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      La « bassine » de Sainte-Soline : les factieux à la manœuvre

      André Heitz · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 25 November, 2022 - 03:30 · 12 minutes

    Sans eau, il n’y a pas d’agriculture – de production alimentaire pour l’Homme et les animaux (qui, en majorité, nous nourrissent à leur tour) ou à d’autres fins. Depuis des millénaires, l’irrigation est pratiquée là où elle est nécessaire ou utile, et possible, en prélevant l’eau dans le milieu directement ou après stockage.

    Les « bassines » du Val de Sèvre – devenues « méga-bassines » dans le discours militant-militant et médiatique-militant ou médiatique-indigent – sont des « retenues de substitution » (ou des « réserves de substitution ») dans le langage non connoté.

    On trouvera plus d’explications dans les magnifiques fils Twitter de Terre à Terre.

    Et « La réserve de substitution : kesako ? » vous livrera l’expérience d’une agricultrice connectée à une « bassine » en Vendée.

    Compte tenu de la topographie et de la nature des sols, ce sont des bassins pour partie creusés et pour partie surélevés, étanchéifiés par une bâche. Ils sont remplis quand l’eau est abondante (et part pour partie à la mer), en hiver, par pompage dans le milieu, essentiellement dans les nappes phréatiques. L’eau sert à l’irrigation pendant la saison de végétation, en été, en substitution de pompages réalisés actuellement, quand le niveau des cours d’eau et des nappes est faible.

    Cette description simple suffit à elle seule à illustrer l’intérêt de ces projets d’aménagement. Intérêt aussi démontré dans un rapport rendu public le 7 juillet 2022 du Bureau de recherches géologiques et minières de Nouvelle-Aquitaine.

    Les « bassines » sont intégrées dans un « projet de territoire bassin de la Sèvre Niortaise – Marais poitevin » et un « contrat territorial de gestion quantitative (CTGQ) Sèvre Niortaise – Mignon 2018-2022 ».

    Comme tout projet d’aménagement, les « bassines » ont été très contestées mais elles ont aussi fait l’objet d’une concertation qui a abouti le 18 décembre 2018 à un accord des parties prenantes moyennant un réaménagement et des engagements pris par les agriculteurs concernés.

    Mme Delphine Batho s’était félicitée de cet accord en son temps et avait publié les détails des avancées . Elle a changé d’avis depuis : on a dû la bassiner à cette fin…

    Il y a eu des jusqu’au-boutistes , dont… la Confédération paysanne censée défendre les intérêts des agriculteurs. Et c’est ainsi qu’on en est arrivé à une guérilla judiciaire et aux « manifestations ».

    Les arguments de l’écodébilité

    Il serait fastidieux de passer en revue les arguments des opposants aux « bassines » qui, à l’évidence, doivent être simples, sinon simplistes, et percutants quels que soient leur pertinence et leurs liens avec la réalité.

    Mais prenons un exemple : « Paysans, nous sommes résolument contre les mégabassines » proclament dans Reporterre le supplétif de l’altermondialisme – j’ai nommé la Confédération Paysanne – et « 150 associations ». En bref, « [i]ls appellent à transformer nos pratiques agricoles pour préserver la nature et non l’exploiter . » On ne sort pas des incantations !

    Premier élément dans le gloubi-boulga argumentatif, on aurait « fait croire qu’elles [les bassines] se remplissaient avec de l’eau de pluie, sans pompage dans les nappes phréatiques ! »

    En réalité, et Reporterre l’a relevé dans une note en bas de page, l’ancien ministre de l’Agriculture Julien Denormandie avait déclaré que « le projet de bassines consiste à récupérer les eaux issues des pluies diluviennes de l’hiver pour les dédier à l’irrigation agricole » (c’est nous qui graissons).

    On a un condensé de la « pensée » anti-bassines avec : « Ces dispositifs privatisent en réalité un bien commun au profit d’une minorité d’agriculteurs inféodés au système agro-industriel ».

    Mais la pompe individuelle qui prélève l’eau de la nappe en été « privatise » aussi « un bien commun », lequel peut avoir vocation d’être ainsi privatisé – contre redevances – pour répondre à des intérêts économiques, ici dans l’intérêt public, à savoir la production agricole et alimentaire. Rien de neuf non plus pour la « minorité d’agriculteurs », aucun aménagement d’irrigation n’étant en mesure de s’étendre à tous. Et avec l’inféodation « au système agro-industriel » on tombe dans la contestation des éléments fondamentaux de notre société.

    Ces gens osent même affirmer que « [c]ette privatisation se fait de plus au détriment de notre souveraineté alimentaire » !

    L’explication tient à un autre épouvantail, le fabuleux , le vraiment fabuleux maïs :

    « L’eau pompée dans les nappes phréatiques pour les mégabassines est destinée avant tout à l’irrigation du maïs, inadapté à nos régions et cultivé en partie pour être exporté ou vendu aux producteurs d’aliments industriels. »

    Cela se passe de commentaire. Mais ajoutons qu’ils reprochent aussi au maïs de produire « des céréales en quantité pharaonique » – plus précisément au « tout maïs [qui] est l’incarnation d’un système absurde écologiquement et économiquement » (et qui est du reste rare en pratique)…

    On peut continuer ainsi ad nauseam . Le tribunal de l’opinion dite publique voit aussi défiler des gens plus ou moins connus, en mal de notoriété ou soucieux de leur influence pour dézinguer les retenues de substitution ou simplement susciter le doute, prélude à un « alors, ne faisons rien, arrêtons tout ». Avec parfois des arguments qui laissent pantois. On en trouvera un petit florilège sur mon blog .

    La montée des factieux

    Les/des opposants aux « bassines » ont donc organisé des « manifestations » les 30 et 31 octobre 2022 à Sainte-Soline, avec l’objectif à peine voilé de pénétrer dans le chantier et de perpétrer quelques actes de vandalisme. Le succès a été au rendez-vous : un morceau de canalisation a été scié à la disqueuse et porté en triomphe… sauf que c’est un élément du système d’irrigation d’un agriculteur et non un élément de la future alimentation de la « bassine ».

    Les « manifestations » ont été interdites par la préfète des Deux-Sèvres. Les organisateurs ont décidé de passer outre et ont publié une tribune dans Libération , « Méga-bassine à Sainte-Soline : malgré l’interdiction de manifester, la mobilisation continue », contresignée par « près de 200 personnalités du monde politique, syndical, associatif ». On peut le dire autrement : Libé a publié…

    « Un référé liberté va être déposé contre ces arrêtés par la CGT et Solidaires (qui portaient la déclaration de manifestation). […] Par cette tribune nous signifions notre entier soutien aux collectifs et organisations signataires de l’appel à mobilisation et ré-affirmons la primauté de la liberté fondamentale de manifester. »

    La justice a confirmé l’interdiction. Notons que Libération n’a pas jugé bon d’en faire état alors qu’il a fait une couverture extensive des événements. On appelle ça de l’« information de qualité ».

    On connaît la suite…

    Une recherche rapide dans la tribune (à laquelle échappent ceux qui n’auront pas précisé leur affiliation) nous donne… 101 députés, 74 NUPES/FI et 27 EÉLV. Il y a aussi 18 avocats, essentiellement de Paris et de la Couronne, pour plaider la primauté du droit de manifester sur l’ordre et la sécurité publiques et la protection des biens et des personnes – mais tout se plaide, n’est-il pas ?

    Il se sera donc trouvé tout ce beau monde, la grande majorité chargés de voter les lois, pour appeler à violer les lois de la République et, comme c’était à prévoir, à cautionner les troubles à l’ordre public – y compris par des tirs de mortiers et le jet de cocktails Molotov, de boules de pétanque et de cailloux ramassés sur place contre les forces de l’ordre.

    Et lors de la manifestation de samedi, on a vu parader des participants ceints d’une écharpe tricolore, voire dans le cas de Mme Lisa Belluco, députée ECO de la Vienne, provoquer les forces de l’ordre, pour ensuite prétendre avoir été bousculée et frappée et porter plainte…

    Il s’ensuivit un feu d’artifice de réactions outrées – contre les autorités et en particulier le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin – sur les réseaux sociaux et dans des médias complaisants, plus préoccupés par le buzz que par la qualité de l’information et, surtout, la déontologie journalistique.

    Ce fut aussi un concours d’outrances – qui semble s’être un peu calmé après l’ incroyable sortie du député Rassemblement national Grégoire de Fournas .

    Le monde agricole – mais pas que – a aussi été victime des querelles inter- et intra-partisanes, des coups d’éclat médiatiques et des concours d’egos.

    Les mots ont un sens, surtout par les temps qui courent : l’« écologie de combat » de Mme Sandrine Rousseau est susceptible de constituer un appel à toutes formes d’actions et d’atteintes graves au vivre ensemble.

    Notons que les défenseurs des réserves de substitution et plus généralement de l’agriculture (la production alimentaire, etc.) ont été notablement absents.

    Le piège des factieux

    Les déclarations enflammées s’inscrivent en droite ligne dans la stratégie déployée par une partie de la NUPES dans les médias, sur les réseaux sociaux et dans une Assemblée nationale de plus en plus tumultueuse et guignolesque.

    Revenons un instant sur la procédure de référé introduite par, en quelque sorte, deux syndicats prête-noms, tout de même assistés par l’avocat habituel des opposants aux bassines. La Nouvelle République écrit :

    « Ce tour de passe-passe n’est pas innocent : il vise par avance à rendre caduc l’argument principal de la préfète, le risque de trouble à l’ordre public […] jamais les deux syndicats, habitués des manifestations, toujours autorisées, n’ont été mis en cause dans ces possibles délits. »

    Mais que plaidaient-ils, notamment :

    « Il [l’avocat] conteste aussi l’argument selon lequel la préfecture serait dans l’incapacité d’assurer le maintien de l’ordre : « La presse nous annonce 1600 à 1700 gendarmes déployés sur place, plus huit hélicoptères dans le ciel ! » »

    C’est « pile, je gagne ; face, tu perds »…

    La signature d’une tribune appelant implicitement, sinon plus, à passer outre aux arrêtés préfectoraux était déjà un acte d’insubordination par rapport aux lois de la République. Le port de l’écharpe dans une manifestation interdite ajoute une atteinte grave à l’un des grands symboles de la République.

    Que peut faire le gouvernement ?

    Le gouvernement n’a pas été d’une grande clarté.

    Nous avons un gros problème quand, le samedi 29 octobre 2022, au matin, l’invité du weekend de France Inter , Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, déclare que « la mobilisation se comprend dans la finalité » et que « les manifestants dénoncent « quelque chose de juste » ». Il a tenu par ailleurs des propos qui ne débordaient pas d’enthousiasme pour des aménagements s’inscrivant pourtant dans une transition écologique.

    Le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire Marc Fesneau n’a pas été très loquace en amont de la manifestation. Et pour ses déclarations d’après , les médias ont surtout relevé sa condamnation de la violence.

    La Première ministre Élisabeth Borne s’est aussi fait attendre : il a fallu une interpellation au Sénat, mercredi 2 octobre 2022. On peut ne pas aimer M. Emmanuel Valls, mais il se serait sans doute exprimé sans attendre.

    Dans le cas des députés, que peuvent faire le Bureau de l’Assemblée Nationale et les partis qui ne sont pas en cause ?

    Imposer des sanctions serait interprété comme un aveu de faiblesse, une tentative de museler une opposition qui ne manquera pas de prendre la posture du martyr et de redoubler d’outrances contre le président de la République, le gouvernement et le groupe parlementaire majoritaire ne disposant pas d’une majorité de gouvernement.

    Ne rien faire, c’est tolérer, implicitement cautionner une inquiétante dérive, une modulation des valeurs républicaines par des individus et des groupes en fonction de ce qui leur plaît, ou ne plaît pas.

    Quand les bornes sont dépassées, il n’y a plus de limite

    On peut craindre que le gouvernement choisisse la deuxième option au risque de l’escalade. Deux semaines après les « manifestations » et les débordements sur place et dans les médias et sur les réseaux sociaux, on est passé à autre chose.

    Les atermoiements du gouvernement, dont seul M. Gérald Darmanin était en première ligne, et le soutien des NUPES-FI et EÉLV ont déjà produit leurs fruits : le mercredi 2 novembre 2022, écrit par exemple Le Monde ( c’est nous qui graissons ), où ça ?

    « Des représentants du collectif Bassines non merci, des Soulèvements de la terre et des « 150 composantes » qui soutiennent le mouvement sont revenus aux abords du chantier, mercredi 2 novembre, pour fixer un « ultimatum » à l’État : l’arrêt immédiat des travaux à Sainte-Soline, la suspension du projet de création de seize réserves sur les bassins de la Sèvre niortaise et du Mignon (Deux-Sèvres, Charente-Maritime et Vienne) et « la prise d’un moratoire national sur le stockage de l’eau [à usage agricole] en France ». »

    Dans une analyse fort pertinente faite à C à Vous le mercredi 3 novembre 2022, Mme Christiane Lambert, présidente de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), relevait que dans la « manifestation » de Sainte-Soline, on voulait un mort, un Sivens bis .

    Les images diffusées par la gendarmerie nationale montrent que ce mort aurait pu se trouver du côté des forces de l’ordre. En d’autres termes, on est au bord de l’insurrection.

    La France est dans de beaux draps.

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      Écologisme, wokisme, féminisme : les leurres de l’hydre

      Pascal Avot · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 24 November, 2022 - 04:15 · 6 minutes

    Si, à la suite d’ Alain Besançon, l’on considère que l’idéologie est :

    1. Une croyance délirante
    2. qui se prend pour une science exacte et
    3. qui entend prendre le pouvoir afin de
    4. mettre en coupe réglée la totalité de l’activité humaine
    5. dans le but ultime d’anéantir toute forme de civilisation,

    nous vivons à n’en pas douter une ère idéologique.

    Le mouvement woke , l’ écologisme , le féminisme , pour ne prendre que ces trois exemples les plus frappants du moment, correspondent parfaitement à la définition besançonienne de la prise d’assaut du réel par l’incendie idéologique.

    Les trois ressemblent étrangement à des maladies mentales. Les trois sont persuadés d’être intellectuellement aussi rationnels, aussi certains, aussi fiables que l’astrophysique.

    Les trois ont pour objectif la conquête de l’État, soit par l’élection, soit par la révolution, soit par une guerre civile froide et hybride composée de pression médiatique, de combats juridiques et d’entrisme institutionnel.

    Les trois ont la ferme intention de changer le monde en changeant l’Homme, qu’il le veuille ou non.

    On affirmera donc volontiers que wokisme , écologisme et féminisme sont de dangereuses idéologies. Toutefois, la prudence doit nous inciter à aborder le problème sous un autre angle.

    L’histoire de l’idéologie

    L’idéologie a une histoire. Elle a même une préhistoire : la Révolution française . C’est avec elle que naît la volonté enragée de quadriller la vie au nom de la Raison. Cette volonté se traduit par un système politique athée, monopolistique et tout-puissant. Et cette toute-puissance mène droit à la Terreur , à la famine et aux massacres de masses. La Révolution française met en place un prototype du totalitarisme qui servira de diapason à Lénine et à ses disciples sous toutes les latitudes.

    Mais Robespierre n’a que des idées et de la rage et cela ne suffit pas : il ne dispose pas d’une idéologie suffisamment structurée, architecturée, systémique. Au pouvoir, il improvise. Il a une vision dépourvue de méthode et, malgré l’intensité de ses intuitions, il échoue.

    Ce n’est qu’au XIX e siècle que ses chimères se dotent d’un squelette et d’organes et deviennent le monstre totalitaire : l’idéologie se constitue comme une science de la réalité et une science du pouvoir. Netchaïev et Bakounine , Marx et Engels , seront les premiers docteurs Frankenstein de cette évolution. Il y en aura bien d’autres par la suite.

    À la fin du XIX e siècle, la bête est prête à bondir sur le monde. Selon les périodes, les pays et les auteurs, elle se nomme « social-démocratie », « socialisme », « communisme ». Le premier parti de Lénine est le Parti ouvrier social-démocrate de Russie, fondé en 1898. Il compte une poignée de membres. Nul ne peut deviner qu’un siècle plus tard, descendant direct de ce groupuscule, le Parti communiste chinois, muni d’exactement la même idéologie, comptera des dizaines de millions de membres.

    Tout bascule à la fin de la Première Guerre mondiale.

    Faisant preuve d’un flair et d’un opportunisme impressionnants, Lénine renverse le tsarisme. À part lui et son gang, la planète entière pense que le nouveau régime bolchévique est une pitoyable farce et qu’il ne tiendra pas plus de quelques semaines. Hélas, la farce est une tragédie et elle va durer beaucoup plus longtemps qu’on ne pense et s’étendre sur les cinq continents. Malgré les succès spectaculaires de la démocratie et du capitalisme, le XX e siècle sera constamment pris en otage par l’idéologie de gauche comme Saint-Pétersbourg l’a été par les Bolchéviques. Il est fort possible que le XXI e lui ressemble.

    Parfaite illustration de cette mainmise du socialisme sur l’Histoire : la Seconde Guerre mondiale . Elle est déclenchée par un socialiste, Adolf Hitler , et elle a pour conséquence l’extension cyclopéenne de l’empire d’un autre socialiste, Joseph Staline . L’alpha et l’omega de ce conflit inouï, c’est l’idéologie. C’est elle qui se répand comme une pandémie. C’est elle qui rend fous les peuples et qui les extermine. C’est elle qui invente des maux que l’humanité n’avait aucunement imaginés jusque là.

    Wokisme, écologisme, féminisme : l’idéologie est contagieuse

    Le dernier livre d’Alain Besançon s’appelle Contagions . L’idéologie est contagieuse. Elle progresse suivant le même schéma que la mégalomanie et la paranoïa, ces « folies partagées », comme disent les psychiatres.

    Elle se transmet par la parole, par l’image, par le sentiment d’injustice, par la peur, la violence, la torsion du bon sens et le détournement de l’intelligence. Elle peut prendre l’apparence d’un bain de sang ou d’un cours de philosophie.

    Impossible d’en isoler le virus, sinon dans cette formule : « S’il existe des gens malheureux, c’est parce qu’il existe des gens heureux et il suffit d’éliminer ces derniers pour que règne le bonheur universel. » Vous pouvez remplacer « gens heureux » par « bourgeois », « riches », « juifs », « chrétiens », « réactionnaires », « pollueurs », « mâles », « blancs ». L’idéologie est tout-terrain.

    Les idéologies actuelles comme l’écologisme devraient-elles exister ?

    C’est pourquoi il est loisible de se demander si les mouvements woke , écologiste et féministe existent vraiment : s’ils ne sont pas, tout bonnement, des excroissances conjoncturelles du socialisme et, ce qui devrait nous inquiéter, des leurres. Car plus on s’indigne pour une statue de Victor Hugo barbouillée par des imbéciles, pour un délire supplémentaire au sujet de l’empreinte carbone, ou un lynchage de plus de la mentalité masculine par des lesbiennes endurcies , moins on prend pour cible prioritaire, nécessaire et suffisante, la maison-mère de toutes ces gargouilles : le socialisme.

    Greta Thunberg n’est pas Trotsky, ni Himmler, ni Pol Pot. Elle n’a tué personne.

    « Ça ne saurait tarder ! », répondent les catastrophistes de droite. Pendant ce temps, tandis qu’ils s’escriment sur les trolls de la déconstruction, Xi Jinping achète la dette de notre Sécurité sociale. Et lui, des camps de concentration emplis d’innocents qui agonisent, il en a à revendre.

    Comparée à la CGT qui bloque le pays à la moindre occasion, que pèse une manif d’adolescents arc-en-ciel brandissant des pétitions et des hashtags ? « Greta Thunberg, combien de divisions ? », aurait judicieusement demandé Staline. Ainsi nous égarons-nous et nous nous épuisons dans des batailles de polochons contre des dragons en mousse.

    Et s’il n’y avait qu’un seul combat à mener, toujours identique depuis 1917 et qui a donné tant de héros, Churchill, Soljenitsyne , Orwell ?

    On ne peut qu’être frappé par le fait que ni Le Pen, ni Zemmour, ni Pécresse, n’ont frontalement attaqué le socialisme pendant l’élection présidentielle. C’est pourtant bien lui qui hante le cerveau d’Emmanuel Macron : s’il est woke , écologiste et féministe, c’est parce qu’il est socialiste.

    Certes, le président est à géométrie variable, flou, insaisissable, mais il est profondément contaminé : idéologisé.

    « La langue de bois ne veut pas être crue, elle veut être parlée », écrit Alain Besançon. Elle est la langue maternelle de Macron. La dette au grand galop, le confinement aveugle, l’antiracisme de salon, c’est du socialisme.

    Distraits par les innombrables gueules de l’idéologie crachant des fumées multicolores, nous ne faisons plus notre travail, le seul qui vaille : poignarder le cœur rouge de l’hydre.

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      La fabrication du consentement : le pass carbone arrive

      h16 · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 22 November, 2022 - 08:30 · 6 minutes

    Les politiciens sont rarement les crayons les plus affûtés de la trousse mais tous comprennent toujours très vite qu’il ne faut jamais gâcher une bonne crise : si celle-ci permet d’accroître son pouvoir, tout sera donc fait pour ! Il en va dès lors de la faillite de FTX comme du reste et déjà les opportunistes se bousculent pour proposer de nouvelles bordées de régulations à la suite de cette débâcle.

    Difficile de ne pas noter non plus l’engouement subitement renouvelé de certains États pour les cryptomonnaies de banques centrales : la faillite de FTX entraînant d’autres dominos dans sa chute, il semble devenir impérieux d’envisager, tant qu’on peut le faire, un changement paradigmatique rapide du système financier actuel.

    Et dans ce cadre, il n’est donc pas étonnant de voir se multiplier les actions législatives ou gouvernementales pour pousser ces CBDC .

    Ces cryptomonnaies seraient en effet fort pratiques (et pas seulement pour camoufler l’inévitable effondrement du système monétaire international) : en imposant à chaque individu une numérisation et une centralisation de la monnaie, les États peuvent de facto interdire ou limiter toute transaction qui ne serait pas à leur goût ou au goût des politiciens à leur tête…

    Mais même s’il est ardemment désiré par les dirigeants actuels, l’avènement des CBDC n’en reste pas moins incertain : certains pays ont tenté l’instauration de ces cryptomonnaies fort pratiques pour un contrôle social étanche et totalitaire (c’est le cas du Japon, du Danemark ou de l’Équateur par exemple) et ont renoncé au procédé. Pour le moment tout au moins.

    Cependant, rassurez-vous : si ces cryptomonnaies de banque centrales ne peuvent être mises en place aisément, alors l’élite a déjà autre chose sous le coude. C’est probablement pour cela qu’on entend beaucoup parler (notamment en France) d’un « permis carbone » ou d’un « pass carbone » qui trouve très – trop – souvent sa place dans les petits papiers des médias de grand chemin tout acquis à cette cause. Difficile ces derniers jours d’échapper aux antiennes lancinantes de BFM TV sur le sujet tant l’assaut est visible.

    Ici, la petite musique joue constamment et de moins en moins discrètement un message anxiogène permanent rappelant sans arrêt que 1. le réchauffement climatique est (forcément) une calamité et 2. qu’il est évidemment de notre faute, sans aucune échappatoire.

    Peu importe en réalité que même dans le pires scénarios ce réchauffement ne soit que très modeste (on parle d’un degré, pas de 10 ou de 50). Peu importe que ce réchauffement améliorerait la vie de milliards d’humains ne serait-ce que parce que les rendements agricoles augmenteraient ou qu’il n’y aurait plus besoin de se chauffer en hiver (merci la baisse en besoins énergétiques !) – et au fait, non, la terre ne s’assèche pas, elle reverdit .

    Peu importe que les prédictions catastrophistes ne se sont jamais réalisées en 50 ans, que les eaux refusent de monter , que les catastrophes climatiques sont moins nombreuses et qu’elles font de moins en moins de morts, non, vraiment, peu importe tout cela.

    Ce qui importe n’est pas la réalité mais que le message soit anxiogène et doit faire porter la responsabilité sur chacun d’entre nous pour qu’ensuite les promoteurs de ce message, les politiciens avides de pouvoir, puissent pousser leur solution, celle qui (comme par hasard) augmente leur pouvoir et leurs capacités d’influencer nos existences tout en éliminant consciencieusement toute autre solution qui, elle, nous libérerait de leur emprise.

    Et cette « solution », c’est bien évidemment le contrôle total, ultime, minutieux et micrométrique d’absolument toutes vos activités : quoi de mieux qu’un « pass carbone », voie royale pour ce contrôle ? Quoi de mieux que de vous couper l’énergie si vous ne vous comportez pas comme il faut , ce comme il faut étant défini de façon arbitraire précisément par ceux qui ont toujours menti sur tout et qui continuent à le faire et toujours à votre détriment ?

    Le mieux serait sans nul doute un « pass carbone » directement intégré avec les paiements – le mélange de l’enfer parfait, à mi-chemin entre le « permis carbone » et les CBDC – comme le proposent du reste certaines banques .

    Bien sûr, la plupart des citoyens comprennent comment la nasse est en train de se resserrer autour d’eux et qu’elle n’aboutit qu’à un asservissement sans limite. Logiquement, la majorité ne veut pas se retrouver prisonnière des élucubrations d’une ultra-minorité écoloboboïde paranoïaque, hypocondriaque et hystérique au sujet du climat.

    Alors les médias, en bons petits soldats de politiciens et de lobbies, vont fabriquer une majorité de toutes pièces : avec des questions habilement construites, des sondages montreront qu’une majorité entend se plier aux nécessaires mesures pour lutter contre la menace inventée.

    Navigant plus ou moins subtilement entre les tautologies (auxquelles les Français répondent par oui, ce qui est rassurant puisque ce sont des tautologies) et les questions lourdement chargées (« prêt à réduire votre consommation ? », sachant que consommer davantage coûte plus cher), les résultats de sondages habilement conçus pour obtenir cet assentiment global obtiennent… un assentiment global de la population. Pratique et malin !

    De la même façon, on peut clairement lire que les interdictions et les obligations ne plaisent pas du tout (les Français y sont clairement défavorables) mais malgré tout on ne s’empêchera pas de pousser l’idée que le 110 km/h sur autoroute serait accepté par la majorité des Français .

    Là encore, la façon dont la question est posée permet de voir l’entourloupe (« accepteriez-vous de vous limiter à 110 km/h sur autoroute pour réaliser des économies d’énergies/pour lutter contre le changement climatique ? ») et de comprendre comment une contrainte personnelle a ainsi été transformée en obligation générale (avec prunes à la clef) par la magie d’une propagande bien menée et d’une petite musique répétée sans arrêt sur le mode « ça y est, c’est décidé , vous n’y échapperez pas »…

    Ceux qui ont deux sous de bon sens comprennent, même si c’est parfois encore un peu confus, que ces CBDC, ce « permis énergétique » ou ce « pass carbone » ne sont que les jalons avant l’asservissement total de la population.

    En réalité, leur mise en place dépend essentiellement d’une immense opération de psychologie sociale construite de toutes pièces sur la peur et la répétition d’un discours anxiogène afin de faire croire à la majorité qu’elle est minoritaire et que chacun d’entre nous est bien seul, isolé à penser ce qu’il pense. Tenez-le vous pour dit, c’est certain, les médias le répètent : la majorité désire cet asservissement.

    C’est forcément vrai puisque les médias ne mentent jamais.

    Sur le web

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      Greta a ressuscité Einstein, par Jean-Paul Oury

      Frédéric Mas · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 20 November, 2022 - 04:15 · 4 minutes

    L’écologisme comme idéologie illibérale avait trouvé son égérie avec Greta Thunberg , mais il semblerait, autant par commodité que par opportunité, que sa rhétorique ait glissé de l’antiscience au scientisme le plus étroit.

    Pour Jean-Paul Oury , qui signe un essai au titre évocateur Greta a ressuscité Einstein , c’est désormais au nom du « progrès scientifique » bien compris que les écolos cherchent à imposer leur vision du monde à l’ensemble de la population.

    La « science » comme idéologie

    La « science » dont se réclame Greta n’a pas grand-chose à voir avec l’ensemble des pratiques ordinaires des labos et des centres de recherches. Il s’agit plutôt d’un instrument politique, d’un élément de langage aux mains de ses thuriféraires pour imposer un certain nombre de politiques publiques délivrées comme autant de vérités révélées, indiscutables par le commun des mortels, entendez, ceux qui n’appartiennent pas aux classes dirigeantes technocratiques.

    Aux mains des technocrates, l’idéologie de la science dont se prévaut l’écologisme devient un système de domination imposant ses règles et s’opposant clairement aux institutions libérales et démocratiques.

    Une fois instrumentalisée politiquement, « la science » se fait la servante de plusieurs régimes politiques possibles poussés par les nouveaux militants écolo : la climatocratie, la covidocratie, la biodiversitocratie, la collapsocratie et l’algorithmocratie.

    La climatocratie se sert du réchauffement climatique bien réel pour installer la peur, étendre la sphère gouvernementale et produire des interdits. Le style catastrophiste qui en véhicule le message ne supporte aucune critique, aucun dissident et aucun pas de côté. Au nom du « consensus scientifique » sur le sujet, le pouvoir politique l’impose comme vérité révélée abolissant toutes les limites et les normes qui autrefois définissaient le gouvernement représentatif classique.

    La covidocratie repose sur les mêmes ressorts : s’appuyer sur une pandémie bien réelle pour ensuite consacrer politiquement un groupe d’experts devenu collège sacré et dont les décisions valent paroles d’Évangile pour initier des politiques publiques exceptionnelles.

    Jean-Paul Oury revient avec précision sur la manière dont le docteur Fauci aux États-Unis a assis son autorité scientifique à force de combines politiques, comme la polémique « Raoult » qui aurait dû rester une querelle entre spécialistes mais est devenue politique sous la pression confiscatoire des technocrates. L’idéologisation de la médecine qui en a résulté a considérablement atteint la confiance accordée aux praticiens par leurs patients.

    C’est aussi le catastrophisme écologique qui motive les tenants de la biodiversitocratie. Ce qui menace l’humanité, c’est la fameuse sixième extinction supposée se dérouler devant nos yeux, sous le regard imperturbable des dirigeants accusés d’immobilisme. Pour remédier à la fin de l’humanité annoncée, tous les moyens sont bons et certains de ses idéologues sont même prêts à défendre la dictature de salut public. Si la fin de l’Histoire est réelle, tous les coups sont permis, même l’anéantissement de la démocratie et des libertés individuelles.

    L’idéologie sous couvert de science

    Mais « la science » n’est pas seulement instrument de la nouvelle écologie politique. Jean-Paul Oury rappelle que la politique peut également maquiller l’idéologie en science quand cela lui convient, comme c’est le cas pour la collapsologie et l’algorithmocratie.

    Dans le premier cas, « la science de l’effondrement » est une construction problématique qui ne correspond à rien de connu en pratique :

    « (…) Au lieu de compiler les données et de tirer des statistiques sans aucun présupposé, ils ont posé une hypothèse a priori qui est celle que « la civilisation occidentale nous menait à notre perte » et on voit bien dans leurs exposés successifs qu’ils font une sorte de cherry picking de toutes les données qui corroborent leur hypothèse de départ sans tenir compte de celles qui pourraient l’infirmer. »

    Comme la collapsologie, l’algorithmocratie détourne la science au profit de la politique, cette fois en s’appuyant sur la planification technologique. Il s’agit ici de mettre les nouvelles technologies au service de la reprogrammation des comportements humains. À l’heure où certains évoquent avec gourmandise la possibilité d’adopter un permis carbone , le propos est à la fois clairvoyant et glaçant.

    Il est ici difficile de rendre compte en quelques lignes de la richesse de l’essai comme de la volonté constante de son auteur d’exposer et de déconstruire avec minutie les diktats du nouveau scientisme écologiste. Jean-Paul Oury s’attaque à l’instrumentalisation des sciences mais bien évidemment il ne condamne pas la science. C’est au nom du progrès et de la philosophie des Lumières que le directeur de publication de l’excellent site The European Scientist prend la plume et défend l’intégrité de sa pratique contre sa récupération par ses ennemis d’aujourd’hui. L’éclairage global donné sur les menaces qui planent aujourd’hui sur la démocratie par les différentes versions scientistes de la technocratie mérite une lecture attentive. À mettre entre toutes les mains !

    Jean-Paul Oury, Greta a ressuscité Einstein , VA éditions, 2022.

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      Jean-Marc Daniel est-il devenu keynésien ?

      Johan Rivalland · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 18 November, 2022 - 04:30 · 15 minutes

    Jean-Marc Daniel qualifie de « pagano-gauchistes » tous ces mouvements qui se disent écologistes et sont en réalité « sans nuances » , ne faisant que promouvoir un vieil anti-capitalisme qu’ils tentent de recycler , les idées marxistes du XX e siècle ayant perdu de leur superbe à la suite de la chute de l’URSS.

    Selon nombre d’entre eux, au capitalisme devrait être substitué une « société frugale et égalitaire reposant sur de multiples contraintes et sur la restriction des libertés et des possibilités de production ». Par exemple Naomi Klein, chantre depuis longtemps de l’obsession anti-capitaliste s’étant désormais emparée des thèmes de l’écologie radicale, recommande ainsi de mettre tout en œuvre pour revenir au niveau de consommation et donc de revenu des années 1970 (ce qui à titre d’illustration correspondrait à une division par deux du pouvoir d’achat dans le cas des Français, les « riches » devant, il va de soi, être davantage mis à contribution que les autres). On imagine sans peine l’impact économique, sociétal et humain catastrophique que cela engendrerait

    Refusant d’entrer dans le jeu des visions catastrophistes qu’ils s’évertuent sans cesse à mettre en avant de manière virulente, et de l’écologie de type punitive qu’ils promeuvent, Jean-Marc Daniel privilégie quant à lui l’appel à la raison et à la connaissance pour tenter de montrer qu’il est possible d’adopter une analyse beaucoup plus sereine et constructive sur l’écologie plutôt que de chercher en vain et sans réelle vision à « changer le système ».

    Retour aux sources

    Tout étudiant ayant reçu un enseignement en histoire de la pensée économique (HPE) a entendu parler des physiocrates , ce courant de pensée très délimité dans l’espace (la France, à quelques exceptions près) et dans le temps (de la fin des années 1750 à 1776 et le renvoi de Anne Robert Jacques Turgot , ainsi que la parution de La Richesse des nations d’Adam Smith ), dont les précurseurs sont Pierre le Pesant de Boisguillebert et Richard Cantillon .

    Le terme physiocratie a été inventé par Dupont de Nemours . Il résulte de la fusion de deux mots grecs : physis (la nature) et kratos (la puissance). Cette école de pensée très structurée (contrairement au mercantilisme dont elle vient contredire assez radicalement les principes) avait pour chef de file François Quesnay , qui reprend notamment la notion de droit naturel de John Locke , à laquelle il ajoute celle « d’ordre naturel » (« ordre voulu par Dieu, intangible et connaissable »).

    Il reprend aussi à Boisguillebert l’approche en termes de circuit, ainsi que l’anticolbertisme et l’idée de primauté de l’agriculture. Il est persuadé que la prospérité du royaume repose sur celle de l’agriculture. Il faut donc éviter de l’écraser par l’impôt et ôter les barrières administratives à l’échange.

    Il est obsédé, en particulier, par le problème du « bon prix » du grain. Les prix insuffisants empêchent les cultivateurs de pouvoir investir dans l’amélioration des cultures.

    Mais c’est surtout la conception du Tableau économique (1758) qui va susciter l’intérêt des économistes. Cette représentation du circuit macroéconomique inspirera notamment Karl Marx au XIX e siècle et est considérée comme l’origine des systèmes de comptabilité nationale développés après la Seconde Guerre mondiale.

    On y trouve en particulier une notion décisive dans l’HPE qui va déboucher sur la notion classique de capital : celle des « avances » (capital fixe et capital circulant des classiques qui correspondent aux moyens de production durables et aux consommations intermédiaires).

    Une opposition aux thèses des mercantilistes

    Si tout le monde recherche l’excédent commercial, suivant les principes des économistes mercantilistes, dominants depuis le XVI e siècle , le système se bloque ou dégénère en affrontement (le XVII e siècle est un siècle de guerre). Cela pouvait encore à peu près fonctionner tant que l’Espagne assumait les déficits liés à son pillage des réserves d’or et d’argent américaines, mais plus après.

    Le message des mercantilistes à l’égard de l’inflation engendrée par l’afflux de métaux précieux est ambigu : elle favoriserait les vendeurs dont les prix montent (ce qui n’est finalement pas avéré puisqu’on assiste plutôt à des transferts de revenus) et effacerait les dettes des États (les taux d’intérêt vont en réalité monter et non baisser comme attendu, l’inflation ayant conduit les prêteurs à protéger leur rendement), mais en revanche elle rend manifestement le pays moins compétitif et réduit ses débouchés à l’exportation.

    L’inflation conduit donc, in fine , à un amenuisement de l’excédent commercial qui oblige soit à baisser les prix à l’export en faisant pression sur les salaires du secteur exportateur (d’où des révoltes), soit à réduire encore les importations par des augmentations de droits de douane ou un contingentement renforcé (ce qui pénalise le bien-être de la population qui, par ailleurs, souffre toujours de disettes en France et ne voit pas son niveau de vie s’améliorer, y compris en Espagne).

    L’acteur central de l’économie est en réalité l’État et non l’entrepreneur. Le système est construit pour et par des fonctionnaires, au service du « despote éclairé », qui modernise l’économie au nom de la raison (Cromwell, Colbert).

    En définitive, à la fin du XVII e siècle, la recherche de métaux précieux apparaît clairement comme une illusion.

    En outre, les guerres quasi permanentes qui secouent l’Europe conduisent à un endettement récurrent des États qui, par commodité, prennent l’habitude d’organiser les banqueroutes pour annuler tout ou partie de leur dette. Ce qui, forcément, entraîne réticence de la part des prêteurs et conduit donc à des hausses de taux d’intérêt pour tenter de les amadouer. Et à plus long terme conduit à abandonner ces pratiques de la banqueroute devenues inefficaces.

    L’actualité des thèses des physiocrates

    C’est dans ce contexte que la doctrine des physiocrates émerge, avançant l’idée que l’économie est régie par des mécanismes naturels qui ne doivent pas être faussés par ces interventionnismes excessifs.

    La balance commerciale cesse alors d’être privilégiée, pour étudier en priorité les interdépendances au sein de l’économie nationale (analyses du circuit macroéconomique).

    Le parallèle avec aujourd’hui est très intéressant. Après nous avoir présenté de manière vivante et passionnante quelques-uns des personnages éminents, souvent oubliés, de ce mouvement physiocrate, Jean-Marc Daniel montre une fois de plus en quoi la connaissance de l’histoire des idées économiques est utile.

    Pourquoi insister sur les limites et les impasses du mercantilisme ? Parce que notre époque, qui semble étrangement, nous l’avons dit, avoir de plus en plus les yeux de Chimène pour Colbert, est devenue subrepticement chrysohédoniste. En effet, les politiques monétaires débridées qui ont servi à financer les déficits budgétaires ont reposé sur l’idée qu’augmenter la quantité de monnaie en circulation revenait à augmenter la richesse. « L’argent magique » créé sans limites a remplacé l’or dans les fantasmes politiques d’aujourd’hui, comme si une partie des dirigeants avait du mal à admettre que c’est par le travail et non par la monnaie que l’on devient riche.

    Mais revenons aux mercantilistes. Ils soutenaient en outre que l’abondance de monnaie allait se traduire par une baisse des taux d’intérêt favorable à l’investissement et capable d’alléger la charge d’intérêt des États. Or c’est l’inverse qui s’est produit, l’inflation ayant conduit les prêteurs à protéger le rendement de leurs placements en faisant monter ces derniers. Là encore, notre époque décidément tristement chrysohédoniste a cru trouver son salut dans des taux d’intérêt faibles, voire négatifs, et n’en a pas tiré les bénéfices attendus sous forme du renforcement de l’investissement…

    Écologie et droit de propriété

    Le problème des écologistes aujourd’hui c’est qu’ils contestent le droit de propriété qui était justement ardemment défendu, entre autres, par les physiocrates comme faisant partie des droits naturels et comme étant une condition essentielle du développement de la richesse dont nous devons tous bénéficier. Non plus comme auparavant au nom de la lutte des classes mais désormais de la dégradation de la nature. Sauf que, comme le remarque Jean-Marc Daniel (et comme nous sommes nombreux à le remarquer également), le bilan des pays socialistes du XX e siècle qui avaient remplacé la propriété privée par celle collective a été véritablement catastrophique (assèchement de la mer d’Aral, Tchernobyl, etc.).

    L’explication est assez évidente :

    En fait, la défense du droit de propriété comme moyen de préservation de l’environnement tient au simple fait que nul n’a intérêt à abîmer ce qu’il détient alors que tout individu peut vite se convaincre qu’il n’a aucun risque à vivre aux crochets de la collectivité, que celle-ci soit nationale, municipale ou coopérative.

    Bienfaits de la concurrence, libre circulation des marchandises, libre-échange, économie de l’offre et de création de débouchés, sont les autres conditions essentielles définies par les physiocrates pour assurer la croissance des richesses et donc le bien-être de tous. Il s’agit aussi de pratiquer une fiscalité modérée (portant essentiellement sur la propriété foncière, les fameux « rentiers » auxquels Jean-Marc Daniel fait souvent référence), d’éviter l’endettement public (limiter le niveau de dépenses à celui des recettes) et de contrôler la masse monétaire pour ne pas engendrer l’inflation (l’outil monétaire ne favorisant pas la croissance).

    Turgot le réformateur

    Anne Robert Jacques Turgot, qui est l’un des très rares ministres libéraux que la France ait connu au cours de son histoire, va s’inspirer de l’idée des physiocrates affirmant que la croissance économique de l’époque repose sur l’agriculture. Raison pour laquelle il va œuvrer pour la libéralisation du prix du blé.

    Il a été introduit à la Cour et parmi les cercles économiques dominés par les physiocrates par Vincent de Gournay, qui est et restera son véritable inspirateur , celui à qui beaucoup attribuent la célèbre formule « Laissez faire, laissez passer ». Il correspond par ailleurs avec de nombreux philosophes, dont David Hume , qui lui présente son ami Adam Smith . Nommé contrôleur des Finances par Louis XVI en 1774, il entend désendetter la France et contrôler les dépenses.

    Comme chez Jean-Baptiste Say un peu plus tard, l’épargne joue un rôle fondamental pour Turgot. C’est aussi pourquoi il convient d’éviter ce que l’on appelle aujourd’hui l’effet d’éviction (aspiration par l’État de l’épargne privée à travers ses besoins de financement).

    Ses réformes sont d’une ampleur inédite, sachant qu’il n’est resté aux finances du pays que deux ans : notamment libéralisation du commerce des grains, ouverture des marchés, suppression de la corvée et des jurandes, réduction des dépenses pour diminuer le déficit budgétaire (et non augmentation des recettes ou annulations de dettes ! Une vraie rupture), création d’une caisse d’escompte privée et indépendante sur le modèle de la Banque d’Angleterre pour aider à résoudre le problème de la dette.

    Ce sont une fois de plus de mauvaises récoltes et des émeutes de la faim qui auront raison de son action. Le roi cède à la pression très vive de ceux qui ont intérêt à réclamer sa tête (ce qui vaudra à Louis XVI de perdre la sienne quelques années plus tard, événement terrible contre lequel Turgot l’avait mis en garde, faisant le parallèle avec ce qui s’était passé en Angleterre près d’un siècle auparavant).

    Le retour du malthusianisme

    Les physiocrates ont été oubliés de l’Histoire (raison pour laquelle Jean-Marc Daniel tente de les réhabiliter en leur rendant hommage), même si David Ricardo (sa grande référence) notamment a repris l’héritage de Turgot et Jean-Baptiste Say.

    Mais s’il y en a un qui n’a pas été oublié, c’est Thomas Robert Malthus . À son époque, il est vrai que l’on sortait de nombreux siècles parsemés de disettes et de famines. Ce qui permet de mieux comprendre ses craintes même s’il nous apparaît clairement a posteriori qu’il s’était trompé (excuse que l’on peut plus difficilement accorder aujourd’hui à ceux qui développent des thèses qualifiées de malthusiennes, visant à réduire la population ).

    Or, ce que nous montre Jean-Marc Daniel à travers des pages passionnantes est que ce sont les énergies fossiles qui ont permis à l’humanité de sortir du « piège nutritionnel » et de la destruction des forêts, assurant le développement et l’enrichissement de tous. L’occasion une nouvelle fois de nous présenter de manière vivante l’évolution de la pensée économique, de Malthus (et son héritage) à Stanley Jevons , l’un des premiers marginalistes , qui sera aussi l’un des premiers à s’interroger sur la pérennité de la solution représentée par le charbon, jusqu’aux idées reçues accumulées aujourd’hui et reprises en chœur par certains jusqu’à la déraison.

    Enjeux contemporains

    Pour des raisons de longueur, j’irai vite sur les idées que développe ensuite Jean-Marc Daniel au sujet de l’écologie aujourd’hui et auxquelles sont consacrées les 80 dernières pages. Je renvoie pour l’essentiel à la lecture de l’ouvrage.

    Fruits de l’héritage des plus de 200 années de croissance qui font suite à la croissance nulle des nombreux siècles précédents et de l’héritage intellectuel issu des réflexions depuis les physiocrates, ce sont les considérations au sujet de l’écologie auxquelles il s’intéresse. Mettant en exergue à la fois les problématiques actuelles, les raisonnements biaisés ou excessifs qui y sont liés, les mécanismes en jeu et les théories économiques fondamentales les abordant (dont les apports d’ Arthur Pigou en termes d’externalité, auxquels il est sensible). La thèse essentielle du livre étant de montrer que les libéraux ne se désintéressent aucunement de la question de l’écologie , même si leurs analyses ne sont pas celles actuellement dominantes. L’idée centrale étant que croissance économique et préoccupation écologique ne sont nullement incompatibles.

    Ainsi, à rebours des thèses malthusiennes répandues à foison, il invite chacun à s’intéresser aux travaux des démographes sérieux, à se méfier des effets d’annonce et comportements de passager clandestin , à veiller à rester crédible dans ses propositions . Là encore, il se réfère aux travaux des économistes, à l’intar de ceux du prix Nobel d’économie William Nordhaus, peu en phase avec les discours du GIEC et bête noire des pagano-gauchistes, qui montre le potentiel énorme que représente le nucléaire en termes de croissance et de contraintes énergétiques et rappelle toutes les infirmations passées des prédictions pessimistes en matière d’écologie. Sans oublier le prix Nobel Théodore Schultz, de l’école de Chicago , à qui il rend un hommage appuyé et qu’il considère comme le dernier grand économiste à avoir réhabilité les principes des physiocrates, insistant sur l’importance de réduire le rôle des États dans l’activité agricole pour rétablir celui des prix et des mécanismes de marché.

    Revenir aux fondements de l’économie

    Tirant les enseignements de tout ce que nous a apporté l’histoire des idées économiques, et en particulier l’héritage des physiocrates, c’est donc à l’abandon de tout interventionnisme étatique en matière d’agriculture que Jean-Marc Daniel appelle, au respect de la propriété privée et de la concurrence, qui doivent permettre de favoriser l’investissement, le progrès technique et les gains de productivité, qui permettent à la fois d’améliorer les rendements et d’accéder à des formes d’énergie moins polluantes, tout en s’attachant au sens des responsabilités des entrepreneurs et à restaurer le rôle de l’épargne dans l’économie.

    Et non en stigmatisant l’économie de marché et la mondialisation, en faisant appel au protectionnisme, ou en se lançant sans cesse dans des plans de relance keynésiens grossiers et gigantesques ne faisant que traduire une certain « désarroi » et une « paresse intellectuelle ».

    […] les physiocrates ont eu pour premier mérite de rompre avec les illusions chrysohédonistes que le keynésiannisme démagogique actuel fait revivre.

    […] Mais il faut aller au-delà, rendre à la physiocratie la reconnaissance que l’oubli historique lui a dénié. Cela signifie qu’il ne faut pas ignorer les problèmes environnementaux mais lutter contre leur utilisation pour justifier un renforcement de l’État. Ces problèmes trouveront une réelle solution grâce à la concurrence, et certainement pas grâce à un interventionnisme étatique désordonné et fallacieux car financé à crédit.

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      L’enfer est pavé de bonnes intentions (19) : les voitures électriques

      Johan Rivalland · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Saturday, 5 November, 2022 - 04:00 · 6 minutes

    C’est désormais officiel : plus aucun véhicule thermique neuf ne sera vendu dans l’Union européenne à partir d’octobre 2035. Toujours au nom de « la sauvegarde de la planète », et quoi qu’il en coûte.

    Or, non seulement cela va coûter cher, mais il sera difficile d’être prêts en temps et en heure. Par ailleurs, les résultats escomptés en termes d’environnement sont loin d’être assurés.

    Les voitures électriques, des véhicules propres ?

    C’est la promesse faite au sujet du passage de la technologie du thermique au tout électrique.

    Le véhicule vert serait la solution qui justifie l’arrêt pur et simple de la production traditionnelle telle que nous la connaissons. Une promesse non seulement ambitieuse, mais aussi porteuse d’espoir : réduire enfin de manière substantielle la pollution et les émissions folles de CO 2 , accusées de participer au fameux « changement climatique » pour lequel tant d’esprits s’échauffent , et même parfois à leurs dépens .

    Sauf que, comme le remarque le journaliste économiste Nicolas Doze dans l’une de ses analyses sur BFM Business :

    Il y a un côté fausse promesse environnementale. Car Bruxelles ne considère l’empreinte carbone d’un véhicule électrique que lorsqu’on l’a achetée et que l’on tourne la clef pour la première fois. Sauf que si on prend tout le cycle du produit, depuis l’extraction des matières premières, la production, le recyclage, jusqu’à la période où effectivement il roule, les évaluations qui ont pu être réalisées nous disent que pour une petite citadine, il faut avoir parcouru entre 40 000 et 50 000 kilomètres pour avoir une empreinte carbone et un bilan d’émission de gaz à effet de serre supérieur au véhicule thermique. Et la bascule est beaucoup plus lointaine si l’on prend un SUV. Donc, celui qui achète une voiture électrique aujourd’hui considère qu’il a accompli un grand pas pour l’humanité. Mais la « voiture électrique = voiture verte », c’est quand même beaucoup moins évident que cela n’y paraît.

    En effet, ainsi que le dit le chroniqueur, le choix est purement politique, et non industriel . Les récents progrès importants réalisés en matière de moteur diesel, ainsi que la plus grande efficience du moteur hybride, auraient pu nous conduire à d’autres choix que ceux des politiques, qui se sont engouffrés tête baissée dans le leur en se posant le minimum de questions, traumatisés par le scandale du dieselgate .

    Un choc économique, social et énergétique

    Si je continue de suivre le raisonnement de Nicolas Doze, il semble bien une nouvelle fois – surtout lorsqu’il s’agit de cause environnementale – que les politiques aient « confondu vitesse et précipitation ».

    Car, en effet, la production des véhicules électriques a plusieurs implications économiques :

    Un coût de production supérieur de 50 %

    Il faudrait des gains de productivité de 10 % par an pendant 5 ans. C’est impossible, les meilleures années de l’industrie automobile ayant permis de dégager 2 ou 3 %.

    Un choc pour l’emploi

    Un véhicule électrique requiert 3 personnes en moyenne au lieu de 5 pour un véhicule thermique.

    Un choc social

    Le surenchérissement des véhicules les rend inaccessibles à beaucoup, non seulement parmi les plus modestes, mais aussi au sein des classes moyennes et ce malgré les subventions et ristournes de producteurs. Un fossé supplémentaire serait aussi créé entre les ruraux et les citadins, qui n’ont pas les mêmes infrastructures ni les mêmes contraintes.

    Un choc énergétique

    Cela va nécessiter une quantité inouïe d’électricité qu’il va falloir être en mesure de produire alors même que nous sommes aujourd’hui en pleine difficulté en la matière. Sans oublier le problème des bornes à installer, en faible nombre aujourd’hui, et celui des zones peu fréquentées l’hiver et fortement l’été, qui amènent une difficulté supplémentaire non négligeable.

    Toujours le poids lancinant de la politique et de l’idéologie

    En somme, à se soumettre en permanence à la loi électorale et aux passions du moment, gangrénées par le militantisme et l’écologisme en pleine crise d’adolescence , miné lui-même par les actions de plus en plus violentes de militants extrémistes , notre société est en train de se saborder.

    Au lieu d’emprunter la voie de la sagesse , de la réflexion et de l’innovation, on fait le choix de se soumettre à la pensée magique et aux caprices typiques des jeunes enfants. Avec myopie et un manque évident de lucidité.

    Devant tant d’immaturité et d’injonctions d’idéalistes emplis de bons sentiments suivies par des politiques qui pensent à leur élection ou réélection, on se prend à imaginer ce que ces contempteurs de nos créateurs et grands chefs d’entreprise deviendraient si ces derniers se mettaient en grève à la manière de ceux du roman éponyme d’Ayn Rand .

    Sans aller jusque-là, avec des véhicules actuellement 30 % moins chers, la Chine est en ce moment même le grand bénéficiaire de cette transition, engrangeant des séries de contrats non négligeables susceptibles de mettre en difficulté les constructeurs européens. Les batteries sont elles aussi produites en Chine (80 % du marché mondial actuel), sachant que celles produites chez nous ne seront pas opérationnelles avant au moins une dizaine d’années et que les matières premières (lithium, cobalt) ne sont pas disponibles à ce jour en France et ne le seront pas avant 2035 (pour les découvertes récentes de gisements de lithium sur notre territoire). Et le seront-elles, au niveau mondial, en quantité suffisante ?

    Par excès de précipitation, nos politiques seront donc responsables de ce qu’il adviendra de notre industrie, tout en devant assumer les conséquences en matière d’approvisionnement énergétique et des difficultés que cela engendrera, ainsi que des dommages environnementaux que cela ne manquera pas de susciter. Mais ils ne seront plus aux commandes, d’autres auront pris la place et pourront toujours dire qu’eux n’y sont pour rien.

    On le sait : la politique est régie par le court terme (ce qu’elle ne devrait pas, en théorie). Après nous, le déluge.

    Voilà où mènent donc nos « vertus ». Simplismes, postures , impostures, visions caricaturales mènent le monde, et sont à la source de nombre de nos maux, présents et à venir. Oui, l’enfer est bel et bien pavé de bonnes intentions.

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      Les écolos nous mentent, de Jean de Kervasdoué

      Francis Richard · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 7 March, 2021 - 04:30 · 6 minutes

    écolos

    Par Francis Richard.

    « Plusieurs éditeurs ont refusé d’envisager la publication de cet ouvrage, considérant que critiquer la bien-pensance écologique dominante, fût-elle infondée, était inenvisageable. »

    La censure s’étend effectivement. Ce n’est hélas pas l’apanage du secteur public comme d’aucuns le pensent ou le disent, car le secteur privé condamne aussi très bien les opinions qui lui déplaisent.

    Le secteur public pratique surtout la censure pour empêcher la contestation de son pouvoir. Le secteur privé le fait quand il est au service d’une idéologie plutôt que de ses clients, ce qu’il paie tôt ou tard.

    Les écolos

    Par « écolos », Jean de Kervasdoué entend les écologistes politiques et non pas l’écologie, qui est une science . S’ils mentent, c’est parce que leurs arguments ne sont pas scientifiques mais idéologiques.

    L’auteur donne de nombreux exemples de ces mensonges, qui, à force d’être répétés par des activistes, ou par des médias peu curieux, finissent par être tenus pour vrais par ceux qui ignorent les faits.

    Muni de l’arme de la raison, Jean de Kervasdoué démonte ces mensonges. Il le fait non pas par plaisir de confondre les menteurs, mais parce que l’obscurantisme a toujours de terribles conséquences.

    Les menaces imaginaires des écolos

    Par exemple, ce sont des menaces imaginaires que de dire :

      • On va manquer d’eau . « On ne peut pas consommer l’eau » :

    « La molécule (H 2 O) est stable, indestructible, indéfiniment recyclable et recyclée. En revanche, elle voyage, elle tombe et change d’état pour devenir glace ou vapeur qui, après une dizaine de jours, retombera sous forme de pluie ou de neige, et le cycle recommencera ici ou ailleurs. »

    • Les incendies de forêt menacent la planète. Le taux d’oxygène de l’air est de 21 %, « taux stable depuis des millions d’années » :

    « L’oxygène vient de l’atmosphère, et le gaz carbonique provient de la biomasse, quelle qu’elle soit. Cette biomasse rend kilo pour kilo, mètre cube pour mètre cube, les mêmes quantités de dioxyde de carbone que celles qui ont été précédemment absorbées. Les incendies libèrent cette même quantité de carbone, simplement ils le font plus rapidement. »

    • La biodiversité est menacée. « Sur de longues périodes, les espèces qui ont habités la Terre sont venues et s’en sont allées » :

    « La biodiversité est dynamique, même sans incursion humaine, et l’équilibre entre espèces a toujours été et sera toujours instable. »

    • La production de miel va s’effondrer à cause des pesticides et des insecticides. Or, aucune relation de cause à effet n’a pu être établie avec la mortalité des abeilles :

    « Il y a de bons et de mauvais apiculteurs et c’est ce facteur qui explique la différence de production des ruches, selon une étude de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments. »

    • Les poissons vont disparaître. Si la surpêche est avérée, « depuis les années 1970, l’aquaculture s’est développée de manière considérable dans le monde » :

    « Aujourd’hui, en 2020, la production aquacole de poissons, de coquillages et de crustacés dépasse le tonnage exploité par la pêche traditionnelle ».

    • L’exploitation des forêts nuit à la biodiversité : globalement ce n’est pas le cas et « en Europe la forêt naturelle ne représente que 1 % des surfaces boisées » , d’ailleurs :

    « Moins une forêt est exploitée, plus elle se couvre, ce qui réduit la luminosité ; la biodiversité diminue alors, à moins de faire artificiellement des puits de lumière. »

    La culpabilisation

    L’humanité est coupable.

    • La population de la Terre s’accroît et ce sera une catastrophe :

    « La régression de la famine mondiale n’est pas due à la destruction des forêts mais à l’amélioration de l’agriculture. »

    • Les hommes qui consomment de la viande consomment beaucoup d’eau . « Encore une fois, un être humain pas plus qu’un animal ne consomme de l’eau » :

    « C’est la pauvreté et le sous-développement qui créent le manque d’eau potable, y compris dans des pays très humides. »

    • L’agriculture conventionnelle n’est pas protectrice de l’environnement :

    « L’agriculture biologique nécessite plus de surfaces pour une production donnée et donc plus de terrains défrichés ; or les impacts environnementaux sont proportionnels aux surfaces concernées. »

    • Les produits de l’agriculture moderne avec ses pesticides sont moins bons pour la santé que les produits bio. Or « il n’y a pas d’agronomie sans pesticide, pas plus qu’il n’y a de médecine sans médicament ».

    Selon une étude de 2014 de European Food Security Agency , « 98,8 % des produits bio étaient exempts de résidus dépassant les limites autorisées. Donc guère mieux que les produits non bio, issus de l’agriculture conventionnelle (taux de 97 %, soit un différentiel de 1,8 %). »

    • La viande rouge est dangereuse. Denis Corpet a calculé que la surconsommation de viande était la cause de 4000 décès par an parmi les personnes décédées d’un cancer colorectal, dont le nombre total était de 17 117 en 2018 selon Santé publique France :

    « En reprenant les calculs avec un risque relatif de 1,18 on peut estimer le nombre de décès dus à la consommation excessive de viande à 595, soit environ à un millième de décès en France en 2019, à supposer que le risque des « très carnivores » ne soit pas associé à d’autres facteurs… »

    • Les OGM sont mauvais :

    « La sélection génétique a été une des raisons majeures de la croissance considérable des rendements agricoles depuis un demi-siècle. Historiquement cette sélection s’est faite de manière empirique en reproduisant les bons sujets ou en faisant muter des graines, notamment par irradiation, pour trouver de nouvelles variétés. N’est-il pas préférable de maîtriser ce processus ? »

    Les écolos se contredisent

    Ils luttent contre les émissions de CO2 1 et rejettent l’énergie nucléaire qui représente en France 70,9 % de l’énergie électrique, qui est une énergie décarbonée et qui est « la technologie la moins coûteuse en vies humaines ».

    Ils tentent de parer leur idéologie des habits de la science et de « faire croire contre toute évidence que les OGM, les ondes téléphoniques, le glyphosate à dose d’usage courant, le compteur EDF Linky, etc. sont dangereux pour la santé . »

    Soi-disant scientifiques, ils font pourtant des généralisations hâtives, confondant concomitance et causalité et oubliant qu’une démonstration n’est convaincante que si le lien est avéré toutes choses étant égales par ailleurs ; ils ont même recours à la pensée magique quand ils se font les chantres de la biodynamie

    Conclusion

    Les écolos sont des manipulateurs.

    Pour véhiculer la peur, ils s’appuient sur des images de catastrophes : inondations, sécheresse, famines etc.

    Ils abusent de la confusion entre risque et danger, entre expériences et modèles, entre météorologie et climat, entre le local et l’universel.

    Ils exigent de leurs contradicteurs qu’ils démontrent que leurs cibles – énergie nucléaire, pesticides agricoles, additifs alimentaires – ne seront jamais dangereuses pour la santé.

    « En l’absence d’arguments, ils sortent leur arme universelle, leur couteau suisse : le principe de précaution. »

    Ils excommunient les mal-pensants.

    Leur incontestable victoire ? La Convention citoyenne pour le climat :

    « Combien coûtera-t-elle à la France et aux Français ? On en aura assez vite une idée. »

    Sur le web

    1. Le rôle de l’énergie électrique devrait croître avec les appareils électroniques, la 5G et les véhicules électriques ; les énergies dites renouvelables ne pourront jamais être que des énergies d’appoint en raison de leur intermittence.
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      Greta a tué Einstein, de Jean-Paul Oury

      Francis Richard · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Monday, 1 February, 2021 - 04:30 · 6 minutes

    Greta

    Par Francis Richard.

    Pourquoi ce titre ?

    « Nous l’avons voulu suffisamment accrocheur pour marquer les esprits. En fait nous ne supposons pas un seul instant que la jeune Greta veuille faire du mal au vieil Einstein. »

    « C’est peut-être bien au contraire Einstein qui risque de tuer Greta… »

    En effet, ce livre montre que la science et la technologie, combattues au nom de la science, en fait au nom de l’écologisme, par la jeune Suédoise, ne sont pas le problème mais la solution.

    Technologies présumées coupables

    Greta et ses semblables traduisent devant leur tribunal quatre technologies présumées coupables : les OGM, l’énergie nucléaire, les mauvaises ondes, le glyphosate.

    Il s’agit en réalité à chaque fois d’une manipulation de l’opinion qui utilise le même processus :

    • « mettre en scène un risque potentiel » , c’est-à-dire qui n’existe pas, de la technologie en question ;
    • demander à la science de démontrer que ce risque n’existera jamais, ce qu’elle ne peut pas faire et pour cause car « aucun scientifique sérieux ne se prononcera jamais sur l’innocuité totale » d’une technologie.

    C’est bien sûr le principe de précaution qui est invoqué pour exiger ce risque zéro . Cette mise en scène et cette question sans réponse permettent en tout cas de discréditer lesdites technologies.

    Peu importe que ce risque ne se soit jamais produit avec les OGM, que « le nucléaire civil soit à l’origine d’un bien moins grand nombre d’accidents que les autres sources d’énergies » , que les mauvaises ondes n’aient jamais produit que des maux invisibles et que le seul Centre International sur le Cancer s’en soit pris, et s’en prenne, au glyphosate qui serait cancérigène : « toutes les autres agences partout dans le monde » ne partagent pas cet avis.

    Comme le souligne l’auteur, l’objectif de ceux qui s’en prennent à ces technologies est d’ « enterrer le progrès scientifique. »

    Le label « made in nature »

    A contrario les écologistes ne posent pas, et ne se posent pas, de questions pour ce qui concerne le bio , les éoliennes , la voiture électrique ou l’homéopathie pour la bonne raison qu’ils leur décernent le label made in Nature .

    Pourtant, sur le bio, il existe de vraies histoires d’empoisonnement, que l’auteur ne se prive pas de raconter. L’une d’elles, la plus célèbre , se passe en 2011, dans une ferme allemande, et s’est terminée par 54 morts et 3000 personnes intoxiquées…

    Les éoliennes tuent les oiseaux , sont bruyantes et ne produisent de l’énergie que par intermittence . En Allemagne , la continuité de la production d’énergie est assurée par des centrales polluantes, à charbon et à gaz…

    Le véhicule électrique n’est pas un véhicule à zéro émission. De plus, le coût énergétique pour le construire est de trois à quatre fois celui d’un véhicule conventionnel, sans compter que, pour qu’il circule, il faut bien générer de l’électricité…

    L’auteur s’en prend aux « autres médecines » labellisées (bien antérieures à l’écologisme et sans rapport avec lui) : qi gong, homéopathie, naturopathie, plantes, yoga, acupuncture etc. et se range derrière l’avis de Laurent Alexandre qui défend contre elles les « traitements scientifiques évalués ».

    C’est le point le moins convaincant de l’argumentation. Car, à la fin de son ouvrage, l’auteur déplore que la séparation entre l’esprit et la matière ait rendu difficile l’expression du continuum entre l’Homme et la Nature, or, par exemple, le qi gong ou le yoga l’opèrent…

    L’idéologie d’abord

    La société d’abondance alimentaire est fragile. La science peut en renforcer la sécurité par des avancées technologiques, telles que le séquençage du génome du blé, qui permet, par exemple, de lutter contre des maladies ou les sécheresses.

    Encore faudrait-il que l’idéologie ne prévale pas en suscitant une « peur construite des solutions scientifiques et techniques » , une « peur systématique et indifférenciée de toutes les technologies quelles qu’elles soient » , par exemple :

    D’aucuns, les collapsologues, annoncent l’effondrement de la société industrielle et font appel à la science pour ce faire, alors que ce sont la science et la technologie qui peuvent l’éviter. Eux et les adeptes de la décroissance , en fait, « œuvrent pour saper l’édifice de la science contemporaine » .

    D’autres ne cachent pas leur haine de l’humanité. Ils font appel à la science « pour appuyer des messages catastrophistes » . Ils sont prêts à sacrifier l’humanité « sur l’autel du dieu Nature » . Et cela se traduit par la diminution souhaitée du nombre des êtres humains sur Terre , qu’ils voient comme un moyen de lutter contre le réchauffement climatique…

    Le retour de la science

    Après avoir souligné la montée au créneau de scientifiques contre l’écologisme, l’auteur donne les exemples d’écologistes qui se sont convertis à la science après l’avoir découverte et qui, du coup, ont compris tout l’intérêt du nucléaire civil et des OGM :

    • le nucléaire émet beaucoup moins de CO2 que les énergies renouvelables ;
    • l’innovation technologique de la CRISPR-Cas 9 ( « qui utilise une propriété de certaines bactéries pour découper des portions de génome et les remplacer par d’autres qui auront été sélectionnées » ) permet de « modifier le vivant sans toucher à la barrière des espèces » , autrement dit les OGM deviennent des « produits naturels » .

    À partir de là, l’auteur parle de l’« agriculture de précision » , qui est respectueuse de l’environnement puisque :

    • elle est moins gourmande en intrants (eau, énergie, engrais, pesticides etc.) ;
    • elle est plus attentive aux sols ;
    • elle adapte des variétés au niveau local.

    Pour ce qui est de l’intelligence artificielle, il y voit un moyen d’assister l’Homme, notamment dans la prise de décision. Il combat les fantasmes à son sujet et s’en tient aux réalisations concrètes.

    Enfin, il cite Marc Rameaux :

    « La conscience humaine est capable de décider par elle-même de se placer « out of the box », ce qu’aucune IA ne sait faire. »

    Enfin il ne voit pas d’opposition entre l’Homme et la Nature , comme le prétendent les écologistes : « L’entreprise humaine est davantage une tentative de se libérer du déterminisme et de la fatalité qu’un combat contre la nature. »

    Il existe en revanche une opposition entre ceux qui ont une vision étroite de la nature, les écologistes adeptes de l’écologie politique et ceux qui en ont une élargie, les écologues, les scientifiques de l’environnement.

    Conclusion

    « L’homme, la science et la nature sont intimement liés. »

    Pour que la confiance en la science revienne, il faut appliquer à toutes les innovations scientifiques et techniques, le label made in Nature puisque ce label, employé par le marketing vert, rassure l’opinion et qu’en l’occurrence il est pertinent.

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      On nous refait le « coup du diesel » avec les SUV

      IREF Europe · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 29 January, 2021 - 04:00 · 6 minutes

    les SUV

    Par Philbert Carbon
    Un article de l’Iref-Europe

    Le « coup du diesel », vous connaissez ? C’est une manœuvre de l’État qui consiste à accorder des avantages à un produit ou un service puis, une fois qu’une grande partie de la population a été convaincue de les adopter, à décréter leur caractère néfaste ou dangereux. Les consommateurs sont alors orientés vers de nouveaux produits ou services, qui sont à leur tour subventionnés, tandis que les anciens se voient davantage taxés, voire interdits.

    Le meilleur exemple en la matière est celui du diesel. Les automobilistes ont été longtemps encouragés à choisir cette motorisation. Les ventes de voitures diesel ont représenté 64 % du marché des véhicules particuliers en 2014 pour tomber à 34 % en 2019. Puis petit à petit, comme nous l’avons expliqué dans un article de février 2019 , de nouvelles réglementations sont venues rendre le diesel moins attractif, et les consommateurs sont désormais incités à acheter des véhicules électriques ou hybrides rechargeables.

    Cependant, comme nous l’avons montré dans un article de décembre 2020 , la fin des subventions à la voiture électrique est déjà programmée et il est probable que de nouvelles taxes sur l’électrique apparaissent prochainement, à l’instar de ce qui se passe en Australie.

    Haro sur les SUV

    Aujourd’hui, les SUV sont dans le collimateur des pouvoirs publics et des écologistes . La Convention citoyenne pour le climat a, par exemple, proposé de renforcer très fortement le malus sur les véhicules polluants et d’introduire le poids comme un des critères à prendre en compte. Le gouvernement a repris l’essentiel des propositions de la Convention, et les véhicules neufs de plus de 1,8 tonne seront soumis à un malus de 10 euros par kilogramme excédant ce seuil de 1800 kg à partir du 1er janvier 2022.

    Certains veulent même interdire purement et simplement les SUV des villes, comme David Belliard, candidat écologiste à la Mairie de Paris en mars 2020, et aujourd’hui adjoint au maire chargé « de la transformation de l’espace public, des transports, des mobilités, du code de la rue et de la voirie ».

    Apparu dans les années 1990, ce Sport Utility Vehicule ressemble à un 4 x 4 de par sa carrosserie, mais n’est pas à proprement parler un véhicule tout-terrain (il n’est pas systématiquement équipé de quatre roues motrices par exemple). Il a rapidement eu les faveurs des automobilistes et ses ventes n’ont cessé de croître.

    Aujourd’hui, avec une part de marché de 40 % en France en 2020 (contre 6 % en 2009), les SUV grignotent celle de tous les autres types de véhicules (monospaces, berlines familiales, véhicules haut de gamme, et même citadines).

    Les SUV : Trop gros, trop polluants, trop chers

    La popularité du SUV ne le met pas à l’abri des critiques. Il serait d’abord trop gros pour la ville : plus haut, plus long (de 26 cm en moyenne par rapport à un véhicule standard), plus large (de 10 cm), plus lourd (de 205 kg), plus puissant (de 26 cv), le SUV représenterait un danger pour les piétons et les cyclistes. Selon l’European New Car Assessment Program (Euro NCAP), un organisme qui teste la sécurité des voitures, « plus l’avant du véhicule est haut et vertical, plus il sera dangereux pour les usagers vulnérables de la route ».

    Deux études, présentées par WWF France en fin d’année dernière, indiquent par ailleurs que les SUV sont une « catastrophe climatique » et un « gouffre pour le budget des ménages » . Pour l’association de défense de l’environnement, un SUV émet 20 % de CO2 de plus qu’un véhicule standard lorsqu‘il roule. Il pollue aussi fortement lors de sa fabrication puisque son « empreinte carbone » serait 1,3 fois supérieure à celle d’un véhicule standard. Pour le WWF , avec un marché des SUV en croissance, la France ne pourra respecter ses engagements climatiques. Même avec des SUV électriques.

    Les SUV sont également mauvais pour les ménages puisque, en moyenne, ils coûtent 30 % plus cher qu’une voiture de moyenne gamme et consomment 20 % de carburant de plus. Le WWF a calculé que les ménages modestes, qui s’équipent en automobiles essentiellement sur le marché de l’occasion, pourraient voir leur budget auto augmenter de 13 % (soit 408 euros par an). Et l’association de souligner que c’est trois fois plus que l’augmentation des prix des carburants qui, en 2018, a précipité les Gilets jaunes sur les ronds-points.

    Pour Isabelle Autissier, présidente du WWF France, « les SUV pourraient représenter deux tiers des ventes en 2030 et renforcer les fractures sociales et les inégalités d’accès à la mobilité » . Elle soutient donc les propositions de la Convention citoyenne pour le climat visant à détourner les Français de ce type de véhicules.

    Et tant pis si les Français, y compris les plus modestes, aiment les SUV !

    Pourquoi les SUV se vendent-ils autant ?

    Car, même si les constructeurs automobiles poussent à l’achat de SUV, concentrant leurs actions marketing et commerciales sur ces modèles, le boom des ventes s’explique avant tout parce que ces véhicules attirent les automobilistes. Ces derniers apprécient l’habitacle vaste et lumineux, la position de conduite haute qui fait dominer la route et permet d’anticiper les dangers, le sentiment de sécurité procuré par une voiture lourde voire imposante.

    Mais les pouvoirs publics, et plus particulièrement la Commission européenne, ne sont pas non plus étrangers à leur succès, comme l’explique Samuel Klebaner , maître de conférences en économie (Université Sorbonne Paris Nord). Les SUV ont, en effet, bénéficié d’un « terrain réglementaire favorable à leur développement ».

    Il y a d’abord le règlement (CE) n° 78/2009 du Parlement européen et du Conseil du 14 janvier 2009 « relatif à la réception par type des véhicules à moteur au regard de la protection des piétons et autres usagers vulnérables de la route », qui demande un rehaussement des pare-chocs et donc favorise les SUV.

    Par conséquent, il est curieux d’entendre l’Euro NCAP, cité plus haut, critiquer les SUV sur le plan de la sécurité des piétons. C’est au contraire parce qu’ils satisfaisaient aux nouvelles normes que les SUV ont été développés par tous les constructeurs.

    La prolifération des SUV les plus gros a également été aidée par les normes sur les gaz à effet de serre (NOx) et les particules qui, jusqu’en 2005, ne s’appliquaient pas aux véhicules de plus de 2,5 tonnes. Les constructeurs avaient donc intérêt à développer ces modèles. Depuis, de nouvelles normes de pollution (Euro 6) sur le diesel sont apparues qui favorisent le système SCR ( selective catalytic reduction ). Celui-ci consiste à injecter de l’ammoniac dans la ligne d’échappement pour créer une réaction chimique et transformer les NOx en azote et vapeur d’eau. Pour cela, il est nécessaire d’avoir un réservoir d’urée que seuls les véhicules les plus spacieux peuvent accueillir.

    Enfin, le mode de calcul des émissions de CO2 par les constructeurs favorise les véhicules lourds, autorisés à émettre davantage de CO2 que les petites voitures. Les constructeurs, pour tenir les objectifs qui leur sont assignés et éviter les conséquentes amendes prévues, ont donc intérêt à vendre leurs voitures les plus lourdes.

    L’alourdissement des véhicules et le développement des SUV ne sont donc pas que le fruit d’une stratégie commerciale des constructeurs et du désir des automobilistes. Ils sont aussi largement le fait des normes et règlements.

    En taxant davantage les SUV à partir du 1er janvier 2022, les gouvernants se comportent, une fois de plus, comme le sapeur Camember qui creuse un trou pour pouvoir reboucher celui qu’il avait précédemment formé.

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