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      Police : peu de moyens et beaucoup de bureaucratie

      Olivier Maurice · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 18 October, 2020 - 03:40 · 9 minutes

    Champigny police

    Par Olivier Maurice.

    Les policiers figurent depuis de bonnes années dans la cohorte des fonctionnaires en colère. À se demander d’ailleurs s’il existe dans ce pays des fonctionnaires qui soient réellement satisfaits de leur sort.

    Pas facile d’être policier dans un pays où la jeunesse d’hier s’amusait à croire que « la France est un pays de flics, à tous les coins d’rue y en a cent, pour faire régner l’ordre public, ils assassinent impunément » et dans lequel l’amalgame « CRSS-SS » est quasiment une médaille d’honneur chez certains grands pseudo-défenseurs autodéclarés de la liberté pour qui tout ce qui est mal porte forcement une moustache, des lunettes teintées et un grand imper en cuir noir .

    Il suffit de voir le nombre de candidats aux dernières élections présidentielles se réclamant héritiers ou ayant été dans leur jeunesse des farouches partisans de la haine anti-flic (ou inversement, de la haine envers la haine anti-flics) pour comprendre les interrogations des policiers à chaque élection ou à chaque remaniement.

    La haine de la police

    Quand ce n’est pas de la haine, c’est tout au moins du manque de respect, voire des provocations, des guet-apens, des lynchages, des tentatives de meurtre

    Le tout dans la quasi-indifférence des médias, qui si prompts habituellement à utiliser les comparaisons hors d’échelle que leur donnent les divers groupes de pression, sont semblent-ils incapables de se rendre compte que 50 commissariats attaqués depuis le début de l’année, ça fait bien plus d’un par semaine ou que 65 000 violences verbales ou agressions physiques par an envers les forces de l’ordre, cela fait un policier ou gendarme agressé en France toutes les 8 minutes.

    Il y a en France quasiment autant d’agressions envers les policiers que de vols avec violence, 20 % de plus que d’agressions sexuelles, huit fois plus que de braquages. La police, qui est supposée protéger les citoyens, est devenue une, sinon la cible des violences de notre société.

    Il est sans doute correct de parler de violence policière, mais alors il faut le faire pour évoquer toute cette violence ayant pris la police pour cible privilégiée.

    Les échecs à répétition

    Comme toujours, l’explication est lapidaire et binaire : soit notre société s’ensauvageonne , entendez par là qu’elle dérive doucement vers une guerre tribale de sauvages importés ; soit notre société se fractionne , entendez par là que la lutte des classes, les inégalités, l’injustice sociale, la démission des parents, les pannes de l’ascenseur social, le défaut d’éducation, de responsabilité citoyenne, le rap et le prix des crayons sont responsables du manque de respect face à l’autorité publique.

    En s’appuyant sur l’une ou l’autre des deux explications, une fois le concours de celui qui a la plus grosse gagné par l’une ou l’autre des parties, l’équipe au pouvoir s’efforce immédiatement de dépenser l’argent des contribuables pour prouver sa théorie.

    On pourrait à la limite passer sur cette transposition de la méthode scientifique à la vie publique : les banlieues, les migrants, les pauvres, et surtout les policiers servant tour à tour de cobayes ; mais ce serait sans compter sur l’incroyable talent de nos bonimenteurs professionnels à faire passer n’importe quel échec patent pour une réussite révolutionnaire et de faire table rase des expériences des autres une fois au pouvoir et d’y installer les siennes.

    Le chaos et la désorganisation de la police

    La police et d’ailleurs avec elle la justice, y perdent surtout un temps incroyable en paperasse, en réorganisation et en démoralisation. Prise en tenaille entre la délinquance qui sent bien la confusion qui règne chez les policiers et une hiérarchie dont l’unique préoccupation est de tenter de faire respecter par ses troupes toute une série d’injonctions contradictoires.

    Il faut des résultats, mais des résultats dans tout : dans les résolutions de crimes comme dans le nombre d’amendes de stationnement, dans l’arrestation de tueurs en série comme dans celle de petits délinquants.

    La police ne fait plus respecter l’ordre public, ne protège plus les biens et les personnes : elle tente tant bien que mal d’exécuter une politique décrite par des lois, les décrets et les notes de service.

    Les moyens et la liberté

    Au bout d’un certain temps, ce qui arrive toujours quand on charge trop une barque. Et dans ce cas-là, il n’y a que deux types de solutions avouables : soit rejeter la faute sur les autres, les parents, l’école, les nouvelles possibilités offertes par le monde, et en dernier lieu, l’irresponsabilité des citoyens… soit invoquer le manque de moyens.

    S’il y a une augmentation des crimes et des incivilités, c’est à cause de la société en perte de repères, c’est parce que les citoyens abusent de leur liberté et parce que l’on ne réglemente pas assez.

    Si la politique mise en œuvre pour corriger cela ne marche pas, c’est que l’on n’a pas suffisamment essayé. Si on n’arrive pas à tout faire, ce ne peut être qu’une question de moyens.

    D’où un cercle vicieux et un enfermement dans la quadrature du cercle : davantage de délinquance, davantage de règles ; davantage de règles, davantage de police ; plus de police, pas assez de moyens ; pas assez de moyens, davantage de délinquance…

    C’est en général alors que le nouveau ministre fraichement débarqué constate l’ampleur des dégâts et réussit parfois à trouver quelques miettes dans le fond de son budget pour réparer les vitres et faire déboucher les toilettes des commissariats.

    Une fois le cataplasme posé sur la jambe de bois, celui-ci s’empresse de retourner inventer de nouvelles lois et de nouvelles priorités sans jamais envisager comment elles pourraient interférer avec l’existant.

    La planification ne marche pas

    Notez que cette maladie ne frappe pas que la police. Les médecins ont récemment fait entendre leur voix face aux manques de moyens qui seraient nécessaires pour essayer de travailler alors que la population ne comprend pas leurs malheurs et se laisse aller à faire n’importe quoi, comme essayer d’avoir une vie un tant soit peu normale.

    Même cause, la planification politique et même résultat, l’effondrement.

    Tout comme les soignants ont été petit à petit transformés en petits soldats d’une politique de santé publique , les policiers ont été transformés en chair à canon d’une politique de sécurité publique qui englobe quasiment tout : de la circulation routière au nombre de personnes assises à la table des restaurants.

    Cette intrusion de plus en plus profonde dans la vie des individus mobilise de plus en plus de forces de police et les détourne totalement de leur mission originelle.

    Même si tout le monde comprend qu’un policier qui met une amende à un conducteur ayant oublié son attestation d’assurance à la maison, c’est en fait un policier de moins pour arrêter les délinquants professionnels et les cinglés, tout le monde préfère s’en prendre aux flics : les contribuables à petite mémoire car ils ont effectivement des raisons de penser que leurs impôts pourraient être mieux utilisés et le caïd car il sait qu’il a de bonnes chances d’avoir devant lui un carnet à souches en uniforme.

    Dans tout les cas, derrière le policier, c’est l’agent de l’État que l’on voit, et pas la personne en charge de vous protéger et de faire régner l’ordre ou de faire appliquer des décisions de justice.

    La loi et la justice

    La police est une fonction régalienne.

    Cela ne signifie pas du tout que le rôle de la police soit de faire respecter la loi. En fait c’est même totalement le contraire : son rôle est d’utiliser la violence afin de réprimer toutes les autres formes de violence, mais de le faire dans le cadre légal, en respectant la loi.

    C’est une atteinte totale aux droits naturels des citoyens que d’en faire un instrument politique.

    C’est également un renversement total du principe de droit et de justice.

    La loi existe pour déterminer de façon claire et objective ce qui est une nuisance et ce qui ne l’est pas, pas pour imposer un quelconque agenda politique.

    Les policiers ont comme mission de servir les citoyens, pas de répondre aux ordres d’autorités administratives ou politiques qui n’ont d’ailleurs comme autre mission que celle de vérifier qu’ils n’outrepassent pas leurs droits et que les fonds qui leur sont attribués sont bien utilisés, pas de les commander, encore moins de les orienter.

    Pour une réforme libérale de la police

    Il est largement temps de changer ce système qui est, comme tant de choses, en train de s’effondrer complètement. Les prochaines élections présidentielles mettront la sécurité au cœur du débat, et verront sans aucun doute comme d’habitude fleurir toute une surenchère de yaka-fokon à base d’augmentations d’impôts et de lois supplémentaires.

    Peut-être émergera-t-il un candidat qui saura reprendre tout ou partie de la philosophie libérale qui a permis à tant de pays de développer des conditions de liberté et de sécurité et de ne pas tomber dans l’avertissement de Benjamin Franklin : « Ceux qui peuvent renoncer à la liberté essentielle pour acheter un peu de sécurité temporaire, ne méritent ni la liberté ni la sécurité. »

    Ces principes sont pourtant simples :

    • la loi ordonne aux policiers et aux magistrats, pas aux citoyens ;
    • la police est au service des citoyens, pas d’une faction ou d’un agenda politique ;
    • nul ne peut être emprisonné, détenu ou condamné à une quelconque peine, même insigne ou financière, sans qu’un juge ne se soit prononcé ;
    • les citoyens déterminent eux-mêmes quelles forces de police les encadrent.

    En dehors de cela, la police est libre d’user de tous les moyens qui lui sembleront nécessaires afin de servir et de protéger le plus efficacement possible la population.

    De toute autre façon, l’inflation sécuritaire incessante conduira à l’effondrement du système. Il n’existe aucune autre option que celle d’une dérive autoritaire, voire dictatoriale, dont il est très improbable que l’État, le délabrement des fonctions régaliennes et la fatigue des policiers puissent assurer la tenue, si tant est que ces derniers veuillent bien se prêter à une telle tentative oppressive.

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      Hygiénisme et criminalisation des comportements déviants

      Marc André · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 15 October, 2020 - 03:20 · 3 minutes

    criminalisation

    Par Marc André.

    Notre beau pays, si bien dirigé par une administration que le monde entier nous envie, mais qu’il ne copie pas, ne cesse de s’améliorer. Il est faible de dire que l’épidémie actuelle fait à ce titre ressortir le meilleur de nous-mêmes.

    Maintenant que l’on teste à tour de bras, nous trouvons un nombre toujours plus significatif de cas positifs dans une population en cours d’acquisition de son immunité collective ; et nos dirigeants, hantés par le souvenir de la canicule de 2003 n’ont de cesse de s’agiter dans tous les sens pour tenter d’enrayer l’inévitable. Le virus se répand, comme bien avant lui celui de la grippe espagnole et celle de Hong-Kong plus récemment.

    Face à l’inéluctable, le gouvernement s’agite pour donner l’illusion qu’il sert à quelque chose, répète tout et son contraire et pense avoir trouvé la martingale en désignant un coupable : la covid c’est la faute des jeunes !

    La covid, la faute des jeunes !

    Ces inconscients s’exposent sans précautions et disséminent le fléau sans aucune considération pour les messages toujours limpides de l’exécutif. Cela est insupportable à tout esprit technocratique détenteur de LA vérité. Que cette dernière soit fluctuante et souvent contradictoire importe peu.

    Le péril c’est la jeunesse et il faut se donner les moyens de la faire rentrer dans le rang. La dernière trouvaille gouvernementale consistant à employer des Brigades Anti Criminalité pour traquer les fêtards pourrait faire sourire, si elle n’était aussi consternante.

    La criminalisation des comportements déviants

    D’abord parce que les mots ont un sens et que s’appuyer sur ces brigades pour imposer la vision administrative du jour — qui ne sera pas celle du lendemain — revient à criminaliser, au sens littéral du mot, des comportements qui relèvent de la liberté individuelle .

    Ensuite, si les jeunes se réunissent sans prendre nécessairement toutes les précautions, c’est parce que les bars où des mesures barrières pouvaient être appliquées ont été fermés. Oui, mais non ! Fermons ces lieux de dépravation et tout le monde s’en portera mieux… hé ben non ! Le virus n’attaque visiblement que la nuit, jamais le jour dans des amphis ou des salles de classe bondées !

    La prochaine étape consistera certainement en toute logique à arrêter les contrevenants et les trainer devant les tribunaux pour mise en danger de la vie d’autrui.

    Tout cela en toute décontraction, la même semaine où deux policiers ont été désarmés par des voyous qui les ont criblés de balles, une quarantaine de jeunes entrepreneurs en distribution de produits psychotropes a pris d’assaut le commissariat de Champigny-sur-Marne et qu’un fonctionnaire de police est entre la vie et la mort après avoir été délibérément renversé par un chauffard lors d’un contrôle routier.

    Dans un pays où le calme règne de si parfaite façon, il est donc tout à fait normal de lancer les BAC aux trousses des étudiants.

    Protéger les plus faibles d’entre nous est une bonne chose. Le faire en culpabilisant la population accusée de propager une infection dont notre État nounou a été bien incapable de prendre la mesure en est une autre. La jeunesse est insouciante, c’est un fait entendu, mais c’est aussi son charme.

    Comment faire porter aux Français et surtout aux plus jeunes la responsabilité de cette crise quand les messages et les actions de nos gouvernants ont été aussi brouillons que consternants depuis le début de cette pandémie ?

    Si d’aventure nous en arrivons au couvre-feu, ne doutons pas que nos zélites auront recours à l’armée. Pendant ce temps-là, les occupants des territoires perdus de la République pourront toujours se livrer à leur passe-temps favori et casser du flic… à condition qu’ils respectent des gestes barrières que personne ne viendra, de toute façon, jamais leur imposer.

    Pauvre France !

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      Déploiement de l’armée et guerre sanitaire : une urgence au sommet de l’État

      Sabine Lula · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 31 March, 2020 - 03:00 · 3 minutes

    armée

    Par Sabine Lula.

    Le 25 mars 2020, Emmanuel Macron a annoncé la mise en place d’une opération militaire baptisée Résilience , dans le cadre de la lutte contre le coronavirus. Bien qu’il ait annoncé que l’armée serait déployée afin d’apporter un soutien à la population, les actions concrètes qui vont être entreprises demeurent floues.

    Il est annoncé que le déploiement militaire ne servira en aucun cas à faire respecter le confinement , bien que certains médecins semblent le demander pour certaines zones sensibles ; quelles seront alors ses missions principales ?

    Mettre un nom sur le peu qui est déjà en place ?

    Depuis le début de la crise, l’armée est déjà intervenue plusieurs fois dans les zones les plus fortement touchées, par exemple en installant un hôpital militaire sur le parking de l’hôpital civil de Mulhouse.

    Résilience devrait donc poursuivre de façon plus centralisée, et mettre en place ces mesures d’urgence à échelle nationale. Il est prévu également que les militaires effectuent des missions de désinfection dans les grands centres urbains.

    On peut craindre cependant la centralisation et le monopole d’action de l’État dans la gestion d’une crise d’une telle ampleur alors qu’il semble bien incapable de faire respecter l’ordre sur l’intégralité du territoire , encore moins quand des vies sont en jeu.

    L’appui martial ne rendra certainement pas les membres du gouvernement – qui nous ont prouvé plus d’une fois qu’ils pouvaient tout à fait sacrifier la santé des Français si cela leur offrait davantage de pouvoir – plus compétents, mais sûrement plus menaçants aux yeux d’une population déjà trop privée de libertés individuelles.

    « Le poisson qui étouffe sur la berge s’agite toujours plus que celui qui est dans l’eau »

    On peut alors légitimement se demander si la mobilisation « officielle » de l’armée ne serait pas une ruade vaine d’un État ruiné, mis à genoux par la crise sanitaire.

    Un État en ruines

    Depuis le début de la crise, la communication a été l’arme privilégiée des élites, au détriment des mesures concrètes qui pourraient sauver des vies. La France semble toujours avoir un temps de retard et agir par défaut, face aux politiques menées par les voisins.

    On peut notamment citer la fermeture des frontières : si la République Tchèque fut le premier pays de l’UE à interdire l’entrée sur le territoire aux résidents des pays « à risque » dès le 13 mars 2020, puis une fermeture totale des frontières le 16 mars – alors que le patient zéro y est arrivé le 1er mars 2020 – la France a attendu que tous les pays voisins fassent de même avant d’oser fermer ses frontières.

    Dans un contexte pareil, la mobilisation d’une armée qui ne sait pas dire pourquoi on l’appelle apparaît comme la dernière absurdité en date. Mais il ne faut cependant pas oublier que l’usage de la force, qu’elle soit psychologique avec le matraquage des médias ou physique avec la mise en place éventuelle de contrôles musclés, est peut-être le dernier moyen qu’ont nos élites pour assurer un contrôle sur cette cocotte-minute qu’est la France. Encore plus quand certains redoutent d’avoir à rendre des comptes sur leur gestion calamiteuse .

    Il convient donc de surveiller ce soudain sursaut de nos élites, et leur bras armé martial. Seul le temps nous dira s’il s’agit là d’une énième manœuvre de communication de crise pour sauver les apparences et conserver leur pouvoir, ou bien le début de quelque chose de plus grave .

    Quoi qu’il en soit, rester sur ses gardes, faire attention à soi et à ses proches, et chercher le peu de liberté qu’il nous reste dans ce pays, en d’autres termes rester indépendant, voilà le meilleur moyen de survivre à cette crise sanitaire, et à toutes les autres qui en découleront.