J’ai rencontré un avocat qui me disait que les tribunaux chinois sont plus rapides qu’en France. Vous voyez : avant de donner des leçons aux autres pays, regardons toujours les éléments de comparaison. »
La faute est grave, car dans les deux cas la démocratie prend exemple sur le régime totalitaire le plus dangereux au monde et dans le pire des domaines : la justice. Dans les deux cas, c’est une atteinte à la philosophie du Droit et un satisfecit accordé à une tyrannie qui exécute officiellement, chaque année, davantage de prisonniers que tous les autres pays de la planète additionnés – sans compter ceux qui meurent à l’ombre des camps de concentration.
Concernant Royal, cette folie peut encore vaguement s’expliquer par la proximité historique entre les socialistes et le communisme. Dans la bouche d’un Américain et d’un Républicain, elle est inexcusable.
Trump berné
Comble du comble, Trump avoue inconsciemment qu’il s’est fait berner par Xi. Car la Chine a bel et bien « des problèmes avec la drogue » : près d’un demi-million de personnes sont actuellement enfermées dans des centres de détention pour drogués en Chine, selon l’association Human Rights Watch. Il y a donc des millions de toxicomanes, voire des dizaines de millions, qui courent encore en Chine. Trump a pris pour argent comptant une énormité de Xi et il ose s’en vanter. Nul n’est plus facile à arnaquer qu’un arnaqueur.
Et ce n’est hélas pas fini. Car Trump conclut : « Ils n’ont pas de problème avec la drogue. Leur seul problème avec la drogue est qu’ils fabriquent du fentanyl et qu’ils l’écoulent aux États-Unis, et je mettrai fin à ce trafic. » Il voudrait donc nous faire croire que la Chine produit du fentanyl sans en consommer. Le mensonge atteint des dimensions grotesques.
Donald Trump est de retour et le pire de ses défauts avec lui : il se moque de la vérité avec une morgue proprement indécente. Pour débarrasser l’Amérique de la fuite en avant économique mise en place par les Démocrates, il faudra sans doute un autre candidat.