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      Aux législatives, Macron et Philippe en chiens de faïence

      Romain Herreros · news.movim.eu / HuffingtonPost · Monday, 2 May, 2022 - 10:18 · 5 minutes

    Emmanuel Macron et Edouard Philippe photographiés au Havre le 14 avril  Emmanuel Macron et Edouard Philippe photographiés au Havre le 14 avril

    POLITIQUE - “Aucune circonscription pour Horizons, ce sont des cons”. Non, Emmanuel Macron n’a pas insulté Édouard Philippe et ses troupes sur fond de tensions provoquées par les législatives , assurait vendredi 29 avril au HuffPost l’entourage du chef de l’État, apportant un démenti ferme et direct à cette anecdote relatée par Europe 1. Réel ou non, ce feuilleton témoigne de l’ambiance délétère qui règne entre les macronistes et les philippistes, en vue des élections du mois de juin.

    En cause, les prétentions du maire du Havre et de son parti Horizons qui seraient, aux yeux du locataire de l’Élysée, bien trop élevées et surtout révélatrices des ambitions personnelles de l’ancien Premier ministre, soupçonné en interne de vouloir se tailler un espace politique sur mesure, en vue de l’élection présidentielle 2027.

    Résultat, des noms d’oiseaux échangés par “offs” interposés. Illustration encore ce lundi dans Le Parisien , où un proche du président de la République parle de “taqiya philippiste”, en référence à la pratique de la dissimulation prônée par les jihadistes avant de commettre un attentat. Ambiance. Mais comment en sont-ils arrivés là? Un coup d’œil dans le rétroviseur s’impose.

    Depuis la création de son parti Horizons au mois d’octobre, Édouard Philippe donne l’impression de jouer sa propre musique , malgré une loyauté revendiquée et répétée à l’égard d’Emmanuel Macron, pour lequel il a fait campagne (à sa façon) durant l’élection présidentielle. Or, un parti autonome a besoin de financement et d’élus pour s’implanter durablement.

    “Il faut trouver un truc qui nous lie, sans que ce soit la guerre. Un ministre au HuffPost

    Si Horizons peut compter sur de nombreux maires, dont certains sont influents, comme Christian Estrosi (Nice) ou Christophe Béchu (Angers), l’échéance des élections législatives est cruciale puisque, théoriquement, Emmanuel Macron compte sur une majorité élargie sur sa droite comme sur sa gauche pour ce second quinquennat.

    Pour assurer la pérennité de son parti, l’ex-Premier ministre mise sur l’investiture d’au moins 50 candidats, seuil à partir duquel une formation politique est éligible au financement public. Avec la possibilité de l’élection d’une trentaine de députés, ce qui permettrait au moins à Horizons de disposer de son propre groupe.

    Éviter les frondeurs

    Or, c’est précisément sur ce point que les ambitions du maire de Havre entrent en friction avec celles d’Emmanuel Macron qui, marqué par l’épisode des frondeurs sous François Hollande, n’a aucune envie que son action soit parasitée par des sensibilités trop bruyantes.

    “Il faut trouver un truc qui nous lie, sans que ce soit la guerre. On doit consolider le centre et laisser les sensibilités s’exprimer, à gauche comme à droite, sans que ce soit le bordel: un orchestre symphonique et non cacophonique”, schématisait récemment un ministre au fait des négociations.

    Reste alors à délimiter l’espace dont pourrait bénéficier Édouard Philippe et ses troupes au sein de cette majorité. Une équation rendue encore plus compliquée par la cohorte de députés LR prêts à rejoindre Emmanuel Macron, sans forcément passer par le sas que pourrait constituer Horizons. D’autant que la Macronie a fixé une ligne rouge: pas touche aux députés sortants.

    Entre un député LR et nous, quelle est la place pour le candidat Horizons? Conseiller de l'exécutif, au "HuffPost"

    Mais le parti de l’ancien Premier ministre ne compte visiblement pas se contenter de circonscriptions de conquête. Illustration avec la 5e circonscription du Morbihan où l’actuel député LREM, Gwendal Rouillard, ne se représente pas. Sans attendre les accords nationaux, le maire de Ploemeur, Ronan Loas s’est lancé pour Horizons, alors qu’une autre candidate potentielle, Lysiane Métayer, brigue l’investiture de la majorité présidentielle avec l’aval de Jean-Yves Le Drian . Un coin à surveiller...

    En face, la Macronie ne semble pas disposée à faire le moindre cadeau. À l’image de la candidature de Jean-Michel Blanquer dans la 4e circonscription du Loiret , où le LR sortant, Jean-Pierre Door, élu depuis 2002, ne se représente pas. Problème: Christophe Bouquet, référent local pour Horizons a aussi fait acte de candidature. Dans La République du Centre ce lundi, il juge “incompréhensible” ce parachutage “abracadabrantesque”.

    A part Christophe Béchu à Angers, qui ils ont chez Horizons? Un conseiller de l'exécutif au "HuffPost"

    Différents points de tensions qui expliquent les attaques relatées ci et là dans la presse ces derniers jours. Mais pourraient-elles se convertir en réelles divisions, au point de voir des candidats Horizons face à des LREM? Auprès du HuffPost , un conseiller de l’exécutif doutait en fin de semaine dernière de la capacité du parti d’Édouard Philippe à franchir cette ligne: “Je ne vois pas trop leur intérêt à partir seul, entre un député LR et nous, quelle est la place pour le candidat Horizons?”.

    Alors que la formation philippiste tend à se revendiquer plus ancrée localement que le parti présidentiel souvent décrit comme peu implanté sur le territoire, le même nuance: “à part Christophe Béchu à Angers, qui ils ont ?”

    Du côté d’Horizons, alors que les tensions sont montées d’un cran ces derniers jours, l’heure est désormais à l’apaisement. “On ne réagit jamais à ce genre de choses. Ce sont des propos rapportés qui semblent bien nébuleux. Ce n’est pas un souci”, assure l’entourage d’Édouard Philippe, alors que le dialogue n’est pas rompu entre les différentes équipes.

    Il y a quelques jours, Édouard Philippe et Richard Ferrand se sont vus pour discuter de cet épineux dossier. L’ex-Premier ministre a même déjeuné à la table du chef de l’État avec François Bayrou mercredi 27 avril, rapporte Le Monde . De quoi permettre d’apaiser les tensions et d’éviter des divisions? Une source proche des négociations veut encore y croire: “les discussions avancent, après, à quel rythme, c’est autre chose”.

    À voir également sur Le HuffPost: Emmanuel Macron peut-il changer de méthode ?

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      Covid : perquisitions chez les ministres, justice d’exception ou justice spectacle ?

      Laurent Sailly · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 18 October, 2020 - 03:30 · 6 minutes

    perquisitions

    Par Laurent Sailly.

    C’est un véritable coup de tonnerre judiciaire qui a éclaté jeudi 15 octobre 2020. Alors que tous les commentaires concernaient l’intervention présidentielle de la veille et le couvre-feu déclaré dans les grandes métropoles françaises, on apprenait dans la matinée, que plusieurs perquisitions étaient en cours au domicile et bureau du ministre de la Santé, Olivier Véran et d’autres responsables dans le cadre de l’enquête sur la gestion de la crise sanitaire.

    Perquisitions chez les ministres

    Dans le même temps, les gendarmes de l’OCLAESP (Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique) et des policiers de l’OCLCIFF (Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales), ont perquisitionné chez le directeur général de la Santé Jérôme Salomon et la directrice générale de Santé Publique France, Geneviève Chêne, ainsi qu’aux domiciles ou dans les bureaux d’Édouard Philippe, Agnès Buzyn, et Sibeth Ndiaye.

    Ces perquisitions ont été décidées, dans le cadre d’une information judiciaire ouverte le 7 juillet dernier, par la Cour de justice de la République (CJR) sur la gestion de la crise du coronavirus.

    Depuis le début de la crise du coronavirus, 90 plaintes contre des ministres ont été adressées à la CJR, seule instance habilitée à juger les membres du gouvernement pour l’exercice de leur fonction. Neuf d’entre elles ont été jugées recevables , plaintes portant notamment sur « l’incohérence des mesures » prises au sommet de l’État ou encore « l’absence d’application des recommandations de l’OMS ».

    De son côté, le parquet de Paris, qui a reçu plusieurs dizaines de plaintes ciblant parfois des responsables de l’administration, a ouvert le 9 juin une vaste enquête préliminaire, notamment pour « homicides involontaires » ou « mise en danger de la vie d’autrui ».

    Réactions politiques aux perquisitions

    Les réactions politiques n’ont pas manqué. « Ça n’est pas l’urgence aujourd’hui, on doit lutter contre la deuxième vague et je ne suis pas persuadé qu’on doive perdre du temps avec ça » , a réagi sur BFMTV le président de l’UDI Jean-Christophe Lagarde, qui ne croit « pas à la responsabilité pénale des ministres dans cette affaire » .

    « Je vois vraiment dans cette perquisition ordonnée au lendemain de la déclaration du président de la République par les plus hauts magistrats une vraie déclaration de guerre de la justice au pouvoir politique » , a estimé sur LCI Gilbert Collard, député européen proche de Marine Le Pen.

    « Je ne trouve pas que ces perquisitions soient opportunes, il y a une judiciarisation de la vie politique. C’est plus une mise en scène qu’autre chose » , a déploré sur LCI le député LFI Éric Coquerel.

    Ces trois interventions, émanant de trois ténors politiques de famille différente éloignée de la majorité gouvernementale, soulèvent trois problématiques : la responsabilité pénale des ministres, le risque d’un pouvoir des juges, la judiciarisation de la vie politique. Dans cet article, nous ne nous interrogerons que sur la première des trois problématiques.

    La responsabilité pénale des ministres

    Un des piliers de la démocratie réside dans sa capacité à évincer du pouvoir ceux qui en abusent ou ne répondent pas aux attentes du détenteur de la souveraineté, c’est-à-dire le peuple dans les démocraties libérales modernes.

    Pour Benjamin Constant, « les ministres sont souvent dénoncés, accusés quelquefois, condamnés rarement, punis presque jamais… » .

    La responsabilité pénale permet de mettre fin à la fonction du ministre qui s’est rendu coupable d’un délit, d’un crime, ou a failli à sa mission de façon grave et de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de son pays et cette sanction peut être assortie de condamnations pénales.

    Une procédure qui a évolué sous la Ve République

    La responsabilité pénale des membres du gouvernement, pour les actes commis dans l’exercice de leurs fonctions, a connu une évolution très importante en 1993. Auparavant, ils étaient responsables, comme le président de la République, devant la Haute cour de justice, sur décision du parlement.

    Depuis la révision constitutionnelle du 27 juillet 1993, un particulier peut déclencher les poursuites devant la Cour de justice de la République. Les requêtes sont examinées par une commission composée de magistrats professionnels, et sont ensuite soit classées, soit transmises au procureur général près la Cour de cassation pour saisir la Cour de justice de la République.

    Celle-ci est composée de 12 parlementaires et de trois juges professionnels (magistrats du siège à la cour de cassation), dont l’un préside la cour.

    Art. 68-1 de la Constitution de la Vème République

    Les membres du gouvernement sont pénalement responsables des actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions et qualifiés crimes ou délits au moment où ils ont été commis.

    Ils sont jugés par la Cour de justice de la République.

    La Cour de justice de la République est liée par la définition des crimes et délits ainsi que par la détermination des peines telles qu’elles résultent de la loi.

    La Cour de justice de la République « constitue un privilège qui n’a plus de raison d’être »

    La Cour est accusée d’être une justice d’exception, symbole d’une justice à deux vitesses. Sa création en 1993 avait pourtant pour objectif de réconcilier l’opinion publique avec ses responsables politiques.

    En effet l’opinion jugeait très sévèrement la classe politique qui lui semblait échapper aux règles communes en particulier lors de certaines affaires liées au financement de la vie politique et surtout lors de l’affaire dite du sang contaminé.

    La légitimité de la CJR est contestée. Selon Cécile Guérin-Bargues, professeure de droit public, ses décisions sont peu convaincantes, les condamnations très faibles, parfois assorties de jugement moraux.

    De plus les ministres sont jugés par la CJR mais leurs conseillers par les tribunaux ordinaires, conduisant ainsi à une justice à deux vitesses et des jugements peu cohérents.

    Supprimer la CJR ?

    Plusieurs projets ou propositions de lois constitutionnelles ont proposé de supprimer la CJR. Les ministres devraient être jugés par les juridictions pénales de droit commun, y compris pour les actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions, après autorisation préalable de la commission des requêtes.

    En 2018, un autre projet de loi proposait la suppression de la CJR, les ministres devant être jugés par la cour d’appel de Paris. Cette solution bancale doit être écartée.

    Les perquisitions ne sont que le début

    Toujours est-il que nous ne sommes qu’au début de la procédure judiciaire. Si l’un ou l’autre des protagonistes devait être déclaré coupable, une condamnation définitive n’est pas attendue avant de très longues années (les recours judiciaires sont nombreux).

    Quant à une parodie de justice, mon caractère optimiste me pousse à la rejeter. À défaut de ce positionnement, il faudrait accepter être dans un pays avec un régime autocratique. En cas d’acquittement des ministres poursuivis, nul doute que les accusations de parodie de justice fleuriront.

    Mon inquiétude porte sur un éventuel lynchage électoral ou politique via les réseaux sociaux des personnes incriminées face à la disparition progressive de la présomption d’innocence en France.

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      Remaniement : verdir ou féminiser, Macron va-t-il devoir choisir ?

      Frédéric Mas · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 3 July, 2020 - 08:48 · 2 minutes

    remaniement Macron

    Par Frédéric Mas.

    C’est officiel, Édouard Philippe a présenté sa démission ce matin afin de permettre le remaniement d’un gouvernement malmené par les crises et les renoncements. Après trois ans d’exercice du pouvoir, la défiance s’est creusée non seulement entre la classe dirigeante et la population, mais aussi entre l’exécutif et l’ensemble des autres branches de la démocratie représentative.

    La verticalité du pouvoir s’est pris le corporatisme économico-politique français de plein fouet, et l’ambition réformiste du Macron en campagne s’est vite transformée au contact du pouvoir en centrisme autoritaire et bureaucratique.

    Malgré les cabrioles écologiques et médiatiques du président visant à minimiser la claque que LREM s’est prise aux municipales, l’exécutif se trouve aujourd’hui face au mur et va tenter avec ce remaniement de récupérer un peu de crédit pour retrouver quelques appuis dans la population et la classe politique.

    Emmanuel Macron a sacrifié son Premier ministre pour donner au gouvernement une apparence de « second départ » et de « rénovation ». Plusieurs noms circulent déjà, et on sent certains, comme la secrétaire d’État Marlène Schiappa, assez fébrile pour la suite de sa carrière au sein du gouvernement.

    Les noms de Damien Abad, Guillaume Larrivé, Jean-Louis Borloo, Jean-Yves Le Drian ou encore Florence Parly circulent. Dans tous les cas, le nouveau monde se rabat sur les « valeurs sûres » de l’ancien.

    Parmi les candidats les plus crédibles dans ce remaniement, retenons Jean-Louis Borloo , qui pourrait synthétiser tout ce qui manque au président de la République en ce moment. Le vieux routier de la politique a l’oreille des pouvoirs locaux, il est populaire parmi les politiques, et a été ministre de l’Écologie. Et surtout, c’est un apparatchik total, légaliste et conservateur profond sous son apparente originalité.

    La dernière fois qu’il fit parler de lui, c’était pour tenter de vendre au gouvernement un « Plan banlieue » qui promettait non seulement d’être un total gaspillage d’argent public , mais une relance totalement vaine de la même « politique de la ville » qui a échoué avec constance depuis 40 ans.

    Emmanuel Macron pourrait être tenté de « verdir » son gouvernement pour lui donner une seconde jeunesse, après la Convention climat et ses propositions grotesques , et en ce sens, un ancien ministre écolo pourrait l’aider à remonter la pente.

    Mais si au lieu d’un écolo, Macron prenait une femme comme Premier ministre ? C’est une autre hypothèse qui circule, et qui favoriserait la candidature d’une Florence Parly, déjà membre du gouvernement, mais épargnée par les différentes tempêtes politiques qui ont secoué le navire élyséen. Cette énarque ex-socialiste passée par Bercy a le profil pour agréer aux élites macroniennes déjà convaincues et ne risque pas non plus de renverser la table.

    Le suspense reste entier…

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      Conférence d’Édouard Philippe : le déconfinement, c’est presque maintenant

      Frédéric Mas · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 8 May, 2020 - 03:45 · 4 minutes

    Par Frédéric Mas.

    Le discours du Premier ministre Édouard Philippe jeudi était attendu. La France s’apprêtait à savoir si elle allait être libérée, pardon, déconfinée , lundi 11 mai comme prévu. La réponse fut positive, mais nuancée, suffisamment nuancée pour laisser un goût un peu amer dans la bouche des amis de la liberté.

    Certes, la levée du confinement se fera le 11 mai , mais elle se fera progressivement. Le gouvernement, par la voix de son Premier ministre, a bien insisté sur l’équilibre à maintenir entre d’un côté le retour à la situation « normale » et de l’autre la nécessité d’endiguer la pandémie qui ne s’est pas envolée.

    Si les raisons évoquées sont plausibles, elles n’en demeurent pas moins difficiles à entendre provenant d’un gouvernement dont l’improvisation permanente a conduit au confinement précipité, occasionnant crise et pénurie, en particulier de masques, puis un déconfinement tout aussi chaotique, qui, nous allons le voir, ne conduira pas à un retour à la normale, tant sur le plan sanitaire que sur celui des libertés publiques .

    Respecter des règles strictes

    Si le déconfinement s’étend à l’ensemble du territoire, deux d’entre eux garderont des règles plus strictes, à savoir Mayotte et l’Ile-de-France. Dans le premier cas, le déconfinement y est différé, dans le second, des règles particulières y seront observées.

    Notons que pour l’Ile-de-France le Premier ministre a préféré jouer sur la responsabilité des plus vulnérables plus que sur la menace de la punition : il a exhorté les individus les plus à risques de complications médicales dues au Covid-19 de se maintenir isolés et de respecter à la lettre les consignes de sécurité sanitaire.

    À la suite de la présentation d’Édouard Philippe, plusieurs ministres se sont succédé afin d’exposer plus en détails le déroulement du déconfinement dans les domaines de la santé publique, de l’éducation, des transports, du maintien de l’ordre, de l’économie et du travail. Retenons du discours du ministre de la Santé Olivier Véran l’idée que la France est désormais prête pour dépister massivement le virus (enfin !).

    La situation de l’Ile-de-France est toujours délicate du fait de la circulation encore active du virus, mais c’est surtout sur la responsabilité des Franciliens qu’il faudra se reposer pour éviter sa propagation.

    Élisabeth Borne, en charge des transports au gouvernement, a signalé en complément que de manière à raréfier la circulation des personnes et donc du virus, l’utilisation des transports en commun y nécessiterait une attestation pendant les heures de pointe. On imagine le personnel mobilisé pour les contrôler et éventuellement pour verbaliser les contrevenants.

    Télétravail et télémédecine

    La télémédecine comme le télétravail seront fortement encouragés à entrer dans les mœurs des Français. Notons que sur ces derniers points, l’adaptation pourrait être au plus grand bénéfice des deux disciplines, qui pourraient réduire drastiquement des coûts d’infrastructure et de déplacement (adieu le pass Navigo !) à un moment où ils en ont le plus besoin. M. Jean-Michel Blanquer a rappelé qu’en matière d’éducation, le déconfinement scolaire se ferait dès le 11 mai dans un souci d’égalité des chances entre élèves et pour éviter le décrochage scolaire.

    Pour ceux qui s’inquiétaient de la disparition des attestations et autres éléments de paperasse bureaucratique, M Castaner nous a rappelé qu’il en faudrait pour justifier de ses déplacements dans le périmètre des 100 kilomètres autorisés et au-delà. N’oubliez donc pas votre facture EDF quand vous irez visiter vos parents. Ah non, il vaut mieux éviter les personnes âgées. Disons quand vous ferez des rondes dans votre région pour ne plus rester cloitrés à la maison.

    Reprenant la balle au bond lancée par le Premier ministre, Bruno Le Maire a annoncé la réouverture de tous les commerces. Sauf les lieux de convivialité et le tourisme, ce qui est tout de même l’un des secteurs économiques les plus florissants et essentiels du pays. Là encore, l’annonce du déconfinement se révèle très très partielle.

    Un déconfinement très très progressif

    Globalement, le déconfinement se fera, mais partiellement, avec des exceptions à la liberté de commercer, de circuler, le maintien d’aides publiques dont l’argent n’existe pas encore, le tout en fonction d’indicateurs qui pour l’instant sont d’une fiabilité relative, puisqu’il n’existe pas de tests à grande échelle aujourd’hui, et qu’ils ne seront mis en place que la semaine prochaine.

    Le gouvernement institue des règles complexes qui auront un coût, et qui risquent fort d’étendre encore le pouvoir de la bureaucratie d’État pour en mesurer, jauger et rendre effectif l’application. Pour nos libertés, tout doit être mis en œuvre afin de sortir le plus vite possible de cette situation qui s’annonce kafkaïenne.

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      Macron-Philippe : de l’eau dans le gaz ?

      Claude Robert · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 1 May, 2020 - 03:40 · 6 minutes

    Par Claude Robert.

    Selon plusieurs médias 1 , Emmanuel Macron aurait personnellement contacté des journalistes ce lundi pour leur exprimer son désaccord quant à la décision d’Édouard Philippe de maintenir mardi la présentation du plan de dé-confinement à l’Assemblée ainsi que le vote des députés.

    Est-ce le début de la fin du couple de l’exécutif, ou un astucieux jeu de rôle ? Le fait que le Président se soit prononcé ce mardi même pour démentir avec véhémence l’existence de tensions mérite de s’attarder sur la question.

    Le trop puissant démenti du Président

    « L’ensemble de l’exécutif est pleinement aligné dans cette crise. Je n’aurai aucune complaisance à l’égard de ceux qui par des bruits et des rumeurs tentent de diviser le gouvernement et singulièrement le Premier ministre et le Président de la République » a donc déclaré Emmanuel Macron ce mardi matin en conseil des ministres. Par deux fois même, le Président est revenu sur le sujet.

    Très souvent, quand une rumeur est bénigne, elle est ignorée. Ce n’est que lorsqu’elle a pris une certaine ampleur qu’elle incite la victime à sortir du bois et à confirmer ou pas son authenticité. L’existence d’un démenti ne signifie pas pour autant que la rumeur soit fondée. Mais cela donne une première indication quant à l’éventuel courroux ressenti par la victime. Ce courroux peut d’ailleurs porter sur le contenu même de la rumeur, ou sur la propagation de celle-ci.

    Le cas le plus défavorable se rencontre bien sûr lorsque le contenu de la rumeur est compromettant, et que sa diffusion est maximale. En réalité, il s’agit toujours du regard de l’Autre, dont la victime peut souffrir, et dont elle va tenter de s’affranchir par le démenti. Le danger, pour la victime, réside toutefois dans la réalimentation de la rumeur, car cela exige de nouveaux démentis. Or pas plus tard que l’après-midi même du démenti du Président, de nouveaux éléments sont venus semer le doute, alimentant de nouvelles suspicions de mésentente au sein du couple de l’exécutif.

    Je t’aime moi non plus ?

    Plusieurs médias ont en effet détecté ce mardi des divergences entre les annonces du Premier ministre en matière de plan de dé-confinement, et ce qu’avait précédemment avancé le Président. Pour Olivier Bost 2 , le Premier ministre a clairement douché les espoirs de dé-confinement du 11 mai claironnés par le Président.

    Les « jours heureux » jadis promis se sont transformés en « jours meilleurs » dans la bouche d’un Édouard Philippe mesuré, qui a parlé d’un « confinement moins strict » en réalité, plutôt que de ce qu’avait peut être un peu trop hâtivement fait miroiter le Président…

    Ou chacun dans son rôle ?

    Ce n’est certes pas la première dissension au sein du couple de l’exécutif. L’ épisode des Gilets jaunes avait déjà laissé entrevoir un possible divorce. Mais à cette époque, le Premier ministre avait lui-même réagi, en déclarant de façon tout à fait convaincante : « Ma mission c’est d’atteindre les objectifs qui ont été fixés par le président de la République. Je le fais avec le soutien de la majorité […] et avec la confiance du Président. Et c’est ce qui m’importe » 3 .

    Un an plus tard, un nouveau désaccord surgissait à l’occasion de l’improbable limitation de vitesse à 80 km/h , mesure dont le Président s’était dédouané sans scrupule auprès des journalistes : « Je n’y suis pour rien dans cette affaire. C’est le Premier ministre, et c’était une connerie. D’ailleurs, cette mesure n’était pas dans mon programme » 4 .  À cette époque, face à un tel reniement, beaucoup pariaient déjà pour le départ d’Édouard Philippe. Mais il n’en a rien été.

    Ainsi peut-on envisager derrière la solide durabilité du couple de l’exécutif actuel un astucieux partage entre deux rôles complémentaires : au Président les grandes orientations et le rêve qui les accompagne, au Premier ministre les difficultés opérationnelles et les retours de manivelle. Ce partage des rôles est l’essence même du tandem au sommet de l’État. Il est constitutif des responsabilités de chacun. Il permet par ailleurs de tâter le terrain et de minimiser les réactions populaires. Très naturellement, chaque citoyen espère que le « bon » l’emportera sur le « méchant », ce qui fait toujours gagner du temps.

    Le coronavirus de la division

    Il n’empêche que l’épisode actuel semble nettement plus sérieux. Au tel point que des médias comme L’Express et Gala ont titré respectivement : « Quand Macron saborde son Premier ministre auprès des journalistes » et « Emmanuel Macron au bord du divorce avec Édouard Philippe ». Comment en effet ne pas sentir dans ces tiraillements les prémices d’un remaniement que la mauvaise gestion de la pandémie risque de rendre inévitable ?

    Au moment des Gilets jaunes, personne n’avait démenti quoi que ce soit et la situation paraissait en réalité très solide. Suite aux critiques présidentielles concernant les limitations de vitesse, c’est le Premier ministre qui avait démenti, en faisant d’ailleurs clairement acte d’allégeance, ce qui là aussi fournissait un gage de robustesse de leur relation.

    Dans la séquence actuelle, c’est le Président qui a émis des critiques puis qui s’est aussitôt fendu d’un démenti. Cette configuration est donc très différente. Elle peut se justifier de cette façon :

    • le Président a planté un coup de poignard dans le dos de son Premier ministre car ce dernier a mis en exergue l’inconséquence de ses propos lorsqu’il a fait miroiter un rapide retour à la normale.
    • le Président est le responsable in fine de la grave impréparation et des mensonges du gouvernement face à la pandémie. Quand il lui faudra rendre des comptes sur le nombre de décès et la longue mise à l’arrêt de l’économie, s’il veut sauver sa tête et terminer son mandat, il lui faudra sacrifier son principal fusible.

    Probablement Emmanuel Macron préparait-t-il déjà le terrain lorsqu’il a parlé d’un « gouvernement de concorde » lors de son allocution du 11 avril. Se donner l’allure d’un rassembleur, court-circuiter son propre gouvernement, construire quelque chose qui a l’apparence du neuf et qui soit porteur d’espoir malgré le désastre, tel est sans doute le premier volet du plan. Un plan dont l’unique but consiste à survivre à la déroute pandémique dont il est le responsable. Un plan dont le Premier ministre fera très certainement les frais.

    Sur le web

    1. L’Express et Le Point (20 Minutes 28/04/20).
    2. RTL 29/04/20.
    3. Huffpost 6/12/18.
    4. Le Parisien 27/01/19.
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      Déconfiner, mais clairement

      Frédéric Mas · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Monday, 27 April, 2020 - 08:06 · 3 minutes

    Par Frédéric Mas.

    Mardi 15 heures, le gouvernement, par l’intermédiaire d’ Édouard Philippe , devrait indiquer aux Français son plan de déconfinement. Cela fait maintenant 42 jours que pour répondre à la crise sanitaire qui traverse le pays, les pouvoirs publics font plus ou moins respecter des mesures de confinement destinées à limiter la diffusion du coronavirus et surtout éviter l’engorgement des établissements hospitaliers en « lissant la courbe » des patients dans le temps.

    Si régulièrement les quartiers « populaires » sont pointés du doigt pour leur non-respect des consignes, ce week-end, c’est au cœur de Paris que l’exaspération s’est donnée à voir. La police a dû disperser une foule rassemblée pour danser dans le 18 e arrondissement, suscitant l’indignation sur les réseaux sociaux face à « l’irresponsabilité » des individus qui violaient les consignes de sécurité, à savoir confinement et gestes barrières.

    Ne soyons pas naïfs : la lassitude touche tout le pays. Le confinement sauve sans doute des vies et surtout aide le personnel soignant qui se trouve en première ligne de cette drôle de guerre, mais l’homme n’est pas fait pour vivre en cage.

    Des mesures autoritaires, privatives de liberté et mortelles pour l’économie

    L’impréparation de l’État face à la crise nous a mené au confinement comme solution unique à l’endiguement de la propagation du virus. Comme le rappelle Nathalie MP Meyer , non seulement ces mesures semblent avoir été prises avec précipitation, mais jusqu’à présent, le gouvernement n’a pas été capable d’envoyer un message clair aux Français quant aux modalités de déconfinement. Serons-nous déconfinés par âge ? Par région ? Qui sera déconfiné en priorité ? Serons-nous prêts pour éviter une deuxième vague ?

    Le message d’Édouard Philippe sera peut-être l’occasion de mettre de l’ordre dans une communication gouvernementale chaotique.

    Rappelons également que l’annonce du déconfinement se fait le même jour que le retour des masques « alternatifs » dans les pharmacies. Au bout de pratiquement deux mois, il devient donc envisageable de sortir de chez soi protégé. Sans doute eut-il fallu libéraliser la vente plus tôt , mais la situation s’améliore un peu. La question des tests reste en suspens. Tout comme les masques, leur disponibilité pour la population demeure essentielle pour que le déconfinement se passe bien.

    Il faut déconfiner au plus vite

    Il faut cependant déconfiner au plus vite pour retrouver nos libertés et ne pas laisser la dépression économique tout emporter sur son passage. Le confinement nous prive de notre liberté d’aller et venir, mobilise la police pour punir des comportements anodins et le tout pour une efficacité limitée.

    Il faudra être particulièrement attentif aux mesures de sortie, en particulier aux mesures de traçage qui nous sont présentées comme anodines, mais qui risquent fort d’accélérer le quadrillage numérique de nos données personnelles de santé.

    Plus nous déconfinerons tôt, moins le choc de la récession se fera sentir. Ce sont des milliers d’emplois et de commerces qui sont détruits par le confinement aujourd’hui, demain des millions. Si nous voulons éviter le pire, il nous faut rapidement des stratégies alternatives au confinement pour éviter la catastrophe économique.

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      Le 49-3 ? Oui, pour une vraie réforme, pas pour étatiser les retraites et faire payer le privé !

      news.movim.eu / Contrepoints · Wednesday, 4 March, 2020 - 04:30 · 3 minutes

    49.3

    Par Nicolas Lecaussin.
    Un article de l’Iref-Europe

    Jean-Paul Delevoye et Agnès Buzyn avaient quitté le navire. Le premier, contraint et forcé après les révélations sur ses différentes fonctions et missions qu’il avait tenues cachées ; la seconde après avoir été désignée en catastrophe candidate à la mairie de Paris. Les 40 000 amendements déposés à l’Assemblée ont contribué à la cacophonie ambiante, empêchant un vrai débat sur cette réforme.

    Finalement, le Premier ministre va utiliser l’article 49-3 pour faire passer le texte. Ce n’est pas une surprise (il y a eu 88 précédents sous la Ve République) mais on aurait préféré qu’il serve pour une vraie réforme, qui aurait changé radicalement le système français tout en le sauvant de la faillite.

    Or, ce que fait le gouvernement n’améliorera nullement la situation. Les derniers changements et autres promesses ajoutent encore à l’opacité d’un texte qui était déjà bâclé.

    Grand flou sur la pénibilité, prise en compte des primes des fonctionnaires

    Une chose est certaine. Le Premier ministre a rappelé sa volonté de créer un « système universel de retraites » et ce sera bien une étatisation avec la mise en place d’une retraite unique. Sauf que les incertitudes et les ambiguïtés sur sa faisabilité sont nombreuses. Il y aura, pour certains, quelques « dérogations ».

    La notion de « pénibilité » est encore floue, les ordonnances à ce sujet qui vont suivre pourraient englober plusieurs catégories de fonctionnaires et d’agents publics. D’ailleurs, les primes seront prises en considération dans le calcul de la retraite des fonctionnaires. Dans une étude récente, l’IREF a montré que cela coûterait probablement quelque 14 milliards d’euros supplémentaires par an à l’État, donc aux contribuables. Rappelons que les engagements retraites pour les seuls fonctionnaires représentent environ 2000 milliards d’euros.

    En ce qui concerne les agents des entreprises publiques, leur entrée dans le « système universel » se fera très, très progressivement. Le texte prévoit que la réforme s’appliquera à partir de 2022 pour la génération née en 2004. Ce qui signifie que les régimes spéciaux actuels vont durer, pour ceux qui sont nés avant cette date, jusqu’à la fin des années… 2060 et qu’ils pourront en profiter jusqu’en 2100 voire davantage pour les plus âgés. À condition qu’aucun autre changement n’intervienne durant cette période.

    On est donc encore loin de la suppression de ces régimes privilégiés qui perdurent grâce aux subventions publiques.

    Le privé va payer mais combien ?

    Un très grand flou entoure aussi les caisses des professions libérales. Il est surtout question de leurs réserves , plus de 125 milliards d’euros.

    La grève des avocats depuis des semaines n’a pas fait plier le gouvernement même si dans le nouveau texte il est question de « garanties accordées aux professions libérales concernant leurs réserves, le maintien de leur caisse ou le calcul de leurs cotisations » . Mais alors il ne s’agirait plus d’un système unique. Difficile de croire que l’argent de ces caisses ne sera pas siphonné dans le nouveau fonds de retraite. Cela s’est déjà produit naguère avec les complémentaires, il y a donc de fortes chances que cela arrive encore.

    Enfin, aucune étude sérieuse d’impact financier n’a été faite avant l’adoption de la réforme. Où le gouvernement trouvera-t-il l’argent pour payer les retraites des fonctionnaires et des agents publics ? Le privé sera de nouveau sacrifié, c’est certain, mais cette fois dans le cadre d’un système qui était censé apporter de l’équité.

    Le 49-3 ? Oui, mais pour réformer réellement la France, pas pour l’enfoncer encore plus.

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