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      Le confinement ciblé n’est pas discriminatoire

      Maxime Kristanek · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 29 January, 2021 - 03:50 · 5 minutes

    confinement ciblé

    Par Maxime Kristanek.

    La crise sanitaire place le gouvernement français entre le marteau et l’enclume : du côté du marteau sanitaire, il faut restreindre les activités économiques et les rapports sociaux ; du côté de l’enclume économique et sociale, il faut permettre aux entreprises de fonctionner et aux individus d’avoir un minimum de contacts sociaux. Est-il possible de limiter le nombre de morts du à la pandémie sans sacrifier nos entreprises et notre vie sociale ?

    Concernant les chiffres français, nous savons que 89 % des patients en réanimation présentent des co-morbidités et que 90 % de ceux qui décèdent ont plus de 65 ans, et/ou présentent des comorbidités. Nous ne sommes donc pas égaux face au virus : les individus âgés avec des co-morbidités sont beaucoup plus vulnérables que les autres.

    La mise en place d’un confinement ciblé

    L’infectiologue Odile Launay a suggéré de mettre en place un confinement ciblé . Il s’agit de confiner seulement les individus vulnérables, ce qui signifie que ceux en bonne santé pourraient reprendre leurs activités. Dans un tel cadre, les universités, les salles de sport, les stations de ski, les restaurants, les bars et les lieux culturels réouvriraient.

    L’argument en faveur du confinement ciblé est d’ordre utilitariste. L’ utilitarisme est la doctrine éthique selon laquelle nous avons le devoir de choisir les actions qui maximisent le bien-être du plus grand nombre. En adoptant ce confinement ciblé limité à certaines parties de la population, on maximise les intérêts du plus grand nombre : les individus non vulnérables travaillent et retrouvent une vie sociale et les individus fragiles sont protégés du virus en étant confinés.

    À plusieurs reprises, le président de la République et des membres du gouvernement ont écarté cette solution, jugée éthiquement problématique. Plus précisément, ce type de mesure serait discriminatoire : certains seraient confinés sur des critères d’âge et de santé, tandis que d’autres pourraient jouir de leurs libertés. La discrimination est moralement condamnée parce qu’elle est un traitement désavantageux injustifié visant un certain groupe. Elle constitue une violation du principe d’égalité, énonçant que les individus doivent être traités de la même manière.

    Un confinement ciblé serait-il discriminatoire ?

    L’argument du gouvernement consiste à énoncer que toute rupture du principe d’égalité constitue une discrimination. On peut pourtant douter de la vérité de cette affirmation car dans certaines situations, il n’est pas discriminant de traiter les individus de manière inégalitaire. Si la différence de traitement, même désavantageuse, repose sur des justifications valables, alors elle n’est pas considérée comme une discrimination.

    Par exemple, il ne paraît pas discriminatoire de taxer davantage ceux qui ont des revenus élevés. Il semble injuste qu’un milliardaire paye les mêmes impôts qu’un travailleur payé au salaire minimum. Le traitement différentiel désavantageux est justifié par l’écart de revenu.

    Depuis le début de la crise sanitaire, le gouvernement français ne traite pas de la même manière les citoyens sans que cela apparaisse discriminatoire. Par exemple, les professionnels de discothèques ont l’interdiction de travailler, contrairement aux employés de supermarché. Cette différence de traitement est justifiée : les discothèques sont des lieux de forte contamination, et ne remplissent pas un rôle essentiel, contrairement aux supermarchés.

    On peut justifier le confinement des individus vulnérables car du fait de leur âge ou de leur état de santé ils ont davantage de risques de développer une forme grave de la maladie. Pour cette raison et afin d’être protégés, ils doivent être confinés. Il apparaît en revanche injustifié de confiner les personnes en bonne santé de moins de 65 ans qui ne développent pas de forme grave dans l’immense majorité des cas.

    Une deuxième raison de pratiquer un confinement ciblé est que la majorité des individus fragiles (retraités et personnes ayant de graves problèmes de santé) ne travaille pas, contrairement à la majorité en bonne santé. Rappelons que les hôpitaux et les retraites sont financés principalement par le travail des individus non vulnérables. Il est donc avantageux pour les plus fragiles que les autres continuent de travailler afin de financer leurs retraites.

    Critère biologique et critère économique

    On pourrait objecter que traiter de manière différente des individus sur la base de critères économiques ou professionnels n’est pas la même chose que traiter de manière différente à partir de critères biologiques, la vulnérabilité étant ici considérée comme la fragilité biologique d’un organisme humain pour se défendre face au virus. Le critère économique serait acceptable, contrairement au biologique, sur lequel on n’exerce aucune prise : on ne décide pas d’être âgé ou d’être diabétique.

    Pourtant, l’État traite déjà différemment les individus sur la base de critères biologiques. Par exemple, les personnes présentant des handicaps physiques ou mentaux importants perçoivent des aides publiques auxquelles n’ont pas accès les non-handicapés. On pourrait rétorquer qu’il ne s’agit pas là de discrimination, car le traitement différentiel est avantageux.

    Mais on pratique aussi des traitements différentiels désavantageux sur la base de critères biologiques sans que soit évoquée une discrimination.

    Par exemple, pour exercer certaines activités professionnelles (pompier, policier, pilote, etc.), il faut passer des épreuves physiques, et ceux qui échouent à cause d’un handicap biologique, inné ou acquis, sont disqualifiés.

    Autre exemple : les personnes non-voyantes ne peuvent détenir un permis de conduire. Si le traitement différentiel sur la base d’un critère biologique est justifié, alors il ne s’agit pas de discrimination. On voit mal ainsi pour quelle raison le critère de différenciation biologique serait, en soi, discriminatoire.

    Ainsi, en situation de crise sanitaire, il n’est pas discriminatoire de traiter différemment les individus avec un organisme vulnérable. Ainsi, il n’est pas discriminatoire de seulement confiner les personnes fragiles en vue de les protéger et permettre à celles en bonne santé de travailler et reprendre une vie sociale.

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      Les finances publiques plombées par la politique gouvernementale

      Jean-Philippe Delsol · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 28 January, 2021 - 04:30 · 5 minutes

    finances

    Par Jean-Philippe Delsol
    Un article de l’Iref-Europe

    C’est un peu moins mauvais que prévu dans la quatrième loi de finances rectificative , mais c’est néanmoins cauchemardesque. Le déficit du budget de l’État français en 2020 représentera environ 178 milliards d’euros. Il faudra y ajouter le déficit de la Sécurité sociale, y compris des caisses de retraite et de chômage, et les conséquences sur les collectivités locales, encore inconnues.

    Sachant que selon un rapport de la Cour des comptes d’octobre 2020 le déficit cumulé du régime général de la Sécurité sociale et du fonds de solidarité vieillesse devrait atteindre 44,4 milliards d’euros en 2020 (contre 1,9 milliard en 2019 et 28 milliards d’euros en 2010, à la suite de la crise financière), et que les régimes de retraite et d’assurance chômage devraient cumuler près de 45 milliards d’euros supplémentaires de déficit, le déficit global des finances publiques devrait en 2020 représenter plus de 100 % des recettes fiscales de l’État. Bien sûr il faut s’endetter toujours plus pour y faire face.

    Bruno Le Maire maintient qu’il ne faut pas augmenter les impôts et compte sur la croissance pour rembourser les dettes publiques qui s’accroissent démesurément, autour de 120 % du PIB en attendant pire en 2021, et qu’il faudra bien rembourser si l’on veut éviter que la France perde tout crédit. Il n’a pas tort sur le principe, sauf que sa politique entrave l’économie plutôt qu’il ne la libère, ce qui nuira à la croissance nécessaire. Carrefour en offre un exemple manifeste.

    Le mauvais exemple Carrefour

    À défaut de gérer ses affaires, le gouvernement s’occupe de celles des autres. Près de quarante ans après que Laurent Fabius a arrêté les magnétoscopes japonais à Poitiers, il s’ingère dans les affaires de Carrefour pour faire obstacle au Québécois Couche-tard qui voulait entrer dans son capital.

    Pourtant l’investisseur canadien était prêt à investir trois milliards d’euros dans Carrefour pour améliorer sa productivité et développer l’e-commerce de façon à réduire encore ses prix au profit des consommateurs sans peser sur les producteurs.

    Le veto public opposé à Carrefour est d’autant plus incompréhensible que sur le marché français, la concurrence est vive : Auchan, Casino, Intermarché, Leclerc… Qu’aurait dit monsieur Le Maire si les Canadiens avaient posé leur veto à l’achat de Bombardier par Alstom fin 2020 ?

    Bombardier, qui fabrique des matériels de transport collectif, est pourtant autrement stratégique pour le Canada que Carrefour pour la France. Le distributeur français est présent dans de très nombreux pays étrangers et il y est souvent le distributeur le plus important, ou l’un d’eux. Selon son dernier rapport financier annuel 2019, Carrefour comptait par exemple 789 magasins en Belgique, 1149 en Espagne, 1089 en Italie, 906 en Pologne, 464 au Brésil, 597 en Argentine…

    Si la France poursuit sa politique souverainiste, les autres pays prendront des mesures de rétorsion équivalentes et empêcheront le développement de nombreuses entreprises françaises à l’international. Pourtant les activités à l’étranger des grandes firmes françaises actives au niveau international comptent pour une part majoritaire de leur chiffre d’affaire et de leurs profits.

    L’État n’a pas vocation à gérer l’économie

    Nous vivons dans une économie mondialisée qui a permis le développement exceptionnel de ces cinquante dernières années aussi bien dans les pays les plus pauvres que dans les pays riches. Mais si nous commençons à fermer nos frontières aux échanges de capitaux et bientôt de services et marchandises, nous en pâtirons tous. Et nous serons incapables de redresser la situation après la crise sanitaire qui nous aura plombés.

    Les agriculteurs qui se sont félicités du veto du gouvernement opposé à Couche-tard n’ont pas compris qu’au contraire, cet investissement aurait favorisé les ventes de Carrefour en France et à l’étranger et donc la production agricole française et ses échanges, notamment avec le Canada.

    Le rôle de l’État n’est pas de gérer les entreprises et de décider de la qualité de leurs actionnaires. L’État est mauvais gestionnaire ; il n’a pas les qualités appropriées et il n’en a pas la responsabilité. Sa gestion excessivement centralisée et tout entière administrée de la crise du Covid démontre son incapacité en la matière. On ne gère pas une crise en multipliant des circulaires aussi détaillées qu’un règlement de caserne.

    L’économie a moins besoin d’être suradministrée que libérée de trop de règlements, de contrôles, de sanctions, d’interdictions, d’obligations… Pire, en s’immisçant dans la vie des entreprises, l’État altère le juste équilibre des relations de marché.

    Certes, les mesures fiscales retenues dans la dernière loi de finances, pour atténuer les impôts de production et poursuivre doucement la baisse de taux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés, sont favorables à l’économie française.

    Mais si parallèlement les réglementations se multiplient au prétexte de satisfaire les revendications populistes et gauchistes, écologiques ou protectionnistes, ce qui a été donné d’une main sera repris de l’autre. Et l’apaisement fiscal ne sera alors qu’une parenthèse provisoire, parce que les entreprises gavées d’emprunts garantis par l’État ne pourront pas faire face à leur remboursement, parce que le déficit budgétaire public sera si lourd qu’il faudra en appeler au contribuable pour remédier à la faillite de l’État . Ce qui ajoutera encore au désastre.

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      Faire la peau à la bureaucratie : et si c’était la mauvaise question ?

      Philippe Silberzahn · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 27 January, 2021 - 03:30 · 7 minutes

    bureaucratie

    Par Philippe Silberzahn.

    J’étais interrogé il y a quelques jours par une journaliste au sujet de la bureaucratie qui, semble-t-il se développe beaucoup dans les grandes entreprises et empoisonne leur existence, ralentissant leur fonctionnement et démobilisant leurs collaborateurs. Certes, l’enjeu est d’importance à l’heure de la crise où tout le monde doit être sur le pont dans un environnement qui change rapidement. Mais je ne crois pas qu’attaquer la bureaucratie soit la bonne approche.

    Gary Hamel , un gourou du management des années 1990, veut faire la peau à la bureaucratie. Qui serait contre ? Je ne connais personne qui aime la bureaucratie. Et pourtant, cette approche est problématique.

    D’une part parce que le vocabulaire est guerrier, et que les organisations ont trop souffert de ce type d’impératif qui reflète des modèles mentaux viciés à la base : ici, celui selon lequel la bureaucratie est un mal et qu’il peut être combattu à condition d’être courageux et de trancher ce qui doit être tranché. La violence de la posture nourrit sa propre défaite qui ne viendra malheureusement qu’après beaucoup de souffrances et de dégâts causés à l’organisation et à ceux qui y travaillent.

    D’autre part parce que l’utilisation du mot bureaucratie de façon explicitement péjorative est un jugement de valeur, ce qui est toujours un très mauvais point de départ dans un diagnostic organisationnel. Car la bureaucratie a des avantages, c’est ce qu’a montré le sociologue Max Weber il y a longtemps : des règles claires, identiques pour tous, la prédictabilité des décisions, la capacité à faire fonctionner de très grandes organisations, entre autres.

    La sociologie moderne, notamment avec les travaux de Michel Crozier et Ehrard Friedberg, nous a en outre appris depuis longtemps que si une situation de gestion persiste, c’est qu’elle présente un intérêt et qu’elle répond à un besoin d’une partie au moins de l’organisation et de ses membres.

    La bureaucratie : un symptôme, avant d’être une cause

    Il y a quelques temps, j’intervenais auprès d’une grande entreprise industrielle qui menait un grand projet de transformation avec un objectif de simplification de son fonctionnement.

    « Nous étouffons sous les procédures » , me disait son responsable. « Par exemple, le moindre projet, si petit soit-il, doit avoir un comité de pilotage. Il faut simplifier tout ça! »

    Et pourtant, toutes les tentatives de simplification avaient échoué et ce bien que toutes les parties prenantes m’aient assuré qu’elles voulaient absolument réduire la bureaucratie. Et donc tout le monde devenait fou : la bureaucratie se développait, tout le monde était contre, mais rien ne changeait et elle continuait sa course folle.

    Dans notre ouvrage Stratégie modèle mental , Béatrice Rousset et moi avons abordé cette question et montré que dans ces situations, il faut remonter à la source du phénomène qui semble inextricable. Il y a quelque chose qui bloque, et ce quelque chose ce sont les modèles mentaux, c’est-à-dire les croyances individuelles et collectives de l’organisation. Vue sous cet angle, la bureaucratie, ou ce qu’on nomme bureaucratie, est le produit d’une certaine façon de penser, et c’est elle qu’il faut mettre en lumière.

    Un atelier a permis de montrer que cette entreprise a une très forte culture industrielle et s’est bâtie autour de la notion d’expertise. Les managers sont pour la plupart ingénieurs de formation et voient leur fonction comme une fonction d’expertise : un manager, parce qu’il (ce sont en majorité des ils) est le chef, est un expert, et un expert doit avoir réponse à tout.

    La terreur absolue de ces managers est d’être pris en défaut, de ne pas savoir répondre à une question dans une réunion et donc d’être déconsidéré par leurs collègues, tout aussi terrorisés qu’eux. Cette terreur a développé un manque de confiance et une peur de l’échec, qui a entraîné un besoin de se protéger à tout prix. La bureaucratie, mot qui ici qualifie le développement de procédures apparemment inutiles, est la réponse de ces managers à leur besoin de protection. Le comité de pilotage d’un projet existe pour mouiller les collègues et faire en sorte que si échec il y a, celui-ci soit collectif.

    Autrement dit, la bureaucratie est une réponse parfaitement rationnelle des managers à leur modèle mental de peur.

    Le miroir aux alouettes de la simplification

    Avec ce qui précède, on comprend donc pourquoi les efforts de simplification échouent. Si vous dites à un manager que désormais il pourra gérer son projet tout seul, la panique le saisit. Ce n’est pas du tout ce qu’il veut, même si par ailleurs il déteste cette bureaucratie qui le mine jour après jour, comme un fumeur qui sait que le cancer le guette mais qui ne peut renoncer à sa cigarette.

    Si vous simplifiez en exigeant des réunions plus courtes, les managers en feront deux au lieu d’une. Et donc les entreprises qui suppriment les strates d’organisation et les processus superflus se font des illusions car ces strates et ces processus jugés superflus remplissent en fait une fonction, et que cette suppression se heurtera au mur de l’immunité organisationnelle. Vue comme une agression et une mise en danger, elle fera l’objet d’une résistance qui, il faut insister là-dessus, sera parfaitement rationnelle. Le problème n’est pas le processus superflu ; le problème est ce qui donne naissance à ce processus. Vous appuyez sur l’accélérateur (la simplification) tout en ayant le pied sur le frein (le modèle mental bloquant).

    L’erreur consiste donc à poser le problème en termes de bureaucratie et la solution en termes de simplification . Quand vous pensez bureaucratie, les managers entendent protection . Quand vous parlez de simplification ils entendent danger et ils ont raison.

    Dans notre exemple, la solution a consisté à exposer le modèle mental profond « Un manager est un expert qui doit avoir réponse à tout » pour amener les participants à le questionner.

    Puis nous avons identifié quelques occasions où un manager pouvait essayer un modèle alternatif, par exemple : « Un manager est un coordinateur qui s’appuie sur l’expertise des autres » .

    Ces occasions ont été choisies de façon qu’elles soient sans impact important en cas d’échec (qu’elles représentent des pertes acceptables). De fait, un manager qui n’est plus saisi par la peur de ne pas savoir répondre à une question technique ressentira moins le besoin de se protéger par des mesures bureaucratiques. On ne guérit pas la fièvre, mais la source de la fièvre. Et surtout, on la guérit en partant d’une posture de reconnaissance et de respect de ce qui est, ici la peur des managers.

    Au-delà, nous avons mis en lumière un modèle mental encore plus profond qui a trait à la confiance. En l’occurrence ici, l’organisation avait laissé diminuer la confiance accordée aux managers avec le temps, ce qui était l’une des sources de leur peur et de la démultiplication des procédures. La notion de confiance est donc apparue comme un sujet majeur sur lequel l’organisation devait travailler.

    Deux choses en conclusion

    Cesser de proposer des solutions simplistes basées sur l’identification d’un coupable ou d’un mal « facilement curable à condition qu’on s’en donne les moyens. » Cela revient à prendre les collaborateurs des organisations pour des imbéciles ou des poules mouillées, ce qu’ils ne sont assurément pas. Si c’était aussi simple, ils l’auraient déjà fait.

    Les phénomènes organisationnels sont intrinsèquement compliqués ; là encore la sociologie nous l’a abondamment montré depuis bien longtemps. Des recommandations simplistes voire naïves comme « limiter les réunions à 1 heure » ou « réduire les niveaux organisationnels » ne prennent pas du tout en compte la réalité organisationnelle et n’iront nulle part.

    Remonter à la source des comportements qui peuvent sembler aberrants mais qui sont en fait rationnels. Et cette source, ce sont les modèles mentaux, nos croyances profondes. L’exposition de ces croyances et leur ajustement respectueux est la seule façon de remettre l’organisation en mouvement.

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      Confinement 3 : la crise sanitaire révélatrice du mal français

      Olivier Maurice · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Saturday, 23 January, 2021 - 03:50 · 9 minutes

    confinement 3

    Par Olivier Maurice.

    La France vit donc son troisième confinement. Car il n’est pas la peine de se demander si la bouteille est à moitié pleine ou à moitié vide, nous sommes confinés 12 heures par jour , de 6 heures du soir au lendemain matin 6 heures et en régime de semi-liberté les 12 autres heures de la journée.

    En régime carcéral, cela s’appelle le placement à l’extérieur : un aménagement de peine qui permet au détenu de travailler, mais l’oblige à revenir dormir en prison.

    Après 6 heures, tout redevient comme avant, entendez par là comme pendant le vrai confinement, celui qui osait dire son nom. Les mêmes attestations de sortie dérogatoire à compléter soi-même, les même exceptions pour promener son chien, les mêmes prunes à 135 euros et la même déprime dans les rues abandonnées aux rongeurs nuisibles, les muridés et les autres.

    Qui se souvient encore du monde d’avant ? Du vrai monde d’avant, celui des discussion au café et des films au cinéma ? Espérons-nous encore un monde d’après ? Est-ce qu’il existera et à quoi pourra-t-il bien ressembler quand l’inondation de folies redescendra enfin ? Si elle descend un jour !

    Un an maintenant que l’on n’entend plus parler que de Coronavirus, de contaminations, de covid, de maladie, d’hospitalisations, de réanimations, de décès, de restrictions de libertés, de contrevenants, de comportement incivique et de comportement inconséquent des uns et des autres.

    Un an que la France vit en régime carcéral.

    Mais qu’avons-nous donc fait pour mériter une telle punition ?

    On aura beau râler sur, au choix : les politiciens, le système, la mondialisation, les pays étrangers, les Américains, les Chinois, les Russes ou le monde de la finance, le constat est cependant bien plus clair que cela : nous récoltons aujourd’hui ce que nous avons semé hier.

    L’analyse des disparités et des incohérences qu’un an de régime de tyrannie sanitaire aura révélée nous permet assez clairement de voir ce qui ne va pas dans notre pays.

    La dépendance à l’État

    Le premier point est la dépendance à l’État. Dépendance devenue si flagrante qu’elle relève presque du syndrome de Stockholm. Depuis un an, le pays vit au rythme effréné des déclarations gouvernementales hebdomadaires, des fameux points de presse du jeudi que la population attend désormais comme on attend le briefing du matin au boulot ou l’emploi du temps de la semaine à l’école.

    Le rapport des Français avec l’État a fondamentalement changé. D’un conglomérat assez obscur de services publics, l’État est devenu le patron. Pas le grand patron qu’on ne voit jamais, mais le petit patron, le petit chef, celui qui est chaque jour sur votre dos, qui surveille vos moindres faits et gestes et qui vous fait des réflexions à la moindre occasion.

    On connait tous les ravages que font ces rapports conflictuels dans les entreprises.

    En plus de la dépendance hiérarchique, une réelle dépendance économique s’est créée entre des milliers d’entreprises, d’indépendants, de secteurs qui ne survivent pour l’instant que parce que l’État perfuse ces secteurs qu’il a délibérément mis en sommeil. Comment se passera le sevrage d’argent public et qu’adviendra-t-il de ces entreprises zombies ?

    Sans compter en plus de tout cela sur l’effet délétère d’avoir maintenu en vie des acteurs qui aurait dû disparaître, non pas à cause de la crise, mais à cause de leur mauvaise stratégie, de leurs problèmes structurels, du manque de valeur ajoutée ou de différenciation, et que le marché aurait éliminé.

    Quel poids ces entreprises inadaptées ou dépassées, maintenues en survie artificiellement vont-elles faire peser sur la reprise ?

    La mauvaise santé de la population

    Que l’on évalue ou non l’impact des mesures sanitaires sur le bilan humain de l’épidémie, celui-ci est loin d’être fameux. Il est certes bien plus facile d’ accuser le virus ou surtout les mauvais comportements de la population, mais ce n’est que détourner le regard pour éviter de constater une évidence : si le bilan humain est si lourd, c’est que quelque chose ne fonctionne pas du tout dans le couple patient-soignant.

    La santé repose à la fois sur la condition physique des individus et sur l’accès aux soins. Et malgré le matraquage quotidien effectué depuis des années sur les ravages des mauvaises habitudes et l’incroyable importance donnée à la nourriture, malgré la gigantesque montagne d’argent investi dans les services sanitaires, ni l’un, ni l’autre n’ont permis d’éviter les hécatombes dans les maisons de retraite et certaines couches de la population, ni l’engorgement misérable des services hospitaliers.

    Le constat est sans appel : la population française est en mauvaise santé, autant parce que le pourcentage de personnes à risque est très élevé que parce que les services sanitaires ne sont plus à même d’assurer la couverture de cette population.

    Au-delà de la notion de protection sociale, c’est toute notre vision de la santé qui est remise en question, en passant par le sport et l’entretien physique : alimentations, addictions, soins bénins… et en terminant par la vieillesse.

    Le bilan catastrophique de cette épidémie et l’effondrement du système de santé sont la directe conséquence du « Je fais ce qu’il me plait, je ne crains rien, j’ai gratuitement accès au meilleur service de santé du monde ».

    La santé ne peut être gérée ni comme un centre de coût, ni comme un argument électoral ; elle est un sujet bien trop important pour être laissée aux mains de fonctionnaires, de corporations ou de politiciens.

    La France perdue des villes

    Cette crise a également relevé les incroyables disparités territoriales de notre pays. Elle a surtout montré l’incapacité d’une organisation centralisée à gérer cette diversité.

    Si la France est globalement restée si tranquille pendant toute cette crise, c’est que les Gaulois réfractaires, ceux qui sortent au besoin les gilets jaunes ou les bonnets rouges et qui biberonnent de la potion magique au premier coup de sang, en grande majorité ceux qui vivent dans la France périphérique , sont tranquillement restés dans leur village.

    Il faut dire que les mesures sanitaires ont majoritairement frappé les citadins, dans leurs effets mais aussi dans leur philosophie.

    Ce sont les citadins qui vont au restaurant trois soirs par semaine, au cinéma et au théâtre et dans les salles de sport. À la campagne et dans les petites villes, on va au restaurant pour les anniversaires, on a un home cinéma dans son salon et on fait du sport dans les associations, ou entre amis. De toute façon, on ne manque pas d’exercice physique.

    À la campagne, tant que le centre commercial est ouvert, qu’il y a de l’électricité et de l’essence, on se débrouille. Ce sont les citadins qui s’entassent dans les transports en commun et qui restent cloîtrés dans 20 mètres carrés par personne.

    Quel impact peuvent donc avoir des mesures ayant majoritairement consisté à interdire des activités qu’une partie importante de la population ne pratiquaient déjà pas, par faute de temps, de moyens, d’intérêt ou tout simplement d’accès ?

    Beaucoup d’élus locaux, moins coupés de la réalité, ont compris cette incohérence et se sont senti pousser des ailes, voire des griffes.

    L’État jacobin commence enfin à être soumis à concurrence. Certes une concurrence bien timide quand les présidents de région organisaient des distributions de masques ou quand les acteurs industriels se mettaient à fabriquer du gel hydroalcoolique, mais le mouvement est lancé et le state-bashing est passé au stade du sketch télévisé et aux banalités sorties quotidiennement par les élus locaux.

    Le vrai changement

    Il faudra sans doute attendre 2027 pour voir le vrai changement se produire. L’élection présidentielle de 2022 sera trop proche de l’impact pour que des solutions politiques nouvelles qui vont forcément émerger de cette crise ne voient le jour en si peu de temps.

    La grande question reste quand même celle du dégel. Que se passera-t-il quand le spectre de la troisième vague de printemps sera passé, qu’il y ait ou non d’ailleurs répétition de la flambée du printemps 2020 ?

    La radicalisation d’une partie importante de la population est en tout cas une certitude. Il semble raisonnable de dire qu’à part un petit noyau protégé, les Français ont été sévèrement secoués par la crise, que ce soit par les décisions arbitraires, la défaillance du système de santé, ou les errements du pouvoir central.

    Dans quelle population plus durement touchée par la crise se produira ou ne se produira pas l’étincelle que tout le monde redoute ? Chez les étudiants sacrifiés et cloitrés en isolement, chez les indépendants qui ont vu leur business fondre et disparaître, chez les salariés mis en chômage partiel et dont le sursis prendra fin avec les subventions, chez les ruraux ou les citadins, chez les jeunes ou les vieux qui ont payé un très lourd tribut à un État qui n’a absolument pas été à la hauteur de ses promesses.

    Que font les professionnels de la révolution d’habitude si prompts à faire un barrouf géant au moindre sourcil de travers ? Où sont passés les syndicats d’étudiants, les associations de commerçants, les syndicats, les associations, les collectifs et autres people engagés ?

    La liberté est la clef. Nous le savons et nous avons des propositions claires, précises, efficaces et réalistes pour sortir de cette impasse dans laquelle les politiques étatistes ont mené le pays. C’est le moment de faire entendre nos voix et de diffuser notre message.

    Si ce ne sont pas les libéraux qui le font, personne ne le fera, il ne faut pas compter sur les ex-révolutionnaires d’après-guerre et leurs héritiers. Ce sont eux qui envahissent quotidiennement les plateaux télé pour accabler la jeunesse de reproches, demander chaque jour davantage de restrictions et nous faire la morale.

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      Confinement, couvre-feu : entrepreneurs, défendez-vous de ces folies !

      Sébastien Leblet · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 20 January, 2021 - 04:30 · 4 minutes

    masque

    Par Sébastien Leblet.

    Comme le relate un récent article de Newsweek , une étude évaluée par les pairs publiée récemment dans l’ European Journal of Clinical Investigation démontre qu’il n’existe aucun intérêt net aux confinements de toute la population d’un pays pour répondre à l’épidémie de Covid-19.

    Cette étude vient corroborer d’autres études comme, entre autres, celle de la prestigieuse Université de Stanford ou une autre, plus ancienne, de l’institut national de Santé publique norvégienne .

    Or, le gouvernement français a fait le choix de confiner la totalité de sa population en mars 2020 puis à nouveau fin octobre 2020, et ce bien que l’OMS ait indiqué que le confinement n’était pas la solution et ne devait être décidé qu’en dernier recours.

    Depuis le début de l’épidémie le gouvernement français a aussi choisi d’y répondre quasi-exclusivement par des mesures liberticides comme l’instauration de nombreux couvre-feux (à 21 heures, à 20 heures, à 18 heures, etc.) ou d’obliger les Français à s’auto-signer des attestations de déplacement.

    Comme chacun le sait, ce sont bien ces mesures, et non l’épidémie de Covid-19, qui sont responsables d’une perte, selon les métiers, de 10 à 50 % de chiffre d’affaires sur l’année 2020 pour les TPE, PME, commerçants et professions libérales de France.

    À l’aune d’un troisième confinement qui semble prévu pour le 22 ou le 29 janvier, si les chefs d’entreprise n’ont pas vocation à faire de la politique, il leur appartient cependant – voire il est de leur devoir, de défendre les intérêts de leur entreprise, de leurs actionnaires et de leurs salariés.

    Plutôt que de confiner la France entière ou de limiter le déplacement des Français depuis un an, le gouvernement français aurait très bien pu s’inspirer sans risques des pays qui ont réussi à limiter le nombre de morts de la Covid-19 sans détruire leur économie. Faut-il rappeler qu’en termes de mortalité par million d’habitants, la France se classe 176ème sur 197 pays ?

    Les comparaisons internationales nous apprennent que l’État français aurait très bien pu, par exemple :

    • contrôler ses frontières nationales par la preuve de tests négatifs au Covid-19, comme quasiment tous les autres pays du monde ;
    • offrir des masques FFP2 aux plus âgés et/ou plus fragiles, comme en Allemagne ;
    • mettre en place des tests massifs de la population pour n’isoler que les personnes malades, comme beaucoup de pays asiatiques l’ont fait, à commencer par Taïwan ;
    • ne confiner que les plus âgés ;
    • encourager les molécules ou les compléments alimentaires diminuant la mortalité de la Covid-19 au lieu de les combattre ou les ignorer ;
    • accélérer la vaccination de ceux qui le souhaitent ;
    • rouvrir, et non fermer des lits d’hôpital ;
    • etc.

    De ce fait, compte tenu des forts doutes qui existent sur la pertinence des mesures prises par le gouvernement français pour lutter contre cette épidémie, tous les chefs d’entreprise de France sont fondés à demander rapidement des comptes à l’État sur sa gestion de la crise devant les tribunaux administratifs, pour commencer.

    Il appartiendra à l’État de prouver que les mesures restrictives majeures qu’il a prises à l’encontre de la liberté d’entreprendre et de commercer s’appuient bien sur des preuves scientifiques de leur efficacité et de la bonne prise en compte de la balance bénéfices/risques.

    Si l’État français se révèle incapable de prouver – études scientifiques à l’appui – la pertinence de ces mesures de confinement et autres couvre-feux, il devra sans délai indemniser le préjudice subi par les entreprises, ses dirigeants, ses actionnaires, ses salariés, et surtout cesser immédiatement sa politique pour en mettre une autre en place, plus appropriée.

    Alors, chefs d’entreprise, si vous ne souhaitez pas que 2021 se répète à l’identique de 2020 et que vous et vos salariés ne finissiez pas bientôt au Revenu universel en cours d’étude à l’Assemblée nationale, fédérez-vous vite et mandatez un avocat !

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      Macron, président d’une France pauvre mais verte

      Claude Robert · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 14 January, 2021 - 04:30 · 7 minutes

    France

    Par Claude Robert.

    Macron, ou l’air pur des sommets

    Tandis que la France souffre d’une sévère crise sociale et industrielle, Emmanuel Macron veut « faire converger les enjeux climatiques et la préservation des écosystèmes » lors du troisième One Planet Summit dont il est lui-même à l’initiative.

    Il serait presque malvenu de rappeler quelques principes moraux de base. Il paraîtrait pourtant immoral d’imposer des contraintes de dépollution à des pays en voie de développement. Il est en effet relativement aisé de comprendre que ces pays pauvres font face à des priorités autrement plus urgentes : assurer une vie décente à leur population en termes de santé, d’alimentation, d’instruction, de sécurité, en un mot, de niveau de vie. La moindre des choses consiste à leur donner du temps et des moyens pour les aider dans leur lutte contre la pauvreté.

    Plus prosaïquement, pour reprendre un exemple de la vie courante, on ne va décemment pas ennuyer un SDF dans la rue sous couvert qu’il pollue le trottoir. On ne peut pas non plus décemment exiger que les personnes en situation précaire qui ont du mal à joindre les deux bouts roulent avec des voitures propres dernier cri. Les obliger serait tout simplement immoral car antisocial.

    Exactement de la même façon, on ne comprendrait pas qu’un pays en voie d’appauvrissement et en proie à de sérieux problèmes se consacre en premier lieu à la lutte contre un prétendu réchauffement climatique et qu’il s’auto-inflige de nouvelles contraintes.

    Alors que dire si ce pays lui-même se rêve en parangon de la discipline écologique et souhaite montrer la voie ? Par quel renversement des valeurs l’Hexagone se débrouille-t-il pour jouer le héraut de la « préservation des écosystèmes » lors de ce dernier One Planet Summit du 11 janvier, sommet dont il est lui-même à l’initiative ( Le Monde du 11 janvier 2021) ?

    Notre pays n’aurait-il pas des problèmes autrement plus pressants à résoudre ?

    Ce décalage quasi schizophrénique entre la situation de la France et le rôle que tente de lui faire jouer son président sur le plan international forcément interpelle.

    Des chiffres qui devraient faire peur

    La France d’aujourd’hui, c’est toujours 1 % de la population mondiale, ce n’est hélas plus que 3 % de l’industrie mondiale contre 7 % il n’y a même pas 30 ans, et c’est accessoirement 15 % des transferts sociaux de la planète ! On se doute qu’une telle configuration n’est en aucune façon soutenable, et finira par nous retomber dessus tel un méchant boomerang.

    Angela Merkel n’a pas oublié de brandir ce genre de comparaison pour alerter il y a quelques années ses concitoyens, alors même que notre voisin qui avait à peu près la même part du marché industriel mondial que la nôtre a vu celle-ci progresser depuis, et affiche des ratios beaucoup moins déséquilibrés !

    Un tel gouffre entre niveau de vie et ressources en déclin est bien évidemment explosif et se paie au prix :

    • d’un recul régulier de la richesse par habitant, ce fameux PIB per capita (en parité de pouvoir d’achat). Ne rêvons plus, la France se trouve actuellement reléguée à la 26ème place (source IMF/WEO octobre 2020) et recule régulièrement ;
    • d’une augmentation concomitante de la dette de l’État , dette dont une partie sert paradoxalement à financer le traitement de la douleur que le déclin économique génère, au préjudice des réformes qui elles seules seraient en mesure de stopper celui-ci, mais qui ne sont pas engagées ;
    • d’un accroissement de la pression fiscale , sa diminution devenant mécaniquement impossible compte tenu du coût du traitement social du chômage et du poids des intérêts de la dette.

    La France, une absence totale de réforme de fond

    Les maux dont souffre la France sont parfaitement identifiés et tiennent à deux boulets dictés par une gouvernance hyper étatique : un excès de prélèvements obligatoires et un excès de réglementations. Il ne fait pas bon d’entreprendre en France, ni de risquer du capital. Les entreprises y sont moins rentables qu’ailleurs en Europe. Elles recrutent moins et se développent moins, ce qui alimente chômage et précarité.

    Il y a longtemps qu’économistes et experts appellent de leurs vœux une réforme de l’État , mais en vain. Malgré des promesses tonitruantes du gouvernement Macron, la simplification du mille-feuilles réglementaire et une baisse des impôts généralisée, y compris pour les entreprises, se font toujours attendre.

    La réformette du droit du travail représente certes un progrès mais ne peut rien face au déluge de contraintes et de taxes étatiques. Quant au prélèvement à la source , il apparaît au contraire comme une monumentale provocation de la part d’un président qui n’a strictement rien entrepris pour libérer l’économie mais qui verrouille un peu plus la collecte des impôts afin d’assurer la poursuite de cette hyper gouvernance étatique qui nous ruine à petit feu.

    La France, un État aussi boursoufflé que peu réactif

    À ces difficultés économiques déjà anciennes et qui se sont particulièrement aggravées depuis la présidence Hollande s’ajoute une crise morale d’un genre nouveau, dans laquelle le gouvernement Macron possède une part non négligeable de responsabilité. Que ce soit en matière de sécurité , vis-à-vis des actes de terrorisme et de vandalisme , ou en matière de prévention contre la pandémie , force est de constater que l’État français ne brille ni par son efficacité ni par sa transparence.

    Le manque de masques, de tests , et à présent de vaccins, le tout sur fond de polémiques et d’accusations de mensonges officiels, résume parfaitement le niveau d’incurie actuel. Les mesures de confinement partiel ou total décrétées trop tardivement et sans discernement afin de compenser un manque patent d’organisation, ont généré une récession qui accélère même le recul du pays !

    La France, un président au destin de sauveur de la planète

    Comme Hollande qui osait donner des leçons de bonne gestion à l’Europe tout en générant jusqu’à 1 135 000 nouveaux chômeurs en plein boom post crise bancaire, Macron fait montre d’initiatives tout aussi renversantes à l’international.

    Sur le plan économique, les conseils du président français se résumaient récemment en ces termes : « endettons-nous, et laissez-nous nous endetter encore plus » , celui-ci allant jusqu’à ironiser quant au prétendu « fétichisme de l’excédent budgétaire » allemand ! Toutefois, le combat écologique élyséen semble d’une autre nature car il consiste paradoxalement à vouloir imposer des contraintes additionnelles communes. Rappelons-nous d’ailleurs que la révolte sociale des Gilets jaunes, qui a pris sa source dans la limitation à 80 km/h et l’excès de taxes, s’est soldée par une improbable Convention pour le Climat . Une convention capable, dès sa première réunion, de proposer une limitation de la vitesse sur autoroute et de nouvelles obligations environnementales !

    Comme chacun sait, par les temps qui courent, seuls les pays en parfaite santé financière et sociale sont capables d’encaisser des contraintes supplémentaires. Certainement pas la France qui d’ailleurs ne représente que 1 % des émissions de carbone de la planète ! Quelles sont donc les motivations du président pour s’enticher de la sorte ? Souhaite-t-il cultiver son électorat bobo et altermondialiste ? Faire diversion de l’échec de son mandat ? Se préparer un destin historique mondial ?

    Que le prince Charles, également membre du One Planet Summit , se consacre tant qu’il le souhaite à l’aquarelle et à l’écologie ne pose pas de problème particulier. Mais que le président Macron se découvre un rôle messianique planétaire et semble prêt à y sacrifier une partie des moyens de son pays est autrement plus dangereux. Une telle passion ne peut se faire qu’au préjudice de la gestion domestique et des réformes structurelles tant nécessaires.

    Encore une fois, les chômeurs et les laissés-pour-compte attendront, leur nombre risquant même de se développer plus vite sous l’effet des handicaps que notre président tente d’imposer sous couvert d’écologie !

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      Reconfinements locaux : en mesurons-nous les conséquences ?

      Jonathan Frickert · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 15 October, 2020 - 03:30 · 9 minutes

    reconfinements locaux

    Par Jonathan Frickert.

    Nous connaissions les vents d’ouest, Jean Castex vient d’inventer le vent d’est. Difficile de ne pas y voir l’illustration d’un gouvernement avançant à contre-courant, car après Nice et Marseille le mois dernier, les restrictions touchent désormais l’ouest du Midi. Montpellier et Toulouse sont ainsi à leur tour touchés par de nouvelles restrictions après avoir été placés en zone d’alerte maximale ce mardi.

    Si hier, c’était la carte des contaminations que beaucoup scrutaient, comme les avancées de l’ennemi en temps de guerre, c’est bien l’avancée du nombre de territoires touchés par des restrictions qui frappe aujourd’hui les esprits, atteignant désormais l’ouest du pays. Des avancées qui rappellent largement les lignes ennemies des grands conflits militaires, à la manière du « nous sommes en guerre » assené en mars par le chef de l’État, alors que le pays se préparait à être confiné durant près de deux mois .

    Une perspective funeste, mais que Jean Castex n’exclut pas, invité ce lundi sur France Info pour évoquer les nouvelles mesures prises par le gouvernement pour endiguer l’épidémie.

    Difficile de ne pas s’inquiéter de ces mesures lorsqu’on connaît leur inefficacité et surtout les conséquences d’un confinement national dont les démembrements locaux n’inspirent guère d’optimisme.

    Une hésitation désormais coutumière

    « On sait ce qui va se passer dans les 15 jours », a asséné le Premier ministre, quelques secondes seulement après avoir reconnu que les services de l’État ont été incapables de prédire l’ampleur de ce qui s’apparente désormais à une deuxième vague.

    Ayant échoué dans sa stratégie d’endiguement associant dépistage et traçage, notamment en raison du flop complet de l’application StopCovid dont une nouvelle version sera présentée le 22 octobre, mais qu’il avoue lui-même ne pas avoir téléchargé, le Premier ministre a évoqué un nouveau conseil de défense et de sécurité nationale courant de semaine, basé sur les données récoltées ce lundi afin d’envisager de potentielles nouvelles annonces au début de la semaine prochaine, et notamment des reconfinements localisés dans les zones les plus touchées.

    Sans exclure la perspective d’un nouveau reconfinement, le Premier ministre a reconnu qu’il lui était impossible de restreindre les espaces privés, en particulier depuis la décision du Conseil constitutionnel du 11 mai dans laquelle les Sages ont exclu les locaux à usage d’habitation du champ des restrictions , mais pas les baptêmes, enterrements et autres événements religieux restreints sur la Côte d’Azur et qui, sans être juridiquement des espaces privés, concernent les familles dans l’intimidité de leur pratique religieuse.

    À l’appui de ses déclarations, Jean Castex a notamment rappelé que la crise allait encore durer plusieurs mois, tout en oubliant d’évoquer qu’il s’agit en réalité de l’objectif des autorités depuis le début de l’épidémie.

    En effet, difficile de ne pas se souvenir de l’appel du gouvernement en février et mars à un comportement permettant « d’aplatir la courbe », sous-entendu de permettre de lisser dans le temps le nombre de cas afin de soulager nos services sanitaires.

    Tel est bel et bien le cœur de ces restrictions que la soutenabilité de notre système de santé justifie en grande partie, sans pour autant parvenir aux résultats escomptés.

    Des mesures inutiles

    Parmi les mesures envisagées : des couvre-feux à compter de 20 heures dans les principaux foyers de contamination, en particulier dans les grandes villes du sud-est du pays, avec toujours le même ciblage des bars et restaurants, jugés responsables de nombreuses contaminations.

    Pourtant, l’impact de ces lieux sur la propagation du virus n’est en rien démontré. Comme le notait le docteur en épidémiologie Pascal Crépey dans la Voix du Nord , « On n’a pas d’étude épidémiologique sur ces lieux », les études publiées se limitant à une distinction entre sphère privée et sphère professionnelle , dans laquelle les bars et restaurants sont en fin de podium, largement derrière l’industrie alimentaire et les transports, mais à quasi-égalité avec l’administration publique ou les activités sportives.

    De quoi renforcer l’idée que l’équilibre entre l’efficacité sanitaire et la limitation des freins économiques et sociaux est loin d’être trouvé, renforçant l’opinion selon laquelle la seule solution est une fermeture totale de tous les lieux recevant du public. Au regard des conséquences des mesures déjà prises depuis mars, cette perspective est impossible, aussi bien moralement qu’économiquement et surtout socialement.

    Des reconfinements locaux, pas de confinement total

    Blocage des recrutements, hausse du chômage, baisse historique du produit intérieur brut, augmentation du déficit et de la dette publique qui ferait même pâlir un keynésien… si les conséquences économiques sont largement rappelées depuis six mois, d’autres effets des mesures de restriction et de confinement sont largement passés sous le tapis.

    Pourtant, les conséquences sociales et psychologiques de ces limitations sont loin d’être négligeables.

    Des conséquences bien comprises et notamment par le Conseil d’État. Fin mars, il a été saisi d’un référé-liberté par plusieurs syndicats de médecins qui estimaient les mesures gouvernementales trop laxistes et portant atteinte au droit à la vie. Ces organisations syndicales exigeaient un confinement total incluant une interdiction de sortie et un ravitaillement des populations.

    Ce recours a été rejeté par la juridiction administrative en partie pour des questions de moyens humains et matériels à mettre en œuvre, mais également au nom de la santé. Dans son ordonnance du 22 mars, le Conseil d’État a ainsi rappelé le risque pour la santé mentale des Français que représenterait un confinement d’une telle intensité.

    Une explosion de la pauvreté

    En effet, le confinement ainsi que les différentes mesures de restrictions qui ont depuis suivi se focalisent sur une limitation des interactions sociales et de l’activité physique, en particulier après la polémique relative à la pratique du jogging en mars dernier.

    Depuis cette époque, plusieurs études ont montré les conséquences sociales et psychologiques de ces mesures.

    Il en est ainsi de l’explosion de la pauvreté dans l’Hexagone. L’économie d’un pays étant sa santé, lorsque celle-ci s’effondre, le reste fait de même. On le voit tous dans nos vies et c’est particulièrement vrai ici, puisque depuis février, un million de Français ont basculé dans la pauvreté .

    Le confinement est une violence psychologique

    À cette hausse de la détresse sociale succède une hausse des violences, psychologiques d’une part, avec par exemple une augmentation des revenge porn , mais également un renforcement des violences physiques et notamment du fléau des violences conjugales qui ont ainsi augmenté de 30 % à la fin du mois de mars.

    Sur le plan psychologique, certains psychiatres notent les conséquences d’un isolement déjà massif chez certaines catégories de population comme les personnes âgées, d’autant plus impactées que principales victimes du virus.

    Si les défenseurs de la liberté promeuvent celle-ci pour des raisons morales ou d’efficacité, la nécessité psychologique et biologique de liberté s’est manifestée encore une fois durement durant le confinement. De la même manière que l’univers carcéral, par la privation de liberté qu’il induit, crée des troubles psychiatriques notoires, la privation de liberté que constitue le confinement provoque à son tour un certain nombre de problèmes de cet ordre.

    Comme le notait la psychologue clinicienne Johanna Rozenblum en juin dernier, l’obligation « de rester à domicile n’est naturel pour personne », la liberté étant un besoin pour chaque individu , et en particulier celle consistant à avoir des relations sociales.

    Le confinement est en cela parfaitement antinaturel, frappant de plein fouet à la fois le besoin de liberté et celui d’être entouré.

    Dans le même sens, Libération constatait le mois dernier l’augmentation des cas d’insomnie et d’épisodes anxieux liés à l’épidémie.

    À cela s’ajoutent des conséquences interpersonnelles que chacun constate sans que personne ne puisse vraiment les évaluer : tous les jours, en menant tout simplement votre vie, il est possible, voire même très probable, que vous fréquentiez des personnes positives au Covid, sans naturellement qu’elles en soient conscientes.

    Renforcée par les rappels récurrents du gouvernement, cela renforce l’idée qu’il faille se méfier de tout le monde. S’il est régulièrement reproché à tort aux défenseurs de la liberté de vouloir créer des individus asociaux , la réalité saute une nouvelle fois aux yeux lorsqu’on voit la société de défiance que nous prépare l’actuel gouvernement.

    Un dépeçage inutile de la vie sociale

    En voulant lisser dans le temps le nombre de patients en réanimation, le gouvernement procède à un dépeçage en règle de la vie économique et sociale de ce pays, avec des conséquences que beaucoup ne parviennent pas encore à mesurer.

    Entre tenter d’avoir une vie normale tout en appliquant strictement certaines précautions dans nos rapports aux autres et restreindre la vie économique et sociale, le choix de gestion relève d’un choix de société sans précédent, dépassant largement les limites de l’Hexagone voire du continent européen, l’actuelle campagne présidentielle américaine se jouant aujourd’hui largement sur la question.

    Dans ce sens, et à moins de deux ans de la prochaine élection présidentielle française, et si tant est que celle-ci soit maintenue au regard de la situation sanitaire du pays, la question électoraliste est loin d’être dénuée d’intérêt.

    L’élection présidentielle étant affaire d’incarnation, il y a fort à parier que la cacophonie qui frappe l’exécutif soit également liée à l’image de mauvais gestionnaire collant désormais à la peau du président de la République, de la même manière que l’actuel locataire de la Maison Blanche, auparavant incarnation d’un rêve américain perdu, se retrouve désormais être celle des affres de la crise sanitaire.

    Reste à savoir comment Emmanuel Macron parviendra à se débarrasser de cette image durant les 18 mois qui nous séparent de la prochaine élection présidentielle.

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      Covid-19 : la politique keynésienne nous a affaibli devant la crise qui vient

      Foundation for Economic Education · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 19 May, 2020 - 03:30 · 12 minutes

    Keynes

    Par Mark Hornshaw.
    Un article de la Foundation For Economic Education

    « Il y aura de plus un grand avantage à l’ordre des choses que je défends dans le fait que l’euthanasie du rentier , de l’investisseur inutile, ne sera aucunement soudaine, mais une continuation graduelle et prolongée de ce que nous avons vécu récemment en Grande Bretagne, et nous n’aurons pas besoin d’une révolution. »

    Ce sont les mots de John Maynard Keynes dans sa Théorie Générale de 1936. Ce que la Grande Bretagne avait récemment vécu à cette époque était la grande dépression.

    Keynes utilise le mot français rentier pour exprimer son dédain du genre de personne que Henry Hazlitt décrit comme « l’horrible individu qui économise un peu d’argent et le met sur un compte épargne. Ou alors il achète une obligation de United States Steel. » L’œuvre de Hazlitt, L’échec de la nouvelle économie , est la meilleure source qui soit si vous voulez vraiment comprendre Keynes.

    Un monde sans entrepreneurs

    Bien que Keynes emprunte à la langue française lorsque ça l’arrange, il y a un autre mot français que vous ne trouverez pas dans sa Théorie Générale : l’ entrepreneur. Keynes voit le monde en termes de macro agrégats . Dans son modèle le « capital » est homogène et toute « quantité » de ce capital qui existe au moment présent est considérée comme donnée ; de même pour le « travail ».

    Dans le modèle keynésien il n’y a pas de procédé au cours du temps (intertemporel) pour calculer, choisir et produire les formes particulières de capital d’équipement qui permettent de produire des biens et services qui plaisent aux consommateurs. S’il n’y a pas de diversité dans les biens d’équipement, pas de structure de la production, pas d’orientation d’avenir ni de choix, alors il n’y a pas besoin de l’entrepreneur.

    Alors, lorsque Keynes observe dans le monde réel des personnes qui n’ont pas de rôle dans son modèle imaginaire (par exemple les entrepreneurs), il les dépeint comme des fardeaux sans valeur pour la société et il défend des politiques qui visent à les éliminer (et, en tant que Président de la Société britannique d’eugénisme, l’élimination des indésirables n’était pas confinée à la sphère économique).  Keynes à nouveau :

    « [L’] euthanasie du rentier [signifierait] l’euthanasie du pouvoir croissant d’oppression du capitaliste qui exploite la valeur de rareté du capital. L’intérêt de nos jours ne récompense aucun authentique sacrifice, pas plus que ne le fait le loyer de la terre. Le propriétaire du capital peut obtenir un intérêt car le capital est rare, de même que le propriétaire de la terre peut obtenir un loyer car la terre est rare. Mais, bien qu’il puisse y avoir des raisons intrinsèques à la rareté des terres, il n’y a pas de raison intrinsèque à la rareté du capital… »

    L’équipement en capital ce sont des biens de production – des usines, des avions, des camions, des ordinateurs, des tournevis, des machines à expresso, etc. Le mot capital est quelquefois utilisé de sorte qu’il inclut l’argent disponible pour acheter des biens de production.

    Le capital n’est pas rare

    Si vous prenez le dernier sens, plus large, le capital semble ne pas être rare, puisque la monnaie fiat peut être créée à volonté par les banquiers centraux. Mais les véritables biens d’équipement tangibles dont vous avez besoin pour produire de véritables biens et services sont évidemment rares. On ne peut pas les produire instantanément d’un clic de souris. Et la nature des biens d’équipement disponibles est clairement importante – préférez-vous une usine de machines à écrire ou une usine de microélectronique ?

    Une fois choisie la sorte de biens d’équipement que vous préférez, il vous faut avancer dans le temps. Pendant le temps consacré à produire ces biens d’équipement, vous devez faire un sacrifice – vous devez sacrifier la possibilité de consommer dans le temps présent , afin de vous concentrer à produire des machines qui produiront des biens de consommation dans un futur lointain.

    Imaginez Robinson Crusoé naufragé sur une île.

    Il rêve peut-être de construire un fort, un canot, un filet de pêche, un champ de blé et bien d’autres projets à long terme – des projets d’équipement. Avant de pouvoir commencer ces projets il a d’abord besoin de fabriquer une hache, une pelle, et ainsi de suite, selon une longue séquence de production. Mais ces projets à long terme prennent du temps et il est affamé, assoiffé, glacé et en danger maintenant. Tous les efforts consacrés à ces objectifs de long terme sont faits au détriment des efforts de satisfaction de ses besoins immédiats de consommation.

    Contrairement à l’affirmation de Keynes, le capital est authentiquement rare et il exige d’authentiques sacrifices.

    Dans une société plus complexe comme la nôtre, nous pouvons profiter de la division du travail . Cela n’enlève pas la rareté des biens d’équipement ni le besoin de sacrifier la consommation immédiate pour les produire. Mais cela signifie que certains peuvent volontairement faire ce sacrifice, évitant ainsi aux autres de le faire.

    La plupart des travailleurs veulent être payés immédiatement, avant que les produits finis soient prêts pour la vente et peu importe qu’ils soient vendus un jour avec ou sans bénéfice. Par contre les entrepreneurs sont des gens qui ont épargné des ressources qu’ils ont décidé de ne pas consommer mais de les utiliser pour payer des travailleurs en espérant faire des bénéfices un jour. Cet arrangement convient aux deux parties selon leur préférence. Comme John Stuart Mill l’a fait remarquer en 1848 :

    « Quelqu’un qui achète des marchandises et les consomme lui-même n’apporte rien aux classes laborieuses ; c’est seulement par ce qu’il s’abstient de consommer et qu’il dépense en rémunération directe de travailleurs en échange de leur travail qu’il apporte quelque chose aux classes laborieuses ou qu’il ajoute quelque chose au total de leurs emplois. »

    Les entrepreneurs supportent l’incertitude du marché, ils font confiance à leurs prévisions et consacrent des ressources aux secteurs d’activités pour lesquels ils anticipent une demande.

    Mais que se passe-t-il si quelqu’un possède cette vision entrepreneuriale mais pas les ressources épargnées ? C’est précisément pour cela qu’il y a l’intérêt.

    Le taux d’intérêt à zéro

    L’intérêt permet à une personne d’épargner et à une autre d’accéder à ces fonds épargnés pour les investir dans des activités profitables. Le taux d’intérêt , lorsqu’il n’est pas manipulé par des banquiers centraux, est le moyen par lequel la société détermine le prix du sacrifice qui consiste à attendre. Comme Mises l’a expliqué dans L’Action humaine, cet « intérêt originel » ne peut jamais être éliminé. Un taux d’intérêt originel de zéro signifierait que les gens acceptent indifféremment d’être payés tout de suite ou dans un million d’années. Mais comme nous sommes tous des êtres limités dans le temps, une telle situation est inimaginable dans notre monde.

    Alors que signifie un banquier central lorsqu’il déclare « nous abaissons les taux d’intérêts à zéro » ?

    La banque centrale n’a pas de moyen magique pour que les individus apprécient indifféremment que leur satisfaction soit immédiate ou future. Mais ils peuvent manipuler artificiellement le taux d’intérêt du marché en étant prêts à injecter autant de monnaie supplémentaire et de crédit dans « l’économie » (via leurs complices bien entendu) pour satisfaire la demande d’emprunts à ce taux. Comme ils peuvent le faire avec des fonds nouvellement créés il n’y a besoin d’aucune incitation pour que les épargnants satisfassent la demande avec leur épargne. Les emprunteurs peuvent emprunter ce que personne n’a épargné. Le « rentier » est « euthanasié ».

    Alors, quel est le problème ?

    Le problème c’est que Crusoé ne veut pas juste une « représentation » de biens d’équipements, il veut un vrai canot. Les banques centrales peuvent faire illusion pour que les gens « dépensent » de l’argent dans des projets d’investissements en l’absence de véritables ressources épargnées, mais ils ne peuvent pas créer par magie ces véritables ressources épargnées. Keynes le savait mais il s’en moquait :

    « Le chômage se développe, disons, parce que les gens demandent la lune ; on ne peut pas employer des hommes lorsque l’objet du désir (par exemple l’argent) est quelque chose qui ne peut pas être produit et dont la demande ne peut pas être rassasiée facilement. Il n’y a pas de remède, hormis en persuadant le public que la lune est faite de fromage et en ayant une usine de fromage (c’est-à-dire une banque centrale) contrôlée par l’État. »

    L’interprétation de Hazlitt :

    « La théorie qui sous-tend ce paragraphe est que le public est irrationnel, qu’on peut lui faire croire ce qu’on veut et que l’objet de l’État est d’être aux commandes de l’escroquerie. »

    Mais peu importe que l’État pense que nous sommes naïfs, ou qu’il soit créatif dans sa manière de nous abuser, le fromage de Keynes (c’est-à-dire la monnaie créée) n’est pas la même chose que les véritables ressources que veulent les gens et pour lesquelles ils travaillent dur. L’escroquerie conduit à une explosion artificielle de la dépense suivie d’un effondrement, ce qui a pour effet de consommer et d’assécher le capital.

    La monnaie est une créance sur de véritables ressources, donc le fait d’en imprimer transfère une partie de cette créance à ceux qui reçoivent cette monnaie nouvelle, aux dépens de ceux qui ont travaillé dur pour les accumuler. Un commentateur astucieux sur un réseau social a récemment ironisé « on se crève à bosser toute l’année pour 30 000 dollars alors qu’un banquier central clique sur un bouton de souris et crée 2 000 000 000 000 dollars. » Chacun de ces dollars mis au monde d’un simple clic a le même pouvoir d’achat que les dollars pour lesquels on a travaillé dur. Pourquoi travailler dur ?

    Ludwig von Mises a résumé Keynes comme ceci :

    « Et alors, vraiment très tardivement, même les gens les plus simples découvriront que Keynes ne nous pas appris le ‘miracle… qui consiste à transformer une pierre en pain’, mais le procédé pas du tout miraculeux qui consiste à manger son blé en herbe. »

    Dans un environnement où le taux d’intérêt est manipulé, plutôt que d’épargner et d’accumuler des ressources, chacun veut profiter des largesses de l’État et de la banque centrale, en mangeant le blé en herbe du voisin, de peur qu’il le mange le premier.

    En 2020 le monde est entré dans une situation de fermeture imposée par les États qui va plonger les économies dans une grave récession . La situation est largement aggravée par les décennies de politiques économiques keynésiennes qui ont précédé.

    L’économie keynésienne en 2020

    Cet élément déclencheur du côté de l’offre arrive à un moment où les taux d’intérêts ont déjà été artificiellement réduits presque à zéro pendant dix ans ou plus dans de nombreux pays. Dans un tel environnement, seuls des fous ont voulu épargner et tout le monde – ménages, entreprises et administrations – a emprunté à mort alors que le crédit était peu cher et abondant. Le monde est donc entré dans cette crise du coronavirus avec pratiquement aucun matelas d’épargne, avec des firmes et des employés qui vivent au jour le jour sur une montagne de dette.

    Une telle économie n’a aucune résilience face au moindre choc. Des entreprises sans le sou ne peuvent pas payer les salaires, donc des locataires sans le sou ne peuvent pas payer leur loyer, et donc des propriétaires sans le sou ne peuvent pas rembourser leurs emprunts, ce qui signifie que des banques sans le sou ne peuvent pas rester solvables, à moins d’une aide des États. Mais que se passe-t-il si les États aussi sont sans le sou ?

    Les États essaient de rassurer les électeurs : personne ne manquera d’aide. Ne vous inquiétez pas cher électeur, le fardeau sera transféré ailleurs, pas sur vous. Mais qui est cet autre ? Il ne reste personne pour fournir des aides. Nous sommes entrés dans la crise du coronavirus dans une situation économique où le rentier a déjà été euthanasié et où le blé en herbe a déjà été mangé.

    Le seul « actif » hypothécable qui reste dans la société sont les droits de collecte des impôts futurs par les États. Mais ces droits ont été vendus en millions de petites tranches (les obligations d’État) et les États surendettés en vendent fébrilement de plus en plus. Qui peut acheter ces obligations si plus personne n’a d’épargne en réserve ?

    La seule chose qui reste aux États est de faire semblant d’acheter leurs propres obligations en imprimant de plus en plus de monnaie pour eux-mêmes. Mais plus ils s’engagent dans cette voie apparemment aisée, moins il est motivant pour qui que ce soit de travailler pour vivre. Si les gens ne produisent pas de véritables biens et services pour que les États les achètent, leur monnaie fiat est sans valeur. Chacun reçoit un bon en or, mais il n’y a pas de chocolaterie.

    Voilà le monde que Keynes voulait et que ses protégés de la planification centralisée ont produit en masse.

    Bien joué, Monsieur Keynes.

    Traduction Contrepoints.

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      Emmanuel Macron : trois ans de présidence et beaucoup de dégâts

      Claude Robert · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Saturday, 16 May, 2020 - 03:45 · 8 minutes

    Emmanuel Macron

    Par Claude Robert.

    Même avant d’être élu président, Emmanuel Macron s’est distingué en conseillant François Hollande sur la fiscalité puis en devenant son ministre des Finances. Avec les résultats que l’on sait. Le bilan ici dressé couvre d’ailleurs l’ensemble de cette période. Voici les faits.

    La France, seul pays à avoir manqué la reprise d’après crise bancaire

    Alors qu’en fin de crise économique il est impératif de laisser les ménages et les entreprises se refaire une santé, François Hollande décide d’augmenter fortement la pression fiscale .

    À l’époque, Macron est l’un des responsables de sa cellule économique puis devient son ministre des Finances, jusqu’au mois d’août 2016. Macron est naturellement considéré comme co-responsable de cette erreur contra-cyclique dont les conséquences vont se révéler funestes.

    Alors que l’économie mondiale repart sur les chapeaux de roues, le seul pays européen qui ne bénéficie pas de ce rebond est la France. Quelques chiffres donnent une idée de l’ampleur des dégâts : pendant le mandat de Hollande, la France voit son nombre de chômeurs s’accroître de +1,132 millions tandis que les Allemands et les Anglais en perdent respectivement -500 000 et -400 000. Le nombre d’emplois précaires augmente de 700 000 alors qu’il reste stable chez nos voisins. Les salaires reculent de -2,1 % par rapport à ceux de nos voisins.

    Quant à la dette publique, elle flambe de +4,1 % par rapport à la moyenne européenne. Appelons un chat un chat : ce bilan est une véritable débâcle sociale pour le pays.

    Un an et trois mois de révolte des Gilets jaunes

    Depuis qu’il est président, Macron aura soulevé la rue, les Gilets jaunes en l’occurrence, sur une durée record de 65 semaines, à raison d’un blocage des principaux centres urbains et de nombreux péages autoroutiers les samedis 1 , battant le triste record d’Alain Juppé.

    Déclenché par l’anachronique limitation à 80 km/h , perçue comme du racket pur et dur, puis renforcé par les hausses de taxes notamment sur les carburants, ce mouvement protestataire révèle à grande échelle un climat social terriblement dégradé.

    Car à la différence des grèves conduites par les syndicats d’extrême gauche arcboutés sur la défense pavlovienne des privilèges de certaines corporations de fonctionnaires, les Gilets jaunes sont issus de la vraie vie . Celle dans laquelle travailleurs du privé et petits entrepreneurs luttent tous les jours contre une pression fiscale de plus en plus confiscatoire . Celle dans laquelle les chômeurs et les laissés pour compte se débattent avec de moins en moins d’espoir.

    N’étant pas du bon côté, les Gilets jaunes n’auront bénéficié d’aucune pitié de la part d’un Macron qui leur répondra au contraire avec une brutalité inouïe. Une brutalité qui incitera Amnesty International à lancer une alerte pour « de nombreux cas de recours excessifs à la force » contre les manifestants (le 17/12/18). Une brutalité qui incitera également le Conseil de l’Europe à demander au gouvernement l’arrêt de l’utilisation des LBD (le 26/02/19).

    De multiples plaintes ont été déposées contre le gouvernement et la police à l’occasion de violences qui ont fait au total plusieurs centaines de blessés graves et pas moins de 8500 interpellations 2 .

    Incapable de calmer les émeutes, Macron les aura même exacerbées par des déclarations malheureuses, en particulier celle prononcée à l’arrivée du Tour de France : « on a commencé l’année avec les Gilets jaunes, on l’a finie avec le maillot jaune » 3 . Ainsi le président est-il devenu peu à peu l’une des motivations de l’insurrection, un grand nombre de Gilets jaunes réclamant désormais sa tête.

    À ce jour, alors qu’il est sur le point de se relancer maintenant que le confinement a pris fin, ce mouvement de révolte sociale particulièrement solide aura coûté la bagatelle de 2,5 milliards d’euros à la collectivité 4 . Un splendide échec à la fois humain, sociétal et économique.

    La non-réforme ruineuse de la SNCF

    Difficile de faire pire en matière de réforme du mastodonte SNCF , en se mettant à dos dès le départ les syndicats pour pratiquement rien en contrepartie, si ce n’est l’arrêt du recrutement sous statut de fonctionnaires. Ce qui s’apparente à une réforme, le changement de statut de l’entreprise, n’en est en fait que le degré zéro.

    Car strictement rien n’aura permis d’améliorer les méthodes de travail et l’efficience de la SNCF afin qu’elle soit capable d’affronter le marché concurrentiel exigé par la Communauté européenne. C’était pourtant l’objectif escompté…

    Rien que pour la SNCF elle-même, ces 36 jours de grève auront coûté 790 millions d’euros , sans compter les conséquences induites sur l’économie. Un nouveau ratage cinglant dont le pays, hélas, n’avait pas besoin.

    Une tumultueuse réforme des retraites

    La réforme des retraites fournit un autre exemple de la façon dont Macron chef d’État envisage le dialogue social. À force de débats particulièrement opaques et maladroits, le gouvernement Macron a fait l’unanimité contre lui, déclenchant ainsi d’interminables grèves (SNCF, RATP, Air France, trafic aérien, etc.) qui auront paralysé le pays pendant plus d’une quarantaine de jours.

    Au-delà de la rancœur qu’elle aura suscitée et que les citoyens ne sont pas prêts d’oublier, cette longue agonie de réforme qui s’achève momentanément sur un passage en force (49.3) et donc sans le moindre consensus, aura coûté plus de 15 milliards d’euros à l’économie hexagonale , en plus des respectivement 200 et 850 millions d’euros perdus pour la RATP et la SNCF.

    Saluons là aussi un magnifique échec à l’actif du président. Un échec qui risque de se prolonger lorsque la réforme, gelée pour cause de pandémie, reprendra son cours.

    Des résultats économiques constamment inférieurs à ceux de l’UE

    Après avoir totalement manqué le rebond économique post crise bancaire, la France du président Macron conforte des résultats systématiquement moins bons que ceux de l’UE (28 pays) en matière de croissance, de taux de chômage, de prélèvements obligatoires et, ô surprise, de dette publique.

    En matière de dette publique, on assiste même à une détérioration, cette même détérioration constatée avec Hollande et qui pose toujours la même question : où passe donc l’argent de l’accroissement de l’endettement s’il n’aide même pas à améliorer les principaux indicateurs économiques que sont les taux de croissance, de chômage et de prélèvements obligatoires ?

    En réalité, malgré des discours trompeurs et un flux ininterrompu de promesses, force est de constater que Macron a échoué sur le plan économique et ne fait que poursuivre , à un rythme simplement moins flagrant, le travail de sape de son prédécesseur.

    Une gestion paradoxale de la pandémie de covid-19

    Dernier ratage en date, il n’en demeure pas moins le plus sordide car il touche non seulement à l’économie du pays, mais à la santé des Français. Et de ce côté-là, le bilan humain est assez dramatique.

    Alors que le confinement a été levé, la population attend toujours l’indispensable campagne de dépistage et les dotations en masques de protection . Macron a imposé un confinement relayé par 100 000 policiers et l’obligation d’un formulaire de justification de déplacement digne d’une dictature. Mais il n’a pas brillé par les mesures de prévention, celles qui pouvaient éviter à la fois un nombre important de décès et un arrêt quasi généralisé de l’économie.

    Il suffisait pourtant de considérer la façon dont les pays asiatiques (en avance sur le cycle de la contagion) les plus performants s’y sont pris pour connaître les bonnes pratiques à observer : dépistage de masse , port de masque généralisé, toutes ces mesures de bon sens tellement efficaces qu’elles ont même parfois permis d’éviter le confinement de la population.

    Pire, la communication du président, de son ministre de l’Intérieur et de la porte-parole du gouvernement aura été à la fois paradoxale et dangereuse en ce qui concerne le port du masque. À tel point que le Premier ministre ainsi que l’ancienne puis le nouveau ministre de la Santé ont fait l’objet de plusieurs plaintes en justice notamment de la part d’un collectif de plus de 600 médecins. Les motifs évoqués dans ces recours, mensonges et mise en danger des personnes, sont révélateurs du niveau de défiance actuellement atteint vis-à-vis du gouvernement.

    La France se situe dans le top 7 mondial du nombre de décès par millions d’habitants. On compte à ce jour 5 27 425 morts du coronavirus, soit 420 morts par million d’habitants. Un chiffre 4,4 fois plus élevé que chez nos voisins allemands, pour ne citer qu’eux.

    Avec, en prime, la plus forte récession européenne, double conséquence du confinement non ciblé et de la très rapide et paradoxale incitation au chômage partiel 6 , ces deux mesures imposant une mise en rideau radicale et plus forte que nécessaire de l’économie du pays ! Un fiasco de plus.

    Les leçons à tirer pour nous citoyens

    On peut toujours espérer d’un peuple qu’il considère enfin les actes plutôt que les promesses, enfin les résultats plutôt que les discours. Le bilan est là, dans toute son âpreté. Il est essentiel qu’il soit connu de l’ensemble des citoyens…

    Sur le web

    1. Il semble d’ailleurs que la révolte sociale ne s’est interrompue que pour des raisons de pandémie et qu’elle reprendra dès qu’elle le pourra.
    2. Source France TV Infos 16/03/2019.
    3. Emmanuel Macron 25/07/19.
    4. Estimation du gouvernement (RTL 15/11/20).
    5. Worldometer 14/05/20.
    6. Le Figaro 04/05/20.