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      Crimes et châtiment : vers la destruction des cryptos ?

      Drieu Godefridi · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Saturday, 26 November, 2022 - 03:30 · 5 minutes

    Les trois moteurs de la saga des cryptomonnaies auront été des escrocs lunaires — souvent programmeurs — des idiots utiles et bien sûr ceux sans lesquels rien de tout ceci n’aurait été possible : des millions de victimes.

    Qu’est-ce qu’une cryptomonnaie ?

    La cryptomonnaie est une unité produite par un algorithme informatique qui, par des contraintes mathématiques et techniques, ne les produit qu’en nombre limité. Cette unité purement informatique et technique est baptisée « monnaie » par celui qui l’a produite. En vertu de quoi cette unité, transmutée en « monnaie », est proposée à la vente contre des monnaies classiques. Donne-moi 10 dollars et je te remettrai une unité ( coin , token ) de ma précieuse « monnaie » crypto.

    Quand on revient aux fondamentaux, on reste saisi par la simplicité du procédé. Après sa chute, Bernard Madoff n’a cessé de rappeler que les 80 milliards de son escroquerie reposaient sur un simple jeu d’écritures effectué par une seule assistante : prétendre avoir acheté le matin des actions qu’on revendait le soir ou le lendemain avec bénéfice. Sauf que rien n’avait été acheté et rien vendu non plus. Par son ampleur et sa durée, l’une des plus grandes escroqueries de tous les temps.

    Comment expliquer que tant de gens aient investi des fortunes, parfois leur maison et l’avenir de leurs enfants, sur un simple jeu d’écriture informatique ? Parce qu’on leur a présenté les cryptos comme d’authentiques monnaies, comme refuge contre l’inflation et comme alternative aux monnaies classiques vouées à disparaître.

    Rien de tout ceci n’était fondé.

    Aucune crypto n’a jamais satisfait la fonction de monnaie réelle

    Descendez dans la rue avec des bitcoins, vous n’achèterez ni pain, ni viande, ni maison. Les cryptos n’ont jamais rempli l’office le plus élémentaire d’une monnaie. Premier mirage.

    Si les cryptos étaient un refuge contre l’inflation, elles auraient dû gagner en valeur quand l’inflation est arrivée. C’est le contraire qui s’est produit : l’ensemble du système crypto s’est affaissé à mesure que progressait l’inflation. Dans des proportions du reste nettement plus graves — de l’ordre de moins 70 % — que la plupart des autres catégories d’actifs.

    Enfin, le dollar ne s’est jamais aussi bien porté tandis que les cryptos mordent la poussière. Aucune des promesses cryptos initiales n’a été tenue. Aucune.

    Pire : c’est tout un écosystème financier crypto qui est venu se greffer aux cryptomonnaies, avec banques cryptos et places financières cryptos.

    Le maillon faible, ce sont les banques

    Le défi de toute banque est de conserver des assets en nombre suffisant pour satisfaire les retraits de ses clients. Ces assets peuvent être du cash, des biens, des placements, de préférence liquéfiables en cas de besoin. Or, les assets des banques cryptos sont massivement composés d’autres cryptos.

    Cette interdépendance solidarise de fait l’ensemble des acteurs et banques de l’écosystème crypto. C’est le concept de linkage , consubstantiel à tout bank run systémique (on songe à The Panic of 1907 , le bank run remarquablement décrit par Bruner et Carr dans leur ouvrage éponyme).

    En vertu de ce qui précède, une baisse drastique de la crypto de référence, le bitcoin, entraîne mécaniquement une diminution substantielle de la valeur des assets des banques-cryptos et leur liquidité. Qu’une banque-crypto plus exposée que les autres — en juin dernier, TERRA, puis CELSIUS, aujourd’hui Alameda/FTX — soit confrontée à des demandes de conversion massive en dollars, elle devra suspendre ses opérations, aggravant la panique. Car les déposants d’une banque-crypto qui choit perdent tout (ou presque).

    FTX et Alameda sont deux entreprises créées par le bien-nommé M. Bankman (-Fried), tout un destin. FTX et Alameda ont entretenu des relations incestueuses dès le début. FTX, bourse d’échanges, a créé le token (une cryptomonnaie) FTT. FTX et Alameda se sont partagé la majeure partie de l’offre totale du token FTT — on n’est jamais si bien servi que par soi-même — qui n’a pas vraiment été mise en circulation. En raison de la crédibilité dont bénéficiait M. Bankman et ses camarades, la valeur du FTT en dollar explosa bientôt. L’ascension fulgurante de la crypto FTT a entraîné une explosion de la valeur du bilan d’Alameda. Cette valeur élevée des positions de FTT au bilan a été utilisée par Alameda comme garantie pour solliciter des prêts.

    Quand les fonds empruntés par Alameda étaient utilisés pour des investissements illiquides, FTT devenait par lui-même un point faible central d’Alameda. L’effondrement de TERRA et CELSIUS entraînait en juin dernier une première crise de liquidités pour Alameda, de nombreux créanciers ayant réclamé le remboursement de leurs prêts à Alameda. La majeure partie des fonds propres nets de l’activité d’Alameda était constituée du jeton de FTT, contrôlé de manière centralisée par FTX/Alameda.

    Il paraît également acquis que M. Bankman a fait remonter les fonds de ses clients de FTX vers Alameda, pour s’y mieux servir lui-même. Enfin, dans les derniers jours précédant la faillite, il semble que M. Bankman se soit encore régalé du cash disponible, notamment sous la forme de prêts personnels — aux dépens bien sûr de ses clients et créanciers. Tout ceci sera établi par la justice américaine, le moment venu.

    Du fait du linkage extrêmement étroit et serré des banques cryptos, la crise crypto actuelle n’est pas terminée. Soit un acteur majeur s’imposera pour ramener le calme — on ne voit pas d’autre option à l’heure actuelle que Binance — soit Binance choira à son tour et du pompeux et arrogant écosystème crypto dans son format actuel. Il ne restera bientôt plus que dettes et illusions perdues.

    Le domino suivant pourrait être l’entreprise Tether, avec son stablecoin USDT. L’USDT est une cryptomonnaie rivée au dollar. Tether est censée n’avoir créé des USDT que dans la stricte mesure des paiements qui lui étaient faits en dollars. Sur le modèle un USDT = un dollar. De forts soupçons existent actuellement selon lesquels cette règle n’aurait pas été respectée. Dit autrement, Tether aurait créé des USDT sans contrepartie en dollar. Pour ensuite les convertir en assets eux-mêmes convertibles en dollars ; elle est pas belle, la vie, quand on imprime soi-même sa monnaie ? Par ailleurs, Alameda la précitée qui vient d’entrer en faillite était l’un des deux principaux interlocuteurs de Tether dans l’écosystème crypto.

    Stablecoin : monnaie stable. Encore une double promesse — monnaie et stable — dont il n’est pas acquis que le mundus senescit de la crypto pourra la tenir.

    Pour aller plus loin, cette vidéo

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      Crise économique : machine infernale contre l’euro

      Henry Bonner · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 23 November, 2022 - 04:15 · 4 minutes

    Les autorités monétaires en Europe ont abandonné le plafond des 2 % d’inflation en novembre de l’année dernière, juste avant la plus forte envolée de l’inflation en 25 ans.

    Elle atteint aujourd’hui 10,6 % pour la zone euro.

    La force du dollar fait partie du problème

    L’euro perd pied face au dollar comme le yen ou la livre sterling.

    L’euro baisse de 8 % contre le dollar (un rebond en cours depuis octobre limite la perte). Depuis le 1 er janvier 2021, il perd 15 % par rapport au dollar.

    L’euro remonte un peu grâce à une chute des prix de l’énergie en ce moment et une baisse de l’inflation aux États-Unis. Les marchés prévoient donc la fin du resserrement de la vis par la Réserve fédérale.

    Néanmoins, ce répit pourrait vite s’évaporer. La zone euro n’a pas réglé les problèmes dans l’énergie. Elle a attiré des cargaisons de gaz liquide en acceptant de le payer plus cher que les autres. Par ailleurs, la baisse des prix dans l’énergie a lieu grâce à la chute de la demande – une contraction de l’activité économique.

    Or, les autorités monétaires n’ont pas à ce jour manqué de rabaisser les taux et relancer la machine à billets en cas de contraction.

    Par exemple, les coûts des énergies ont mené à la perte de 70 % de la production d’ammoniac, un ingrédient important des engrais, et (comme vous le voyez ci-dessous) de nombreux pays européens avaient perdu plus de 10 % de leur production d’acier en mai.

    Le renforcement de l’euro provient donc de la contraction de l’activité en Europe et du ralentissement de l’inflation aux États-Unis.

    Cependant, jusqu’ici, les autorités n’ont pas attendu les bras croisés pendant les contractions économiques. Ce ne sera pas différent cette fois-ci. Les élus feront à nouveau couler des euros – via les plans de relance, prêts aux entreprises en faillite ou aux contrôles des prix.

    L’euro et les écarts de taux

    La perte de valeur de l’euro a lieu car les obligations américaines paient plus de retours et les investisseurs recherchent la sécurité.

    Les taux sur les obligations de la zone euro ont aussi grimpé pour refléter la fuite de capitaux vers les États-Unis.

    Simone Wapler, mon associée sur notre lettre d’information, a récemment comparé les taux à travers le bloc que vous voyez dans le tableau ci-dessous.

    Vous pouvez constater que le taux moyen est de 3,2 %, mais la Grèce et l’Italie paient plus du double du taux de l’Allemagne, le débiteur le plus sûr du bloc.

    À la différence des États-Unis, la banque centrale européenne doit non seulement permettre aux pays de rembourser mais aussi éviter que l’écart des taux d’intérêt n’augmente beaucoup plus que cela.

    Or, une politique monétaire de restriction affecte davantage les pays à risque – comme l’Italie – que les pays plus solides du bloc.

    Les autorités européennes sont donc contraintes de conserver une politique d’assouplissement, aux dépens de la valeur de l’euro.

    L’euro et l’énergie

    L’euro remonte ces temps-ci grâce à la chute de tension sur les prix dans l’énergie. Le baril de Brent vient par exemple de chuter sous les 90 dollars, contre plus de 120 dollars en juillet.

    Cependant, les marchés du courant électrique indiquent que le bloc n’est pas encore sorti d’affaire.

    Le coût du MWh est toujours de plus de 200 euros en France, pareil qu’au début de l’année, selon l’Epex, alors qu’il coûtait en général moins de 60 euros en 2019.

    De plus, la baisse du pétrole vient d’une contraction de la demande… pas d’une hausse de l’offre.

    Dans l’immédiat, la production américaine est toujours inférieure de plus de un million de barils par jour par rapport à 2019, en dépit de l’incitation à produire impliquée par les prix élevés.

    Par ailleurs, les investissements dans la production d’hydrocarbures se sont effondrés pendant les confinements.

    Par exemple, selon Rystad Energy, l’industrie du pétrole et du gaz a acquis les droits à plus de 1,2 million de km 2 de terrains – dans l’objectif de développer des gisements – en 2019. Sur les années suivantes, les acquisitions de terrains ont chuté à moins de la moitié de ce nombre.

    De plus, les investissements dans les gisements sont toujours très inférieurs à leurs niveaux d’avant 2020. Le graphique ci-dessous vous montre par exemple les dépenses d’Exxon, la plus grosse compagnie de pétrole, sur l’exploitation de gisements au cours des trois dernières années.

    Vous pouvez voir que la dépense a chuté de moitié de 2019 à 2021. En 2022, les montants investis restent en-dessous des niveaux de 2019 d’environ 8 milliards.

    Les soucis d’énergie n’ont pas disparu. Et le manque d’investissements dans la production (au profit des renouvelables peu efficaces) devrait faire durer la pénurie.

    Cela suggère que nous verrons un assouplissement de la politique de la banque centrale même si elle n’a pas l’inflation sous contrôle… et ainsi plus de faiblesse pour l’euro.

    (Vous pouvez suivre nos analyses au quotidien en cliquant ici.)

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      Splendeurs et misères du bitcoin

      Jean-Jacques Handali · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 4 March, 2021 - 04:15 · 7 minutes

    bitcoin

    Par Jean-Jacques Handali.

    Né dans l’esprit d’un certain Satoshi Nakamoto en 2008, dont on ne sait si c’est le vrai nom ou le pseudonyme d’un groupe de personnes, le bitcoin fut commercé pour la première fois le 12 octobre 2009. 5050 bitcoins furent échangés pour 5,02 dollars par virement Paypal, soit environ 0,001 dollar l’unité.

    Le 9 février 2011, le bitcoin atteignait la parité avec le dollar et un peu moins de trois ans plus tard, il dépassait la valeur de l’once d’or qui était alors de 1250 dollars. Son enchère continua de grimper régulièrement avant de s’emballer à partir de 2017 où, en douze mois, la valeur de la crypto-monnaie a été multipliée par quinze, passant de 1300 dollars à 19 000 dollars.

    Depuis, le bitcoin avance en zigzag, mais à grandes enjambées, dépassant les 58 000 dollars pour la première fois, en février 2021.

    Le bitcoin, une monnaie de réserve ?

    Pour commencer, prenons conscience d’avoir affaire à une monnaie qui n’est liée à aucune substance économique. Elle ne colporte ni valeur intrinsèque ni actif sous-jacent. Elle ne produit ni intérêt, ni dividende, ni rente, ni revenu et son application ne connaît aucun débouché industriel. Aucune autorité centrale ou garantie étatique n’en soutient l’évolution.

    Le bitcoin dépend donc uniquement du bon vouloir des marchés et du flux des transactions. Que les acheteurs soient en appétence et la crypto-monnaie prendra de la valeur. Que les vendeurs soient majoritaires et son cours ne sera plus soutenu. Ce n’est donc pas un système monétaire qui est mis en place, mais une sorte de structure pyramidale, fluctuante et étroite, soumise à l’engouement du moment.

    De même, bien que ses transactions soient en constante augmentation, le bitcoin n’est pas déterminé par un usage économique ou une fonction sociale . D’abord, parce que sa masse est ténue : 18 millions d’unités émises (21 millions attendues d’ici l’an 2140 en tout et pour tout). Partant, l’agrégat monétaire ne s’adaptera pas à la création de richesse, et les mots de passe oubliés et adresses égarées ne seront pas remplacés.

    Ensuite, parce que sa volatilité est extrêmement élevée : une devise dont le prix oscille de 30 à 40 % en l’espace de quelques jours n’est pas crédible. Sa convertibilité dans un contexte international ne serait pas soutenable, son utilisation sur un mode intérieur gripperait les échanges.

    À ce titre, l’évoquer en tant que monnaie dans cet article est davantage une convenance de langage qu’une juste définition.

    Le bitcoin, une valeur refuge ?

    Sa volatilité élevée empêche le bitcoin d’être considéré comme une valeur refuge. Par définition, une valeur refuge est un bien dont l’estimation a tendance à se stabiliser ou à s’apprécier pendant les périodes de crise des marchés financiers. Un tel actif permet en quelque sorte de sécuriser le patrimoine de son détenteur. Difficile de prétendre à une telle stabilité avec les fluctuations mentionnées ci-dessus.

    Au-delà, il faut être conscient que 2100 adresses détiennent approximativement 40 % du total émis à ce jour. Il suffirait que certaines de ces adresses parviennent à une sorte d’entente ou de déclaration d’intention pour orienter ce marché dans un sens ou dans l’autre.

    Précisons également que 80 % des utilisateurs ne participent pas au marché. Ils gardent leurs avoirs sous le matelas et n’y touchent pas. C’est donc une minorité d’actionnaires qui font le marché et en rythment la cadence.

    Ce ne sont pas là les principes d’une valeur refuge.

    Le bitcoin, un réseau confidentiel ?

    À quel point le bitcoin est-il confidentiel et quelle est l’influence d’une autorité de référence sur ce système ?

    Les transactions d’achats et ventes du Bitcoin ne se font pas dans l’anonymat. Un registre public indique le montant de bitcoins affilié à chaque adresse, ainsi que les opérations enregistrées sur la chaîne de blocs. Si elle n’est pas ouvertement accessible, l’identité des utilisateurs peut ainsi être déterminée grâce aux plateformes d’échanges, qui consignent l’identité des propriétaires. Seules certaines opérations de gré à gré échappent au contrôle.

    Combien de temps avant qu’un État ou un groupe d’États n’en signifie l’arrêt ?

    Une grande sécurité d’utilisation ?

    Les portefeuilles sont protégés par un mot de passe. Le Vatican, le Pentagone, JP Morgan, Citigroup, Sony et d’autres institutions réputées inviolables ont été attaquées par des hackers , avec des dégâts plus ou moins avérés, plus ou moins avoués. Viendra un jour où un hacker parviendra à secouer le temple du bitcoin.

    Quel sera la réaction des investisseurs à ce moment-là ? De même, que se passera-t-il le jour où une monnaie électronique améliorée (sécurité accrue, meilleure consommation électrique du minage…) sera introduite sur le marché ? Qui voudra alors d’une crypto-monnaie dépassée ?

    Rappelons que les transactions sont traitées par internet. Leur fluidité est donc dépendante de la neutralité de ce réseau. Nous savons déjà comment certains pays autorisent le déploiement de cette toile et comment d’autres en restreignent l’utilisation.

    Tant que ce réseau est disponible, votre coffre électronique est accessible. Sinon, il faudra patienter jusqu’à la réouverture des guichets !

    Le minage du bitcoin entraîne une consommation électrique vorace. À l’heure où la planète prend conscience de la dilapidation de ses ressources, l’empreinte écologique de la crypto-monnaie pose question sur son progrès.

    Enfin, la dimension internationale du bitcoin octroie à ses contrevenants un caractère d’impunité, car les cadres juridiques s’arrêtent souvent à la frontière des États. Que risque un hacker biélorusse ou nord-coréen qui détourne les codes d’un épargnant anglais ou allemand ? Pas grand-chose !

    Mettre fin au monopole des banques centrales ?

    À l’heure où les principales économies croulent sous l’avalanche de cash et d’injections monétaires, la technologie intéresse de plus en plus les institutions financières et les autorités officielles. Pour l’instant, elles se contentent de suivre le cours des crypto-monnaies en invitant les investisseurs à la plus grande prudence…

    Lorsque la bulle éclatera (SIC), les gouvernements pourront alors se targuer de leur mise en garde : « On vous l’avait bien dit » ! La monnaie ayant cours officiel (dollar, euro ou autre…) brillera en comparaison, ne serait-ce que par défaut.

    À l’inverse, si le bitcoin poursuit son petit bonhomme de chemin, les gouvernements verront d’un très mauvais œil la perte de leur hégémonie. Les autorités veulent être les seules à contrôler la monnaie et le crédit qui en découle.

    Elles n’hésiteront pas à mettre le bitcoin hors la loi (c’est déjà le cas dans de nombreux pays : Chine, Inde, Thaïlande, Maroc, Algérie…) et proposeront une alternative officielle afin de récupérer la manne déversée dans ces portefeuilles électroniques.

    Conclusion ?

    Résumons : voici une pseudo-monnaie qui n’en est pas une, qui ne représente aucun actif sous-jacent, qui ne jouit d’aucune garantie gouvernementale, et qui ne peut être considérée comme une valeur refuge.

    Sa confidentialité est tantôt décriée comme insuffisante, tantôt dénigrée comme servant aux malversations . L’utilisation du bitcoin est tributaire de la régularité d’internet, de l’impéritie des hackers et du retard de la concurrence. La consommation d’énergie de son minage frôle l’indécence. Il est d’ailleurs curieux que le patron de Tesla ait encouragé son achat, et que les organisations de défense de la planète n’aient pas réagi…

    L’échec de la crypto-monnaie renforcera la position des banques centrales qu’elle prétend contourner. Alternativement, son succès suscitera l’intervention de ces mêmes banques à l’encontre de son développement.

    Alors pourquoi cet enthousiasme délirant pour ce qui n’est rien d’autre qu’un modèle mathématique ? Certains investisseurs, à tort ou à raison, parient sur la valorisation d’une société comme Tesla, pensant que sa valorisation actuelle représente un calcul équitable de ses revenus futurs. Dans le cas du bitcoin, il n’y aura guère de revenu futur !

    Le bitcoin est une bulle spéculative fondée sur les incontournables faiblesses de la nature humaine : ignorance, comportement moutonnier et avidité du gain.

    Que nos dirigeants ne se croient pas au milieu d’un long fleuve tranquille, pour autant. Outre l’engouement de certains investisseurs pour une étoile filante, le déversement de liquidités par les autorités est symptomatique d’un manque de confiance dans les repères monétaires de nos démocraties.

    Un jour ou l’autre, elles devront y faire face par la levée d’impôts et/ou l’entraînement de l’inflation. Une autre solution serait de refondre le système monétaire mondial, un nouveau Bretton Woods, qui ré-instituerait l’or physique comme pilier de ce nouveau système. Mais cela demande un peu de courage. C’est toujours préférable que d’initier une guerre…

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      Robinhood, vraiment un Robin des bois ?

      Philippe Alezard · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Saturday, 20 February, 2021 - 03:50 · 12 minutes

    Par Philippe Alezard.

    Robin des Bois est de retour, et avec lui, une armée de petits porteurs qui va s’en prendre aux usurpateurs du pouvoir financier, au Jean Sans Terre des marchés, les fonds d’investissement vendeurs à découvert. Robinhood et son armée de hors-la-loi, les WallStreetBets , WBS, vont ridiculiser le nouveau shérif de Nottingham, à savoir WallStreet. C’est MainStreet contre WallStreet.

    Robinhood créée en 2013 est une plateforme de trading qui souhaite démocratiser l’accès aux produits financiers par le biais d’un outil extrêmement simple, gratuit, et accessible via un téléphone portable. On reviendra plus loin sur ladite gratuité du service. L’objectif est de réunir un maximum de petits porteurs. Ceux-ci pourront se voir offrir l’opportunité d’acheter tout type d’action ou d’option grâce au trading on margin.

    Pour le client, le trading sur marge consiste en l’ouverture d’un compte de marge avec lequel il va payer seulement un pourcentage de l’actif qu’il souhaite acheter. Il emprunte la différence à son broker , en l’occurrence Robinhood, qui de fait, agit comme un préteur et l’actif détenu agit comme le collatéral de sécurité. C’est l’effet de levier qui permet de multiplier les gains mais également les pertes.

    C’est la qu’interviennent les fameux appels de marge quand l’actif prend le sens contraire de votre « pari ». Dans ce cas, pas d’autres choix que de créditer à nouveau le compte de marge ou de sortir à perte son achat.

    Robinhood sur Reddit

    Reddit est un site web communautaire partageant tout type d’actualité par le biais de forum, des subreddits , dont l’un des plus actifs actuellement, visant à lutter contre des marché financiers et leurs spéculateurs, est WallStreetBets (WSB).

    Avec la pandémie du covid et les confinements, Robinhood et WallStreetBets ont connu une progression en miroir avec chacun plus de trois millions d’utilisateurs supplémentaires. Selon une étude de Envestnet Yodlee une grande partie du fameux Stimmy Check, chèque de stimulus de 1200 dollars versé par le gouvernement américain, s’est retrouvée massivement investie sur les marchés financiers et en grande partie par le biais de Robinhood, qui est devenu le bras armé de WSB.

    Sur la base des derniers chiffres publiés en juin 2020, Robinhood comptait 13 millions de clients, et était devenu le premier broker américain, loin devant les anciens leaders, avec une moyenne journalière de 4,3 millions de trades . MainStreet va pouvoir prendre sa revanche sur WallStreet. Les 99 % vont enfin pouvoir prendre le pouvoir des fameux 1 %. La communauté WSB a une cible, les fonds vendeurs à découvert et s’est donné un objectif noble : sauver Gamestop .

    L’action Gamestop s’envole

    Gamestop, fin 2020, ce sont un peu plus de 5500 magasins de ventes de jeux-vidéo, contre 7535 fin 2017, dont 413 en France sous l’enseigne Micromania. Pour la petite histoire, la France est le pays le plus important en nombre de magasins pour la société, hors États-Unis.

    L’enseigne passe de 23 000 employés en 2017 à 14 000 en 2020. Le chiffre d’affaires est en baisse chaque année et le résultat d’exploitation négatif. Le business model souffre face aux plateformes de jeux en ligne et face aux ventes en lignes et semble, si ce n’est voué à l’échec, bien mal en point. Donc logiquement, un certain nombre d’acteurs, dont c’est le métier, s’était positionné à la vente sur le titre. Parmi eux, Citron Capital et Melvin.

    Les risques du short selling , la vente à découvert, sont infinis contrairement à un achat. Un titre que vous achetez 20 dollars, ne peut perdre au maximum que 20 dollars, mais a contrario, peut monter, en théorie, à l’infini. Ce risque impose aux vendeurs à découvert de couvrir ce risque en rachetant leur position à un niveau défini ou en en achetant des options d’achats. J’ai déjà eu l’occasion de définir les bénéfices et inconvénients de la vente à découvert ainsi que l’intérêt pour le marché.

    La communauté WSB veut forcer ces vendeurs à découvert à perdre beaucoup d’argent en les forçant à se racheter. Par le biais de Robinhood, elle se met à acheter massivement le titre Gamestop, notamment par le biais d’option d’achat, ce qui amplifie d’autant plus les achats sur le titre Gamestop. Le 22 janvier, ce sont plusieurs millions d’acheteurs qui entrent simultanément dans le casino avec l’argent public distribué par le gouvernement américain. L’action Gamestop s’envole de 42 dollars à 150 dollars en deux séances.

    Elon Musk à la rescousse

    Le mercredi 27 janvier, les WSB trouvent un soutien de poids, Elon Musk , dont la haine envers les vendeurs à découvert n’est plus à démontrer. Par un simple tweet, Gamestonk, il fait exploser le titre qui va coter un plus haut à 483 dollars le jeudi 28 janvier. Il faut dire que l’excentrique patron de Tesla est un grand spécialiste du genre, s’amusant à faire exploser les cours du dogecoin, du bitcoin et malgré lui de Signal.

    Dès le 21 janvier Citron Capital a jeté l’éponge dans la bataille, laissant au passage quelques belles plumes. Autres acteurs fortement impactés, Robinhood lui-même qui s’est trouvé pris à son propre piège. Car l’histoire est bien plus complexe que ce que pouvaient imaginer les militants de WSB. Robinhood est une plateforme de trading mais pas un market maker. Pour accéder à la place boursière du NYSE, New York Stock Exchange, Robinhood doit passer par un market maker.

    Robinhood et Citadel

    En l’occurrence il s’appuie sur Citadel, un des principaux market maker mondiaux et actionnaires de Melvin. Ce même Melvin, vendeur à découvert de Gamestop, qui devra être recapitalisé par Citadel, à hauteur de 2,5 milliards de dollars.

    Robinhood, comme toute société a besoin de revenus pour vivre. Or le trading sur sa plateforme est dit gratuit. Tout le monde sait que lorsque un service est gratuit c’est que l’utilisateur du service est le produit. Rappelons nous que le service « offert » est le trade sur marge. Les sources de revenu pour Robinhood sont directement liées à ce type de trading .

    La première de ces sources est le taux d’intérêt appliqué aux emprunts pour acheter l’actif. C’est un écart qui est appliqué entre le vrai prix de l’action coté sur le marché et le prix auquel va l’acheter le client Robinhood. Ce que l’on appelle le spread .

    Ensuite, puisque le client ne possède qu’une partie de l’actif, l’actif lui-même est détenu par Robinhood qui peut le prêter, moyennant un intérêt, aux hedge funds ou toute autre investisseur qui souhaite le vendre à découvert, drôle d’ironie.

    Robinhood offre un abonnement premium, qui constitue une source supplémentaire de revenu.

    Et enfin, nous sommes dans le monde du numérique et du big data. Les millions d’utilisateurs de la plateforme passent des millions d’ordres d’achats et de vente d’action et d’options. Robinhood vend ce flux aux market makers , comme Citadel et autres fonds de trading haute fréquence.

    Les robots de ceux-ci vont l’analyser, le décrypter afin d’en extraire un comportement et ces mêmes robots vont se placer quelques millièmes de seconde avant afin de tenter d’anticiper la demande. Ces millions d’aller-retour de quelques centimes par jours font des milliards de dollars à la fin du mois.

    Selon le Wall Street Journal , Citadel aura été le principal gagnant de l’affaire Gamestop. 30 % des flux de trading sur Gamestop ont été traités par Citadel. Autant dire que la société pouvait facilement recapitaliser Melvin.

    En apportant sur le marché ces millions d’ordres, les WSB vont faire s’envoler la volatilité intraday et implicite. Et là, vont entrer en jeu tous les fonds spécialisés dans l’arbitrage et la gestion de cette volatilité. D’un autre coté ces mêmes WSB achetant des millions d’actions ou d’options Gamestop vont par ailleurs créer un risque de contrepartie. Il n’y aura peut-être pas assez de vendeurs au moment de la livraison des actions.

    Robinhood doit se protéger quand il perd de l’argent

    C’est là qu’interviennent les appels de marges. Les volumes d’actions mis en jeu pour la livraison quotidienne ainsi que la volatilité de celles-ci, font que Robinhood fait face à un manque de liquidité le soir lors de la compensation. Alors Robinhood veut bien être Robin des Bois tant qu’il gagne de l’argent, mais quand cela risque de le mettre en péril, l’histoire est tout autre.

    Il doit se protéger, et pour cela pas d’autre solution que de limiter les achats de ses clients. Le 28 janvier, la communauté est informée que l’accès aux titres Gamestop est suspendu. Dès le 21 janvier l’action passe dans la journée de 483 dollars à 161 dollars.

    Une fois encore, les premiers gagnants, et surtout les gagnants à coup sûr, sont le market maker , Robinhood et les fonds qui étaient investis sur le titre Gamestop, qui eux, connaissent et maitrisent les règles de WallStreet. Certes de nombreux WSB ont gagné dans cette opération, mais d’autres ont perdu beaucoup d’argent ou vont en perdre encore beaucoup. À l’heure où j’écris cet article, l’action Gamestop vaut 50 dollars. Que vont devenir tout ceux qui, dans l’euphorie ont acheté à 200, 250 ou 400 dollars ?

    Comme son nom l’indique l’industrie financière est une industrie, avec ses règles, ses codes, sa régulation. C’est avec le nucléaire et le domaine de l’aérien probablement l’industrie parmi les plus réglementées au monde. Elle n’est ni bonne ni mauvaise, il n’y a pas, d’un côté les gentils et de l’autre les méchants. Ce n’est pas le lieu pour des insurrections ou autre révolutions.

    Vouloir à tout prix, faire s’envoler Gamestop, Balckberry, Nokia et quelques autres sociétés cibles de WBS, n’a strictement aucun intérêt pour lesdites sociétés. L’intérêt est purement spéculatif pour WBS et par conséquent bien singulier comme démarche pour dénoncer cette même spéculation.

    Gare aux pompiers pyromanes

    Il y a des régulateurs, des faiseurs de lois que nous élisons démocratiquement. C’est à ce niveau que la finance doit être règlementée et jugulée si nécessaire. Mais gare aux pompiers pyromanes. C’est le politique qui fait l’économique, et c’est l’économie qui influe sur la finance et non l’inverse. Or, depuis des années le politique a démissionné de sa fonction en choisissant la facilité du whatever it takes ou du quoiqu’il en coûte.

    Certes, la pandémie méritait un traitement économique et financier spécifique, du fait de la mise en confinement de toutes les activités, mais les torrents de liquidités viennent hypertrophier des actifs qui lévitent déjà dangereusement en bulles. Les marchés financiers ont perdu toute notion de valeur, toute rationalité. La théorie de l’efficience du marché, chère à Eugène Fama , est définitivement obsolète.

    C’est devenu un immense casino ouvert à tout type de pari, pris en fonction de tels ou tels tweets. Les transactions sont déconnectées de la valeur sur laquelle portent ces transactions. Alors que l’économie mondiale connaît son plus fort ralentissement, le cours de toutes les matières premières explosent par rapport à leurs prix d’avant crise : le pétrole, l’or, l’argent, le cuivre, mais également le coton, le café, le soja, le blé. Tous les indices boursiers battent records sur records.

    L’effet Cantillon confirmé

    L’hélicoptère monnaie budgétaire américain a permis une fois de plus de confirmer l’effet Cantillon . L’inflation se loge au plus près de l’injection monétaire.

    Cette affaire Robinhood, Reddit, est très révélatrice de l’ère dans laquelle nous sommes projetés. Une ère où Darwin et Schumpeter n’ont plus de place. Les économies de tous les grands pays se sont figées il y a maintenant plus d’un an.  Depuis 2008, elles étaient déjà sous respirateur monétaire.

    La pandémie a pérennisé cet état végétatif. Personne n’osera débrancher les perfusions. Pire, chaque jour on augmente les doses de dollars ou d’euros.

    Madame Lagarde, d’un coté, parle de bazooka monétaire, et du coté du président Biden, fraichement élu, les enchères sont ouvertes. Ce n’est pas 3 %, 5 % ou 7 % mais c’est l’équivalent de 9 % du PIB qui se déversera sur les États-Unis avec toujours les mêmes effets, le creusement des inégalités.

    Ce creusement des inégalités, cette ségrégation entre ceux ayant accès aux richesses et les autres se cristallisent sur les réseaux sociaux. Les institutions, les gouvernements, les démocraties ont déjà été mis à mal, les garde-fous ont tous sauté les uns après les autres. Malheureusement, les femmes et hommes politiques usent et abusent de ces réseaux.

    Durant les quatre dernières  années, Donald Trump a répandu ses fake news à longueur de journée. Quand Robinhood suspend l’accès au marché, Elisabeth Warren et Bernie Sanders sautent sur l’occasion traitant le marche et l’économie de rigged game . Le domaine de la finance qui se pensait peut-être à l’abri ne l’est plus. Une communauté, un influenceur peuvent déstabiliser un système dont l’équilibre est déjà plus que précaire.

    La science, la raison doivent reprendre la place qui est la leur. Celle de pilier du développement. Elles ont montré qu’elles pouvaient vaincre en quelques mois un ennemi planétaire qui s’en prenait à toute notre espèce. Elles devront être accompagnées et encadrées par le politique qui devra également retrouver la raison et le courage de mettre fin à des années d’errements économiques afin de donner l’impulsion nécessaire à une juste répartition des richesses.

    Cet article a été publié une première fois sur le site de l’Institut Sapiens .

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      Bitcoin, cryptomonnaies : quel est le prix de votre liberté ?

      Auteur invité · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 17 January, 2021 - 04:35 · 8 minutes

    bitcoin

    Par Rémi Pagès 1 .

    Ce n’est pas gratuit mais c’est utile…

    L’adoption d’internet (le web 1.0), puis des réseaux sociaux (le web 2.0) a permis la mise en relation des hommes depuis n’importe quel endroit de la Terre. Les hommes ont adopté les technologies car elles leur sont utiles : échanges épistolaires, échanges d’informations, discussions en direct, chats vidéos, commerce etc.

    Cela s’est développé parce que c’était également gratuit. Mais rien n’est gratuit. Vous payez votre fournisseur d’accès pour accéder au réseau car ce dernier vous fournit la box ainsi que l’entretien du réseau pour vos communications. Vous pouvez chatter sur un réseau social gratuitement. Mais pour cela vous avez signé un « contrat de licence utilisateur final » qui n’est autre qu’un contrat entre vous et l’entreprise. Cette dernière n’aurait aucun intérêt à investir dans d’énormes serveurs ou en développement si elle ne gagnait pas d’argent. Elle monétise donc vos habitudes de surf pour les revendre ensuite a des entreprises de marketing digital pour ensuite cibler les publicités.

    Cela n’a rien d’immoral.

    Ce qui choque l’utilisateur c’est la revente de données personnelles : il doit faire un choix entre utilité et vie privée.

    Utilité ou vie privée ?

    Une étude récente parue dans PLOS ONE , montre qu’en moyenne (sur un petit échantillon d’utilisateurs), les utilisateurs proposeraient de se déconnecter de Facebook pendant un an contre 1000 dollars. Bien qu’anecdotique, cette étude a au moins le mérite de mettre en exergue la notion de valeur.

    Dans le chapitre V d’ Harmonies économiques , Bastiat écrit :

    « … il faut que je fasse comprendre deux choses, savoir :

    1° Que l’utilité tend à devenir de plus en plus gratuite, commune, en sortant progressivement du domaine de l’appropriation individuelle.

    2° Que la valeur, au contraire, seule appropriable, seule constituant la propriété de droit et de fait, tend à diminuer de plus en plus relativement à l’utilité à laquelle elle est attachée. »

    Il faut aussi se rappeler le concept d’antifragilité développé par Nassim Taleb :

    « Est fragile tout ce qui ne résiste pas à l’épreuve.
    Est solide tout ce qui résiste à un grand nombre d’épreuves.
    Est antifragile tout ce qui se bonifie avec les épreuves. »

    Or au cours de la courte histoire humaine, le seul qui ait prouvé son anti-fragilité est l’Homme lui même.

    Nous sommes donc dans une période de basculement ou l’Homme a deux chemins possibles :

    • soit il poursuit dans la voie de la fragilité en continuant de déprécier sa vie privée contre de l’utilité jusqu’à ne plus s’appartenir,
    • soit il choisit la voie de l’antifragilité : il choisit de ne dévoiler que ce qu’il désire de sa vie privée, en échange de monnaie dont la valeur est reconnue par l’ensemble des utilisateurs du réseau.

    Échanger de la valeur sans qu’elle soit dépréciée, et de façon privée

    En 1993 Éric Huges écrit dans Le Manifeste Cypherpunk :

    « La vie privée est nécessaire pour une société ouverte dans l’ère électronique. La vie privée n’est pas un secret. Une affaire privée est ce qu’un individu ne veut pas que le monde entier sache, mais une affaire secrète est ce qu’un individu ne veut pas que quiconque sache. La vie privée est le pouvoir de se révéler sélectivement au monde. »

    Pour cela la monnaie est la pierre angulaire du changement : quelle est la meilleure façon d’échanger de la valeur dans un réseau, sans que cette valeur soit dépréciée ? Le bitcoin est une monnaie qui, sur une courte échelle (10 ans), et contrairement aux monnaies fiat a montré son anti fragilité.

    Ces notions ont été développées par Satoshi Nakamoto dans son White Paper que l’on peut rapidement résumer ainsi :

    • Il faut que les échanges soient structurellement pseudo-anonymes . On entend par pseudo anonymes le fait que les porte-monnaies sont anonymes et cryptés (ne sont pas liés à une identité définie, comme le cash, et ne sont pas dérobables sauf si on vous vole votre clef privée que vous seul détenez, comme si on vous volait votre porte-monnaie), mais également que les échanges entre ces porte-monnaies soient tous traçables de façon à ce que l’ensemble des utilisateurs du réseau puisse vérifier qu’il n’y ait pas de triche.
    • Il faut également éviter que d’autres entités puissent s’emparer de la valeur en « imprimant de l’argent » et en développant un système de dette qu’ils contrôlent au détriment des utilisateurs du réseau. Pour cela, il existe un nombre prédéfini de bitcoins minables soit 21 millions, la monnaie n’est pas inflationniste c’est-à-dire qu’elle est de quantité limitée tout comme l’or. Par ailleurs les échanges monétaires ne sont pas possibles en dehors de la chaine bitcoin. Quand on commence à parler de chaîne parallèle ( side chain ), on peut craindre qu’une entité tierce essaie de prendre en otage les échanges.

    Ce qui la différencie de l’or c’est justement son côté pratique (on peut facilement faire des échanges en millième de bitcoin donc une mise à l’échelle est possible pour l’ensemble du réseau).

    • Ensuite la preuve de travail qui est réalisée par les fameux mineurs qui investissent de l’argent et se font la compétition en résolvant une équation mathématique dont la complexité est variable, pour valider l’ensemble des transactions. Le mineur qui a le plus de puissance de calcul, donc qui a le plus investi, a plus de chance de valider les transactions.

    L’ensemble des transactions depuis le début du bitcoin est contenu dans un sytème d’horodatage des transactions qui est distribué aux différents nœuds du système (la fameuse blockchain , distribuée en peer to peer à la facon de bittorent par exemple). On pourrait comparer la blockchain à un livre de comptes. Le mineur qui a la plus grande puissance de calcul sera celui qui validera ce qu’on appelle un block (en fait il rajoute une page validée et vérifiée au livre de comptes). Une page, ou block , de ce livre de comptes est ajoutée toutes les 10 minutes.

    La cupidité qui ferait qu’un pirate ou qu’un mineur essaie de modifier les transactions pour son compte et vole ainsi les utilisateurs n’est pas rentable car il faudrait modifier toutes les pages précédentes des transactions de celle qu’on veut modifier pour truquer les comptes, ce qui demanderait une puissance énorme de calcul donc un investissement non rentable pour le tricheur.

    • La peur de la centralisation du minage est une peur véhiculée même par les meilleurs défenseurs du bitcoin. C’est un glissement conceptuel entre la centralisation des échanges qui existe actuellement avec les gros nœuds internet des GAFA et la centralisation des échanges monétaires par les banques centrales. Le mineur ne maitrise pas la monnaie et il a seulement le même intérêt que vous que sa valeur soit reconnue. Il ne vous vole pas, il a ses intérêts, vous les vôtres. Si des mineurs s’associaient en corporation pour changer les paramètres de la chaine, la confiance serait alors perdue et la monnaie serait dévaluée, mais comme le sytème bitcoin est adaptable, une nouvelle fork apparaitrait.

    Qui « risque sa peau » ?

    Il existe de nombreuses cryptomonnaies : certaines sont de réelles arnaques.
    D’autres se veulent complètement anonymes, mais n’ont pas réalisé qu’en effaçant des transactions dans le registre pour en anonymiser complètement certaines, on trompe inéluctablement les autres utilisateurs qui ne peuvent plus les vérifier : la confiance chute et la valeur de ces monnaies chutera probablement.

    D’autres essaient de socialiser le concept comme Ethereum qui a créé le proof of stake (la preuve d’enjeu) : ce ne sont plus ceux qui risquent leur peau en investissant dans le minage quitte à tout perdre, mais ceux qui ont le plus de monnaie qui valident les transactions. Ils s’approprient la valeur morale de l’échange. C’est une vision keynésienne des cryptos. Avec les risques inhérents au keynésianisme (crises, guerres, perte de cette fameuse propriété privée tant désirée).

    Où se situe la France ?

    Où se situe la France ? Pionnière dans la bulle blockchain qui n’est finalement qu’une base de registre ou dans l’économie mondiale ?

    • Taxation de l’échange cryptommonaie vers le fiat à 30 % minimum. Sachant que la TVA est a 20 %, un commerçant n’a pas intérêt à échanger ses produits en cryptomonnaies.
    • Validation des fameux organismes de sécurité boursière pour l’échange entre cryptomonnaies, ce dont tous les fervents défenseurs des crypto monnaies s’enorgueillissent : ils y voient une étape supplémentaire vers l’adoption de ces cryptomonnaies. Or cela aboutira inexorablement à la désanonymisation des transactions et donc au vol par la taxation.

    Le système Bitcoin retire aux autorités centrales monétaires le pouvoir de régulation, mais n’empêche en rien l’existence d’un État, de lois ou de voleurs.

    Le système Bitcoin ne juge pas moralement l’échange entre deux individus, il est fungible . Il redonne juste à l’Homme la possibilité de reprendre le pouvoir sur sa propriété privée tout en choisissant de monnayer une partie de celle-ci contre de l’utilité s’il l’estime nécessaire.

    Vous avez le choix , bienvenue sur le web 3.0…

    Article initialement publié en janvier 2019.

    1. Rémi Pagès, entrepreneur, est passionné par les cryptomonnaies depuis 2011.
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      « Great Reset », « grande réinitialisation », « nouveau Bretton Woods » : cela vous concerne

      Simone Wapler · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Saturday, 14 November, 2020 - 04:30 · 8 minutes

    bretton woods

    Par Simone Wapler.

    « Great Reset » , « grande réinitialisation », « nouveau Bretton Woods » : autant d’expressions pour désigner la prochaine remise à plat du système monétaire mondial.

    Great Reset expression de Christine Lagarde du temps où elle présidait le Fonds monétaire international et retenue par le forum économique mondial qui se tiendra non plus à Davos mais à Genève en 2021.

    Nouveau Bretton Woods pour le Fonds monétaire international désormais présidé par la bulgare Kristalena Georgieva.

    La plupart des gens sont plus intéressés par la politique que par la politique monétaire qui vise à financer la première. Aujourd’hui la politique se finance de trois façons : par les impôts, par l’emprunt (la dette publique) et par la planche à billets (ou en version moderne, création de crédit à taux zéro).

    Dans les trois cas, il s’agit de notre argent. Avec les impôts, il nous est pris immédiatement sur nos revenus et nos dépenses. Avec la dette publique, il nous sera pris en différé. Avec l’inflation, l’argent nous est pris à la fois en différé et sur notre épargne. La dette publique et l’inflation font partie de ce qu’il est convenu d’appeler politique monétaire.

    Le nouvel ordre monétaire sera politique, dirigiste et supranational, comme l’ancien ; il laminera les perdants de l’ancien ordre monétaire dont nous, Français, faisons partie. Il purgera partiellement les dettes, tout comme après la Seconde Guerre mondiale.

    Bretton Woods ou l’ordre monétaire d’après la Seconde Guerre mondiale

    Après la Seconde Guerre mondiale, les combattants européens sont ruinés et lourdement endettés. Seuls debout et prospères, les États-Unis. Ils ne sont pas seulement une puissance militaire mais une super puissance commerciale, le pays étant le plus gros exportateur mondial 1 .

    Les accords de Bretton Woods, signés en 1944, entérinent un nouveau système monétaire dont les États-Unis sont le pivot. Le dollar reste la seule monnaie au monde convertible en or, au tarif fixé à l’avance de 35 dollars l’once. Accessoirement, le FMI et la Banque mondiale sont créés comme instances de régulation. Les autres monnaies sont flottantes et ne sont plus adossées à de l’or.

    Il résulte de ces accords que pour payer leurs importations, la plupart des pays ont besoin non plus d’or mais de dollars. Les banques centrales des pays excédentaires stockent des dollars réputés as good as gold , aussi bons que de l’or. Certains pays émettent leur propre monnaie adossée à leurs réserves de dollars comme ils en émettaient autrefois en fonction de leurs réserves d’or.

    D’une façon générale, les fonctionnaires des instances de régulation ne régulent pas grand-chose et sont moins efficaces que la foule des intervenants d’un marché. Sans surprise, l’organisation monétaire de Bretton Woods déboucha donc assez rapidement sur des désordres monétaires.

    Par le passé, un pays qui exportait trop voyait son stock d’or partir à l’étranger. Ses fournisseurs ne tardaient pas à le savoir et à se méfier. Ce pays avait du mal à emprunter. Les balances commerciales se régulaient ainsi avant que quiconque ne puisse devenir « trop gros pour faire faillite ».

    La guerre de Corée, puis la guerre du Vietnam et enfin la course à l’espace poussent les États-Unis à la dépense. Trop de dollars sont émis et le doute commence à s’instiller concernant le dollar as good as gold .

    L’Allemagne remonte la pente économiquement. Échaudée par son récent épisode hyper inflationniste elle demande la convertibilité de ses dollars en or. Le 15 août 1971, les États-Unis sont contraints de fermer le guichet de l’or et suspendent la convertibilité du dollar au prix de 35 dollars l’once. Il s’agit en réalité d’un défaut qui ne dit pas son nom et d’une dévaluation du dollar face à l’or.

    Les pays producteurs de pétrole augmentent violemment leurs prix en dollar. Il en résulte un violent épisode inflationniste mondial.

    L’après Bretton Woods : des monnaies flottantes à la dérive

    Début 1976, les accords de la Jamaïque confirment l’abandon de l’or dans le système monétaire. Toutes les monnaies sont dites flottantes, c’est-à-dire que les marchés définissent le taux de change entre monnaies.

    Toutefois, les matières premières, pétrole en tête, se négocient en dollars. Le besoin de dollars n’a donc pas disparu et les pays exportateurs de pétrole sont ensevelis sous les dollars. Les États-Unis vivent désormais en déficit commercial et budgétaire permanent, exportant de la dette libellée en dollars.

    Par ailleurs, le risque de change devient une nouveauté qui conduit au développement de produits financiers sophistiqués 2 . Les fonds spéculatifs fleurissent tandis que les flux financiers se multiplient perdant toute attache avec les flux de marchandises (biens ou services échangés).

    L’ère de l’économie de la dette

    Bien entendu, les pays n’échangent pas des marchandises -biens ou services – contre de la monnaie papier. Ils les échangent contre de la dette. Les réserves de change des banquiers centraux ne sont pas des liasses de billets mais des obligations souveraines émises avec un certain taux d’intérêt.

    C’est ainsi que les pays exportateurs entassent de la dette souveraine libellée en dollar surtout, en euro ensuite et accessoirement en livre, franc suisse, yen,… tandis que les pays déficitaires exportent des promesses de payer un jour peut-être, si tout va bien et quand ils auront le temps. C’est ainsi que l’industrie financière flotte en apesanteur dans le vide.

    Aujourd’hui, la Chine se trouve avec les États-Unis dans le même dilemme que le chef d’entreprise face à son plus gros client qui a une grosse ardoise. Le contraindre à payer c’est le perdre et le perdre, c’est la faillite. Il faut donc composer, gagner du temps.

    La fin de l’économie de la dette en vue ?

    Dans une économie normale et équilibrée, on échange quelque chose contre autre chose. Échanger quelque chose contre rien est soit du ressort de la charité, soit du ressort du vol. La dette n’est pas quelque chose de tangible. Sa valeur ne dépend que de la volonté du débiteur d’acquitter sa dette.

    Lorsque la dette dépasse les capacités d’endettement d’une génération, la génération suivante la répudie. C’est normal, même dans la sphère familiale, un héritage s’accepte « sous bénéfice d’inventaire ».

    Autrement dit, jamais une génération n’a accepté de payer les dettes de la génération suivante. Au pire, cela se termine par une guerre, au mieux cela se termine par un défaut.

    Il est désormais notoire que les déficits des pays développés dépassent les capacités de remboursement d’une génération. Inutile de vous noyer dans des ratios de dettes sur PIB ou autres.

    En France, nous sommes le champion du monde de la pression fiscale. En temps normal, vos impôts sont cependant insuffisants pour financer le train de vie de notre pays qui enchaîne déficit sur déficit (c’est ainsi que le dette grossit inexorablement).

    La crise sanitaire ne sert que de révélateur à une situation dégradée depuis 2008 dans beaucoup de pays passant pour riches, y compris les États-Unis. C’est pourquoi le FMI en appelle maintenant à un nouveau Bretton Woods.

    Il faut être bien naïf pour croire que ce nouvel ordre monétaire mondial consistera à paisiblement déchirer des montagnes de créances douteuses au motif que ce n’est pas grave puisque « tout le monde doit quelque chose à tout le monde » ou autres balivernes du même acabit.

    Tout le monde ne doit pas la même chose à tout le monde et il existe des pays bien gérés dont la balance commerciale est équilibrée et d’autres, dont la France fait partie.

    Il y aura des défauts, des faillites et votre argent sera pris en otage dans ce processus. N’oublions pas qu’un solde créditeur de compte en banque n’est qu’une créance que la banque reconnaît vous devoir, une assurance-vie en euro repose sur de la dette libellée en euros et un billet de banque n’a cours que si la Banque centrale émettrice le tolère.

    Lorsque l’épargne privée sera sacrifiée sur l’autel du nouvel ordre monétaire, il restera encore une partie de la dette à payer.

    À quoi ressemblera le nouvel ordre monétaire et quels sont les risques pour notre argent ? L’histoire nous donne des indications que nous verrons prochainement.

    1. Au niveau mondial, les États-Unis produisent la moitié du charbon, les deux-tiers du pétrole, détiennent plus des deux- tiers des réserves d’or et exportent de nombreux produits manufacturés.
    2. Notamment les produits dérivés. Le prix Nobel français Maurice Allais prévoyait d’ailleurs une crise financière mondiale dès 1999.
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      Les opérations de split d’actions : optimisme ou opportunisme ?

      Sébastien Thiboumery · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 21 October, 2020 - 02:30 · 3 minutes

    Par Sébastien Thiboumery.

    Que vous découpiez une pizza en deux ou en six parts, sa taille restera identique. Il en est de même pour la valeur d’une société en bourse. Lors d’un split, elle décide simplement d’augmenter le nombre d’actions en circulation via la division du nominal de son action.

    Par exemple, une division du nominal par 2 conduit à une multiplication du nombre d’actions par 2 et à une réduction de la valeur de l’action par 2. L’opération est supposée être neutre en termes de création de valeur. Dans ce cas, pourquoi de plus en plus de sociétés réalisent des splits, et pourquoi les investisseurs réagissent de manière positive à ce qui est censé être un non-événement ?

    Combien vaut une part de pizza ?

    En d’autres termes, pourquoi une pizza découpée en six parts vaut plus qu’une pizza découpée en deux parts ?

    La recherche académique est partagée sur les raisons du split. Louis et Robinson [2005] considèrent celui-ci comme un signal optimiste du management, annonciateur de bonnes nouvelles devant faire progresser le cours de bourse. De même, pour Ikenberry et al. [1996], les managers conditionnent le split à des attentes favorables sur les performances futures de l’entreprise.

    En revanche, Lakonishok et Lev [1987] puis Byun et Rozeff [2003] ont montré que les entreprises ont tendance à effectuer un split après une période de croissance substantielle, et performent moins bien par la suite. Enfin, Guo, Liu, et Song [2008] considèrent que le management soutient son cours de bourse, déjà inflaté par une comptabilité agressive, avec l’annonce d’un split.

    Les autres raisons sont d’ordres psychologique et pratique. En effet, pour de nombreux particuliers, une action cotant à un prix élevé paraît chère, alors qu’elle paraît abordable si elle cote à un prix plus bas. Warren Buffet, l’un des plus grands investisseurs, a même succombé à la mode du split en 2009.

    Il est vrai que peu de particuliers peuvent s’offrir une action Berkshire classe A à 300 000 dollars, contrairement à la classe B à 200 dollars. Un split favorise ainsi l’acquisition d’action par les petits actionnaires qui représentent une part grandissante de l’activité boursière (environ 20 % des transactions à Wall Street).

    Tesla ne s’y est pas trompé : près de 30 % de son actionnariat est représenté par des particuliers, et l’action est l’une des plus populaires sur les plateformes de trading . En effectuant un split, la volonté de Tesla est de rester populaire auprès de ces particuliers. L’annonce d’un split permet également pour une entreprise de rester sur les radars des investisseurs et de capter leur attention.

    Alors comment interpréter un split d’action ? Signal optimiste ou bien opportunisme du management ? Apple et Tesla ont annoncé cet été des splits avec des niveaux de fractionnement élevés (Apple : 4 pour 1 et Tesla : 5 pour 1) reflets de parcours boursiers exceptionnels.

    Les dates de splits effectives (fin août) correspondent aux plus hauts boursiers jamais atteints pour les deux titres, qui ont depuis reflué. Le lendemain de son split, Tesla en a même profité pour annoncer une augmentation de capital de 5 milliards de dollars. Les actionnaires entrés à cette occasion sont donc en perte, pour le moment.

    Les opérations de split sont des éléments de frustration pour les tenants de l’efficience des marchés financiers, car lorsque la logique dit 1+1 = 2, la psychologie dit 1+1 = 2 et plus. Et si la psychologie de l’investisseur évolue en fonction du cours des actions dont les prix ne sont plus soutenus par les fondamentaux, alors le risque de perte n’est pas seulement psychologique, il est matériel. Question de logique. Alors split ou pas, investissez de manière rationnelle et prudente.

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      Une cryptomonnaie publique ne servira à rien

      Ferghane Azihari · tests.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 13 December, 2019 - 04:25 · 3 minutes

    bitcoin cryptomonnaie

    Par Ferghane Azihari.
    Un article de l’Iref-Europe

    Après avoir longuement méprisé les cryptomonnaies , les gouvernements semblent désormais s’y intéresser de près. Le magazine Capital révélait récemment les plans de Bercy et des autorités monétaires européennes pour la création d’une cryptomonnaie d’État.

    Ces derniers réagissent à la popularité croissante des monnaies privées comme Bitcoin et à la volonté de grands acteurs comme Facebook de lancer leur propre d’instrument d’échange. Faut-il saluer le changement de mentalité de la classe dirigeante vis-à-vis des crypto-actifs ? Tout dépend bien sûr de ses intentions.

    À première vue, l’idée de cryptomonnaie étatique fonctionnant grâce à la technologie blockchain paraît étrange. Après tout, Bitcoin, la plus illustre des cryptomonnaies, a été créé pour permettre aux détenteurs de monnaie d’échapper aux manipulations discrétionnaires des tiers de confiance officiels qui altèrent la valeur et la qualité de leur instrument d’échange.

    Se revendiquer de la technologie blockchain et du statut de cryptomonnaie ne suffit donc pas à obtenir un certificat de respectabilité. D’ailleurs, sur les 2000 crypto-monnaies en circulation, beaucoup sont à juste titre considérées comme des arnaques par les adeptes des crypto-actifs.

    La promesse du Bitcoin

    Ce n’est pas la blockchain qui fonde la qualité et le principal avantage compétitif de Bitcoin. C’est plutôt la promesse quasiment inaltérable et inscrite dans le protocole Bitcoin que la masse monétaire ne sera pas susceptible d’être manipulée à des fins inflationnistes.

    La « politique monétaire » de Bitcoin est lisible et prévisible. Les détenteurs de Bitcoin savent que le nombre de BTC ne dépassera pas 21 millions d’unités (Figure 1).

    En singeant les modalités d’émission des monnaies métalliques, Bitcoin s’impose une stricte rareté et devient un candidat sérieux pour la fonction de réserve de valeur là où les monnaies officielles sont administrées par des banques centrales inflationnistes (figure 2).

    Figure 1 : évolution de la masse monétaire de bitcoin

    Figure 2 : évolution de la masse monétaire du dollar depuis 1960

    Bien sûr, la rareté intrinsèque de Bitcoin ne le dispense pas de la volatilité et des dépréciations ponctuelles ou durables. Mais la stabilité de l’offre de BTC garantit que l’évolution du cours de la cryptomonnaie soit exclusivement du fait des variations de la demande. À la différence des monnaies officielles, le destin de Bitcoin est entre les mains de ses utilisateurs.

    C’est en ce sens que les projets de cryptomonnaies étatiques doivent être regardés avec circonspection. Si elles venaient à voir le jour, les cryptomonnaies publiques seraient administrées par des Banques centrales dotées d’un pouvoir discrétionnaire sur la masse monétaire. Là où Bitcoin a été pensé pour éviter le risque d’inflation arbitraire et sauvegarder le pouvoir d’achat des détenteurs de monnaie, ce ne serait pas forcément le cas des cryptomonnaies publiques.

    Le fantasme de la société sans cash

    Pire encore, les réflexions sur la digitalisation des monnaies officielles tendent aujourd’hui à se recouper avec le fantasme d’une société sans cash, promu au nom du besoin de renforcer la capacité des banques centrales à manipuler le comportement des épargnants et des consommateurs.

    Dans leur guerre contre les épargnants, les banquiers centraux et leurs soutiens intellectuels redoutent qu’une politique plus agressive de taxation des épargnants via des taux d’intérêt encore plus bas conduisent ces derniers à thésauriser en espèces.

    Des chercheurs affiliés au FMI remarquaient en effet que l’existence du cash imposait une certaine limite aux politiques monétaires dites « ultra-accommodantes ». Une limite que certains souhaitent lever…

    Dans cette hypothèse, une cryptomonnaie publique aurait une finalité diamétralement opposée à Bitcoin. Là où les premières cryptomonnaies privées étaient envisagées comme un instrument de restauration de la souveraineté du consommateur épargnant, les cryptomonnaies publiques risquent d’être utilisées pour l’anéantir définitivement.

    Sur le web