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      À ma fille porteuse de trisomie, qui va bientôt rentrer en CP - BLOG

      news.movim.eu / HuffingtonPost · Friday, 15 July, 2022 - 07:00 · 5 minutes

    Tu ne m’en voudras pas, mais je crois que je vais avoir du mal à abandonner l’appellation Tu ne m’en voudras pas, mais je crois que je vais avoir du mal à abandonner l’appellation "ma petite" ou "mon bébé".

    HANDICAP - Ma petite Louise, ma fille,

    Aujourd’hui devrait être le jour où je cesse de t’appeler “ma petite Louise”. Tu as fait tes dernières heures dans la cour de l’école maternelle . Et dans deux mois, te voilà propulsée “chez les grands”. En CP .

    Tu ne m’en voudras pas, mais je crois que je vais avoir du mal à abandonner l’appellation “ma petite” ou “mon bébé”. J’ai déjà du mal, avec ton grand frère qui va faire ses premiers pas au collège, alors toi... Toi qui prends ton temps et alignes les années de plus que les autres dans l’univers des “petits”, ne m’en demande pas trop.

    Du rab’ de maternelle

    Quatre années de maternelle. Tu as fait du rab’, et ce n’était pas de trop. Difficile d’échapper aux bilans lors des fins d’années et de cycles scolaires. Et même si je peste souvent intérieurement contre la lenteur de tes progrès, c’est justement l’occasion pour moi de poser noir sur blanc les pas de géants que tu as accomplis, car il y en a.

    Le petit chromosome en plus qui ralentit le temps a tendance à nous les faire oublier. Mais pour toi plus tard, quand je te lirai ceci dans quelques années, pour moi, pour toutes les personnes qui t’ont accompagnée avec bienveillance cette année passée, je vais faire la liste des petits et grands bonheurs que tu as accomplis de ton pas joyeux.

    Vous avez envie de raconter votre histoire? Un événement de votre vie vous a fait voir les choses différemment? Vous voulez briser un tabou? Vous pouvez envoyer votre témoignage à temoignage@huffpost.fr et consulter tous les témoignages que nous avons publiés. Pour savoir comment proposer votre témoignage, suivez ce guide !

    Une année de surprises

    Louise, ce fut l’année où, à la maison, tu as surpris ton monde en mangeant pour la première fois des morceaux (de choucroute, plus jamais je ne verrai une choucroute de la même façon). L’année, au centre de loisirs où j’ai fini par te « lâcher », tu as commencé à boire, certes à la cuillère mais à boire, des jus de pomme et d’orange dont tu te régales maintenant. Ce fut l’année où, à l’école, grâce à la patience de l’artiste peintre venu en résidence décorer avec vous les murs trop tristounes de fresques colorées, tu as accepté de prendre un crayon et de « laisser ta trace ». Quel joli symbole. Ce fut l’année où, en classe, tu as appris ces choses qui paraissent si simples aux autres mais sont si complexes pour toi : enfiler ton manteau seule, t’attribuer les rituels du matin : accrocher le manteau, prendre ton cahier, entrer en classe, poser ton cahier, devenir la responsable de la collecte des cartes de cantine auprès de tes petits camarades.

    L’année où tu as enfin accepté de prendre sur le bout de tes doigts des gommettes et de les coller.

    L’année où tu as exploré les capacités de ton corps à escalader, glisser, s’enfuir à toutes jambes (petite pensée pour les sueurs froides des enseignant.e.s et animateurs/trices).

    L’année où, en attendant ces fichus mots qui ne te viennent pas, tu t’es emparée de ton petit classeur de communication pour demander ce que tu veux en désignant des photos et des pictos.

    L’année où tu as accepté de plus en plus de tenir un pinceau ou un feutre pour dessiner – même si ça ne te fait clairement pas plaisir, mais pour en finir avec les adultes qui ont l’air d’y tenir tellement.

    L’année où tu t’es mise à maîtriser comme une ado le fonctionnement de la tablette (merci Lady Gaga et les vidéos de danse, le scrolling n’a plus aucun secret pour toi).

    L’année où dans notre piscinette familiale, tu as ôté de toi-même tes brassards pour nous montrer que tu as pied, merci, tu peux te débrouiller sans.

    L’année où malgré la foule impressionnante de la fête de fin d’année scolaire, tu as exécuté presque en entier la danse de la classe avec l’aide de ta maîtresse.

    L’année où tu as eu tes deux premières dents de grande, et où tu as assuré comme une chef chez la dentiste, pour la torture de l’arrachage des dents de lait qui ne tombaient pas.

    L’année où tu as continué de danser, danser, en toutes occasions, et où ta prof m’a écrit que tu commençais à investir vraiment les interactions, créant ainsi « de vrais moments de bonheur ».

    L’année où tu nous as fait tourner bourriques, ton papa et moi, mais aussi tous les adultes de ton quotidien, en nous montrant que ce n’est pas un chromosome en plus qui empêche de savoir ce que l’on veut – et surtout ce que l’on ne veut pas.

    Une grande fille

    J’en oublie, c’est évident Mais c’est suffisant pour me démontrer que oui, il se passe toujours des choses avec toi, même dans les moments où, avec nos lunettes d’adulte, on a l’impression d’une stagnation. Tu as bien avancé, ma grande fille.

    Et même si je suis trop pressée, même si des choses me manquent, je suis fière de toi. Et reconnaissante envers tous ceux qui t’ont permis de continuer ton long chemin à petits pas décidés : les maîtresses AESH animateurs animatrices kiné orthophoniste psychomotricienne agents de restauration scolaire copains et copines de classe et leurs parents... Tous ceux qui ont fait de toi une petite élève à part entière.

    Tu nous as fait tourner bourriques, ton papa et moi, mais aussi tous les adultes de ton quotidien, en nous montrant que ce n’est pas un chromosome en plus qui empêche de savoir ce que l’on veut – et surtout ce que l’on ne veut pas.

    Et maintenant, finis les bilans, ma grande fille.

    On regarde devant. Un beau chemin t’attend.

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    Ce témoignage, initialement publié sur la page Facebook de Caroline Boudet, a été reproduit sur Le HuffPost avec son accord.

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    À voir également sur Le HuffPost: Cette Espagnole atteinte de trisomie 21 a réalisé son rêve en défilant à la Fashion Week

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      Comment le dépistage prénatal de la trisomie 21 peut être une épreuve pour les parents

      news.movim.eu / HuffingtonPost · Sunday, 3 July, 2022 - 06:30 · 10 minutes

    La confirmation du diagnostic de trisomie 21 est souvent La confirmation du diagnostic de trisomie 21 est souvent "un choc immense" pour les futurs parents, souligne Alice Drisch.

    GROSSESSE - Lorsqu’Emilie confie au HuffPost son expérience du dépistage prénatal de la trisomie 21 , cela passe d’abord par des détails, comme ce “point rouge” sur la porte de sa chambre à la maternité. À l’été 2019, Emilie apprend à cinq mois de grossesse que la petite fille qu’elle attend est porteuse de trisomie 21. Face à elle, “un choix qui n’en est pas un”: celui de poursuivre ou d’interrompre sa grossesse.

    C’est aussi à ce choix qu’ont été confrontés les influenceurs Shanna Kress et Jonathan Matijas au mois de juin 2022. Sur Youtube , le couple a expliqué avoir appris que l’un des jumeaux qu’ils attendaient était porteur de trisomie 21. Ils ont raconté leur parcours en vidéo, avant d’annoncer avoir choisi de réaliser une interruption médicale de grossesse (IMG). Si leur transparence quant à ce sujet a été décriée, elle a aussi été saluée par plusieurs internautes, dont Emilie.

    “J’ai vécu la même chose que vous et tant qu’on n’est pas dans la situation on ne peut pas comprendre [...]. C’est votre histoire, elle vous appartient, personne n’a le droit de juger, je vous soutiens”, a-t-elle écrit en commentaire d’un de leurs posts Instagram. L’association M21, qui accompagne les parents qui font face à ce diagnostic, a quant à elle “souhaité entrer en lien avec eux”, sans recevoir de réponses.

    En France, la Haute Autorité de Santé rappelle que la loi prévoit que “toutes les femmes soient informées de la possibilité de réaliser un dépistage de la trisomie 21 au cours de leur grossesse”, bien que celui-ci ne soit pas obligatoire.

    Dans un article publié en 2014 et s’appuyant sur les recherches de l’Institut de veille sanitaire (INVS), Libération soulignait qu’il y avait 2370 fœtus porteurs de trisomie par an, mais “seulement 530 nouveau-nés vivants porteurs de ce handicap, cela en raison d’un dépistage prénatal”. Pour autant, les récits de parents confrontés à cette décision et choisissant d’interrompre la grossesse restent rares.

    “J’ai pris une claque quand on me l’a annoncé”

    “Ma première grossesse s’était déroulée parfaitement, alors j’ai pris une claque quand on m’a annoncé qu’elle était porteuse de trisomie 21 et qu’elle avait une cardiomyopathie ”, débute Emilie. “Mais j’ai donné ma décision tout de suite, c’était un sujet sur lequel on était d’accord avec mon mari”, éclaire-t-elle, expliquant avoir choisi de mettre fin à sa grossesse pour diverses raisons.

    “Dans la majorité des cas, le couple s’est déjà posé la question et peut demander une IMG lors de l’annonce du diagnostic de trisomie 21”, souligne en ce sens Lucie Guilbaud, gynécologue-obstétricienne spécialisée en diagnostic prénatal, au HuffPost . En 2012, l’Agence de la biomédecine évaluait à 85% le nombre de femmes ayant réalisé le test de dépistage de la trisomie 21.

    La gynécologue-obstétricienne détaille le dépistage: “Une prise de sang a lieu au même moment que l’échographie du premier trimestre. On évalue la probabilité que le fœtus soit porteur d’une trisomie 21 à partir de l’âge de la femme, de la mesure de la clarté nucale du fœtus et du taux des marqueurs sériques présents dans le sang”.

    Si on propose ces examens, c’est parce qu’on sait qu’il y a un risque de trisomie 21 mais aussi d’autres anomalies Lucie Guilbaud, gynécologue-obstétricienne

    Après cette prise de sang, le résultat est rendu sous forme de risque. Si celui-ci est élevé, un prélèvement invasif est proposé pour observer les chromosomes du fœtus (via une amniocentèse ou une choriocentèse). “Si on propose ces examens, c’est parce qu’on sait qu’il y a un risque de trisomie 21 mais aussi d’autres anomalies”, relève Lucie Guilbaud. Si le risque de trisomie 21 est intermédiaire, un test de l’ADN libre circulant est proposé à la patiente. Si celui-ci est en faveur d’une trisomie 21, un prélèvement invasif est aussi proposé.

    Comme l’explique Shanna Kress et Jonathan Matijas en vidéo, “le plus dur a été d’être dans l’inconnu” pour le couple, qui a attendu près d’un mois le résultat de l’amniocentèse dans “la peur, l’angoisse”. “C’est triste, mais il y en a un sur deux qui va très bien”, a ensuite rebondi le couple.

    Après l’annonce du diagnostic, un temps de réflexion est proposé au couple sans délai, rappelle la gynécologue-obstétricienne, l’IMG étant autorisé jusqu’à terme en France. “Le seul contretemps, c’est que le Centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal doit confirmer la recevabilité du diagnostic prénatal avant l’IMG et nos réunions n’ont lieu qu’une fois par semaine”, éclaire Lucie Guilbaud.

    Colère, tristesse et culpabilité

    Malgré la certitude de son choix, Emilie en a vécu difficilement les conséquences. “C’est un choc immense, traumatique de l’apprendre”, appuie Alice Drisch, fondatrice de l’ association M21 . Elle-même confrontée à cette annonce, mais lors de l’accouchement, elle a en effet créé M21 pour accompagner les parents qui font face à ce diagnostic.

    “Notre mission, c’est l’écoute, si la personne souhaite avoir des informations sur la vie avec un enfant porteur de trisomie 21, là on peut parler de notre vécu”, explique-t-elle au HuffPost . En plus d’une psychologue, l’association est en effet composée de plusieurs parents d’enfants porteurs de trisomie 21. “Après cette écoute, il y a environ la moitié des femmes qui ont appelé qui gardent l’enfant, l’autre moitié qui choisissent d’avorter”, précise-t-elle.

    “Après l’annonce du diagnostic, il peut être proposé aux couples qui le souhaitent de rencontrer des spécialistes de la trisomie 21, des associations de patients et un psychologue”, met en avant Lucie Guilbaud. “Si le Centre ne le propose pas, les parents peuvent en faire la demande”, complète-t-elle.

    Ce qui est difficile aussi c’est la culpabilité, même si on a fait ce choix, on se sent coupable Emilie

    “Jusqu’au moment de l’IMG, j’ai eu un espoir que quelqu’un arrive et m’annonce qu’ils s’étaient trompés”, poursuit Emilie, soulignant être passée par des émotions très diverses, de la colère à la tristesse, suite à l’annonce. “J’attendais cette petite fille - Théa - depuis très longtemps”, appuie-t-elle.

    “Ce qui a été compliqué, c’est la colère qu’on peut ressentir. Je me rappelle que mes parents étaient peinés et je n’arrivais pas à comprendre leur peine. Pour moi, le plus dur, c’était moi qui le vivais”, illustre Emilie. “Ce qui est difficile aussi c’est la culpabilité, même si on a fait ce choix, on se sent coupable”, ajoute-t-elle.

    Ces ressentis, Alice Drisch les constate également: “On a écouté une dizaine de femmes qui ont accouché d’un enfant porteur de trisomie 21 et qui trois, quatre mois après cet événement, ont eu besoin de se confier à nous”. Aujourd’hui encore, Emilie n’a pas réussi à expliquer la raison de son interruption de grossesse à ses enfants. “J’ai peur d’être jugée”, confie-t-elle.

    Une interruption médicale de grossesse vécue comme un deuil

    Cette interruption médicale de grossesse, Emilie l’a d’ailleurs vécu comme un deuil . “Ce n’est pas la même perte que si j’apprenais la mort d’un de mes enfants, mais je l’ai porté, je l’ai senti”, rappelle-t-elle. “J’ai ressenti une profonde tristesse. Après l’avortement, je ne pouvais pas être sans mon mari, c’était mon pilier”, livre-t-elle.

    Son mari, lui, a vécu “un deuil différent”. “Il n’en parle pas”, résume Emilie qui estime que “c’est sa façon de se protéger”. “C’est à la maternité où j’ai avorté que pour la première fois je l’ai vu aussi démuni. Je me rappellerais toujours de cette phrase qu’il m’a dit à propos de la salle d’attente: ‘ je n’avais même pas d’endroit , autour de moi il n’y avait que des futurs papas’”, raconte-t-elle, toujours touchée.

    Dans leur couple cependant, chacun a respecté le deuil de l’autre. “Il a été d’un soutien sans faille”, affirme Emilie. Ce qu’ont aussi montré Shanna Kress et Jonathan Matijas sur leurs réseaux sociaux. Mais ce n’est pas toujours le cas, met en avant Alice Drisch: “Il y a des femmes qui nous appellent et qui nous disent ‘Je ne vais pas le garder parce que mon compagnon va partir’”.

    “Pour le moment, il y a sept hommes qui nous ont contactés sur les réseaux sociaux, mais aucun n’a osé nous appeler”, éclaire la fondatrice de M21, qui souligne qu’on “ne prépare pas assez les couples” alors que la décision à prendre peut “jouer” sur celui-ci.

    Un accompagnement médical parfois questionné

    À l’inverse du soutien qu’elle a reçu de ses amies, Emilie ne s’est pas toujours sentie comprise par le corps médical . “Pour la prise de l’anti-progestatif, on a été reçus dans une salle où on stocke les médicaments et l’infirmière s’est étonné qu’on ne nous avait rien expliqué avant de nous dire: ‘je vais vous donner un prospectus’”, se rappelle-t-elle.

    “J’avais eu des suspicions à 5 mois de grossesse de trisomie 21 et la relation de la sage-femme a changé avec moi lors de cette échographie, on m’a fait mal, on m’a dit: “on va chercher les anomalies, il est où le truc”, se souvient également Alice Drisch. Néanmoins, toutes deux ont aussi été accueillies par des sages-femmes “superbes”. Le couple d’influenceurs a, lui, remercié son équipe médicale, qui a été “top”.

    “Il y a 48 Centres de diagnostic prénatal en France avec des gynécologues-obstétriciens, des pédiatres, des généticiens etc. Ces centres sont spécialisés dans le diagnostic prénatal des anomalies fœtales et notamment dans le diagnostic prénatal de la trisomie 21”, nuance Lucie Guibaud. Reste que pour l’association M21, “quand on annonce la trisomie 21, c’est un drame, c’est compliqué. Sans la désinformation de certains personnels du corps médical, on pourrait éviter le traumatisme de l’annonce”.

    “Aujourd’hui, je l’ai accepté”, reprend Emilie, même si elle sait qu’elle en souffrira “toute sa vie”. “Je suis une maman terriblement angoissée à présent”, illustre-t-elle. Un an après cette interruption médicale de grossesse, Emilie a néanmoins donné la vie à nouveau. “Je ne pouvais pas me dire que c’était ma dernière grossesse, que c’était la mise au monde d’un enfant mort”, souligne-t-elle.

    De leur côté, Shanna Kress et Jonathan Matijas ont donné le nom de Christopher au fœtus dont la grossesse a été interrompue, soulignant que ”ça fera partie de nous, de notre histoire”. Pour Emilie, il est tout aussi essentiel de pouvoir continuer de parler de Théa. “Elle n’a pas vécu, mais elle a existé”, rappelle-t-elle. Ne pas pouvoir échanger sur cette interruption de grossesse serait, pour elle, faire “comme si ça n’était jamais arrivé”.

    À voir également sur Le HuffPost: “Après une fausse couche, comment cette maman s’est réconciliée avec son corps”