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      Exception de copie privée

      Funix · pubsub.eckmul.net / linuxfr · Wednesday, 6 January, 2021 - 14:11 · 7 minutes

    <h2 class="sommaire">Sommaire</h2> <ul class="toc"> <li><a href="#toc-le-contexte">Le contexte</a></li> <li><a href="#toc-que-dit-la-loi">Que dit la loi ?</a></li> <li><a href="#toc-que-dit-la-jurisprudence">Que dit la jurisprudence ?</a></li> <li><a href="#toc-en-guide-de-conclusion">En guide de conclusion</a></li> </ul> <p>'lut nal,</p> <h2 id="toc-le-contexte">Le contexte</h2> <p>J'ai un <a href="https://olivier.hoarau.org/?p=1941">article</a> sur mon blog qui explique comment enregistrer un film d'une box internet sur son PC car pour beaucoup de box ce n'est pas natif et il n'est pas prévu que ça soit possible.</p> <p>Il se trouve qu'on me fait régulièrement la remarque comme quoi ce n'est pas légal. Au travers de ce journal je souhaite donc faire un point actualisé sur la copie privée et ce journal traduit ma compréhension du sujet. Il existe déjà sur linuxfr un certain nombre d'articles sur le sujet mais pas forcément bien développé ou à jour, et je souhaite profiter de toutes les compétences de lecteurs de linuxfr notamment juridiques pour commenter/enrichir/corriger ce journal.</p> <h2 id="toc-que-dit-la-loi">Que dit la loi ?</h2> <p>Ce qu'on appelle l'exception de copie privée est apparue dans la loi n°57-298 du 11 mars 1957. L'<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/article_lc/LEGIARTI000006466389/1992-07-02">article 41</a> nous dit que l'auteur ne peut interdire "Les copies ou reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective". Depuis cette loi a été abrogée mais cette disposition a été codifiée dans le Code de la Propriété Intellectuelle à l'<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGIARTI000037388886/2018-09-07/">article L122-5-2</a>, l'auteur ne peut interdire "Les copies ou reproductions réalisées à partir d'une source licite et strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective". On la retrouve également dans l'<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGIARTI000037388886/2018-09-07/">article L211-3-2</a> pour les droits voisins du même code.</p> <p>C’est à ce titre qu’on pouvait copier des films sur magnétoscope et de la musique sur K7 audio pour les plus anciens qui ont connu cette époque. A vrai dire les choses n'ont pas évoluer même si les moyens techniques de diffusion et d'enregistrement ont beaucoup évolué depuis. D’ailleurs c’est bien au titre de l’exception de copie privée qu’une redevance est prélevée pour les disques durs, mémoire, CD, vidéo K7, mais également smartphone, ordinateurs, box internet, etc. Redevance qui sert ensuite à rémunérer les ayants droits (75%) et financer des actions culturelles (25%) comme l’explique <a href="https://www.copieprivee.org/">ce site</a> consacré à la copie privée. La rémunération pour copie privée fait l’objet des <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGIARTI000025003513/2011-12-22/">articles L311-1 à L311-8</a> du Code de la Propriété Intellectuelle qui précisent bien que la copie privée conduit à la mise en place d'une redevance forfaitaire à l'achat qui dépend du support, de la durée et de sa capacité d'enregistrement. </p> <p>Par ailleurs la <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:32001L0029">directive européenne 2001/29/CE du 22 mai 2001</a> (modifiée par la <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/fr/ALL/?uri=CELEX:32019L0790">directive 2019/790</a>) via l'alinéa 7 de la directive 2019/790 confirme la possibilité de mettre en place des protections pour garantir l'exercice effectif des droits d'auteur mais "tout en veillant à ce que l'utilisation de mesures techniques n'empêche pas les bénéficiaires de jouir des exceptions et limitations prévues par la présente directive". En clair, cette directive oblige les États membres à prendre les mesures appropriées pour garantir le bénéfice de certaines exceptions dont la copie privée.</p> <p>Concrètement la transposition dans le droit français de cette directive dans le Code de la Propriété Intellectuelle (<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000021212222/2009-11-01">article L331-31</a>) a donné comme mission (entre autres) à la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI) de veiller "à ce que la mise en œuvre des mesures techniques de protection n'ait pas pour effet de priver les bénéficiaires des exceptions". Cela comprend bien évidemment l’exception pour copie privée et on peut en conclure que sur la base de cet article l'HADOPI pourrait interdire les éditeurs et distributeurs de services à recourir à des moyens techniques limitant la copie.</p> <h2 id="toc-que-dit-la-jurisprudence">Que dit la jurisprudence ?</h2> <p>Mais les choses ne sont malheureusement pas si simples, il existe une subtilité d'ordre juridique qui a son importance. La copie privée reste une exception légale et n’est pas un droit. En d'autres termes vous ne pouvez pas être poursuivi pour avoir copié un film pour un usage privé en restant dans le cadre de la loi, mais vous ne pouvez pas invoquer cette exception pour poursuivre un distributeur ou un producteur si vous ne parvenez pas à copier un film.</p> <p>A ce sujet la jurisprudence a parfaitement complété la loi au travers de l’affaire “Mulholland drive”. C'est l'histoire d'un mec qui avec l’appui de l’association de défense des consommateurs UFC Que choisir, s'est plaint auprès de la justice qu'il ne pouvait pas copier le DVD du film “Mulholland drive” en invoquant l’exception de copie privé. L’affaire a connu de multiples rebondissements avec un premier <a href="https://www.legalis.net/jurisprudences/tribunal-de-grande-instance-de-paris-3eme-chambre-2eme-section-jugement-du-30-avril-2004/">arrêt du 30 avril 2004</a> par le tribunal de première instance de Paris qui a donné d’abord tort au plaignant qui a interjeté appel de ce jugement. La cour d’appel de Paris dans son <a href="https://www.legalis.net/jurisprudences/cour-dappel-de-paris-4eme-chambre-section-b-arret-du-22-avril-2005/">arrêt du 22 avril 2005</a> a cette fois-ci donné raison au plaignant. La cour de cassation a ensuite été saisie et a cassé le jugement dans son arrêt du <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007052414/">28 février 2006</a>. Retour à la cour d’appel de Paris qui dans son<a href="https://www.legalis.net/jurisprudences/cour-dappel-de-paris-4eme-chambre-section-a-arret-du-4-avril-2007/"> arrêt du 4 avril 2007</a> a débouté cette fois-ci le plaignant qui pourvoit en cassation. La cour de cassation rend un jugement définitif avec son <a href="https://www.legalis.net/jurisprudences/cour-de-cassation-1ere-chambre-civile-arret-du-19-juin-2008/">arrêt du 19 juin 2008</a> et déclare la requête irrecevable et confirme ainsi que la copie privée n’est qu’une exception et ne peut être considérée comme un droit. </p> <h2 id="toc-en-guide-de-conclusion">En guide de conclusion</h2> <p>Moralité cette jurisprudence réduit drastiquement le champ d’application de la copie privée. Alors certes les gendarmes ne viendront pas fracasser votre porte à 6h du mat' parce que vous avez copié "les bronzés" de votre box ou d'un DVD mais il n'existe pas de recours juridique si vous n'y parvenez pas.</p> <div><a href="https://linuxfr.org/users/funix/journaux/exception-de-copie-privee.epub">Télécharger ce contenu au format EPUB</a></div> <p> <strong>Commentaires :</strong> <a href="//linuxfr.org/nodes/122840/comments.atom">voir le flux Atom</a> <a href="https://linuxfr.org/users/funix/journaux/exception-de-copie-privee#comments">ouvrir dans le navigateur</a> </p>
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      La guerre gouvernementale contre internet continue

      h16 · tests.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 13 December, 2019 - 08:30 · 6 minutes

    Par h16.

    Pour les politiciens français, toute liberté n’est que menace. Elle doit être sévèrement encadrée, régulée voire réprimée si c’est possible puisqu’elle représente une façon de s’affranchir de l’influence de l’État et, plus concrètement, de s’affranchir de leur pouvoir. Or, si les députés, les ministres et tous les autres élus se sont bien fait suer pour arriver là où ils sont, ce n’est certainement pas pour voir se débiner sans mal ceux sur lesquels ils entendent régner, scrogneugneu !

    C’est donc exactement pour cela que, dès ses débuts, un espace de liberté comme internet n’a jamais été considéré que comme un danger avant tout et que nos politiciens, dès les années 1990 où le développement des réseaux devenait enfin visible, se sont donc employés à déverser lois, décrets et contraintes pour l’amener dans le champ du régulable et du taxable.

    Malheureusement, au contraire de bien des domaines dont la nature concrète rend aisées les opérations de bombardement législatif en continu, la nature essentiellement abstraite et numérique d’internet, ainsi que la technicité évidente de ce domaine provoquent une dissonance cognitive grave entre d’un côté, la volonté farouche de nos pisse-lois d’enfin l’encadrer au plus serré , et de l’autre, ce marché fluide, extrêmement mobile et versatile, que ceux qui l’utilisent maîtrisent finalement nettement mieux que ces trop zélés élus.

    Autrement dit, pour internet, il est bien plus aisé de pondre de la loi au kilomètre que de la faire appliquer et qu’elle ait effectivement un impact. On pourrait multiplier les exemples où le législateur s’est parfaitement ridiculisé avec ses tentatives idiotes, depuis HADOPI en passant par l’obligation de facturer la livraison pour Amazon (qui a donc facturé 1 centime ) jusqu’à la dernière tentative de taxe GAFA qui sera, comme tout le monde s’y attendait, intégralement reportée sur les vendeurs et donc sur le consommateur , mais on comprend rapidement l’idée : dans le domaine, les agitations de nos élus, ministres et autres sbires gouvernementaux se sont systématiquement soldées par des échecs qui, bien qu’inavoués, n’en sont pas moins cuisants.

    Logo HADOPI : haute autorité destinée à observer les petits internautes

    C’est donc sans surprise mais avec cette consternation toujours entière que nous découvrons l’énième tentative de nos gouvernants de faire semblant de comprendre quelque chose aux problèmes de copie privée, de droit d’auteur, de blocage de sites et d’interdictions de contenus divers et variés : l’idée est encore une fois aussi simple qu’idiote puisque, cette fois-ci, le gouvernement entend « muscler » la lutte contre les sites méchants en pourchassant de leurs assiduités mal foutues « les sites miroirs ».

    Ainsi, profitant de l’improbable fusion entre la HADOPI (dont on ne rappellera surtout pas les performances, cataclysmiques ) et le CSA pour enfin disposer d’un mélange carpe/lapin à même de faire des étincelles sur les intertubes, Franck Riester , l’actuel ministricule de la Culture, tente de pousser une nouvelle bordée de petites lois de derrière les fagots pour lutter notamment contre ces abominables sites pourtant interdits (parce que produisant du contenu « contrefait ») qui se servent de noms de domaine non couverts par les décisions de justice pour continuer leurs méfaits.

    On attend avec gourmandise les textes de lois précis et pointus qui tenteront d’encadrer une pratique dont les déclinaisons sont suffisamment larges pour rendre rapidement caduques ces pathétiques tentatives, et avec la même appétence le développement de l’utilisation de services VPN qui ruinera durablement les éventuels résultats que l’ARCOM, la fumeuse fusion CSA-HADOPI, ne manquera pas de fanfaronner sur toutes les ondes pour justifier de son existence.

    Ouf, Frank Riester n

    Eh oui : la loi n’est pas encore votée ni même appliquée, la fusion n’est pas même encore opérée qu’il existe déjà de multiples solutions à la fois simples et peu coûteuses pour contourner les décisions de justice françaises basées sur des textes législatifs écrits par des personnes qui n’y comprennent à peu près rien…

    Et si nos gouvernants comprennent confusément leur impuissance, ils ne peuvent tout simplement pas se résoudre à cette dernière, malgré les échecs, les coûts, l’humiliation qu’ils subissent et font subir à l’appareil législatif et judiciaire français, et ce quand bien même cette impuissance ne se traduit par aucun effet néfaste palpable (doit-on encore une fois revenir sur les chiffres de tous les domaines soit-disant impactés négativement par la copie pirate et dont les profits sont, actuellement, au plus haut ?).

    Et malgré l’échec humiliant de ces mesures généralement inappropriées voire contre-productives, on continue d’observer un acharnement compact de la part des gouvernants et des élus à vouloir absolument dicter au numérique sa façon de se comporter, sans jamais tenir compte des effets de bord néfastes et de plus en plus nombreux qu’entraîne cette politique de législation compulsive.

    Ainsi, à mesure que l’internet « à la française » ressemble de plus en plus à un rigolodrome des contournements rapides de lois imbéciles (au milieu d’un internet « à l’européenne » passablement encombré de popups aussi agaçants qu’inutiles à la sauce RGPD ), on découvre que nos députés continuent obstinément sur la lancée générale de législorrhée : et c’est ainsi qu’internet devient un champ d’expérimentations pour le signalement vertuel grotesque d’une député LREM, Paula Forteza, qui entend montrer à tout le monde à quel point elle est bien bio-compatible et éco-consciente en imposant une interdiction de l’ autoplay sur les navigateurs internet, ainsi qu’une réduction de la résolution des vidéos, le tout pour favoriser une baisse de la consommation énergétique des internautes.

    Oui, vous avez bien lu : barbouillant son texte de « sobriété énergétique du numérique » , la député LREM demande donc que les contenus vidéos soient proposés par défaut dans une qualité combinant un confort suffisant pour l’utilisateur et la consommation de données la plus faible possible » , ceci afin de « diminuer les émissions de gaz à effet de serre liées à la consultation de vidéos en ligne .

    Lutte chimérique contre la copie numérique et les sites miroirs, lutte ridicule contre un chat spatial géant rose qui ne fait rien qu’à réchauffer la planète avec ses vidéos pornos en 4K, rien n’arrête l’engeance politique qui cherche encore une fois à justifier son existence en multipliant les jetons de présence législatifs qui viendront s’entasser sur des codes déjà obèses.

    Toujours jugée aux intentions et jamais à ses résultats, cette engeance continue à pourrir la vie de ceux qui ne lui ont pourtant rien demandé.

    Vous ne vouliez pas d’une augmentation des coûts de livraison ? Vous l’avez eue. Vous ne vouliez pas d’une taxe GAFA ? Vous la paierez quand même. Vous n’aviez nul besoin d’un HADOPI inutile, d’un CSA encombrant ? Vous aurez l’ARCOM, la fusion des deux, tout aussi nul, mais certainement encore plus coûteux. Vous n’aviez que faire d’une interdiction de l’autoplay, d’une diminution a priori de votre qualité d’image vidéo ? Peu importe, la députaillerie tentera de vous l’imposer !


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    Sur le web

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      Le décevant (mais prévisible) résultat de la consultation citoyenne sur la "République Numerique"

      Friday, 4 December, 2015 - 19:36 edit · 1 minute

    La loi miettes ou République Numérique (de Axelle Lemaire) a été vidée des propositions intéressantes sur les sujets les plus importants (renforcement de la vie privée, le juge judiciaire pour le renseignement, #LogicielLibre, #DomainePublic, suppression de la Hadopi, #DroitDePanorama, etc), et les justifications ne sont pas forcément convaincantes. http://www.numerama.com/politique/133686-la-loi-numerique-ou-quand-le-gouvernement-repond-a-obi-wan-kenobi.html http://www.nextinpact.com/news/97589-le-gouvernement-ne-veut-pas-imposer-chiffrement-bout-en-bout-dans-loi-lemaire.htm

    Voulant aller loin dans l’écoute des citoyens (en n'en tenant peu compte dans un cas et en le faisant d’une manière disproportionnée dans un autre), le gouvernement a fait un questionnaire de satisfaction. Il y a une question ouverte : “Que faut-il améliorer selon vous pour la prochaine fois ?”. Vous pouvez vous inspirez de ma réponse (que je publie comme le reste de ce message sous licence Creative Commons 0) :

    • Prendre beaucoup plus en compte l’avis des citoyens
    • JavaScript non obligatoire pour participer
    • Aucun ressource tierce nécessaire pour participer
    • Aucune inscription nécessaire pour participer
    • Utiliser une moyen décentralisé et utilisable sans aucun logiciel non libre
    • Prendre en compte la jurisprudence (comme la décision du 8 avril 2014, dite Digital Rights Ireland)
    • Permettre aux citoyens de voter d’une manière fiable, vérifiable par tous (ce qui n’est pas le cas du vote électronique) et anonyme sur le texte lui-même
    • Ne pas passer par un tiers pour le questionnaire de satisfaction
    • Proposer le questionnaire de satisfaction d’une manière chiffrée