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      « Climatoscepticisme » sur Twitter : Hou ! les « technosolutionistes » !

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 19 February, 2023 - 04:15 · 8 minutes

    Une étude des comportements sur Twitter face au changement climatique révélerait une augmentation du « climatoscepticisme » en France avec un effet négatif sur la diffusion de la « bonne parole ». Elle n’est pas sans problèmes.

    Sitôt publiée – sur Internet, sans revue préalable par des pairs – l’étude « Les nouveaux fronts du dénialisme et du climato-scepticisme – Deux années d’échanges Twitter passées aux macroscopes » ( présentation avec résumé, texte ) de David Chavalarias, Paul Bouchaud, Victor Chomel et Maziyar Panahi a été médiatisée sur Twitter et promptement relayée par des membres de la tribu de même obédience.

    Sitôt publiée, sitôt médiatisée

    Bien sûr, les médias ont été sollicités. Avec un succès qui semble relatif.

    Sous la signature de Mme Audrey Garric, Le Monde titre « La France fait face à un fort regain de climatoscepticisme sur Twitter ». Un réseau social devient donc un élément majeur de la vie sociopolitique française…

    En chapô, d’entrée, le déshonneur par association, même si le constat paraît légitime :

    « Une importante communauté s’est structurée à partir de l’été 2022, avec plus de 10 000 comptes recensés. Selon une étude, la majorité ont relayé la propagande pro-Kremlin dans la guerre en Ukraine, beaucoup ont été antivaccin et proches de l’extrême droite. »

    L’ Ouest France de la nouvelle charte écolocratique a quant à lui publié « ENTRETIEN. Les climatosceptiques se multiplient sur Twitter, des chercheurs font leur portrait-robot ». Un entretien avec l’auteur principal de l’étude.

    ( Source )

    Twitter , ce n’est pas la France

    « Attention aux yeux !! » écrivait sur Twitter l’auteur principal David Chavalarias, directeur de recherche CNRS au Centre d’Analyse et de Mathématique Sociales (CAMS, EHESS), directeur de l’Institut des Systèmes Complexes de Paris Île-de-France (ISC-PIF, CNRS) et responsable scientifique des plateformes Politoscope et Climatoscope .

    Avant d’entrer en matière, il convient de citer les mises en garde publiées en prologue de l’étude :

    « Le Climatoscope analyse automatiquement des millions de tweets. […]

    Les utilisateurs de Twitter ne constituent pas un échantillon représentatif des Français, l’importance relative des groupes sociaux mis en évidence dans cette étude ne reflète donc pas nécessairement leur importance au niveau national. Cependant, leurs évolutions, leurs stratégies et les rapports qu’ils entretiennent sur Twitter sont informatifs sur ce qui se passe hors-ligne et sur les autres réseaux sociaux. »

    Rien de bien nouveau

    Mais il ne faut pas seulement considérer les conclusions avec prudence pour cette raison. C’est aussi parce que la construction de l’analyse nous semble poser quelques problèmes graves.

    Résumons le résumé : La France – non ! Twitter – connaît une augmentation du climatoscepticisme  ou climatodénialisme depuis l’été 2022. Cela a été mis en lien – surprise, surprise – avec l’actualité : les événements extrêmes (canicules, incendies, sécheresses, etc.), la question des approvisionnements en pétrole et gaz en lien avec la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine, et la COP27 tenue à Charm el-Cheikh (Égypte) en novembre.

    Sans réelle surprise non plus, de nombreux comptes, ont propagé auparavant ou continuent de propager d’autres messages relevant de la contestation « antisystème », notamment antivax et pro-Kremlin. En bref, nous sommes dans la complosphère.

    Mais il n’y a aucune mention dans l’étude de personnages qui contestent les ou des conclusions du GIEC sans relever de l’une ou l’autre des tribus complotistes.

    On trouve des liens avec les confins dextres de l’échiquier politique, avec notamment quelques personnalités qu’il est inutile de citer (à part M. Éric Zemmour qui a fait l’objet d’une attention particulière). On constate aussi une présence de comptes « probablement bots » plus importante que dans le « camp d’en face » (ce qui peut laisser supposer des ingérences étrangères) et une plus grande propension à diffuser des messages « toxiques » (contenant des obscénités, insultes, menaces…).

    Bref, rien de bien nouveau.

    Une influence ? Une influence indue ?

    En conclusion :

    « les discours sur Twitter des communautés dénialistes et technosolutionnistes freinent probablement la dissémination des connaissances scientifiques et des conclusions du GIEC en agissant de manière négative sur l’activité en ligne des scientifiques des sciences du climat et du changement climatique. »

    Prenons cela avec un grain de sel, avec philosophie : les « dénialistes » – qu’il faut bien distinguer ici des « technosolutionnistes évoluent sans nul doute dans des silos, des chambres d’écho relativement hermétiques.

    D’ailleurs, quelle est leur présence et leur audience dans les médias traditionnels et dans l’opinion publique ? L’homme de la rue « climatosceptique » ou pris pour tel l’est-il parce qu’il s’est laissé convertir par Twitter ou un autre réseau social, ou parce que par exemple les discours alarmistes et surtout les politiques préconisées ne le convainquent pas ou le rebutent ?

    Une « communauté technosolutionniste » ?

    Les « dénialistes », on comprend ; mais qui sont les « technosolutionistes » qui se voient couverts de déshonneur par association, en plus d’être définis par un terme foncièrement dénigrant ?

    Dans la représentation de l’espace twittérien (l’image en titre), leur petite galaxie se trouve à mi-chemin entre la grande nébuleuse bleue des « gens du bien » et la nébuleuse brune des « méchants » (celle-ci est du reste passablement plus petite, ce qui reflète le volume de leur activité dans la twittosphère).

    La petite galaxie des « technosolutionistes » est d’un bleu violacé qui la classe dans le « camp du bien », du moins en principe, si nous comprenons bien le code couleur. Mais il y a aussi des fils qui semblent traverser l’espace intersidéral vers « pro-OGM », décidément une accointance peu recommandable… et hors sujet ici.

    Bref, la galaxie est désignée plutôt deux fois qu’une (!) par « Tech Pro-nucléaire ». Elle ne comporte que deux noms, Mac Lesggy et Emma(nuelle) Ducros (M. Jean-Marc Jancovici n’en est pas, mais il est vrai que « Qu’on le veuille ou non, nous n’échapperons pas à la décroissance »).

    Ces personnages se trouvent aussi doublement privés du brevet de respectabilité dans le texte de l’étude par une catégorisation en dehors des « sciences » et par un autre apparentement terrible :

    « À celles-ci [la « communauté dénialiste » et les « communautés pro-sciences »] s’ajoutent une communauté technosolutionniste qui, sans nier l’origine anthropique du changement climatique, estime qu’il existe des solutions, comme le nucléaire, qui rendent superflues une partie des mesures défendues par les pro-climat ; et une petite communauté formée de partisans de Reconquête ! »

    Des interactions complexes entre « communautés »

    Les auteurs proposent des explications complexes sur les interactions entre « communautés ». Mais en bref, une action dans une tribu entraîne une réaction dans une autre. L’étude s’intéresse notamment aux directions de ces interactions, à leur volume et à leur rapidité.

    Leur figure 10 montre que les « communautés » évoluent en grande partie en parallèle. Au moins en partie, une action dans l’une déclenche une action dans une autre. Du reste, on observe un reflux récent de l’activité, ce qui devrait normalement mettre un bémol au discours anxiogène.

    source : https://iscpif.fr/climatoscope/?p=72#tab-id-1

    Ces explications sont censées étayer la mise en cause des « technosolutionistes » – qui reste cependant prudente grâce à l’adverbe « probablement ».

    Mais à bien y regarder, il y a – nous semble-t-il – un très étonnant biais fondamental que l’on peut déjà détecter dans l’intitulé « Tech Pro-nucléaire ».

    La grande nébuleuse du « camp du bien » est un ensemble hautement hétéroclite qui regroupe des membres du GIEC et leurs amis, des médias et journalistes, des personnalités et partis politiques (dont le Parti Animaliste !), des organisations (dont L214 et PETA France !).

    Une membre du GIEC qui se cantonne dans la pédagogie, l’agroclimatologue et chasseur d’orages Serge Zaka ainsi que le pronucléaire Jean-Marc Jancovici se trouvent noyés dans une palanquée de militants pro-ENR et antinucléaires (et adeptes de la catastrophique Energiewende ). Pourtant, dans une série de tableaux et de graphiques, l’étude distingue le « GIEC » des « pro-climat » – un ensemble qui reste fort hétérogène.

    Pourquoi alors avoir distingué les « technosolutionnistes » ou « Tech Pro-nucléaire » ? Le crime – en quelque sorte – des Mac Lesggy et Emmanuelle Ducros est de susciter des interactions avec le « camp du bien » sur le mode, non pas de l’approbation mais de la contestation. La critique argumentée des options politiques et sociétales promues sous le parapluie de la cause climatique.

    Ils tiennent des propos qui plaisent aussi aux « dénialistes » ; bien sûr, ils ne partagent pas les points de vue des « dénialistes » et s’emploient même à les démonter. Mais cela suffit pour montrer un faisceau de liens avec cette « communauté » et de procéder à un apparentement audacieux avec les confins galactiques d’Éric Zemmour… le tour est joué ! Des contempteurs des deux personnages ne s’y sont pas trompés…

    Source : https://iscpif.fr/climatoscope/?p=72#tab-id-1

    ( Source et source )

    Dans ce faisceau reliant Mac Lesggy et Emma Ducros aux « dénialistes », il y a du reste, au milieu, la mention du compte parodique Sardine Ruisseau. Comprenne qui pourra…

    Certes, on leur concède qu’ils ne nient pas l’origine anthropique du changement climatique ; mais ils agissent, est-il dit, « de manière négative sur l’activité en ligne des scientifiques des sciences du climat et du changement climatique ».

    En fait, ils contestent surtout les discours des militants des énergies dites « renouvelables » et de la décroissance, discours promus dans cette étude au rang des « connaissances scientifiques et des conclusions du GIEC ».

    Qu’ils fassent cela est impardonnable et cela valait bien la peine de créer une petite galaxie !

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      Maintenant, il va falloir du courage

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 17 February, 2023 - 12:00 · 5 minutes

    Il faut du courage pour avoir une opinion différente car celle-ci entraîne une singularisation pas toujours agréable, loin s’en faut. Or, de ce point de vue, les années qui viennent de passer auront indubitablement marqué nombre d’individus de traces que le temps aura beaucoup de mal à effacer.

    Une fois la poussière retombée, l’écume des jours passée, une fois qu’on commence à distinguer ceux qui ont justement fait preuve de courage à bon escient de ceux qui se sont aplatis ou pire, de ceux qui ont été les porte-voix des mouvements les plus grégaires et les plus agressifs, il faut pas mal de courage pour ne pas sombrer dans la facilité de distribution des bons et des mauvais points, de ne pas crier « je vous l’avais bien dit » voire « c’est bien fait ! »

    En toute occasion, il faut beaucoup de courage pour admettre s’être trompé et accepter toutes les conséquences de ses décisions parfois hasardeuses. Penser différemment, émettre des opinions contraires ou différentes de celles de la majorité, c’est non seulement multiplier les occasions de faire une erreur mais aussi celles d’être ridiculisé.

    On pourra par exemple prendre le cas assez éclairant de Scott Adams, un cartooniste assez célèbre en Amérique pour avoir notamment montré les tactiques employées avec succès par Donald Trump afin de quasiment piloter l’agenda des médias, et qui s’était montré particulièrement favorable à la vaccination contre le covid au point de se moquer de ses interlocuteurs les plus prudents ayant refusé les vaccins proposés. Récemment, dans une vidéo qui a eu beaucoup de couverture sur les réseaux sociaux, il a ainsi reconnu que ceux qui ont hésité et se sont tenus à l’écart de ces injections expérimentales ont probablement fait le bon choix :

    Pour le dessinateur, les opposants à cette expérimentation mondiale ont fait un choix simple : en doutant systématiquement de la parole officielle réputée pour n’être ni fiable ni bienveillante en moyenne, ils ont mis toutes les chances de leur côté.

    On pourra objecter au passage qu’en réalité, ceux qui n’ont pas participé à cette opération n’ont pas simplement eu de la chance mais qu’ils ont plus simplement suivi leur instinct ou noté l’illogisme des informations poussées par les autorités ; certains n’ont pas participé tout simplement parce qu’ils ont compris que la coercition ouverte ou larvée était fondamentalement mauvaise, un viol de leur conscience ou de leurs principes.

    Et à aucun moment, le courage n’a été du côté de ceux qui ont simplement suivi le groupe : compte tenu de la campagne médiatique sans précédent contre les refuspiks , de l’ostracisation active et de la rétorsion à l’encontre de ceux qui doutaient, l’acceptation passive de la pression sociale n’était pas le choix courageux.

    Et il va en falloir du courage pour admettre qu’on a un peu trop aimé ce système où l’on a joué au  héros devant Neflix à bouffer des chips, sans trop se fouler, sans respecter l’aventure très rocailleuse du doute, du recul devant ce qui apparaît être une expérimentation maintenant délétère. Il va falloir une grosse dose de courage pour admettre que la plupart des gens se sont précipités pour être sauvés par l’État d’un virus qui ne les tuait pas autant qu’il les a empêché de s’amuser, d’aller au cinéma ou de voyager…

    Maintenant et malgré l’amoncellement d’éléments qui ne laissent plus aucun doute, il va falloir un courage hors pair pour admettre qu’injecter ce produit douteux, quasiment de force, à toute la population sans distinction était une erreur dramatique : malheureusement, le déni est encore plus facile, plus douillet (et le sera pour un moment encore).

    Ce déni empêche pourtant de comprendre ce qui constitue à la fois des failles dans les raisonnements et les attitudes de certains, d’appréhender les mécanismes mis en place qui ont permis de contraindre autant de monde à se laisser injecter un produit hasardeux. Ce déni, aussi confortable soit-il actuellement, coûtera de plus en plus cher.

    Et à mesure que le coût grandira, il va falloir du courage pour comprendre l’ampleur des dégâts faits aux corps, aux âmes et aux institutions.

    Aux corps, avec les effets secondaires que seuls les plus obtus peuvent encore nier et qui vont continuer à toucher des millions d’humains dans les prochains mois et les prochaines années.

    Aux âmes, dans la corruption des raisonnements, dans la mauvaise foi et maintenant dans ce déni des faits voire le refus de la moindre empathie pour ceux qui ont été blessés par ces bricolages thérapeutiques mal boutiqués et surtout dans l’ostracisation qu’on a fait très inutilement subir à certains (et qui continue pour une part d’entre eux, alors même que plus aucune autre raison que bassement politique ne subsiste).

    Aux institutions enfin, dans la façon dont elles ont toutes été utilisées et se sont naturellement et bien sagement rangées derrière la coercition et avec les oppresseurs, et souvent en contradiction parfaite avec l’objet de leur existence même. La sauvegarde des droits fondamentaux, leur raison d’être, a été non seulement bafouée mais encouragée par chacune de ces institutions qui ont fièrement fait le jeu des gouvernants.

    Oh, il va en falloir, du courage, pour admettre que le « plus jamais ça » que certains braillaient à tue-tête en évoquant les horreurs de la Seconde Guerre mondiale (ces fameuses heures sombres) ont malgré tout recommencé à se produire, que les mécanismes qui ont mené au pire ont pointé de nouveau leur nez et que beaucoup ont été – et pour certains, sont encore – du mauvais côté de la roue, à la pousser dans la direction la plus néfaste.

    Il va falloir du courage pour que ceux qui ont été roulés l’admettent non pour les autres, mais surtout pour eux-mêmes afin de faire le travail nécessaire de correction qui s’impose pour éviter de répéter les mêmes erreurs.

    Ce n’est vraiment pas gagné. L’erreur est souvent confortable (au moins temporairement), surtout lorsqu’elle est commise en groupe et encore plus lorsqu’elle est poussée par l’État, ce grand agent de déresponsabilisation.

    Oui, souhaitons qu’après le temps de la peur vienne celui du courage.

    Car sans ce courage nécessaire pour regarder les choses en face, viendra inévitablement celui de la colère.

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      Arbitraire macronien : les tentatives de censure de la ministre de la Culture

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Monday, 13 February, 2023 - 09:16 · 5 minutes

    Alors que la réforme des retraites déclenche une opposition de plus en plus farouche que Macron et sa clique ne pensaient pas devoir affronter, la nervosité gouvernementale grimpe à mesure que les langues se délient sur les plateaux télé et que les “éléments de langage” officiels ne passent plus sans critique sur certaines chaînes. Zut et zut, voilà qu’il va falloir composer avec des gens pas tous d’accord avec Jupiter !

    Et cette opposition s’est illustrée dans la présence, notamment sur certaines chaînes de la TNT, d’intervenants clairement opposés aux points de vue gouvernementaux à différents sujets, depuis la gestion de la pandémie jusqu’à l’actuel débat parlementaire sur la réforme des retraites en passant par les chroniques et commentaires sur différentes affaires judiciaires qui éclaboussent (régulièrement) le petit monde macronien.

    Cette opposition est devenue virulente très récemment lors d’une émission d’Hanouna, le 16 janvier dernier, dans laquelle l’animateur étrillait l’audiovisuel public en dénonçant un budget de près de 4 milliards d’euros pour une qualité discutable, et appelait à le privatiser intégralement. L’horreur, quasiment l’ultranéolibéralisme sans frein ni loi !

    C’en était probablement trop pour l’actuelle ministre de la Culture, une certaine Rima Abdul-Malak dont l’existence n’a été confirmée qu’assez récemment, qui s’est empressée de faire connaître son point de vue lors d’une émission tenue commodément sur un média de révérence du service public : pour elle – et c’est très simple – on ne peut conserver son droit d’émettre qu’à partir du moment où on ne fait pas trop dans la critique acide.

    Eh oui, pour les petits rigolos qui croyaient que la France était un pays où les “droits de l’Homme” s’appliquaient encore, le réveil est quelque peu rude : non, vous n’avez pas le droit de dire ou d’émettre ce que vous voulez. La liberté d’expression, comme absolument tout le reste en France, doit être sévèrement encadrée et ce, d’autant plus si vous commencez à utiliser niaisement cette liberté pour critiquer vertement l’emploi des fonds publics ou pour remettre en cause le discours officiel.

    Pour l’actuelle ministricule – et comme pour beaucoup d’autres politiciens actuellement en poste, du reste – la libre-expression n’est pas un droit, mais bien un privilège. Privilège qui pourrait donc être résilié ad nutum par le pouvoir en place en prétextant (admirez la beauté de l’argument !) un “manque de pluralité” depuis un plateau radiophonique pourtant réputé pour ses débats et intervenants hémiplégiques soigneusement choisis dans les 50 nuances de rouges, de pourpres et de carmins d’une gauche germanopratine caricaturale d’entre-soi et certainement pas plurielle.

    Sans grande surprise, les explications de la ministre n’ont guère convaincu les intéressés : Hanouna a facétieusement rappelé qu’en 2025, date à laquelle les fréquences attribuées à CNews et C8 – chaîne où il officie – pourraient ne pas être renouvelées par l’État, l’actuelle ministre pourrait ne plus être en poste. De la même façon, Pascal Praud n’a pas goûté les arguments de la ministre et a même accusé Léa Salamé, le passe-plat de la ministre au service public, d’être complice de l’opération menée par Abdul-Malak pour préparer les esprits au prochain refus de renouvellement. Bock-Côté, de son côté , s’est fendu d’une tribune dans Le Figaro pour dénoncer la tentative de musèlement de la ministre au profit de cette “idéologie diversitaire” , ce pluralisme à sens unique où seul le discours d’extrême-centre est autorisé.

    Signalons enfin Christine Kelly , ex-membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), qui rappelle que les décisions de l’autorité compétente en la matière sont, normalement, réalisées en indépendance totale du ministère, ce que les déclarations de la Ministre semblent remettre en cause.

    Soyons lucides : il est particulièrement amusant de voir certains se réveiller en 2023 devant ce qui était apparent depuis plusieurs années pour ceux qui se sont donné la peine de regarder la réalité en face. L’épisode particulièrement douloureux et dramatique de la gestion pandémique a largement illustré l’absence réelle de toute possibilité d’un débat serein, scientifique et argumenté dans les médias, et C8 comme CNews ne s’en sont pas mieux sorties à l’époque que les autres chaînes, publiques ou privées.

    Cela fait en réalité plusieurs années que le débat démocratique n’existe plus en France, et que la fameuse pluralité d’opinions et de points de vue n’existe plus sur à peu près aucun plateau télé, aucune émission radio ou quasiment aucune tribune journalistique. Parfois, il y a quelques résurgences, quelques épisodes où un intervenant va, subitement et inconsciemment sans doute, sortir une opinion parfaitement contraire à la doxa officielle, plombant l’ambiance et aboutissant à des journalistes à la bouche bée qui font ensuite des mèmes rigolos sur les intertubes. L’émission suivante, l’impétrant n’est d’ailleurs pas réinvité.

    En réalité, toute la société française s’est maintenant accommodée d’un discours quasi-unique et de débats sur les détails, à la marge et surtout pas en profondeur : le moindre écart à cette marge est immédiatement taxé, sans la moindre nuance, de complotisme , de discours fasciste , d’ extrême-droite (ou ultradroite , n’hésitons pas). Les intervenants qui ont émis une opinion différente ont dérapé , le doute ou leurs questionnements les propulse dans les antivax , les pro-Poutine ou les ultralibéraux , autant de termes qu’on voudra aussi infâmants que possible.

    Dans cette ambiance délétère maintenant bien installée, toute opposition clairement exprimée, voire – pire que tout – argumentée sera non seulement combattue avec absolument tous les procédés rhétoriques les plus vils (depuis l’ ad hominem jusqu’à l’insulte pure et simple en passant par l’homme de paille ou les diversions plus ou moins grossières) mais elle sera surtout cachée, tue et effectivement censurée par action et par omission dès que cela sera possible.

    En exprimant ainsi ces menaces même pas voilées à l’encontre de groupes privés, la ministricule Rima Abdul-Malak ne fait en réalité qu’entériner un état de fait déjà bien présent dans le pays. On ne pourra que s’étonner de l’incohérence de la même ministre qui, il y a quelques semaines, s’exprimait sur les dangers de la Cancel culture .

    Manifestement, certaines opinions semblent importantes à étouffer, mais d’autres peuvent revendiquer l’application et la protection de la loi… Bienvenue dans la confusion générale et dans l’arbitraire macronien.

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      En Russie, la littérature pour enfants devient une arme de propagande

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 12 February, 2023 - 03:40 · 10 minutes

    Par Laure Thibonnier-Limpek et Svetlana Maslinskaia .

    En Russie, l’offre culturelle se transforme sous l’effet indirect des lois adoptées par les députés depuis le 24 février 2022. C’est notamment le cas dans le domaine de la littérature jeunesse, où des activistes et des spécialistes des questions culturelles favorables au régime ont appelé à restreindre l’accès des jeunes lecteurs à certains livres, voire à les interdire, visant surtout les ouvrages qui diffuseraient les «valeurs occidentales », comme ceux de J. K. Rowling .

    Le 13 décembre 2022, Vladimir Poutine a appelé le gouvernement à adopter des mesures susceptibles de populariser parmi la jeunesse « les héros de l’histoire et du folklore russe conformes aux valeurs traditionnelles ». Un objectif immédiatement soutenu par une partie des spécialistes des politiques culturelles .

    Il existe en Europe une tradition de régulation de la lecture enfantine par les adultes afin de transmettre à la jeune génération des connaissances et des valeurs communes. Généralement, les États optent pour la voie de la recommandation : ils font élaborer et diffusent des listes d’œuvres dont la lecture est recommandée aux enfants. Mais lorsque la littérature pour enfants devient une arme de propagande, le pouvoir utilise la censure pour restreindre l’accès des lecteurs aux textes qui, de son point de vue, menacent l’idéologie dominante. C’est ce qui se passe aujourd’hui en Russie.

    La doctrine patriotique et les livres pour enfants dans la Russie actuelle

    Désormais, la politique russe en matière de littérature jeunesse repose principalement sur l’idée que celle-ci doit transmettre des « valeurs spirituelles et morales traditionnelles » qui seraient propres à la Russie. Plusieurs lois fédérales encadrent l’édition jeunesse :

    Ce dernier document définit ainsi les « valeurs spirituelles et morales traditionnelles » :

    «La vie, la dignité, les droits et libertés de l’Homme, le patriotisme, le sens civique, le service de la Patrie et la responsabilité envers son destin, de hauts idéaux moraux, une famille solide, un travail créatif, la priorité du spirituel sur le matériel, l’humanisme, la charité, la justice, l’esprit collectif, l’entraide et le respect mutuel, la mémoire historique et la continuité des générations, l’unité des peuples de Russie. »

    Le secrétaire du Conseil de sécurité de la Fédération de Russie, Nikolaï Patrouchev, a déclaré le 30 mai 2022 que l’État devait commander plus de produits culturels susceptibles de « préserver la mémoire historique, susciter la fierté nationale et la formation d’une société civile mature consciente du rôle qu’elle a à jouer dans son développement et sa prospérité ».

    Selon la vision conservatrice du gouvernement, la Russie aurait été tout au long de son histoire encerclée par des ennemis déterminés à la détruire. Cette volonté de démantèlement de la Russie aurait culminé avec la Seconde Guerre mondiale, laquelle est largement ramenée, dans le récit déployé par les autorités russes, au triomphe de l’URSS sur le nazisme allemand, triomphe dont la Russie actuelle serait la seule héritière .

    L’art et l’éducation doivent donc inculquer aux jeunes cette idée que la Russie d’aujourd’hui est avant tout le pays qui a sauvé le monde du nazisme en un effort héroïque dont aucun aspect ne saurait être remis en question. Les évocations de faits historiques susceptibles d’assombrir cette vision irénique (rappel du pacte Molotov-Ribbentrop, des erreurs des dirigeants, de la quantité colossale des pertes humaines dont une partie au moins aurait probablement pu être évitée, etc.) sont considérées comme des falsifications de l’histoire et sont poursuivies en vertu de la loi fédérale n°278-FZ du 01.07.2021 Sur les modifications de la loi fédérale « Sur la commémoration de la victoire du peuple soviétique dans la Grande Guerre patriotique de 1941-1945 ».

    « L’Arbre de Noël d’armoise »

    Les mésaventures que subit actuellement le roman d’Olga Kolpakova L’Arbre de Noël d’armoise illustrent parfaitement les conséquences du durcissement du régime sur ces questions.

    Le livre, sorti en 2014 chez la maison d’édition Kompas Guide , a remporté en 2019 le prix Piotr Erchov, attribué à des ouvrages destinés à la jeunesse, dans la catégorie « meilleure œuvre patriotique pour la jeunesse ».

    Cependant, à l’été 2022, le département de politique intérieure de la région de Sverdlovsk (Oural) a donné aux bibliothèques la consigne orale de retirer le livre du libre-accès . Les bibliothèques ne peuvent plus prêter ce livre aux mineurs, ni l’utiliser dans leurs manifestations à destination du jeune public. Comment un livre jusque là salué par les enseignants et les fonctionnaires a-t-il pu faire l’objet d’une telle interdiction ?

    La protagoniste du roman, qui se déroule durant la Seconde Guerre mondiale, est une fillette de cinq ans, Marihe, du diminutif allemand Mariechen (petite Marie). Elle vit près de Rostov-sur-le-Don avec sa famille qui parle allemand et ne connaît que quelques rudiments de russe car elle appartient au groupe des Allemands de Russie .

    De même que les Allemands de la Volga , dont le sort tragique est plus connu, ces Soviétiques descendent des populations germaniques installées dans l’Empire de Russie dans la seconde moitié du XVIII e siècle. Catherine II les avait invitées pour peupler et cultiver les terres nouvellement rattachées à l’Empire de Russie dans les régions de la Volga, du sud de la Russie et de l’est de l’Ukraine actuelles. Dans les quelque 150 années suivantes, il n’y a pas eu, les concernant, de politique de russification ni d’assimilation massive. Les communautés allemandes formaient des villages entiers. La pénétration de la langue russe s’est faite de manière hétérogène, au gré des trajectoires sociales. La différence de religion a joué un rôle, limitant les mariages interconfessionnels dans lesquels le russe aurait pu devenir la langue commune. L’école n’a pas non plus pu imposer la langue russe puisqu’elle n’était pas obligatoire.

    En 1941, lorsque l’avancée des troupes nazies menace ces régions, les hommes valides sont envoyés au front et leurs familles, dont celle de Marihe, sont déportées en Oural et en Sibérie.

    La narration est menée du point de vue de la fillette. Ainsi, l’auteure décrit les événements historiques des années 1941-1942 tels qu’ils ont pu être perçus par un jeune enfant. Ce texte écrit « en se mettant à genoux », selon l’expression d’ Erich Kästner , ce regard enfantin, construit une voix narrative sincère et chargée d’émotions exprimant une nette position antifasciste.

    Kolpakova puise aussi dans la tradition littéraire des XIX e et XX e siècles pour décrire l’enfance malheureuse de Marihe. L’intrigue reprend les événements majeurs de cette représentation : la séparation avec un des parents, l’errance, la vie chez des étrangers, la mort d’un proche (frère, sœur, mère ou père), l’éloignement puis la rencontre fortuite avec des amis ou des parents, la faim, le dénuement, la maladie, l’aide providentielle d’étrangers, le travail physique éprouvant…

    La fillette décrit ainsi la faim :

    Au printemps, ma grand-mère s’est mise à faire de la soupe avec des orties, des pissenlits et de l’aneth. Parfois, Lilia allait chercher de l’oseille dans la montagne. De l’eau et des orties, ce n’est vraiment pas bon, surtout sans sel ni pommes de terre. Je pleurais, je ne voulais pas manger cette mixture.

    Ces privations matérielles sont présentées comme des épreuves qui font grandir.

    Le regard naïf porté par Marihe sur le contexte politique est contrebalancé par la prise de position tranchée de l’auteur contre le fascisme. L’enfant donne sa tonalité éthique au récit :

    « Dans toute nation, il y a des gentils et des méchants, des personnes bonnes et mauvaises, cupides et généreuses. Ceux qu’on appelait désormais « nazis”, c’étaient les Allemands méchants. Voilà ce que papa avait dit. »

    Censure et harcèlement

    Mais en juin 2022, dans le cadre de ses charges administratives, Ivan Popp, maître de conférences à l’Université pédagogique de l’Oural, expertise le livre à la demande du gouvernement de la région de Sverdlovsk.

    Selon ses conclusions , le roman « déforme les faits historiques, spécule et invente des légendes » et « suivant la tendance libérale européenne, compare l’Union soviétique avec l’Allemagne fasciste […], falsifie les faits historiques et discrédite les dirigeants et l’histoire » russes. Svetlana Outchaïkina, ministre de la Culture de la région de Sverdlovsk, s’est appuyée sur cette analyse pour exiger, à travers une circulaire confidentielle , le retrait du livre des bibliothèques pour enfants.

    À la mi-juillet 2022, Olga Kolpakova met en ligne le texte de Popp et rapporte des cas de retrait de l’ouvrage du libre accès de certaines bibliothèques. Cette annonce émeut les écrivains pour la jeunesse et les spécialistes de la lecture enfantine qui publient sur les réseaux sociaux des textes soutenant le roman et critiquant l’analyse qu’en a faite Popp , et qui continuent de relayer les annonces relatives à sa situation. Des écrivains ont aussi lancé un mouvement pour soutenir financièrement l’auteur et son éditeur. Le Moskauer Deutsche Zeitung , revue bihebdomadaire rédigée en allemand et russe, a pris position en faveur du livre et des écrivains pour enfants ont écrit au gouvernement de la région de Sverdlovsk pour défendre l’ouvrage et son auteure. Evguéni Roïzman, ancien maire d’Ekaterinbourg (la plus grande ville de l’Oural) aujourd’hui prisonnier politique , a également soutenu le livre. L’éditeur a demandé à l’Institut de littérature de l’Académie des sciences russe, la Maison Pouchkine, de procéder à une analyse littéraire du roman.

    Ce rapport d’expertise , rédigé par le Centre de recherche sur la littérature pour enfants, souligne la qualité littéraire et didactique du roman de Kolpakova. Après l’avoir lu, le gouverneur de la région de Sverdlovsk, Evguéni Kouïvachev, a déclaré en août 2022 que l’interdiction du livre était inadmissible.

    Aucune décision officielle n’a suivi, si bien que les bibliothèques continuent de retirer le roman de leurs rayons .

    Malgré la chape de plomb qui pèse sur la Russie aujourd’hui, ce soutien multiforme, y compris de la part d’un responsable haut placé comme Kouïvachev, montre qu’il existe quand même encore un petit espace de débat dans la Russie d’aujourd’hui. Pour autant, à l’instar du sort réservé au livre Un Été en cravate de pionnier , d’Elena Silvanova et Katerina Malisova, faisant l’objet de poursuites pour propagande LGBT+ , la censure de L’Arbre de Noël d’armoise fait peser de sérieuses inquiétudes sur le climat intellectuel dans lequel grandissent les enfants russes. Cet épisode révèle des mécanismes de contrôle des esprits dont l’impact sur la société russe risque de se faire sentir encore longtemps. The Conversation

    Laure Thibonnier-Limpek , Enseignant-Chercheur à l’Institut des Langues et Cultures d’Europe, Amérique, Afrique, Asie et Australie (ILCEA4), membre du Centre d’Etudes Slaves Contemporaines, Université Grenoble Alpes (UGA) et Svetlana Maslinskaia , Professeur de littérature russe invitée à l’ILCEA, Université Grenoble Alpes (UGA)

    Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’ article original .

    The Conversation

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      Pourquoi Twitter a-t-il été bloqué en Turquie après le séisme ?

      news.movim.eu / Numerama · Wednesday, 8 February, 2023 - 16:34

    Séisme tremblement de terre

    Plusieurs opérateurs en Turquie ont entravé l'accès à Twitter, alors que le pays a été secoué par deux puissants séismes cette semaine. [Lire la suite]

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      Des craintes de censure du système de suivi du jet d’Elon Musk émergent

      news.movim.eu / Numerama · Monday, 30 January, 2023 - 12:55

    Suivre le jet d'Elon Musk va-t-il devenir encore plus difficile ? Le système sur lequel repose le fameux compte Twitter qui irrite le milliardaire américain a été racheté par une entreprise. D'aucuns craignent que cela conduira le service à censurer certains vols. [Lire la suite]

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      YouTube supprime la chaîne d’un cinéphile après une vidéo sur le film érotique Shortbus

      news.movim.eu / Numerama · Tuesday, 24 January, 2023 - 14:47

    De plus en plus de créateurs se plaignent de censure et d'une modération plus stricte qu'avant sur YouTube. Le dernier exemple en date vient d'un youtubeur cinéma. Sa vidéo mentionnant le film Shortbus, qui traite de sexe, n'aurait pas respecté les règles de la plateforme — et toute sa chaîne a été supprimée en réprimande. [Lire la suite]

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      YouTube a censuré une vidéo mentionnant le suicide de Kurt Cobain

      news.movim.eu / Numerama · Wednesday, 18 January, 2023 - 11:04

    Le youtubeur Jean-Baptiste Toussaint, qui anime la chaîne Tales From The Click, a eu la surprise d'apprendre qu'une de ses vidéos avait été supprimée. La raison ? Il a mentionné le suicide du chanteur Kurt Cobain. [Lire la suite]

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      WhatsApp défie l’Iran avec une arme contre la censure de l’app

      news.movim.eu / Numerama · Friday, 6 January, 2023 - 09:23

    Iran

    Une nouvelle fonctionnalité est désormais disponible dans WhatsApp. Celle-ci permet de créer et d'utiliser un proxy, pour passer par un point d'accès intermédiaire et esquiver le blocage du service. La censure en Iran est visée. [Lire la suite]

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