CINÉMA - C’était la polémique des dernières 24 heures sur la Croisette. Rithy Panh, président de la compétition de films TikTok à Cannes, a fait marche arrière et est redevenu président du jury
au lendemain de sa démission surprise.
Le réalisateur franco-cambodgien a expliqué au HuffPost,
dans la vidéo en tête d’article,
les raisons pour lesquelles il a décidé de changer d’avis quelques heures avant l’annonce des résultats de
cette toute première compétition de vidéos très courtes
, qui se tient en marge du Festival de Cannes.
Après avoir dénoncé des “pressions” du réseau social sur les choix des jurés, il assure avoir obtenu de la part de TikTok des garantis quant à la souveraineté du jury dans ce concours. La cérémonie s’est donc bien déroulée ce vendredi 20 mai en milieu d’après-midi avec un grand absent:
Thierry Frémaux.
Le délégué général du festival de Cannes devait remettre les prix initialement, un geste très symbolique, mais il a finalement annulé sa venue.
“Un pas en arrière” de TikTok
“Nous avions un
grand désaccord sur ce qu’est l’indépendance du jury et sa souveraineté. Lorsque vous n’êtes pas entendu une fois, deux fois, trois fois, au bout d’un moment il faut faire quelque chose”, explique Rithy Panh au
HuffPost
, tout en rappelant qu’il avait alerté les organisateurs depuis plusieurs semaines sur ces problèmes d’indépendance, sans réaction de leur part, d’après lui. “J’ai fait un acte qui était nécessaire de faire à un moment (...) Je crois que TikTok a compris ce qu’était un jury et ils ont décidé de faire un pas en arrière et nous offrir notre indépendance.”
Rithy Panh assure par ailleurs que son geste était soutenu par une partie du jury et que deux autres membres ont aussi présenté leur démission pour les mêmes raisons. Il s’agirait de la réalisatrice sénégalaise Angèle Diabang et de la réalisatrice française Camille Ducellier.
Au cœur de la polémique, un film allemand qui faisait partie de la pré-sélection réalisée par les équipes de TikTok. Celui-ci dénonçait le machisme en inversant les rôles et en faisant vivre à un homme ce que pouvait subir une femme au quotidien. Selon Rithy Panh, le jury qui comptait dans ses rangs
l’influenceur Khaby Lame
, souhaitait récompenser cette création. Problème: elle avait déjà été publiée sur une autre plateforme, Youtube en l’occurrence. Face au non-respect des conditions du concours, TikTok aurait demandé aux jurés de modifier leurs choix.
“Il ne faut pas leur en vouloir non plus, ils (TikTok) sont dans le monde du marketing et de l’industrie. C’est plutôt bien qu’ils s’intéressent au milieu créatif mais il faut apprendre à connaître comment les artistes travaillent, notamment dans le cadre d’un jury pour un festival”, a-t-il ajouté.
Le réalisateur, dont le long-métrage
Les Gens de la rizière
est, en 1994, le premier film cambodgien présenté au Festival de Cannes reprochait aussi à l’organisation de ne pas avoir organisé de rencontres physiques entre les membres du jury avant les délibérations cette semaine à Cannes.
Quatre prix plutôt que trois
Les jurés sont finalement parvenus à un accord et ont pu donner des prix aux films qu’ils avaient choisis. Ils ont récompensé non pas trois films comme cela été initialement prévu, mais bien quatre. Le Japonais Mabuta Motoki et le Slovène Matej Rimanić ont remporté ex-æquo le Grand Prix. Le prix du meilleur montage a été attribué au Néo-Zélandais Tim Hamilton, tandis que le prix du meilleur script a été remis à la Française Claudia Cochet pour son court-métrage contre les violences faites aux femmes.
Par sa présence, Rithy Panh souhaitait surtout “célébrer les créateurs”. Le cinéaste franco-cambodgien se dit “prêt à travailler avec TikTok” pour améliorer le processus de sélection l’an prochain, si l’expérience est renouvelée durant le Festival de Cannes 2023.
À voir également sur Le HuffPost:Le Palais Bulles transformé en paradis des Instagrameurs pendant le Festival de Cannes