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      Pourquoi la liberté a besoin d’une philosophie

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 19 February, 2023 - 03:30 · 5 minutes

    Par Dan Sanchez.

    Partout dans le monde, les États ont mené une guerre contre la liberté, faisant disparaître nos droits par une succession rapide de politiques radicalement tyranniques. Comment ceux d’entre nous qui croient en la liberté peuvent-ils contrer cela ?

    Tout d’abord, nous pouvons persuader davantage de personnes de se joindre à nous pour s’opposer aux mauvaises politiques. Mais cela peut être une bataille difficile. Comme vous le savez peut-être par expérience, il est difficile de faire changer d’avis les gens, en particulier leur position politique. Les défenseurs de la liberté sont souvent déconcertés par l’obstination avec laquelle certains s’accrochent à leurs positions antiliberté.

    Pourquoi nous heurtons-nous sans cesse à ce mur ?

    Selon Henry Hazlitt , c’est parce que les libertariens ne réalisent souvent pas que « certaines propositions qu’ils combattent ne sont qu’une partie de tout un système de pensée ». C’est pourquoi, explique Hazlitt, même les arguments irréfutables contre une mauvaise politique ne parviennent souvent pas à convaincre.

    Ainsi, il ne suffit pas de critiquer une mauvaise politique spécifique de manière isolée.

    Hazlitt conclut :

    « C’est une philosophie globale quoique confuse que nous devons affronter et nous devons y répondre par une philosophie tout aussi globale. »

    Illustrons l’affirmation de Hazlitt par un exemple.

    Supposons que vous débattiez avec quelqu’un qui soutient le salaire minimum. Vous présentez clairement un argumentaire solide , étayé par une logique économique, un raisonnement moral et des preuves empiriques démontrant que le salaire minimum viole les droits et favorise le chômage , poussant les personnes qu’il est censé aider vers la pauvreté et la dépendance. Pendant ce temps, les contre-arguments de votre adversaire sont confus et mal informés. Et pourtant, malgré tout cela, il rejette avec colère vos affirmations et persiste dans son soutien au salaire minimum.

    Comment cela se fait-il ?

    Le problème est que son soutien au salaire minimum « n’est qu’une partie de tout un système de pensée », comme l’a dit Hazlitt, à savoir l’idéologie économique, politique et morale progressiste dont il s’est imprégné à l’école, dans les médias ou sous une autre influence.

    S’il devait se plier à votre argument supérieur et s’opposer au salaire minimum, cette opposition serait en désaccord avec le reste de sa vision du monde. Le simple fait d’envisager cette idée crée une dissonance cognitive. Il recule donc devant cet inconfort mental intense et rejette la raison elle-même au nom de l’autoprotection émotionnelle.

    Selon le psychologue Jordan Peterson , il existe une « tendance humaine naturelle à répondre à […] l’idée étrange […] par la peur et l’agression… ». Cela s’explique par le fait que « prendre sérieusement en considération le point de vue d’autrui signifie risquer de s’exposer à une incertitude indéterminée – risquer une augmentation de l’anxiété existentielle, de la douleur et de la dépression… »

    Il peut sembler idiot de considérer de nouvelles idées si effrayantes et des systèmes de croyance si précieux. Mais nous le faisons tous, et pour de bonnes raisons.

    Comme l’explique Peterson dans son livre Maps of Meaning , nos systèmes de croyances (y compris nos visions sociopolitiques) nous permettent de donner un sens au monde. Ils sont les boussoles et les cartes que nous utilisons pour naviguer dans l’immense complexité de la vie. Sans paradigmes globaux pour structurer nos vies, nous nous sentons perdus en mer, confus et apeurés. C’est pourquoi nous sommes si attachés et si protecteurs de nos systèmes de pensée.

    Comme l’a démontré l’historien des sciences Thomas Kuhn, même les scientifiques sont attachés à leurs paradigmes et ont tendance à s’y accrocher en dépit de la raison et des preuves contraires, jusqu’à ce que ces anomalies s’accumulent au point de précipiter une crise et que le paradigme finit par s’effondrer d’un seul coup sous leur poids. Le paradigme discrédité est alors supplanté par un paradigme alternatif. Ainsi, les changements de paradigme scientifique ont tendance à être révolutionnaires plutôt qu’évolutifs.

    Comme l’a fait valoir Jordan Peterson, cela est vrai non seulement pour les paradigmes scientifiques mais aussi pour les systèmes de croyance en général, y compris sociopolitiques.

    Ainsi, un progressiste peut préserver son précieux modèle en répondant à des anomalies comme vos arguments solides contre le salaire minimum par un déni général. Vous avez peut-être planté la graine du doute, mais il est réticent à la laisser germer, de peur qu’elle ne compromette et n’effondre toute sa philosophie progressiste. Une telle crise de paradigme bouleverserait son monde et il ne veut pas qu’elle se produise.

    Mais si, en plus de remettre en question sa vision actuelle, vous lui en proposez également une alternative – « une philosophie tout aussi complète », comme l’a dit Hazlitt – cela peut atténuer son anxiété à l’idée d’abandonner son idéologie progressiste. Au lieu de la perspective de voir sa structure existante s’effondrer et être remplacée par rien d’autre qu’une confusion sans direction, on lui offre l’opportunité de la remplacer par une autre. C’est beaucoup moins effrayant.

    Ainsi, au lieu de se contenter de démystifier le salaire minimum en particulier, il est essentiel de fournir au moins un aperçu d’une vision alternative plus large : c’est-à-dire la fonction économique des salaires en général, l’éthique des contrats en général, et ce que sont les marchés et les sociétés libres et comment ils fonctionnent. Une fois que votre adversaire commence à comprendre et à adopter la perspective de la liberté dans son ensemble, il lui sera beaucoup plus facile d’adopter les salaires du marché et de renoncer au salaire minimum.

    Pour amener les gens à abandonner le progressisme, le socialisme, l’autoritarisme et autres idéologies illibérales, nous devons « avant tout », comme l’a conclu Hazlitt, « exposer les fondements d’une philosophie de la liberté ».

    Pour détourner les gens des mauvaises politiques, nous devons d’abord et avant tout les orienter vers de bons principes fondamentaux et une bonne philosophie. Nous devons aller au-delà du jeu de la taupe avec les mauvaises propositions et poser les bases philosophiques nécessaires pour aider les individus à effectuer leurs propres changements de paradigme révolutionnaires – leurs propres expériences de conversion – vers la liberté.

    Traduction Contrepoints

    Article publié initialement le 9 août 2022

    Sur le web

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      Comment Margaret Thatcher a vaincu la syndicratie

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 14 February, 2023 - 04:15 · 10 minutes

    À l’heure où le gouvernement britannique se trouve confronté à un vaste mouvement social sur fond d’inflation et de stagnation, de nombreux commentateurs évoquent les combats de Margaret Thatcher . Le Premier ministre actuel, Rishi Sunak, a lui-même invité la comparaison en déclarant l’été dernier : « Je me présente en thatchérien et je gouvernerai en thatchérien. »

    Dans la crise actuelle, quelles leçons peut-on tirer du bras de fer qui opposa le gouvernement de Thatcher aux syndicats il y a quarante ans et plus ?

    Il convient tout d’abord de relativiser le parallèle. Les problèmes du Royaume-Uni en 2023 n’ont pas la profondeur de ceux des années 1970. L’inflation d’aujourd’hui résulte de chocs ponctuels et non de facteurs structurels internes : on peut espérer une stabilisation des prix une fois la crise énergétique et la guerre en Ukraine passées. Les grandes entreprises britanniques d’aujourd’hui ne sont ni sclérosées par les rentes ni plombées par les grèves. Les syndicats n’ont pas la force de frappe qu’ils avaient à une époque où ils faisaient chuter les gouvernements.

    Cette position relativement favorable – si on la compare à celle où se trouvait Margaret Thatcher lors de son arrivée au pouvoir – est précisément la conséquence de son action. Sa victoire durable sur la syndicratie s’est accomplie en trois temps.

    Une victoire en trois temps

    Le premier moment fut celui du carcan législatif. Les gouvernements des années 1970 s’étaient montrés impuissants à enrayer une spirale inflationniste dont ils étaient conscients. Durant le fameux « Hiver du Mécontentement » de 1978-79 le Trade Union Congress (TUC) avait paralysé le pays pour obtenir des hausses de salaires de 10 % alors que Premier ministre travailliste James Callaghan voulait s’en tenir à 5 %.

    Pour défendre l’État et le citoyen face au chantage syndical, le gouvernement Thatcher a entrepris d’encadrer le droit de grève par la loi. Les réformes du début des années 1980 ont interdit des pratiques telles que le secondary picketing : sous prétexte de « solidarité », les centrales avaient recours à des troupes de choc – les flying pickets – intervenant d’usine en usine pour empêcher toute reprise du travail. Désormais, chacun était en droit d’agir contre son employeur, mais pas celui des autres.

    Par ailleurs, la réforme instaurait le bulletin secret dans l’élection des dirigeants syndicaux comme pour les grèves : la pratique trotskiste de la main levée disparaissait. Enfin, le législateur s’attaquait au dispositif du closed shop par lequel, dans des pans entiers de l’industrie, tout travailleur était tenu d’être syndiqué. Cette mainmise sur l’embauche constituait non seulement une source de revenu garantie pour les syndicats mais surtout un formidable moyen de pression : en se désolidarisant d’un mouvement social, un employé risquait l’expulsion, donc la perte de son emploi.

    Thatcher se défendait de vouloir détruire le syndicalisme. Elle partait de l’idée que la majorité des adhérents n’était pas des extrémistes : pour rompre l’emprise des intégristes du TUC, il fallait donner la parole à la base.

    Notons que ces mesures qui se résument au remplacement de la stratégie des gros bras par la démocratie interne, n’avaient rien de radical. Les gouvernements antérieurs de droite comme de gauche avaient esquissé des initiatives dans ce sens. Même sur le closed shop, la nouvelle législation se limitait à instaurer des dédommagements pour les travailleurs exclus d’un syndicat. Le monopole d’une union sur la main-d’œuvre d’une entreprise ne sera aboli que sous John Major, le successeur de Margaret Thatcher.

    La volonté d’agir

    Ce qui distingue la Dame de fer de ses prédécesseurs n’est donc pas l’hostilité à l’hyperpuissance syndicale mais la volonté d’agir. Nous touchons là au deuxième volet de son action contre les grévistes : la fermeté. Une fois le cadre légal posé, elle était résolue à triompher de ceux qui cherchaient à s’en affranchir.

    Elle en donna la preuve éclatante lors du conflit avec des mineurs de 1984-85. On a souvent reproché à Thatcher d’avoir cherché l’épreuve de force. Elle s’y était assurément préparée, mais l’initiative en revient d’abord à Arthur Scargill, chef du syndicat de mineurs, la National Union of Mineworkers (NUM). Ce marxiste de stricte observance était convaincu d’incarner le pays réel face à un capitalisme corrompu. Après la réélection de Thatcher en 1983, il se pose en fer de lance de la résistance à des institutions jugées illégitimes. « L’action extraparlementaire, déclare-t-il, est la seule voie ouverte à la classe ouvrière et au mouvement travailliste. »

    Un an plus tard, lorsqu’il s’insurge contre la fermeture des mines de charbon déficitaires, Scargill ne cache pas le caractère politique du mouvement : « C’est le coup d’envoi d’une campagne pour changer de direction et se débarrasser du gouvernement conservateur. »

    Scargill fut l’adversaire rêvé pour Thatcher. Extrême en paroles, il l’était aussi dans ses buts et ses méthodes. Il exigeait le maintien des puits quelle que soit leur rentabilité, jusqu’à l’épuisement des gisements, voire au-delà. La grève fut déclarée par la NUM sans consultation en bonne et due forme. Cela renforça le gouvernement dans sa fermeté : il était clair que beaucoup de mineurs ne partageaient pas la ligne dure de Scargill et qu’il craignait de se voir désavouer par sa base.

    Les divisions au sein du mouvement éclatèrent dès le début, en mars 1984, lorsque les mineurs du Nottinghamshire votèrent à une large majorité pour la poursuite du travail. Dans une manœuvre encore une fois illégale, Scargill dépêcha ses commandos de flying pickets pour en découdre avec les « jaunes » et la police. Thatcher qualifiera ces incidents de « tentative de substituer la loi de la populace à la règle de droit ».

    On peut qualifier d’intransigeante sa position tout au long de la crise. Il est également vrai que les forces de l’ordre ont commis des brutalités contre les grévistes. Mais en fin de compte, Thatcher fit plier Scargill en démontrant que c’était bien elle, et non lui, qui représentait le pays, notamment les classes populaires. Son autorité tirait sa force de sa légitimité.

    La voie de la privatisation

    Le troisième temps fort de sa lutte contre les syndicats fut à long terme le plus efficace : il s’agit des privatisations. Notons que le programme conservateur de 1979, axé sur la rigueur budgétaire et monétaire, n’en parle pratiquement pas. Ce n’est qu’au cours des années 1980 que prend corps l’idée de vendre les industries nationalisées durant l’après-guerre.

    Il faut souligner ce que ces mesures ont de révolutionnaire : aucun pays n’avait jusque-là envisagé et encore moins tenté l’expérience. De plus, Thatcher s’y est attachée à une période où sa politique n’avait pas encore porté ses fruits. Il fallait avoir les reins solides pour lancer ces privatisations en 1981, au milieu d’une récession qui provoquait des émeutes dans tout le pays. Et il fallait une foi indestructible pour accélérer le mouvement en 1985-86, alors que le chômage dépassait 12 %, que la popularité du Premier ministre était au plus bas et qu’elle était contestée au sein même de son cabinet.

    Malgré ce contexte peu propice, la révolution a bien eu lieu. L’aérospatiale, la construction automobile, les transports aériens, les télécoms, l’acier, le gaz, l’eau : au total une quarantaine de grandes entreprises sont passées au privé sous Thatcher. Le secteur nationalisé qui représentait 10 % du PIB britannique en 1980 ne pesait que 3 % dix ans plus tard.

    Libérés du cocon étatique, des entreprises en faillite ont appris à voler de leur propre ailes. Le sidérurgiste British Steel, le transporteur British Airways, pour ne prendre que deux gouffres à subventions des années 1970, ont fini par contribuer au redressement des comptes publics plutôt que de les plomber. Dans les secteurs non-compétitifs – comme les chantiers navals – les privatisations ont accéléré des fermetures (en cours de longue date), libérant les capitaux et l’emploi vers des usages productifs.

    Les ventes d’actions aux citoyens à prix avantageux ont par ailleurs institué un véritable capitalisme populaire : en quatre décennies le nombre d’actionnaires au Royaume-Uni est passé de trois millions à douze millions. Le succès des privatisations à la britannique en fera un modèle copié de par le monde.

    Outre l’impact purement économique, le retrait de l’État de l’appareil productif constitue un changement de paradigme qui a cassé l’absolutisme syndical. Soumise à la discipline du marché, une entreprise n’a ni la marge de manœuvre ni le pouvoir de nuisance nécessaires au maintien de mesures restrictives.

    La Grande-Bretagne compte aujourd’hui 6,5 millions de syndiqués – moitié moins qu’en 1980. En termes de journées perdues pour cause de grève, la chute est encore plus spectaculaire : d’une moyenne de 13 millions par an dans les années 1970, on est passé à quelques centaines de milliers, tout au plus, depuis 30 ans.

    Aujourd’hui, seul le secteur public affiche un taux de syndicalisation important (50 %). Les grèves actuelles sont particulièrement suivies dans l’enseignement, la santé, les secours d’urgence et la fonction publique. La mobilisation est également notable dans les transports où de nombreux acteurs sont privés. Mais ce secteur est loin d’être concurrentiel : dans les chemins de fer, l’infrastructure est aux mains de l’État qui accorde des monopoles sur le long terme à des opérateurs qu’il subventionne.

    Rishi Sunak peut-il s’inspirer de Margaret Thatcher dans l’affrontement avec les grévistes ?

    Pour ce qui est du cadre législatif, la marge est limitée. Déjà en 1997, Tony Blair se vantait d’avoir mis en place « les lois sur les syndicats les plus restrictives du monde occidental « . On voit mal comment le gouvernement conservateur peut les restreindre davantage – d’autant moins que les grèves relèvent de conflits classiques (salaires, conditions…) et non de l’insurrection. Tout au plus Sunak prévoit-il d’instaurer un niveau de service minimum dans certains secteurs publics, à l’instar de la France et d’autres pays du continent.

    En matière de recours au privé, les possibilités d’action sont en principe plus amples. Malgré les réalisations de l’ère Thatcher, la Grande-Bretagne n’est pas le paradis – ou l’enfer – néolibéral que beaucoup imaginent. Ainsi en matière d’enseignement, il n’y a pas d’équivalent aux écoles sous contrat à la française : une independent school ne saurait bénéficier d’aide de l’État. Pas étonnant que ces établissements privés accueillent trois fois moins d’élèves que leurs homologues français. Le monopole de l’école publique sur des deniers publics accroît naturellement le pouvoir des syndicats d’enseignants britanniques.

    La France est également plus libérale que le Royaume-Uni dans le domaine des ambulances. Près de 80 % de nos ambulanciers dépendent du privé avec un taux de syndicalisation très faible. Même dans les urgences, affirme Bruno Basset de la Fédération Nationale des Ambulanciers Privés, la moitié des transports sont assurés par de petits opérateurs. En Grande-Bretagne, où règne le culte du National Health Service , le secteur public est largement majoritaire. Selon Alan Howson, patron de l’ Independent Ambulance Association , à peine 10-15 % des urgences en Angleterre sont sous-traitées au privé. Résultat : depuis six mois, les services ambulanciers sont touchés par des grèves à répétition qui n’ont pas d’équivalent en France.

    Toutefois, il n’est pas question pour le gouvernement de s’attaquer aux monopoles du secteur public, que ce soit dans l’enseignement ou la santé. Rishi Sunak n’est pas l’homme de la rupture. Technocrate compétent, il n’est ni animé par la foi qu’exige le changement de paradigme, ni auréolé par le suffrage populaire. Il gère les affaires au nom d’un parti conservateur usé par 13 ans de pouvoir.

    On peut néanmoins espérer qu’il montre assez de fermeté pour faire face à des défis sociaux mineurs par rapport à ceux qu’a connus le pays dans les années 1970 et 1980. Sunak saura peut-être su diriger le pays « en thatchérien », mais il n’aura pas gouverné en Thatcher.

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      Lettre aux hommes

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 1 February, 2023 - 03:40 · 1 minute

    Par Tonvoisin.

    « Mon cœur s’est noyé dans l’océan de tes rêves !

    Au loin, le temps, la vie des vagues silencieuses,

    se brisait en cadence sur l’absence de trêve

    Et le monde riait ! La folie est joyeuse !

    J’aurais vécu pour rire dans un monde à pleurer

    sans mépriser mes juges de ma peine cruelle

    Enfant je suis, enfant je meurs. Me faut-il expliquer ?

    La tristesse des autres est ma seule étincelle !

    Je me croyais vivant et soudain je suis mort !

    Gloire à mes assassins, qui ont sali mon âme,

    les plaines de mes pensées, mon unique trésor

    courent dans des lendemains inconnus des infâmes !

    Ignorant par principe du travers des hyènes

    ma lanterne brisée, je titube dans l’espoir

    de ne pas m’être perdu dans la nature humaine

    un sourire cicatrice comme dernier territoire

    À rêver de partir sans savoir où aller…

    On traverse la vie, et la vie vous transperce

    Mes combats inutiles, qu’importe de les gagner ?

    Je n’ai vaincu que moi ! Ce monde n’est qu’ivresse.

    Il se tient devant vous l’Amazigh fatigué !

    les mots n’arrêtent rien ! Le drame se prépare !

    À l’ombre des silences et des infatués,

    la vérité se terre à l’abri des regards !

    Un poème pourra-t-il convaincre votre coeur

    que le mal est en marche déguisé en sauveur ?

    un poème pourra-t-il faire taire votre peur ?

    hurler à mes côtés pour sauver le bonheur ?

    Le bien alimente le mal, s’en pensant exempté

    la propagande violente altère la raison

    elle transforme les hommes en produits exaltés

    des hommes vont mourir, ils n’auront pas de noms

    Ceux qui décident les guerres ne partent pas au combat

    et la guerre se rapproche comme solde de tout compte

    de peuples « insupportable »s qui réclament l’équitable

    La troisième guerre mondiale, elle se fera sans moi !

    Je ne reste debout que par mépris des balles !

    Pour clamer ma tristesse devant l’inconséquence

    Je demeure vivant en quête d’idéal

    Si les hommes sont fous. Toutes mes condoléances !

    Amen Tonvoisoin

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      Pour en finir avec le « libéralisme »

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 29 January, 2023 - 04:30 · 4 minutes

    Si vous défendez en France le libéralisme classique vous êtes rapidement soumis à un exercice pénible. Face à l’ignorance de votre auditoire, vous êtes contraint d’expliquer les « droits naturels », de remonter à l’humanisme et à l’ école de Salamanque , de justifier laborieusement que le libéralisme n’est pas que le marché et la concurrence loyale. Ni le capitalisme de connivence.

    Définir facilement le libéralisme est si malaisé que beaucoup commencent par expliquer « ce qu’il n’est pas ».

    Bref, en invoquant le libéralisme, vous perdez vos interlocuteurs même ceux qui seraient plutôt disposés à aller dans votre sens. Car beaucoup commencent à douter du bien-fondé du « tout État ».

    Le concept mussolinien du « tout dans l’État, rien contre l’État, rien en dehors l’État » n’a jamais été autant pris en défaut que ces deux dernières années :

    • Réforme des retraites
    • Gestion de l’épidémie de Covid-19
    • Crise énergétique provoquée
    • Dogmatisme écologique
    • Lutte contre la hausse des prix, stigmate de l’inflation monétaire
    • Dysfonctionnements de plus en plus flagrants de l’Éducation nationale, de l’hôpital, des transports publics, de la justice…

    Autant de sujets qui mènent certains esprits sensés – pourtant nourris aux mamelles roses et rouges du mammouth – à douter.

    Si vous vous réclamez du « minarchisme » comme solution possible à ces maux votre auditeur prête une oreille plus attentive que si vous agitez l’épouvantail du libéralisme. C’est ce que j’ai constaté.

    Le minarchisme est plus simple à définir rapidement

    D’abord, l’étymologie est simple : « min » = minimal et « archie » = gouvernement.

    Pas de gros mot qui font peur comme « liberté » avec son effrayant corollaire de « responsabilité ».

    Légère consonnance avec « anarchie » qui évitera de vous faire immédiatement ranger dans la case « fasciste » ou « capitaliste ».

    Wikipedia définit ainsi le minarchisme :

    « Idéologie politique dérivée du libertarianisme qui préconise un État minimal dont la légitimité est enserrée par des limites strictes ».

    Évidemment, vous aurez tout intérêt à éviter la diabolique mention du libertarianisme et à condenser cette définition, par exemple : « politique qui préconise un « État minimal », dont la légitimité est enserrée par des limites strictes ».

    Wikiberal complète un peu, mais en restant simple :

    « L’État étant caractérisé comme un monopole de la violence, ses prérogatives légitimes sont souvent identifiées aux seuls domaines où la violence est justifiée, les « fonctions régaliennes » de l’État : le maintien de l’ordre, la justice, la défense du territoire. »

    Vous pouvez à ce stade paraître sympathique car contre la violence d’où qu’elle provienne. Presque baba-cool … Vous devriez alors pouvoir argumenter sur le bien-fondé de faire reculer les prérogatives de l’État.

    Certes, un libéral farouche vous objectera que la police, la justice et même l’armée pourraient être confrontées à la concurrence. Mais le libéral farouche est une espèce rarissime dans notre merveilleux paradis social et enfer fiscal et ce n’est pas à lui que vous cherchez à ouvrir des horizons.

    À ce stade, vous devriez cependant recevoir les objections classiques :

    « Oui,… mais non ! Que faites-vous de l’éducation, de la politique industrielle, de la culture, de la santé, de l’énergie… Que faites-vous du « lien social » ? ».

    Vous pouvez alors dégainer une autre arme : la subsidiarité.

    La subsidiarité pour contrer l’irresponsabilité

    Je vous l’accorde, la subsidiarité n’est pas le mot politique le plus usuel dans notre merveilleux paradis centralisé. Mais la définition coule assez bien :

    Wikipedia

    « la responsabilité d’une action publique, lorsqu’elle est nécessaire, revient à l’entité compétente la plus proche de ceux qui sont directement concernés par cette action. »

    Vous pouvez là aussi prendre un peu de liberté avec la définition et la remplacer par :

    « La décision d’une action publique doit revenir à l’entité compétente la plus proche de ceux qui sont directement concernés par cette action. »

    Ainsi, vous serez vu d’un bon œil par les habitants des « territoires » excédés des décisions prises à Paris par des gens qui ne subiront jamais les nuisances de leurs erreurs.

    Ceci vous permettra de butiner différents thèmes comme :

    • Le salaire minimal ou le RSA (pourquoi devraient-ils être identiques à Dunkerque et à Nice ? À Dunkerque, le chauffage est un poste bien plus lourd qu’à Nice)
    • La scolarité (pourquoi pas un peu d’initiatives locales dans la pédagogie et les programmes ? Qui est le plus apte à juger de ce qui convient à vos enfants ?)
    • Le lien social et la solidarité consentie et non pas imposée ne seraient-ils pas bien plus forts si les gens concernés avaient leur mot à dire ?
    • Pourquoi la monnaie devrait-elle être administrée par un organisme supranational irresponsable des conséquences de sa création monétaire ?
    • Etc.

    Bref, en combinant minarchisme et subsidiarité, vous devriez pouvoir instiller un peu de libéralisme en évitant d’être étiqueté libéral-au-cœur-sec qui n’aspire qu’à être un loup parmi des loups dévorant des agneaux.

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      Liberté : la Première ministre de la Nouvelle-Zélande démissionne

      ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 24 January, 2023 - 03:50 · 2 minutes

    Faisant face à une popularité en chute libre, la Première ministre travailliste néozélandaise Jacinda Ardern a récemment démissionné de son poste. Alors que les politiciennes habituelles la défendront bec et ongle contre le « sexisme , » les libéraux sensés se réjouiront de la démission de ce tyran, quel que soit son sexe.

    Rassurez-vous, le mot n’est pas utilisé à la légère. Comme trop de gouvernement « libéraux », Ardern a fortement restreint la liberté de mouvement de « sa » population durant la pandémie. Malheureusement, elle a pris la Chine en exemple et y est allée d’une politique zéro covid en enfermant les Kiwis au moindre cas. Ironiquement, ces fermetures incluaient aussi les sites de vaccination…

    À ce sujet, Ardern a également opté pour la vaccination obligatoire après avoir appris qu’à peine 10 % des travailleurs d’un port avaient reçu leur injection. À l’instar de son collègue Justin Trudeau, elle a aussi brutalement réprimé des manifestations surtout pacifistes protestant contre la violation des libertés. Elle a feint l’innocence en affirmant ne « pas comprendre pourquoi, quand 400 personnes sont hospitalisées et 20 000 deviennent malades chaque jour, certains s’opposent aux efforts pour calmer la situation. »

    Ne lui en déplaise, les gens s’opposaient surtout aux restrictions et aux obligations.

    Un gouvernement de censure

    Le gouvernement Ardern a entrepris un combat de Don Quichotte contre la « désinformation. » Ledit combat avait commencé contre l’extrémiste, suite à l’attentat de Christchurch qui avait couté la vie à quelque 50 personnes. Elle avait même fait alliance avec Emmanuel Macron pour demander un contrôle plus strict de l’Internet pour contrer la haine virtuelle. Son gouvernement avait aussi menacé de 14 ans de prison quiconque partageait la vidéo du manifeste du tueur.

    Le combat s’est donc dirigé contre la désinformation. Après tout, « comment peut-on combattre le changement climatique si les gens n’y croient pas? » s’est-elle demandé . Son questionnement allait également dans ce sens en ce qui concerne la question du covid. Cette obsession de prétendre à la vérité infuse explique sans doute pourquoi le Parti libertarien a fait si bonne figure en 2020.

    Désarmer la population

    Finalement, comme tout bon tyran, Ardern veut une population désarmée.

    Après tout, elle a carrément dit que le port d’arme est un privilège . Elle a donc joué le jeu du tireur de Christchurch et promptement banni les armes « d’assaut » afin d’éviter d’autres fusillades. Si c’était si facile, Chicago serait un paradis sur Terre où on entendrait une mouche voler.

    Heureusement pour les Kiwis, un tel projet sera très ardu . Non seulement il n’y a pas de statistiques précises sur le nombre d’armes en circulation, mais la compensation pour le rachat des armes était ridicule. Et avec la fuite des données de quelque 38 000 personnes ayant enregistré et/ou rendu leurs armes, il n’y a pas de quoi avoir confiance en son gouvernement.

    Bref, la démission de Jacinda Ardern est une rare occasion pour sabrer le champagne en l’honneur du libéralisme. Les remarques sexistes (oui, il y en a eu ) qu’elle a subies sont bien pâles en comparaison de ses violations patentes des droits et libertés des Néo-Zélandais.

    En espérant que son successeur , qui devrait être connu au moment de la publication de ce texte, saura ramener un peu de bon sens dans les politiques de son pays.

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      Roger Scruton, le brexiteur, désormais incontournable philosophe conservateur-libéral européen

      Thierry Martin · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Saturday, 7 January, 2023 - 04:15 · 13 minutes

    Il y a trois ans disparaissait le philosophe anglais Roger Scruton. Son œuvre et son parcours furent salués mais sans réellement mesurer en quoi il nous serait nécessaire pour les temps à venir. D’après l’écrivain Jacques de Saint Victor dans le Figaro Magazine Georgia Meloni, citait, outre Jean-Paul II et Montesquieu, sir Roger Scruton dans son discours d’investiture du 25 octobre 2022. Elle le présentait comme « un des plus influents maitres de la pensée du conservatisme européen ».

    N’oublions pas que le philosophe conservateur libéral parti le 12 janvier 2020 était heureux d’avoir connu le Brexit. Pour lui la nation restait une dimension indépassable de la richesse de la civilisation non seulement européenne mais occidentale.

    Scruton était devenu conservateur après avoir vécu Mai 68 en France et en avoir éprouvé un « vrai dégoût » pour le gauchisme. « Ce conservatisme d’un Scruton, d’un Oakeshott ou d’un Prezzolini, dont le Manifeste des conservateurs de 1972 est une version italienne anticipée de Scruton, relève d’une philosophie libérale particulière, peu diffusée en France, qui sans être réactionnaire, défend l’héritage historique de chaque nation occidentale »

    Ce conservatisme libéral offrirait selon Meloni un moyen de contrer les dérives d’un libéralisme qui s’épuise dans le wokisme , la cancel culture , ou l’indifférence aux pressions migratoires et au séparatisme islamique, ce que Sruton appelait le « libéralisme de la répudiation ». Une haine de soi représentée par le régime de Bruxelles au nom du progressisme cher au président Macron.

    Il y a un an, Georgia Meloni a déclaré au Giornale : « Mon intention est de promouvoir la figure de sir Roger Scruton, notamment auprès de jeunes. »

    Ce fut l’intention de votre serviteur dès qu’il apprit la disparition du grand philosophe dans la presse britannique, en publiant un hommage dans Le Figaro .

    Scruton constate finalement que depuis 1989 et la chute de l’Union soviétique, un transfert des revendications s’est opéré de la classe ouvrière aux femmes, aux homosexuels et aux immigrés.

    Hommage à Roger Scruton, un conservateur qui a déconstruit la gauche

    Cet hommage a été publié en partie dans Le Figaro. Il est reproduit ici dans sa version complète.

    Sir Roger Scruton est mort et l’Angleterre a perdu son plus grand penseur conservateur, écrivain, chasseur de renard, philosophe et véritable héros de la droite.

    Comme beaucoup des plus braves et des meilleurs il était un prophète presque sans honneur dans son propre pays, nous dit le journaliste anglais James Delingpole.

    Dans les pays d’Europe de l’Est, poursuit-il, où il avait lutté pour la liberté sous le communisme, il a été correctement reconnu comme un héros : en 1998, le président Vaclav Havel lui a décerné la Médaille du Mérite de la République tchèque (première classe) pour son travail dans les années 1980 en contrebande de littérature samizdat et en encourageant les réseaux clandestins derrière le rideau de fer. En juin 2019, le président polonais lui a décerné l’Ordre du mérite de la Pologne. Le mois dernier (décembre 2019) le président hongrois Viktor Orban lui a décerné l’Ordre du mérite, affirmant qu’il avait « prévu les menaces de migrations illégales et avait défendu la Hongrie contre les critiques injustes. »

    Fin analyste de la gauche moderne

    Mais comment mieux rendre hommage à un penseur disparu qu’en invitant à le lire.

    La récente (mars 2019) traduction en français du livre de Roger Scruton , grand connaisseur de l’idéologie de gauche va nous éclairer sur les chemins parcourus pour en arriver là où nous en sommes aujourd’hui, c’est-à-dire le remplacement de cette « bonne vieille » idéologie de la gauche ouvrière par les politiques de l’« identité » et la « globalisation ».

    Si Antonio Gramsci a voulu transposer la révolution dans le domaine de la culture, l’action révolutionnaire des rues et des usines devenant une révolution culturelle sans violence menée au sein des universités, des théâtres, des salles de conférences et des écoles, ses successeurs sont allés plus loin dans la déconstruction.

    « La révolution culturelle initiée par Gramsci tourna court dans le relativisme vide […] Gramsci espérait remplacer la culture bourgeoise par une nouvelle hégémonie culturelle objective, mais ces projets furent contrecarrés par le rejet de l’idée même d’objectivité. »

    À la politique classique d’émancipation de l’individu se substitue dans la gauche libérale américaine et notamment dans le Parti démocrate les « politiques de l’identité victimaire » qui réduit le champ social à un système de domination. Nous assistons rien de moins qu’à la disparition de la personne sur le plan idéologique, ce qui peut être interprété comme le prodrome d’une dimension totalitaire au sens orwellien.

    Il est nécessaire de reprendre la généalogie de cette « politique des identités » pour bien comprendre que cette idéologie n’est pas le fruit du hasard. Roger Scruton nous l’expose dans ce récent ouvrage (mais non le dernier) paru en anglais dès 2015, mais traduit dernièrement en 2019. Ce brillant intellectuel conservateur relançait à nouveau la polémique trente ans après et posait clairement la question : pourquoi les autorités universitaires sont-elles de gauche et conséquemment pourquoi les penseurs de droite ou libéraux, bien plus proche de la vérité, y sont tellement sous-représentés ?

    Il faut préciser ici que Roger Scruton menait une vie universitaire tranquille après avoir passé sa thèse et qu’il aurait pu jouir sereinement de sa carrière de professeur de philosophie de l’esthétique à la Birkbeck University of London , s’il n’avait pas commis en 1985 un ouvrage sur les penseurs de la nouvelle gauche où il étrillait l’étonnante « machine à non-sens » inventée par Lacan, Deleuze et Guattari, mais aussi les études post coloniales de Saïd ou le renouveau de « l’hypothèse communiste » vu par Badiou et Zizek. Thatcher avait beau être au pouvoir ce fut une bronca qui s’abattit sur notre auteur conservateur, ses pairs d’Oxford s’en prirent à son éditeur à tel point que le livre sarcastique fut retiré du catalogue, et l’ensemble de ses travaux subirent le discrédit.

    Personnellement j’ai quitté l’université en fin de thèse pour fuir les petits mensonges du prêchi-prêcha politiquement correct. J’ai retrouvé plus de vérité dans mes activités de direction d’entreprise où le profit & lost ne permet pas de tricher. Heureusement Scruton, lui, a persisté, et il émet l’hypothèse iconoclaste selon laquelle les intellectuels de gauche se pensant supérieur aux gens ordinaires considèrent comme injuste de devoir gagner leur vie comme les autres. Ils sont frustrés, dit-il, de voir que les événements sont menés par les politiciens et les hommes d’affaires – les bourgeois .

    Scruton poursuit, non sans ironie, qu’hostile à la bourgeoisie et à l’église catholique, les intellectuels de gauche fonctionnent pourtant comme un phénomène religieux en ce sens que tout comme la promesse de vie éternelle n’est pas vérifiable, la promesse des lendemains qui chantent est à venir. On ne peut réfuter ces promesses puisque l’avenir n’est pas encore advenu.

    L’intellectuel de gauche moderne est le descendant du prêtre [mais sans Dieu.] […] Il ne cesse de comparer l’imperfection du présent avec la perfection de l’avenir. Or il est malhonnête de prétendre que tout est imparfait car on peut toujours améliorer les choses ponctuellement – c’est cela, être conservateur, et c’est ce que la gauche refuse d’accepter. Il y a deux grandes conceptions de la politique, l’une où elle n’est pas l’entièreté de la vie mais juste une petite partie. On se met d’accord malgré des divergences d’intérêts, on fait des compromis. L’autre conception est la conception exorbitante de la politique héritée de Lénine, Marx, de la Révolution française ou du nazisme. La politique est alors une vision entière qui organise la vie de tous et à laquelle chacun participe, avec pour résultat le chaos et les millions de morts.

    Qu’a fait Scruton ? Figure reconnue du conservatisme britannique, il s’est amusé à les lire. À les prendre au sérieux. De Sartre à Foucault en passant par Thompson, Habermas, Hobsbawn, Lacan, Derrida ou Badiou , il a plongé dans le bouillon de concepts tortueux de ce petit monde de gauche de l’après-guerre et il a remonté une talentueuse démonstration des errances de ces pensées dont il ne sauve que l’écriture de Sartre qu’il a toujours admiré « parce qu’il savait écrire ».

    Ces gens veulent la « justice sociale » et « l’émancipation individuelle », ce qui est contradictoire puisqu’il faudrait alors « empêcher les ambitieux, les dynamiques, les intelligents, les beaux et les forts d’avancer, et quel degré de contrainte devons-nous nous permettre d’exercer sur eux ? »

    Mais peu importe le réel puisque la gauche s’est toujours payée de mots, et la novlangue débusqué par Orwell est toujours là pour apporter ses solutions. C’est ainsi que la justice faite d’interactions individuelles et devenu « justice sociale ». « Ce genre de « justice » imposée par un plan qui implique invariablement de priver les individus de choses qu’ils ont acquises de manière équitable sur le marché. » Le plus célèbre des mots de la novlangue étant le mot-valise incantatoire « capitalisme ».

    [S’opposant clairement au constructivisme, Roger Scruton affirme que la société tient grâce à un réseau de lois implicites en s’appuyant sur l’économiste libéral Friedrich Hayek. « Les vraies lois – « les lois abstraites » , comme les appelle Hayek – ne sont donc pas des éléments d’un plan d’action, mais résultent d’une entreprise de coopération sociale à long terme. Elles sont les paramètres par lesquels la coopération entre des inconnus pour leur avantage mutuel devient possible. Comme pour le marché, les avantages qu’elles procurent sont en partie épistémiques. En suivant ces règles, nous nous dotons d’une connaissance pratique qui nous sera particulièrement utile quand nous nous aventurerons dans l’imprévisible, qui nous dictera le comportement à avoir envers les autres afin de nous assurer leur coopération tout en poursuivant nos objectifs. »]

    Dans Gentle Regrets (2005) Scruton reprenait les arguments de Edmund Burke concernant le contrat social, « un contrat social qui devrait être élargi pour prendre en compte les morts et ceux à naître ». Oublier cela, écrit-il – se débarrasser des coutumes et des institutions –, c’est « placer les membres vivants d’une société en position de domination dictatoriale sur ceux qui les ont précédés et qui leur succéderont ».

    Cette idée de Burke l’amena à publier en 2012, un livre sur l’environnement, Green Philosophy , développant les principes d’une écologie conservatrice.

    Cependant Roger Scruton constate dans son récent ouvrage que depuis 1989 et la chute de l’Union soviétique, un transfert des revendications s’est opéré de la classe ouvrière aux femmes, aux homosexuels, aux immigrés et même aux musulmans. L’émancipation de ces nouvelles victimes est un puits sans fond dans la mesure où de nouvelles victimes surgissent constamment à l’horizon tandis que les précédentes disparaissent. Ce sont des intellectuels américains comme Richard Rorty ou Edward Saïd qui ont opéré cette rupture, reprenant le concept de rupture plus radical théorisé par Gramsci contre le dépassement hégelien ( aufhebung ) plus classique dans la pensée marxiste qui va jusqu’à Lénine et Staline, où l’on entend conserver la contradiction en la dépassant. Mais ces adeptes de la French Theory (la déconstruction) vont encore plus loin car Gramsci voulait une culture populaire, prolétarienne à la place de la culture dite « bourgeoise » alors que les gender studies , les post colonial studies amènent le relativisme et « les politiques de l’identité victimaire ».

    Aux États-Unis on parle de post-1989 world , parce que c’est à la faveur de la fin de la guerre froide que le champ idéologique a été investi par le globalisme et les politiques de l’identité victimaire.

    Autoflagellation des Occidentaux

    Voué aux gémonies l’Occident chrétien est et fut pourtant la société la plus inclusive de toutes, dit encore Scruton.

    Alors pourquoi cette sans cesse autoflagellation ?

    Aujourd’hui les boomers refusent de voir l’angoisse des classes moyennes en déclin dont ils ne partagent pas le sort. « Ils voudraient juste pouvoir continuer à se prétendre radicaux, tout en jouissant de confortables niveaux de vie grâce à cette feuille de vigne qu’est la « politique des identités » ».

    L’expression « gauche caviar » décrivait sous Mitterrand ceux qui n’avaient pas changé la vie mais seulement leur propre vie en accédant au pouvoir . Maintenant, c’est nous qu’on est les princesses. Vingt ans après, les bourgeois-bohèmes – les bobos – sont passés de la possession à la location, c’est-à-dire au stade de la jouissance sans entrave sans la responsabilité de l’avoir. Ils bénéficient d’un bon niveau de vie qui leur permet de ringardiser l’envie de consommer des plus pauvres. Ils en rajoutent dans les prétentions écologiques vertueuses globalistes qui ne mangent pas de pain tant elles sont souvent hors de portées de l’action humaine au sens stoïcien du terme, et s’investissent dans la défense d’identités soi-disant victimaires, ce qui leur garantit une confortable estime de soi.

    S’opère alors en France comme aux États-Unis un recentrage sur une politique qui classe les gens en fonction de leurs identités. À l’épicentre d’un système sans Dieu, devenu paradoxalement plus religieux que politique, il y a « le mâle blanc hétérosexuel chrétien », et plus on se rapproche de ce centre fatal, plus on est censé être coupable ou endetté envers les autres « identités ». L’altérité radicale qui en découle interdit tout dialogue d’égal à égal dans la mesure où la politique est réduite à une lutte entre groupe pour l’attribution préférentielle des ressources. L’éthique de la discussion qui permet de s’entendre sur le bien commun, abstraction faite des caractéristiques de chacun ne peut plus opérer.

    James Delingpole dont le livre préféré de Scruton est On Hunting rapporte qu’il a été tellement heureux de lire dans le numéro de Noël du Spectator que, pas plus tard qu’en février de l’année dernière – à l’occasion de son 75e anniversaire – il avait pu, malgré les protestations de sa charmante épouse Sophie, se rendre à la chasse à courre une dernière fois. Roger Scruton conclut son article dans le Spectator :

    En tombant au plus bas dans mon propre pays, j’ai été élevé au sommet ailleurs, et en regardant en arrière sur la séquence des événements, je ne peux que me réjouir que j’ai vécu assez longtemps pour voir cela se produire. En approchant de la mort, vous commencez à comprendre ce que signifie la vie, et ce que cela signifie est la gratitude.

    Puissions-nous maintenant prendre le temps de lire ses ouvrages.

    Adieu Sir Roger !

    Ainsi conclus-je mon hommage au grand philosophe qui par ses écrits va encore longtemps nous aider à ne pas être dupe et à agir pour conserver notre civilisation.

    Sur la masse de son œuvre peu d’ouvrages sont traduits en français.

    Thierry Martin auteur de BoJo, un punk au 10 Downing Street : Global Britain, Boris Johnson, le Brexit et l’après

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      Idée reçue : Emmanuel Macron, président libéral

      Eddie Willers · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 6 January, 2023 - 03:30 · 3 minutes

    Depuis son arrivée au gouvernement sous François Hollande, la presse n’a eu de cesse de présenter Emmanuel Macron comme un libéral . Forte de son inculture en la matière, elle pensait qu’il suffisait d’être passé par une banque d’affaires et d’avoir fait voter une loi de libéralisation de l’exploitation des autocars pour en être.

    Néanmoins, les dernières semaines nous montrent que notre président fait tout pour se départir de cette étiquette. Une déclaration m’a notamment marqué ces dernières semaines, celle critiquant une « Europe ultra-libérale qui ne permet plus aux classes moyennes de bien vivre ».

    Je passerai outre la stupidité profonde de l’expression ultra-libéral (on est libéral classique , minarchiste , libertarien , anarcho-capitaliste ou bien d’autres choses encore mais personne ne se revendique ultra-libéral parce que ça ne veut rien dire).

    En revanche, cette déclaration montre bien que notre président a abandonné toute velléité de réformer le mammouth étatique français et a sombré dans la facilité de la critique anti-capitaliste. Si je devais faire un parallèle avec l’histoire récente, je dirais qu’Emmanuel Macron est en voie de sarkoïsation : un président jeune qui laisse imaginer qu’il veut réformer le pays dans une optique plutôt libérale, quelques réformes timides qui vont dans ce sens et puis finalement l’abandon et le retour à la grosse cavalerie socialiste.

    Pas de baisse de la dépense publique en vue

    La gestion ubuesque de l’augmentation des taxes sur les carburants vient d’ailleurs corroborer cette affirmation. Elle est l’une des rares augmentations que j’aurais été prêt à consentir si elle avait réellement eu pour ambition de pousser à la baisse la consommation d’essence. Cependant, elle vient après moult annonces de prélèvements en tout genre et la conviction que le président ne souhaite pas réduire la dépense publique.

    Ces augmentations de taxes viennent donc encore une fois combler un manque à gagner et ne font qu’augmenter le mécontentement général et justifié des Français. La mise en place de « bons de carburants » proposée en contrepartie s’inscrit elle aussi purement dans une logique socialiste de redistribution par un État omnipotent qui décide à la place des Français.

    Ces orientations mouvantes décrédibilisent d’ailleurs encore les libéraux aux yeux de l’opinion qui ne les imagine qu’en monstres assoiffés de l’argent des Français. La situation de la France n’évoluera pas tant que l’État ne réduira pas son périmètre . Cela passe par des privatisations et des simplifications administratives. Si nous ne voyons pas ces mesures poindre, il n’existe aucun espoir que les baisses d’impôt annoncées se réalisent et que la situation des Français s’améliore.

    J’ai comparé un peu plus haut Emmanuel Macron à Nicolas Sarkozy, j’aurais aussi très bien pu le comparer à un Matteo Renzi à la française : un homme issu du centre gauche, présenté comme progressiste, libéral et réformiste qui se contente de réformettes et de communication pour finalement se rendre compte que ses orientations sont du socialisme déguisé et ne changent rien.

    Lorsque l’on voit où cela a mené l’Italie aujourd’hui, aussi bien en termes économiques que politiques , je ne puis qu’espérer un changement radical de notre président pour enfin embrasser la voie de réformes libérales.

    Sur le web

    Un article publié initialement le 14 novembre 2018.

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      Pourquoi le libéralisme n’est pas une idéologie

      Johan Rivalland · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 4 January, 2023 - 03:45 · 7 minutes

    Les définitions du terme « idéologie » abondent. Mais plutôt que de vous en apporter une ici, il convient surtout de relever qu’entre le sens initial du mot et les sous-entendus qu’il recèle désormais, la prudence s’impose.

    En effet, alors que ce terme avait une signification précise au départ, se référant à la science des idées , il a très vite subi les coups de boutoir de Napoléon, se moquant des intellectuels peu au fait de la politique concrète, puis surtout de Karl Marx, qui en marquera profondément le sens péjoratif aujourd’hui dominant, la présentant comme une « illusion idéaliste ».

    Le libéralisme est-il une idéologie ?

    Mais c’est surtout, aujourd’hui, sur son caractère prescriptif que l’on insiste lorsque l’idéologie est évoquée. Raymond Aron opposait ainsi ceux qui prétendent vouloir « changer l’Homme », en poursuivant des utopies ou croyances illusoires toujours pleines de bonnes intentions , mais se heurtant au réel, à ceux qui se réfèrent aux faits et, à ce titre, peuvent apparaître comme des briseurs de rêves .

    C’est pourquoi il considérait que le libéralisme, par essence, est anti-idéologique, car non-prescriptif.

    En quoi le libéralisme n’est-il pas prescriptif ?

    Le libéralisme n’a pas pour prétention de vouloir changer le monde ou de promouvoir un quelconque idéalisme. Il n’est pas là pour fantasmer la réalité, changer l’Homme ou faire rêver.

    C’est pourquoi certains préfèrent parler de doctrine, d’autres de philosophie, ou encore d’humanisme (ou les trois à la fois). En ce sens que le libéralisme est avant tout une conception de l’être humain, basée sur des rapports de coopération volontaire, de solidarité spontanée, de respect, de tolérance. Et qui ne cherche pas à imposer ses idées, comme le font des idéologies totalitaires ou simplement étatistes, par nature.

    Correspond-il à une forme d’extrémisme ?

    Comme le nom l’indique, le libéralisme vise avant tout à défendre les libertés individuelles. Ce qui passe par l’importance accordée au droit (nous y reviendrons), à la défense de la propriété (nous aurons certainement également l’occasion d’y revenir ; pas facile de ne pas déborder sur les prochains volets de cette série, ni de faire court) et implique de concevoir les libertés politiques et économiques comme un tout (idem).

    Il ne s’agit donc pas d’un extrémisme , loin de là et bien au contraire. Plutôt de principes visant à garantir les libertés fondamentales, fragiles par nature .

    Quelles sont ses prétentions ?

    Contrairement à l’État-providence qui a quasiment comme prétention de prendre totalement en charge les individus de leur naissance à leur mort , de manière que l’on peut croire bienveillante , le libéralisme entend au contraire leur faire confiance et s’appuyer sur leur capacité d’initiative pour développer une société où vivre en harmonie , tout en se sentant responsable. Ce qui n’exclut pas, d’ailleurs, de venir en aide aux plus démunis, contrairement à ce que certains souhaitent laisser penser.

    Dans le premier cas (État-providence), le risque de despotisme n’est pas loin. Voici ce qu’énonçait Alexis de Tocqueville à son sujet, se référant ici à ses citoyens :

    « L’État travaille volontiers à leur bonheur ; mais il veut en être l’unique agent et le seul arbitre ; il pourvoit à leur sécurité, prévoit et assure leurs besoins, facilite leurs plaisirs, conduit leurs principales affaires, dirige leur industrie, règle leurs successions, divise leurs héritages, que ne peut-il leur ôter entièrement le trouble de penser et la peine de vivre ? […] il ne brise pas les volontés, mais il les amollit, les plie et les dirige […] il éteint, il hébète, et il réduit enfin chaque nation à n’être plus qu’un troupeau d’animaux timides et industrieux, dont le gouvernement est le berger. »

    Le libéralisme défend donc une vision contraire à celle de planisme, qui mène à la route de la servitude . Et une philosophie optimiste, pleine de confiance en l’homme, tout en étant consciente de ses limites, et profondément éthique. Loin de l’arbitraire des idéologies tendant à prendre en mains le destin des peuples.

    Les Français sont-ils majoritairement contre le libéralisme ?

    La falsification qui est faite de ce terme, notamment à travers les adjonctions de particule ( néo , ultra ), destinées à le décrédibiliser, peut laisser penser que oui.

    Maintenant, et au vu de ce que nous avons pu amorcer à travers les éléments développés ci-dessus, on peut imaginer que les valeurs du libéralisme sont très probablement compatibles avec ce que pense profondément une grande partie de la population.

    La crainte ou le rejet du libéralisme, à mon sens, résulte donc d’un grand malentendu, d’une ignorance entretenue par ses principaux ennemis et par ceux (très nombreux) qui jouent involontairement, du coup, la caisse de résonance de ces mensonges, de manière sincère, par ignorance réelle de ce qu’il est (même des personnes aussi sensées ou avisées qu’une Natacha Polony , véritablement obsédée et ennemie farouche depuis très longtemps de quelque chose qu’elle méconnaît et au sujet duquel elle se trompe de ce fait lourdement 1 ).

    Pour conforter l’idée, voici ce qu’en dit par exemple Jacques Garello dans son dernier livre (en reprenant la phrase complète de Francis Richard) :

    « Les idées libérales ne sont pas celles qu’on croit : beaucoup de Français se croient et se disent libéraux, mais ne le sont pas en réalité. À l’inverse, sont encore plus nombreux les Français qui sont libéraux mais ne le savent pas. Rien d’étonnant à cela puisque le libéralisme n’a que très rarement été enseigné, et presque jamais appliqué. Le libéralisme est ignoré, donc caricaturé, diabolisé, ou dévié.

    Libéral ? Pas libéral ?

    Car, en effet, au-delà de ceux qui se pensent anti-libéraux par simple ignorance, il existe aussi tous ceux qui se disent ou se sont déjà dits un jour libéraux, mais ne le sont qu’à la carte (je ne pense pas à un Emmanuel Macron, auquel vous aurez peut-être pensé spontanément, mais plutôt ou aussi à des politiques du type Jean-Pierre Raffarin ou tant d’autres du même acabit, libéraux un jour, et plus le lendemain, ou libéraux mais pas ultra-libéraux ou encore libéraux en politique mais pas en économie. Autant de points qui mériteraient d’être discutés, mais je m’aperçois que mon article finit par être à rallonge, alors que je le voulais court).

    Et nous revenons là à l’essence de notre sujet du jour (en attendant les volets suivants) : le libéralisme est-il une idéologie ?

    C’est parce qu’il ne l’est pas que rien ne sert de se présenter comme libéral sur tel plan et pas sur tel autre. Cela peut d’ailleurs se discuter, mais le fait est que nous parlons bien d’une doctrine, d’une philosophie qui, si elle n’est pas fermée et stéréotypée mais bien vivante et ouverte, révèle une essence profonde difficilement divisible ou modulable en fonction de ce qui arrange.

    Cette philosophie de la liberté s’oppose à tout ce qui assujettit d’une manière ou d’une autre des êtres ou des organisations, au risque de verser dans ce qui apparaît bien, si l’on fait référence au domaine économique, comme un capitalisme de connivence (là encore, nous aurons largement l’occasion d’y revenir, car il s’agit d’une source centrale du grand  malentendu).

    Et c’est aussi parce que beaucoup ont été déçus et se sont sentis floués par certaines idéologies auxquelles ils ont plus ou moins adhéré un temps par une sorte d’idéalisme bien compréhensible et parfaitement humaine, que certains d’entre eux, parmi les esprits les plus brillants ( Jean-François Revel , Jacques Marseille et d’autres encore, comme le rappelle un lecteur de l’article précédent) s’en sont détournés pour privilégier une approche plus philosophique (alors que les exemples inverses sont plus difficiles à trouver, comme ce lecteur le souligne).

    La liberté ne se décrète pas

    En conclusion de ce volet, et pour finir (même si je suis forcément très incomplet), on peut noter que la liberté que défend le libéralisme est quelque chose de spontané. Il ne s’agit pas d’un constructivisme , donc pas d’une idéologie. Ce qui n’exclut pas l’État, en tant que garant de ces mêmes libertés.

    Un article publié initialement le 7 avril 2017.

    1. Je découvre d’ailleurs, au passage, moi qui ai failli lui écrire gentiment il y a quelques mois en y ayant finalement bêtement renoncé par manque de temps, que Nathalie MP a justement écrit un article à ce sujet , que je vais m’empresser de lire avec délectation, où il est manifestement question de « malentendu »
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      La faillite de l’étatisme

      Olivier Maurice · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Monday, 2 January, 2023 - 04:30 · 9 minutes

    Les collapsologues ont tout à fait raison : nous vivons bien une période d’Apocalypse, à la nuance près que ce n’est pas la planète qui s’effondre, c’est l’État qui part en totale déconfiture.

    En quarante ans de « néolibéralisme » (entendez par là en quarante ans de soviétisation menée par des fils à papa parisiens pourris gâtés) la France s’est propulsée avec vigueur et confiance dans une trajectoire menant tout droit dans le mur.

    Le prétendument meilleur système de santé au monde est en fait un dispensaire qui ne tient que par miracle et par l’abnégation de plus en plus rare de soignants au bord de l’effondrement.

    Le pays des Lumières s’enfonce dans les classements sur l’éducation. L’illettrisme a doublé en un siècle et est passé de 3 % en 1914 à 7 % selon les derniers chiffres officiels .

    L’agriculture, fondement du pays des 54 appellations de fromage, des grands vins et des restaurants étoilés est mourante . Le nombre d’agriculteurs a été divisé par deux, le nombre d’exploitations par quatre.

    L’ industrie a été divisée par deux , enregistrant le plus fort recul de la zone euro.

    Et on pourrait ainsi continuer la liste : la dégradation de l’état des routes , les délais indignes des procédures judiciaires

    Mais depuis deux ans, les choses ne font que s’accélérer. À ces problèmes lancinants se dégradant inexorablement mais suffisamment lentement pour que l’on puisse s’y adapter ou trouver des excuses, sont venues se superposer des crises de plus en plus violentes ayant toutes la même origine : l’incurie de l’administration et du gouvernement censés avoir la charge de les régler.

    L’État inflationniste

    La crise de l’énergie et l’inflation nous font presque regretter le folklore de la comédie covid. Le pire étant sans aucun doute que l’État n’a toujours pas compris qu’il en est responsable et qu’il continue avec vigueur et ardeur à aggraver chaque jour la crise.

    Dernière bêtise en date : le chèque bois énergie .

    Jusqu’à aujourd’hui, la France était le premier pays en Europe à utiliser le bois comme source d’énergie. N’en doutons pas, maintenant que l’État a porté son attention sur le secteur et fourré ses petits doigts boudinés dans l’affaire, le secteur ne va pas tarder à péricliter.

    Le bois de chauffage est un sous-produit de l’exploitation forestière. Pour l’instant. Le marché s’est régulé tout seul, que ce soit le marché des granulés ou des bûches, sans avoir d’impact sur l’exploitation forestière qui reste largement dominée par les plantations à long terme en vue de valoriser les grumes utilisées principalement en construction et dans les diverses industries.

    Le gouvernement précédent avait déjà commencé à s’intéresser au secteur. Résultat : une augmentation de 14 % du prix du bois de coupe en un an. Le prix du bois de chauffage avait bien sûr suivi. Les subventions déversées par le nouveau chèque vont comme de toute bonne logique aller encore augmenter les prix.

    Les mécanismes en présence

    Ce n’est pourtant pas compliqué à comprendre ! Depuis la mise en place d’un système monétaire décorrélé d’une matière de référence, trois éléments fixent les prix :

    Premièrement : la disponibilité de monnaie « déblocable » comparée à la quantité de monnaie « exigible » par les divers impôts et taxes. Si vous ne payez pas les impôts, les taxes, les cotisations obligatoires… vous allez en prison. Ce n’est pas plus compliqué que cela : vous n’avez pas le choix.

    Cette demande d’argent confère de la valeur à la monnaie en obligeant les individus et les entreprises à vendre des actifs ou à moduler leurs investissements en fonction de la ponction fiscale.

    Deuxièmement : la disponibilité de la monnaie « débloquée », comparée aux actifs « bloqués » et qui est fixée par les taux d’intérêts, le prix à payer pour obtenir de la monnaie échangeable, mais également par la création de rentes, d’obligations d’État qui donnent lieu à intérêts et deviennent disponibles dès qu’elles arrivent à terme.

    Cette offre d’argent réduit la valeur de la monnaie par le mécanisme d’intérêt qui conduit à une augmentation du volume de monnaie.

    Enfin, troisièmement : l’équilibre des prix fixé par les capacités de remplacement. C’est ce que l’on a longtemps appelé « le marché », mais qui est en fait une interconnexion des prix plus ou moins fluide selon la liberté et la capacité d’échange qui se résume dans deux lois : l’effet de substitution et l’effet de revenu .

    Ce dernier mécanisme, microéconomique alors que les deux premiers sont macroéconomiques, agit comme une espèce de matelas amortisseur ou de réseau qui interconnecterait tous les prix les uns avec les autres et les rendraient tous dépendants.

    Le leurre des subventions

    Normalement, tout ce système s’équilibre « naturellement » : l’argent exigé pour les taxes est dépensé par l’État, les placements financiers créent de la valeur qui vient compenser l’augmentation monétaire liées aux intérêts, les consommations se déplacent en fonction des solutions disponibles et amortissent les variations et les variations de demande, de disponibilité et de rentabilité…

    Normalement…

    Reprenons notre bois de chauffage. L’équilibre des prix du pellet et de la bûche est issu de nombre de facteurs qui vont borner ses prix. Bien plus que la disponibilité des produits, c’est la valeur « chauffage » qui va fixer le prix du bois : la quantité de chaleur restituée comparée aux autres moyens de chauffage.

    Imaginons que chaque foyer disposerait à la fois d’une pompe à chaleur (électrique), d’une chaudière au fuel, d’une chaudière à gaz et d’un poêle bouilleur. Clairement, il est logique d’allumer le moyen de chauffage qui donne le meilleur résultat en fonction de la météo et qui lui coûte le moins cher, par exemple le poêle à bois la journée, la pompe à chaleur la nuit pendant les heures creuses sauf pendant les nuits très froides où il est plus économique de faire fonctionner une chaudière au gaz, etc.

    Bien sûr cette situation est imaginaire. Mais dans la réalité, il est loin d’être rare que le poêle ne soit pas couplé à des radiateurs électriques, à une pompe à chaleur ou une chaudière. Même si on n’est pas à 100 % de capacité de substitution d’une source d’énergie par une autre, cet effet de substitution se concrétise à l’échelle macroscopique du pays et s’opère de proche en proche dans d’autres substitutions pour se diffuser à l’ensemble du système de prix : le prix du bois de chauffage va influencer le prix du bois de construction (et inversement), qui va influencer le prix des poutres en bois, qui va influencer le prix des poutres en métal, qui va influencer le prix du fer, qui va influencer le prix des automobiles, qui va influencer le prix des téléviseurs, etc.

    À la moindre variation, le système de prix va se rééquilibrer tout seul (plus ou moins rapidement il est vrai) et la subvention du prix de la bûche et du pellet sera au bout du compte équilibrée par tout une séries de glissement d’autres prix. Ce système est à somme nulle car ce n’est pas lui qui fixe la valeur globale, il ne fait qu’équilibrer un système dont la « somme » doit correspondre à la quantité de monnaie collectée et dépensée par l’État dans son budget de fonctionnement.

    Le fait de subventionner le chauffage au bois ne va donc pas impacter uniquement les foyers à bas revenus se chauffant uniquement au bois, mais tous les prix. En fin de compte, les seuls résultats tangibles auront été de déséquilibrer certains prix (et de créer des problèmes ou des aubaines pour certaines filières) et surtout d’augmenter la quantité de monnaie en circulation et donc de créer de l’inflation : l’effet d’aubaine sur le bois de chauffage se traduira vite en désillusion par l’augmentation d’autres prix.

    L’État inflationniste

    C’est l’équilibre du budget de l’État qui détermine la valeur de l’argent que celui-ci émet pour payer son fonctionnement. On a cru que l’interdiction faite à l’État d’imprimer du papier allait empêcher cette maladie chronique de l’endettement des finances publiques qui a maintes fois créé des crises financières catastrophiques et fait chanceler les souverains et ce depuis la plus ancienne Antiquité .

    Le fameux « système libéral » dénoncé par tous les vendeurs d’illusion a permis une incroyable période de stabilité et de développement économique depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale en donnant la possibilité à l’État de faire disparaître sa création monétaire dans le système bancaire et ainsi d’éviter d’interférer dans l’économie.

    Mais c’était sans compter l’incompétence et l’inconséquence de certains dirigeants et de certains pays, particulièrement la France, qui ont utilisé cette aubaine pour faire n’importe quoi, en particulier pour subventionner des secteurs entiers de l’économie jusqu’au moment où la bulle explose ou que l’État se retrouve au bout de ces capacités de cavalerie, risque qui peut arriver à tout moment.

    Le chauffage au bois vient d’entrer dans la longue liste des secteurs économiques étatisés, non pas par nationalisation, mais par mise en dépendance à l’argent public, après l’immobilier : crise de 1991 en France , crise des subprimes aux USA en 2008… le système de protection sociale en déficit chronique depuis sa création et qui peut s’écrouler à tout moment comme en Grèce en 2010 , les transports…

    Crise à venir

    Le paquebot de l’étatisation de l’énergie est lancé à pleine vitesse avec à la proue les fameuses énergies renouvelables et la lutte donquichottesque contre le thermomètre, façons élégantes de nommer des machines à détourner l’argent public et à créer de la dette souveraine et donc de l’inflation sous forme larvée ou sous forme de bulles. Cette inflation conduira sans aucun doute à une gigantesque crise de l’énergie dans les années à venir, si elle n’a pas déjà commencé.

    Il devient de plus en plus évident que les États-Nation, créés au XIX e siècle sur le modèle de l’État providence imaginé par Bismarck, sont amenés à disparaître ou pour le moins à se transformer radicalement, car dans l’état actuel des choses, ils amènent bien plus de problèmes que de solutions : quand ce ne sont pas les guerres mondiales, ce sont les crises économiques, sanitaires ou sociales mondiales, quand ce n’est pas tout en même temps.