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      20 citations de Margaret Thatcher sur le socialisme

      Foundation for Economic Education · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Sunday, 15 January, 2023 - 03:30 · 18 minutes

    Par Lawrence Reed.
    Un article de The Foundation for Economic Education

    Cet automne marquera le trentième anniversaire du départ du 10 Downing Street de Margaret Thatcher , première femme à la tête du gouvernement britannique et Premier ministre qui sera resté le plus longtemps à ce poste au XX e siècle. Quels mandats stupéfiants !

    De la dépendance à l’autonomie

    En 1979, la Dame de fer est devenue Premier ministre d’un pays tourmenté par des conflits sociaux, bloqué par la stagflation et ruiné par des décennies d’État-nounou. La Grande-Bretagne se débattait sur tous les fronts et était l’homme malade de l’Europe.

    Pour l’essentiel, Thatcher n’a pas proposé de résoudre les grands problèmes par de petits ajustements comme le suggéraient certains politiciens peureux ou manquant de conviction. Elle s’est mise en campagne, selon ses propres mots, pour faire « reculer les frontières de l’État ». Elle voulait relancer le pays en rétablissant une culture d’entrepreneuriat et de respect de la propriété privée. Elle a rappelé ces objectifs à la nation au cours du deuxième de ses trois mandats, lorsqu’elle a déclaré :

    Je suis arrivée au pouvoir avec une intention délibérée : faire passer la société britannique de la dépendance à l’autonomie – d’une nation de quémandeurs à une nation d’entrepreneurs. Une Angleterre qui se lève et agit, plutôt que se rasseoir en attendant que d’autres agissent.

    Femme de convictions, elle pensait que des dirigeants sans principes méritaient de tomber car ils étaient trop peureux pour défendre leurs idées. Elle préférait faire ce qu’elle pensait être juste plutôt que ce qui était politiquement acceptable, comme elle l’a montré dans cette réflexion bien connue :

    Pour moi, le consensus semble être la voie de l’abandon de toutes les convictions, principes, valeurs et politiques et la poursuite de quelque chose en quoi personne ne croit, mais auquel personne ne s’oppose.

    Lors d’une réunion politique mémorable, elle a sorti de son sac un exemplaire de L a constitution de la liberté de F.A. Hayek et l’a jeté sur la table en déclarant : « Voilà ce en quoi nous croyons ! ». Une autre fois elle fait remarquer que « les marxistes se lèvent tôt le matin pour faire avancer leur cause. Nous devons nous lever encore plus tôt pour défendre notre liberté. »

    Elle a défié les idées reçues au sujet du plafond de verre auquel les femmes étaient confrontées dans le monde politique britannique. Et elle comprenait les difficultés rencontrées par les gens ordinaires, expliquant lors d’une interview :

    J’ai débuté dans la vie avec deux grands avantages : pas d’argent et de bons parents.

    Avec Margaret Thatcher : déréglementation et progrès

    En commençant dans la douleur, sa politique a arraché le pays à son apathie pour l’amener dans une nouvelle ère de progrès et de confiance. Ses onze années à la tête du pays ont prouvé qu’un programme énergique de privatisation, de déréglementation et de réduction d’impôts est un antidote efficace au collectivisme désastreux.

    Elle était de plus en plus sceptique envers l’Union européenne, en partie à cause des penchants de celle-ci pour la bureaucratie et la réglementation, en partie à cause des tentatives de gommer les particularités de chacun des pays.

    Thatcher est décédée en 2013 mais si elle avait vécu sept ans de plus elle aurait probablement applaudi le Brexit qui a finalement eu lieu le mois dernier. Elle a déclaré à la Chambre des communes en 1991 :

    Notre souveraineté ne vient pas de Bruxelles – elle nous appartient de plein droit et nous en sommes les héritiers.

    Dans son livre de 2002, Statecraft: Strategies for a Changing World , elle déclare :

    L’Europe, hormis au sens géographique, est une construction totalement artificielle. Cela n’a aucun sens d’agglomérer Beethoven et Debussy, Voltaire et Burke, Vermeer et Picasso, Notre Dame et St Paul, le bœuf bouilli et la bouillabaisse, et de les dépeindre comme les éléments d’une réalité musicale, philosophique, artistique, architecturale ou gastronomique européenne. Si l’Europe nous enchante, comme elle m’a si souvent enchantée, c’est précisément par ses contrastes et ses contradictions, et non par sa cohérence et sa continuité.

    Elle n’était bien entendu pas parfaite et elle a fait des compromis lorsqu’elle a senti qu’il le fallait. Mais elle avait raison concernant une vision d’ensemble, en particulier à propos des vices du socialisme et des vertus de la liberté. Comme je l’ai écrit en 2013 lors de son décès dans l’hommage intitulé « Le mal des idées malsaines » :

    Les socialistes l’ont détestée parce qu’elle les a affrontés, qu’elle a mis en doute leur compassion feinte, qu’elle a osé montrer l’étatisme comme la secte absurde et déshumanisante qu’elle est.

    Elle a symboliquement arraché le gant de velours de la main de fer et elle a parlé du socialisme de l’État-providence comme d’un loup déguisé en agneau. Toutes choses que les adorateurs de l’État ne peuvent supporter.

    Alors que se déroule cette année l’élection présidentielle en Amérique, je ne peux pas m’empêcher de me demander ce que Margaret Thatcher penserait de nos politiciens et de leurs promesses. Nul doute qu’elle critiquerait les mauvaises habitudes bipartisanes de Washington de dépense et d’endettement.

    Je pense toutefois qu’elle conserverait un mépris particulier pour ces démagogues qui achètent des votes et se complaisent dans la lutte des classes et toutes les nuances de socialisme. Je la vois bien gronder Bernie Sanders en des termes comme : « Nous avons déjà essayé ce que vous prônez et cela a lamentablement échoué. Devenez adulte, trouvez-vous un vrai boulot pour changer et retenez les leçons de l’histoire et de l’économie ! »

    Sa vision du socialisme

    Vous n’avez pas besoin de me croire sur parole. Je vous propose ici certaines des citations les plus incisives de Margaret Thatcher au sujet du socialisme qui semble séduire tant d’Américains ces temps-ci. Elles s’étalent sur plusieurs décennies de sa vie publique.

    1. « Il est bon de se souvenir comment nous avons conquis notre liberté dans ce pays – pas par de grandes campagnes abstraites, mais par le refus d’hommes et de femmes ordinaires de se faire prendre leur argent par l’État. Au début, des gens se sont alliés pour dire au gouvernement de l’époque : vous ne prendrez pas notre argent avant d’avoir réparé les préjudices qui nous sont faits . C’était leur argent, leur bien, qui était la source de leur indépendance vis-à-vis de l’administration. »

    2. « La raison philosophique pour laquelle nous sommes contre les nationalisations et pour l’entreprise privée, c’est que nous croyons que le progrès économique vient de l’inventivité, des compétences, de la détermination et de l’esprit pionnier d’hommes et de femmes extraordinaires. S’ils ne peuvent pas mettre en pratique cet esprit ici, ils iront ailleurs dans un autre pays de libre entreprise qui progressera alors plus que nous sur le plan économique. Nous devrions plutôt encourager les petites entreprises et les petites sociétés parce que le degré d’innovation issue de ces entreprises est fantastique. »

    3. « On m’a attaquée pour avoir mené un combat d’arrière-garde en défendant les intérêts de la classe moyenne… Eh bien si les valeurs de la classe moyenne sont d’encourager la diversité et le libre-arbitre, de mettre en place des incitations et de justes récompenses pour les compétences et le travail, de maintenir des barrières efficaces contre l’abus de pouvoir de l’État et de croire à l’accès le plus large à la propriété privée, alors ces valeurs sont bien celles que je tente de défendre. Ce n’est pas une lutte pour des privilèges, c’est une lutte pour la liberté – la liberté pour chaque citoyen ».

    4. « Notre défi consiste à créer le contexte économique qui permet à l’initiative privée et à l’entreprise privée de s’épanouir au bénéfice du consommateur, du salarié, du retraité et de la société dans son ensemble… Je crois que nous devrions juger les individus selon leur mérite et non selon leur profil. Je crois que la personne prête à travailler le plus dur devrait en retirer les plus grands bénéfices et les conserver après impôt. Que nous devrions soutenir les travailleurs et pas les tire-au-flanc ; qu’il est non seulement permis mais louable de vouloir faire profiter votre propre famille de vos propres efforts. »

    5. « Je crois profondément – vraiment avec une foi fervente – aux vertus de l’autonomie et de l’indépendance de l’individu. C’est sur elles que se fonde la défense d’une société libre, par l’affirmation que le progrès humain s’obtient bien mieux en offrant l’espace le plus libre possible aux développements des talents individuels, ce qui est conditionné uniquement par le respect des qualités et de la liberté des autres… Pendant de nombreuses années il y a eu une érosion subtile des vertus essentielles de la société libre. L’autonomie a été moquée comme si c’était une prétention absurde de banlieusards. Économiser a été assimilé à de l’avarice. Le désir des parents de choisir et de se battre pour ce qu’ils considèrent eux-mêmes comme la meilleure éducation pour leur enfant a été méprisé. »

    6. « Je ne crois pas, malgré tout cela, que les gens de ce pays ont abandonné toute foi dans les qualités et les caractéristiques qui ont fait d’eux un grand peuple. Pas une seconde. Nous sommes toujours le même peuple. Tout ce qui s’est passé c’est que nous avons temporairement perdu confiance en nos propres forces. Nous avons perdu de vue les étendards. Les clairons ont sonné avec hésitation. Il est de notre devoir, de notre raison d’être, de brandir ces étendards, afin que tous puissent les voir, et de faire sonner les clairons fort et clair, afin que tous puissent les entendre. Ils rallieront tout simplement ceux qui s’y reconnaissent vraiment. »

    7. « Je ne cesserai jamais de combattre. Je veux que ce pays survive, prospère et soit libre… Je n’ai pas combattu les forces destructrices du socialisme pendant plus de vingt ans pour m’arrêter maintenant, alors que la phase critique du combat nous arrive dessus. »

    8. « Quelles sont donc les leçons que nous avons tirées des trente dernières années ? D’abord, que la poursuite de l’égalité en elle-même est un mirage. Ce qui est plus souhaitable et plus facile que la poursuite de l’égalité c’est la poursuite de l’égalité des chances. Et la chance ne veut rien dire sauf si elle inclut le droit d’être inégaux et la liberté d’être différents. Une des raisons pour lesquelles nous valorisons les individus c’est non parce qu’ils sont identiques, mais parce qu’ils sont tous différents. Je crois qu’il y a un dicton dans le Middle West : Ne coupez pas les coquelicots les plus hauts. Laissez-les grandir. Je dirais : laissez les enfants grandir et certains seront plus grands que les autres s’ils ont en eux-mêmes la capacité de le devenir. Car nous devons construire une société dans laquelle chaque citoyen peut développer tout son potentiel, à la fois pour son propre bénéfice et pour la société dans son ensemble, une société dans laquelle l’originalité, la compétence, l’énergie et l’économie sont récompensées, dans laquelle nous encourageons plutôt que nous ne  restreignons la variété et la richesse de la nature humaine. »

    9. « Permettez-moi de vous donner ma vision. Le droit pour un homme de travailler comme il le veut, de dépenser ce qu’il gagne, de posséder des biens, d’avoir l’État à son service et non pas comme maître, telle est la tradition britannique. C’est l’essence d’une économie libre. Et de celle-ci dépendent tous nos autres libertés. »

    10. « Certains socialistes semblent croire que les gens devraient être des numéros dans un ordinateur de l’administration. Nous croyons qu’ils devraient être des personnes. Nous sommes tous inégaux. Personne, grâce au ciel, n’est pareil à un autre, contrairement à ce que peuvent prétendre la plupart des socialistes. Nous croyons que chacun a le droit d’être différent mais pour nous chaque être humain est d’une importance égale. »

    11. « Les socialistes nous disent que telle industrie génère des profits énormes et qu’ils ne devraient pas aller aux actionnaires – mais que le public devrait engranger les bénéfices. Des bénéfices ? Quels bénéfices ? Lorsque vous faites entrer dans le giron de l’État une industrie rentable, les bénéfices ont tôt fait de disparaitre. La poule aux œufs d’or fait la tête. Les poules d’État ne sont pas de grandes pondeuses. L’industrie de l’acier a été nationalisée il y a quelques années dans l’intérêt public – et pourtant le seul intérêt qui reste aux gens est d’assister au spectacle déprimant de leur argent jeté par les fenêtres au rythme de millions de livres par jour. »

    12. « Il en est qui nous alertent non seulement au sujet de la menace venue de l’extérieur, mais aussi au sujet de quelque chose de plus insidieux, qu’on ne perçoit pas immédiatement, quelque chose qui n’est pas toujours intentionnel, qui se produit ici chez nous. Que nous montrent-ils ? Ils nous montrent l’expansion régulière et sans scrupule de l’État socialiste. Mais personne ne prétend que la majorité des socialistes est inspirée par autre chose que des idéaux humanitaires et de bonnes intentions. En même temps je pense que bien peu nieraient à présent qu’ils ont créé un monstre qu’ils ne peuvent contrôler. Inexorablement, l’État que les socialistes ont créé devient de plus en plus hasardeux quand il tente de dispenser une justice économique et sociale qu’il tente de dispenser, de plus en plus étouffant par ses effets sur les aspirations humaines et l’initiative, de plus en plus politiquement sélectif dans sa défense des droits des citoyens, de plus en plus gargantuesque dans son appétit – et de plus en plus désastreusement incompétent dans ses résultats.  Par-dessus tout, il représente une grave menace, quoique non intentionnelle, envers la liberté de ce pays, car il n’y pas de liberté lorsque l’État contrôle totalement l’économie. La liberté individuelle et la liberté économique sont inséparables. On ne peut pas avoir l’une sans l’autre. On ne peut pas perdre l’une sans perdre l’autre. »

    13. « Une de nos principales et constantes priorités, lorsque nous serons revenus au pouvoir, sera de rétablir les libertés que les socialistes ont usurpées. Qu’ils sachent que ce n’est pas le rôle de l’État de posséder le plus possible de biens. Ce n’est pas le rôle de l’État de saisir tout ce qu’on lui laisse prendre. Ce n’est pas le rôle de l’État d’agir en dompteur, de faire claquer le fouet, de dicter le fardeau que nous devons tous porter ou de dire jusqu’où nous devons monter. Tout cela c’est la philosophie du socialisme. Nous la rejetons totalement car, même avec de bonnes intentions, elle mène dans une seule direction : l’érosion et finalement la destruction du mode de vie démocratique. »

    14. « Il n’existe pas de socialisme sans danger . Si c’est sans danger ce n’est pas du socialisme. Et si c’est du socialisme ce n’est pas sans danger. Le chemin du socialisme nous entraîne vers le bas, vers moins de liberté, moins de prospérité, nous abaisse vers plus de confusion, plus d’échec. Si nous le suivons à destination, nous mènerons ce pays à la ruine. »

    15. « La réussite économique du monde occidental est le produit de sa philosophie morale et de sa pratique. Les résultats économiques sont meilleurs car sa philosophie morale est supérieure. Elle est supérieure car elle part de la personne, avec sa singularité, sa responsabilité et sa capacité à choisir. C’est à coup sûr infiniment préférable à la philosophie socialiste-étatiste qui met en place un système économique centralisé auquel l’individu doit se conformer, qui le domine, qui le dirige et qui lui dénie le droit de choisir librement. Le choix est l’essence de l’éthique : s’il n’y avait pas de choix il n’y aurait pas d’éthique, pas de bien, pas de mal ; le bien et le mal n’ont de sens que dans la mesure où l’homme est libre de choisir. »

    16. « Dans notre philosophie le sens de la vie de l’individu n’est pas d’être le serviteur de l’État et de ses objectifs, mais de tirer le meilleur parti de ses talents et de ses qualités. Le sentiment d’être autonome, de jouer un rôle dans la famille, de posséder des biens en propre, de tracer son propre chemin, font tous partie du bagage spirituel qui stabilise le citoyen responsable et qui fournit les assises solides depuis lesquelles les gens regardent autour d’eux pour voir ce qu’ils pourraient faire de plus, pour les autres et pour eux-mêmes. Voilà ce que nous appelons une société morale ; pas une société dans laquelle l’État est responsable de tout et personne n’est responsable de l’État. »

    17. « Une fois que vous avez mis dans la tête des gens que tout peut être fait par l’État, et que c’est d’une certaine manière un pis-aller ou même dégradant de le laisser faire à des personnes privées, alors vous commencez à priver les êtres humains d’une des composantes essentielles de l’humanité – la responsabilité morale individuelle. Vous allez, de fait, tarir en eux la source de la gentillesse humaine. Si vous permettez aux gens de transférer toute leur responsabilité personnelle à l’État, le moment viendra – et c’est vraiment pour bientôt – où ce que le contribuable sera disposé à fournir pour le bien de l’humanité s’avèrera être beaucoup moins que ce que l’individu était disposé à donner par amour pour son prochain. Alors ne soyez pas tentés de confondre la vertu avec le collectivisme. Je me demande si les services de l’État auraient fait autant pour l’homme tombé dans le fossé que ce que le bon samaritain a fait pour lui ? »

    18. « Le capitalisme populaire, qui est l’expression économique de la liberté, se révèle être un moyen bien plus séduisant pour diffuser le pouvoir dans notre société.  Les socialistes crient « le pouvoir au peuple » et lèvent le poing serré en disant cela.  Nous savons tous ce que cela signifie vraiment – le pouvoir sur le peuple, le pouvoir à l’État. Pour nous les conservateurs, le capitalisme populaire ne ment pas : le pouvoir par la propriété à l’homme et la femme de la rue, donné avec confiance et la main ouverte. »

    19. « Je pense que nous avons traversé une période où trop d’enfants et d’adultes  ont été bercé de « j’ai un problème, c’est le boulot de l’administration de s’en occuper ! » ou encore « j’ai un problème, je vais demander une aide pour y faire face ! Je suis à la rue, l’administration doit me loger ! » Et donc ils se déchargent de leur problème sur la société et c’est qui, la société ? Cela n’existe pas ! Il n’y a que des individus hommes et femmes et des familles, l’État ne peut rien faire sans les gens et les gens s’occupent en priorité d’eux-mêmes. Il est de notre devoir de prendre soin de nous-mêmes et ensuite d’aider à prendre soin de notre voisin ; la vie est une affaire de réciprocité et les gens pensent beaucoup trop à leurs droits sans penser à leurs devoirs. La société, cela n’existe pas. Il existe une mosaïque vivante d’hommes et de femmes et de gens, et la beauté de cette mosaïque et la qualité de nos vies dépendent de combien chacun de nous est prêt à se prendre en charge, combien chacun de nous est prêt à regarder autour de lui pour aider par ses propres forces ceux qui sont dans le malheur. »

    20. « Je suis partie en campagne pour détruire le socialisme parce que je sentais qu’il était en opposition avec le caractère du peuple. Nous avons été le premier pays au monde à faire reculer les frontières du socialisme, et ensuite à faire avancer les frontières de la liberté. Nous avons récupéré notre héritage ; nous le renouvelons et nous le prolongeons. »

    Traduction par Contrepoints de Margaret Thatcher on Socialism: 20 of Her Best Quotes

    Publié initialement le 17 février 2020.

    Margaret Thatcher at Chequers 1993 by BBC Radio 4(CC BY-NC 2.0)

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      Qatargate : l’Union européenne est un pot de confiture pour les corrupteurs

      Frédéric Mas · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 12 January, 2023 - 04:15 · 2 minutes

    Dans le scandale de corruption des élus européens par le Qatar et le Maroc qui secoue Bruxelles, tous les chemins ramènent au socialisme et à l’étatisme.

    Un mois après l’arrestation de la vice-présidente grecque du parlement européen Eva Kaili et de cinq italiens, tous socialistes, pour corruption et blanchiment d’argent, ce sont deux autres députés, également socialistes qui ont fait l’objet d’une procédure d’urgence pour lever leur immunité le 2 janvier dernier.

    Depuis, c’est Marie Arena, la présidente de la sous-commission des droits de l’Homme du Parlement européen (DROI), qui est sur la sellette : l’eurodéputée socialiste belge, réputée proche de certains accusés, aurait omis de déclarer un voyage tout frais payés par le Qatar, selon Politico . Bien qu’elle blâme la négligence de son secrétariat dans cette affaire, elle risque fort de susciter une plus grande attention des enquêteurs : « Si elle est reconnue coupable d’avoir enfreint le code de conduite de l’institution, l’eurodéputée pourrait se voir infliger des sanctions telles qu’une amende pouvant aller jusqu’à 10 140 euros ou l’interdiction de représenter le Parlement pendant un an. » affirme Politico .

    Pour certains observateurs, cette opération d’achat de députés contre de l’influence au sein de l’Union européenne ne serait que la face visible de l’iceberg, et déjà pointe derrière le Qatargate le MarocGate , dans lequel l’État marocain est à son tour accusé de manipulation politique derrière des organismes européens plus ou moins fantoches. Dans tous les cas, ce sont des politiciens socialistes, gravitant autour de la DROI et de certaines associations de défense des droits de l’Homme plus ou moins bidons, qui auraient mis les doigts dans le pot de confiture.

    Surprise ! Le pouvoir corrompt

    Si l’affaire peut provoquer la colère, elle ne doit pas susciter l’étonnement. Après tout, les institutions européennes, comme toute organisation politique opaque concentrant un large éventail de pouvoirs à son sommet, est un pot de confiture géant pour les corrupteurs du monde entier.

    Comme le rappelle Bruce L. Benson , professeur en économie et chercheur à l’American Institute for Economic Research (AIER), la corruption est une conséquence directe de l’autorité discrétionnaire des élus et bureaucrates publics 1 . Lorsqu’une congestion du pool commun intervient, les agents publics et politiciens ont une marge de manœuvre accrue pour distribuer des ressources face aux demandeurs en compétition. Ce pouvoir discrétionnaire invite donc à la corruption pour obtenir les faveurs de son détenteur quand celui-ci est placé dans des organisations suffisamment impénétrables du grand public pour agir en toute discrétion.

    Plus on concentre de pouvoir discrétionnaire, plus les risques de corruption sont élevés. On imagine donc que les mastodontes comme le gouvernement fédéral américain ou les technocratie byzantines comme l’UE attirent donc l’argent sale comme la confiture attire les mouches. On comprend également que la solution institutionnelle pour éviter ce genre de scandale c’est aussi davantage de décentralisation et de dilution du pouvoir politique. Évidemment, priver les professionnels de la politique de la capture institutionnelle dont ils sont les principaux bénéficiaires n’est pas populaire parmi les socialistes et autres étatistes. On se demande bien pourquoi.

    1. Bruce L. Benson, The Entreprise of Law. Justice without the State , PRIFPP, 1990.
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      Les Français et la maladie du « Toujours Plus »

      Claude Sicard · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 3 January, 2023 - 04:30 · 9 minutes

    L’année 2022 s’achève et on s’interroge avec inquiétude sur ce que nous réserve la nouvelle année. Toutes les économies européennes sont très fortement affectées par les répercussions de la guerre menée par les Russes en Ukraine et le FMI vient d’abaisser de 2,5 % à 2 % ses prévisions pour la croissance mondiale . Il révèle dans sa dernière note que « le ralentissement le plus marqué interviendra dans la zone euro ».

    En France les handicaps pour surmonter les difficultés qui se profilent ne manquent pas : le secteur industriel amoindri ne représentant plus que 10 % du PIB fait de la France le pays le plus désindustrialisé d’Europe Grèce mise à part ; la dette structurelle toujours croissante est supérieure au PIB ; le taux de chômage est le plus élevé d’Europe ; les dépenses publiques sont en proportion du PIB beaucoup plus importantes que partout ailleurs.

    Nos dirigeants n’ont donc pas devant eux une page blanche.

    Et il existe de surcroît un élément sous-jacent jamais évoqué qui est une donnée sur laquelle les dirigeants n’ont aucune prise : la sociologie du peuple français.

    Le rôle de la sociologie en matière économique

    La sociologie joue un rôle extrêmement important dans les processus et les phénomènes économiques.

    Dans La grande transformation , Karl Polanyi , un économiste anthropologue austro-hongrois dont les travaux sont très appréciés par les économistes de l’École de Toulouse énonce qu’il ne peut y avoir de relations économiques sans relations sociales.

    Dans L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme , paru en 1905, Max Weber avait expliqué que la différence profonde de performances économiques entre les pays du nord de l’Europe et les pays du sud tient au fait que les uns sont protestants alors que les autres sont catholiques. Selon lui, c’est l’éthique protestante qui a fait le succès du capitalisme : chez les protestants on accumule pour investir et non pas pour consommer. La France fait partie de ce que certains experts à Bruxelles appellent malicieusement les « pays du club Med ». Nos dirigeants se voient contraints de faire avec cette donnée qui est par nature inchangeable. Max Weber a fait le constat que lorsque dans un pays il y a une partie protestante et une autre catholique c’est toujours la partie protestante qui est la plus prospère.

    Au-delà de cette spécificité culturelle il existe en France un syndicalisme d’opposition qui est la conséquence, selon de nombreux auteurs, de la loi de Waldeck Rousseau du 21 mars 1884 qui a donné une base légale aux syndicats mais les a écartés des sages sentiers de l’administration des choses.

    En Allemagne et dans les pays scandinaves les syndicats et le parti socialiste collaborent. Il y a même un système de cogestion des entreprises chez notre voisin allemand. Dans les pays scandinaves, les conflits se règlent par le dialogue. C’est aussi le cas de la Suisse où depuis l’accord conclu en 1937 instituant « La Paix du travail », il n’y a plus jamais de grèves.

    Dans le cas de la France, il faut se rapporter à la Charte d’Amiens de 1906 qui a fondé le syndicalisme français : elle valorise l’expropriation capitaliste et la lutte des classes avec comme moyen d’action la grève générale. Ainsi, en France, l’inconscient prolétarien est révolutionnaire. Cette Charte a constitué jusqu’ici l’ADN du syndicalisme français. Aussi, les conflits entre les syndicats et le patronat n’ont-ils  pas cessé d’agiter la société. Il est impossible de les énumérer tous ici mais on ne peut manquer de rappeler l’épisode du Front populaire de 1936 qui a abouti à la semaine de 40 heures et des congés payés : dans toute la France des usines furent occupées et le drapeau rouge flottait sur bon nombre d’entre elles.

    Avec ces innombrables luttes contre le pouvoir et le patronat les Français ont obtenu des avantages sociaux importants inscrits dans la législation du pays. Le Code du travail français est ainsi très volumineux et particulièrement rigide et nuit au bon fonctionnement des entreprises.

    Les pays scandinaves et la Suisse sont pris comme exemples de pays où l’économie est dynamique et prospère :

    Population active

    • France……………….. 45,9 %
    • Pays scandinaves… 50 % – 55 %
    • Suisse………………… 57 %

    Durée de vie active

    • France……………….. 35,6
    • Pays scandinaves… 41
    • Suisse………………… 42,4

    Heures de travail par an

    • France……………….. 1402
    • Pays scandinaves… 1662
    • Suisse………………… 1831

    Durée hebdomadaire du travail

    • France……………….. 35
    • Pays scandinaves… 37 – 38
    • Suisse………………… 45 – 50

    Jours de grève

    • France……………….. 1000
    • Pays scandinaves…    114
    • Suisse…………………        1

    On voit comment s’est organisé le pays pour faire fonctionner sa machine économique par comparaison avec les pays scandinaves et la Suisse.

    Dans le cas de la France :

    • taux de population active anormalement bas ;
    • durée de vie active plus courte ;
    • nombre d’heures travaillées par an inférieur ;
    • propension à recourir à la grève particulièrement élevée.

    Il manque à la France au moins 4 millions de personnes au travail sachant que les chômeurs sensés rechercher activement un emploi sont comptabilisés dans la population active.

    En France, ceux qui ne sont pas au travail sont portés par la communauté nationale et vivent de subsides fournis par la population active. Fin octobre 2022 Pôle Emploi comptait 6 198 310 inscrits toutes catégories confondues (A, B, C, D et E), dont 3 091 900 inscrits en catégorie A.

    Il en résulte des performances économiques très inférieures à celles des pays scandinaves et de la Suisse. Paradoxalement, le pays se situe au 24e rang seulement du classement des nations du World Hapiness Report de l’ONU de l’année 2019, entre le Mexique et le Chili alors que les pays pris ici en exemple sont tous en tête du classement.

    Finlande

    • PIB/capita………….. 53 654 dollars
    • Dette/PIB……………   72,4 %
    • Dép. Soc/PIB………. 54,9 %
    • World Happiness….  N° 1

    Suède

    • PIB/capita………….. 61 028 dollars
    • Dette/PIB…………… 42,0 %
    • Dép. Soc/PIB………. 50,2 %
    • World Happiness…. N° 7

    Danemark

    • PIB/capita………….. 68 007 dollars
    • Dette/PIB…………… 33,2 %
    • Dép. Soc/PIB………. 51,0 %
    • World Happiness…. N° 2

    Norvège

    • PIB/capita…………..  89,154 dollars
    • Dette/PIB……………  36,2 %
    • Dép. Soc/PIB……….  18,0 %
    • World Happiness….  N° 3

    Suisse

    • PIB/capita…………..  91 991 dollars
    • Dette/PIB……………  42,4 %
    • Dép. Soc/PIB……….  17,5 %
    • World Happiness….  N° 6

    France

    • PIB/capita…………..  43 659 dollars
    • Dette/PIB……………  113,5 %
    • Dép. Soc/PIB……….  59,2 %
    • World Happiness…. N° 24

    Quand la France va-t-elle pouvoir se réformer ?

    Ces données conduisent à conclure que la France a un immense besoin de se réformer mais ses dirigeants sont très loin de s’atteler à la tâche.

    Les dépenses publiques sont à un niveau très supérieur, en proportion du PIB, à ce qu’elles sont partout ailleurs (51,9 % du PIB contre 34,9 % pour la moyenne OCDE ).

    Les hôpitaux publics sont fortement déficitaires, leur dette s’élève à 30 milliards d’euros.

    Le COR prévoit que le déficit des caisses de retraite va s’élever dans les prochaines années à 0,5 voire 0,8 point de PIB.

    Le pays a perdu près de la moitié de son secteur industriel qui ne représente plus que 10 % du PIB alors qu’il devrait se situer au moins à 18 %.

    De toutes parts, la population réclame davantage de médecins et d’infirmières, davantage de juges, de policiers et de gardiens de prison, davantage de postiers, etc.

    Les revendications pour l’augmentation du pouvoir d’achat sont permanentes. Les 35 heures instaurées par Martine Aubry ont fait partout des dégâts considérables et aucun autre pays n’a adopté une telle mesure.

    Les Français ne parviennent pas à réaliser que le PIB par habitant est bien inférieur à celui des voisins du nord et veulent faire fonctionner la machine économique avec des ratios inférieurs des éléments clés intervenant dans le processus de création de richesse à ce qu’ils sont dans les pays où les PIB par tête sont élevés.

    Cette maladie du « toujours plus » qui affecte les Français avait été déjà dénoncée en 1982 par le journaliste et essayiste François de Closets dans Toujours plus . Ce livre a eu à l’époque beaucoup de succès. François Mitterrand l’avait qualifié « d’ouvrage salutaire ».

    François de Closets écrivait :

    « Les Français se proclament tous défavorisés, réclamant plus d’argent, mais aussi plus de droits, d’avantages, de loisirs, et de garanties ».

    En 2006, il est revenu à la charge avec Plus encore !

    Il serait bon que nos dirigeants veuillent bien s’en inspirer.

    Cet esprit revendicatif s’était traduit par ce bouleversement extraordinaire qu’a été la Révolution de 1789 qui a aboli la royauté et accompagnée des cruautés et des massacres qui ont marqué cette période. Cette grande révolution s’est inscrite dans le roman national : elle est une date clé de l’histoire de France. Elle est louée aux jeunes générations, à l’école, comme un élément positif et on utilise donc la grève voire l’organisation de mouvements populaires violents pour s’opposer au pouvoir. Le marxisme est venu se greffer sur ce fond culturel. Vladimir Lénine avait parlé de « révolution permanente » et cette idéologie a eu beaucoup de succès en France. Les évènements de Mai 68 en ont été une illustration parfaite, mettant à mal une fois de plus l’idée même d’autorité. Plus récemment le mouvement des Gilets jaunes a beaucoup agité le pays.

    Les pouvoirs publics doivent donc faire avec cette donnée de la sociologie française. Alain Duhamel a analysé la psychologie politique des Français dans Les pathologies politiques françaises dont il dit « qu’elles incitent le pouvoir à avancer en crabe ».

    Il s’agit donc bien d’avancer mais avec précaution. Le premier pas consisterait à expliquer avec franchise aux Français où nous en sommes plutôt que de dissimuler en permanence la situation du pays.

    Un récent sondage Harris Interactive indique que six Français sur dix sont pessimistes sur l’avenir du pays, mais on ne leur a jamais expliqué quels étaient les défis à relever. Ils ne comprennent pas pourquoi le pays va mal et se dressent contre les dirigeants. Ils doivent pourtant comprendre les raisons pour lesquelles ils doivent faire des efforts et faire preuve de civisme. Nous n’en sommes hélas pas là pour l’instant. Dès qu’une occasion propice se présente, on déclenche une grève avant même de négocier et la direction de l’entreprise prise au piège doit céder. Une fois de plus, la SNCF vient d’en faire l’expérience, au moment où la population a le plus besoin de se déplacer.

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      Comment le marxisme abuse de l’éthique et de la science pour tromper ses adeptes

      Mises Institute · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 3 January, 2023 - 04:00 · 7 minutes

    Par Antony P. Mueller.

    Dans son livre de 1922 sur le socialisme, Die Gemeinwirtschaft , Ludwig von Mises attribue l’attrait du socialisme à l’affirmation selon laquelle la doctrine de Marx serait à la fois éthique et scientifique. En vérité, cependant, le marxisme représente un dogme métaphysique qui promet un paradis terrestre mais menace la civilisation elle-même.

    La thèse de l’inéluctabilité du socialisme

    Le marxisme explique que les économies capitalistes immorales seront nécessairement remplacées par des systèmes socialistes répondant à des normes morales plus élevées. Le socialisme promet de supprimer l’ordre économique privé irrationnel et d’instaurer une économie rationnelle et planifiée. Les socialistes proclament que la production capitaliste hiérarchique fera place à un ordre coopératif sans subordination :

    Le socialisme apparaît comme un but vers lequel il faut tendre parce qu’il est moral et parce qu’il est raisonnable. Il s’agit de vaincre la résistance que l’ignorance et la mauvaise volonté opposent à son avènement.

    Cette combinaison perfide d’éthique et de science s’accompagne de l’affirmation que le socialisme est inévitable. Marx déclare que l’arrivée du communisme représente la fin de l’histoire et la récompense de toutes les luttes historiques. Les socialistes croient qu' »une puissance obscure, à laquelle nous ne pouvons échapper, conduit progressivement l’humanité vers des formes supérieures d’existence sociale et morale. L’histoire est un processus progressif de purification, au terme duquel se dresse le socialisme comme perfection. »

    Karl Marx a appelé son approche la « conception matérialiste de l’histoire ». Sa théorie affirme que le socialisme est le résultat inéluctable des forces naturelles.

    Le matérialisme historique de Marx comporte plusieurs éléments significatifs.

    Premièrement, il fait référence à une méthodologie spécifique de recherche historico-sociologique qui vise à déterminer la structure sociale globale des époques historiques.

    Ensuite, en tant que doctrine sociologique, le matérialisme historique inclut la thèse selon laquelle la lutte des classes est la force historique déterminante.

    Enfin, la perspective historique marxiste est une théorie du progrès qui englobe le but et l’objectif de la vie humaine.

    En affirmant l’inéluctabilité scientifique d’un système socialiste à venir, l’efficacité pratique du matérialisme historique se déploie. Si le socialisme est le résultat positif de la civilisation humaine, tous les critiques réels ou imaginaires du socialisme sont des réactionnaires. Par conséquent, la lutte contre les adversaires du socialisme est une lutte éthique. Les critiques du socialisme doivent être qualifiés de réactionnaires parce qu’ils bloquent le chemin du paradis. Aux yeux de Marx et de ses partisans, la lutte contre le socialisme est particulièrement mauvaise en raison de sa nature superflue. Le socialisme gagnera de toute façon ; par conséquent, toute opposition à la victoire finale ne ferait que prolonger la privation de la classe ouvrière sous le capitalisme et retarder l’avènement du paradis socialiste.

    Comme l’ explique Mises, peu d’affirmations ont favorisé la propagation des idées socialistes plus que la croyance en l’inévitabilité du socialisme. Même les adversaires du socialisme sont tombés sous le charme de cette doctrine. Ils se sentent souvent paralysés par l’inutilité perçue de la résistance. Les « instruits », en particulier, ont tendance à craindre d’être perçus comme vieux jeu lorsqu’ils ne défendent pas le progrès social et politique que le socialisme prétend représenter.

    Mises a observé cela en son temps et peu de choses ont changé depuis. L’opinion publique qualifie de plus en plus les libéraux classiques (ceux qui favorisent la propriété privée et la liberté individuelle) de réactionnaires et suppose que davantage de socialisme signifie davantage de progrès.

    L’attente du salut

    Bien que l’idée que certains développements historiques soient inévitables est clairement métaphysique, elle fascine les gens jusqu’à aujourd’hui.

    Rares sont ceux qui peuvent échapper au charme du chiliasme et de sa promesse religieuse de salut. Pourtant, coupée de ses racines religieuses, la promesse marxiste de paix et de prospérité sous le socialisme devient une incitation à la révolution politique. Avec ce tournant politique, Marx réinterprète l’attente eschatologique judéo-chrétienne du salut. En accord avec les rationalistes du XVIII e siècle et les matérialistes du XIX e siècle, le marxisme sécularise l’événement du salut comme une révolution sociopolitique globale. Dans le marxisme, la métaphysique philosophique et anthropocentrique du développement historique est essentiellement la même que la métaphysique religieuse. L’étrange mélange d’imagination extatiquement extravagante et de sobriété quotidienne, ainsi que le contenu grossièrement matérialiste de sa proclamation du salut, ont ceci de commun avec les plus anciennes prophéties messianiques.

    Tant que le socialisme sera perçu comme étant à la fois scientifique et métaphysique, sa prétention chiliastique au salut restera à l’abri de toute critique rationnelle. Par conséquent, il est inutile de traiter le marxisme de manière rationnelle ou scientifique. Les critiques du socialisme tentent en vain de lutter contre les croyances mystiques du socialisme : « On ne peut pas enseigner aux fanatiques », écrit Mises.

    Le socialisme comme utopie ratée

    La propagande politique marxiste concerne les croyances selon lesquelles le socialisme est plus productif, moralement supérieur et inévitable.

    En tant que tel, le marxisme va au-delà du chiliasme et justifie ses enseignements comme une « science ». Le marxisme s’oppose au libre-échange et à la propriété privée. Les socialistes prétendent que l’économie de marché est individualiste et donc antisociale. Or rien n’est plus faux. Le marxisme prétend faussement que le capitalisme atomise le corps social. Comme le souligne Mises, c’est le contraire qui est vrai car les marchés sont des phénomènes sociaux par nature :

    C’est seulement la division du travail qui crée des liens sociaux, c’est la chose sociale par excellence. Ceux qui défendent les économies nationales et étatiques cherchent à subvertir la société universelle. Quiconque cherche à détruire la division sociale du travail parmi le peuple par la lutte des classes est antisocial.

    Le marxisme prétend être une philosophie sociale mais il s’oppose à la compréhension de la nature coopérative du capitalisme libéral. Au contraire, le marxisme est antisocial.

    Mises nous avertit que « la disparition de la société libérale basée sur la division du travail en marché libre représenterait une catastrophe mondiale ne pouvant même pas être comparée de loin à quoi que ce soit dans l’histoire connue. Aucune nation n’en serait épargnée ». Malgré l’absurdité de réduire l’histoire à la lutte des classes, le marxisme a eu un impact énorme sur la politique qui se poursuit encore aujourd’hui.

    Mises a publié Die Gemeinwirtschaft il y a plus de cent ans et les échecs du socialisme sont encore plus évidents aujourd’hui. L’effondrement de l’Union soviétique a déjà montré que le communisme apporte le contraire de ce qu’il promet. Alors que les premiers socialistes croyaient que la productivité serait plus élevée dans une société sans classes que dans une société fondée sur la propriété privée, le leader révolutionnaire soviétique, Vladimir Lénine , a dû admettre peu après la création de la Russie soviétique que la dictature du prolétariat avait apporté une souffrance plus grande que celle jamais connue dans l’histoire et que la tâche à venir serait la juste répartition de la misère.

    Le socialisme n’a pas tenu ses promesses. Cette doctrine a été réfutée tant en pratique qu’en théorie. Si les socialistes avaient tenu compte des arguments de Mises, ils auraient également été épargnés par les conséquences de la collectivisation agricole. Avec ses millions de morts l’ Holodomor ou Grande Famine du début des années 1930 a été la conséquence de cette erreur socialiste. Ils croyaient pouvoir augmenter la productivité tout en abolissant les droits de propriété et en collectivisant l’agriculture. Ils se sont lourdement trompés.

    Malgré l’horrible héritage du socialisme, les mouvements anticapitalistes se manifestent encore et encore. Ainsi, prévient Mises, la division hautement productive du travail qui a connu sa plus grande réussite dans le capitalisme restera toujours en danger. Les tendances anticulturelles se développent au sein même de la société capitaliste. Il faut être conscient que toute civilisation risque de succomber à l’esprit de décomposition qui s’abat sur les sociétés où les mouvements socialistes réussissent.

    Traduction Contrepoints

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      Idéologie et bureaucratie : le double enfer du socialisme

      Pascal Avot · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Saturday, 17 December, 2022 - 04:30 · 9 minutes

    À la première page de son chef-d’œuvre, Les hauteurs béantes , plus grand roman de l’après-guerre sur le totalitarisme avec 1984 , le logicien dissident soviétique Alexandre Zinoviev écrit :

    « Comme toute ineptie anhistorique, le Socialisme possède sa théorie fausse et sa pratique erronée, mais il est impossible de dire en théorie et en pratique où commence la théorie et où finit la pratique. »

    L’énoncé semble absurde – il est pourtant d’une grande lucidité. Sous une apparence satirique, Zinoviev nous montre la difficulté de cerner le socialisme.

    En règle générale, le socialisme est considéré comme un courant politique et économique aboutissant à un système de gouvernement. Pourtant, à bien y regarder, il y a tout lieu de s’interroger sur cette définition. Il est fort possible qu’elle soit fausse.

    La non-économie

    Commençons par le versant économique. Nul besoin d’expliquer à un public libéral que l’économie socialiste n’est pas une économie, mais une entreprise de destruction des mécanismes de l’économie. La propriété privée, l’initiative, le profit, la croissance, le travail, l’entrepreneur, l’actionnaire, y sont constamment dénoncés comme des ennemis jurés.

    Que ce soit sous sa forme traditionnelle et rigide (le marxisme-léninisme triomphant du XX e siècle), dans ses manifestations plus opportunistes (le mitterrandisme ) ou à travers ses innombrables produits dérivés contemporains (altermondialisme, écologisme, décroissance), le socialisme est bien davantage une non-économie qu’une économie alternative. Il repose essentiellement sur un parasitisme plus ou moins progressif, plus ou moins prédateur, de l’économie réelle et il s’effondre aussitôt que celle-ci, agonisante, cesse enfin de le nourrir. Il n’a pas de substance propre : il ne sait que vampiriser et ne peut rien faire d’autre. Sans victime, il n’est qu’abstraction.

    La non-politique

    La politique, maintenant. « Tout est politique », écrit Marx . Un des élans les plus constants du socialisme est de politiser la société dans toutes ses dimensions, jusqu’au cœur des familles, jusqu’à la sexualité, afin de remplacer la société concrète, historique, par une société d’avenir, utopique, et d’effacer l’humain traditionnel pour faire advenir un Homme nouveau. On sait bien que cette mainmise socialiste sur la vie commune aboutit invariablement à une disparition du progrès, de la créativité, de la culture et, in fine, et c’est le plus important, à un anéantissement de la société elle-même, c’est-à-dire de la capacité de la collectivité à s’organiser en fonction de ses besoins et de ses désirs, indépendamment du pouvoir politique.

    La politique au sens où l’entend l’Occident libéral est inconcevable sans spontanéité de la société. Pour qu’une société s’exprime politiquement, il faut qu’elle puisse exister hors de la politique. En somme, pour que la vie politique soit possible, il faut que l’absence de vie politique le soit également. On observe ainsi dans les régimes socialistes un phénomène paradoxal, mais logique : plus ils imposent aux populations une politisation à outrance dans tous les domaines, plus la politique disparaît pour laisser place à une passivité généralisée, une indifférence au mieux pessimiste, au pire nihiliste, qui brise tout élan démocratique et éteint les oppositions.

    On a bien vu, par exemple, à quel point la stratégie sanitaire d’Emmanuel Macron, en socialisant la pandémie et en la politisant, en la présentant comme une « guerre », en interdisant aux citoyens de mener des jours raisonnables, autogérés et paisibles, a coïncidé avec une disparition quasi complète du débat politique en France. Le meilleur moyen de dépolitiser une population est de l’empêcher de commercer, de circuler à ciel ouvert et de palabrer dans les cafés : elle se détache alors mécaniquement de la pensée politique, comme un arbre sans terre se dessèche.

    Les fantasmes de Laurent Obertone sur un Big Brother effaçant la vérité et imposant le mensonge relèvent de la paranoïa dans le fond et de la bande dessinée dans la forme, car un confinement, des masques et des gestes-barrières suffisent largement à désocialiser le citoyen, donc à brouiller les messages de la démocratie. La censure n’est alors guère plus qu’une variable d’ajustement : le socialisme, en soi, produit l’essentiel de l’apolitisme. Macron n’a même pas besoin de le vouloir, ni de le comprendre – ne lui prêtons aucun génie maléfique, car il n’y a rien de génial en lui. Peut-être même croit-il vraiment être participer à l’édification du libéralisme.

    Mais alors, si le socialisme n’est ni économique, ni politique, qu’est-il donc ? D’où tire-t-il son effrayante puissance de coercition, de destruction et de ruine ? De l’idéologie et de la bureaucratie.

    L’idéologie

    L’idéologie n’est pas politique, car la politique se signale par une vision de la réalité et une volonté de la réformer pour l’améliorer.

    Or, l’idéologie ne veut pas transformer le réel : elle veut l’abolir. Soit en douceur, par l’effet d’une accumulation asphyxiante de transformations ponctuelles, comme sous Mitterrand, soit par un viol global, brutal et immédiat de ses fondamentaux, comme sous Lénine.

    Mais il y a bien pire encore : l’idéologie ne comprend pas le réel parce qu’elle ne le voit pas. Elle est, à proprement parler, une hallucination. Elle voit tout à l’envers. Où il y a de la richesse, elle détecte de la misère. Où il y a de la liberté, elle décèle de la contrainte. Où il y a du contrat, elle dénonce de l’esclavage. L’idéologie n’est pas une erreur de jugement, mais un anti-jugement, une observation en position du cochon pendu.

    Dénuée de tout point de contact avec la vérité, elle lui tourne le dos aussi longtemps qu’elle peut et ne se dirige vers lui que pour le prendre d’assaut et l’éliminer.

    La bureaucratie

    Sa prise du pouvoir peut s’opérer par étapes ou d’un coup selon les contextes historiques et les dogmes brandis, mais si l’idéologie veut maintenir son emprise sur la société, elle est condamnée à mettre en place une bureaucratie. Ici, entendons-nous : la bureaucratie n’est pas l’État. Si ce dernier peut se targuer d’une dimension légitime (nous laisserons de côté certaines thèses libertariennes, anarchistes ou marxistes), la bureaucratie est illégitime dans son essence même, absurde dans l’ensemble de son fonctionnement et toxique dans toutes ses conséquences. Elle n’est pas une excroissance de l’État, mais un anti-État : la tumeur qui dévore le régalien. Entre un fonctionnaire et un bureaucrate, il y a la même distance qu’entre un policier et un assassin ; les deux sont armés, mais le premier sert la justice, tandis que l’autre l’assaille. Le fonctionnaire honnête et utile existe. Le bureaucrate est l’homme qui s’est donné pour mission de parasiter le plus possible l’État à son seul profit : c’est un ennemi intérieur. Il est moralement condamnable et politiquement inexcusable.

    La seule chose qui puisse justifier l’essor de la bureaucratie, c’est l’idéologie. Et la seule chose qui puisse faire advenir le règne de l’idéologie, c’est la bureaucratie.

    L’idéo-bureaucratie

    Parce qu’elle n’entretient aucune relation avec le réel, l’idéologie ne peut s’incarner que dans une organisation fictive : la bureaucratie. Et parce que son envahissante inanité a besoin d’alibis imaginaires, la bureaucratie renforce sans cesse l’idéologie qui la produit. Elles sont indispensables l’une à l’autre.

    Bien sûr, historiquement il existe des idéologies « pures », qui ne trouvent pas leur aboutissement dans des bureaucraties, comme il existe des bureaucraties « pures », qui se passent de justifications idéologiques. Toutefois, c’est dans leur accouplement pervers qu’elles trouvent leur plein épanouissement à l’ère moderne. Que serait l’écologisme sans ses innombrables bureaux, associations, lois, règlements, ministères, colloques, sommets, partis, élus locaux, nationaux, européens et mondiaux, tous financés par le contribuable, et qui donnent corps et présence à son vertigineux vide intellectuel ? De même, que serait ce labyrinthe organisationnel déployé par les verts sur les cinq continents, sans les délires idéologiques sur le réchauffement, l’empreinte carbone et le devoir de sauver d’urgence la nature menacée de disparition par la plus abjecte des espèces, la nôtre ? L’idéologie est le dieu de la bureaucratie. Le formulaire Cerfa est l’hostie de l’idéologie. Le serpent idéologique et le serpent bureaucratique se mordent la queue l’un l’autre, la boucle est bouclée : l’humanité est encerclée.

    Une feuille de papier

    Et qu’y a-t-il, entre le ciel idéologique et la bureaucratie bassement terrestre ? Rien du tout. Regardez une feuille de papier. Le recto, c’est l’idéologie. Le verso, c’est la bureaucratie. L’épaisseur, c’est le mot « socialisme ».

    L’idéologie est un enfer des idées, la bureaucratie est un enfer de la matière, et le socialisme est le no man’s land contenu entre ces deux enfers. Vivre en pays socialiste ou national-socialiste, c’est se retrouver écrasé par cet étau. Le Goulag et le camp d’Auschwitz étaient deux bureaucraties reposant uniquement sur des idéologies : le communisme et le nazisme sont des mythes : ils n’ont jamais existé. Il n’y a rien eu d’autre que des concepts et à l’étage inférieur, des organigrammes, des législations, des fiches, des classeurs, des bureaux, des guichets, des cases cochées dans des questionnaires pour, en bout de course, couvrir l’horizon de cadavres d’innocents. En milieu socialiste, la politique et l’État sont des décors, des arrière-plans inhabités. L’idéologie fournit le but, la bureaucratie la méthode, avec la mort pour résultat.

    C’est pourquoi, chaque fois que le libéral attaque la bureaucratie, il doit en même temps frapper l’idéologie qui la fonde. Et chaque fois qu’il dénonce l’idéologie, il doit aussi condamner la bureaucratie qui la matérialise. Sans quoi il raye d’un trait de plume le recto de la feuille et oublie le verso, ou inversement ; dans les deux cas, il échoue.

    Lorsqu’on aura mis un terme à l’idéologie et à la bureaucratie prises ensemble, la France découvrira – non sans stupéfaction, mais avec un immense soulagement – l’authentique définition de la gauche qui la torturait au fer rouge dans la cave de l’Histoire : une billevesée. Nos plaies se refermeront bien plus vite que nous n’osons en rêver.

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      Retraites : François Bayrou rédige enfin une note utile

      Nathalie MP Meyer · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 13 December, 2022 - 04:30 · 6 minutes

    Il s’ennuyait ferme, notre François Bayrou national, dans son grand bureau de l’hôtel Beistegui. La vue imprenable sur la place des Invalides et la Tour Eiffel avait beau être l’une des plus belles du Paris gouvernemental, la proximité avec l’Assemblée nationale avait beau être sinon stratégique du moins fort appréciable, sa table de travail restait désespérément vide de tout dossier important malgré sa double fonction de Haut-commissaire au Plan depuis septembre 2020 et de président du Conseil national de la Refondation depuis trois mois.

    Il est vrai que plusieurs « notes d’ouverture » censées éclairer les choix collectifs de la France face aux défis sociaux, technologiques et environnementaux du futur lui avaient permis de se rappeler à intervalle régulier au bon souvenir de l’exécutif et du législatif, mais dans l’ensemble, il s’était montré d’une si grande discrétion dans l’exécution de ses missions que plus personne ne savait au juste ce qu’il faisait et que les rares qui le savaient encore avaient toujours trouvé ses travaux plutôt minces. Même la « planification écologique » introduite par Emmanuel Macron dans l’entre-deux tours de la dernière élection présidentielle pour damer le pion à la Nupes avait fini par lui échapper au profit de la Première ministre.

    Bref, il s’ennuyait ferme, notre Bayrou. Quand soudain, la remise en selle récente de la réforme des retraites dans des termes très simplifiés pour ne pas dire simplistes lui a fourni l’occasion de monter au créneau pour alerter la France entière sur l’extrême fragilité financière de notre système. Quitte à s’opposer bruyamment aux méthodes de son partenaire politique, celui-là même qui, en le nommant à ces postes plus ou moins fantomatiques, lui permet de grenouiller encore longtemps dans les hautes sphères du pouvoir.

    Que se passe-t-il avec les retraites ?

    Pour résumer le fil des événements sur le sujet, disons que la retraite universelle à points voulue par Emmanuel Macron lors de son premier mandat s’est heurtée à une multitude d’oppositions très différentes et très déterminées qui ont culminé dans les grèves et les manifestations de la fin de l’année 2019. Sur ce, pandémie de covid ; tout le monde passe à autre chose. Mais pendant ce temps, nos comptes publics se dégradent encore plus, rendant une réforme significative sur le plan de la baisse des dépenses publiques absolument incontournable.

    Lors de la campagne électorale de 2022, Emmanuel Macron annonce donc que s’il est réélu, il proposera une réforme essentiellement centrée sur le recul de l’âge légal de départ en retraite de 62 à 65 ans. Une mesure qu’il édulcore considérablement dans l’entre-deux tours de l’élection, face aux propositions de retour à 60 ans portées autant par la Nupes que par le Rassemblement national. Il est alors question de s’en tenir à 63 ou 64 ans et de jouer aussi sur la durée de cotisation.

    Sur ces entrefaites, le Conseil d’orientation des retraites (COR) indique dans son rapport annuel publié en septembre dernier que notre système a généré respectivement 900 millions et 3 milliards d’euros d’excédents en 2021 et 2022 mais qu’il renouerait avec les déficits dès 2023 et pour longtemps si rien n’est entrepris pour contrecarrer cette tendance.

    De quoi faire plaisir à tout le monde. Les syndicats, ne voyant que le retour aux excédents, considèrent que la réforme voulue par le gouvernement est inutile car uniquement marquée au sceau de l’idéologique libérale et de l’austérité (sic) tandis que le gouvernement, ne voyant que les déficits, confirme que son plan est bien de remonter l’âge légal à 65 ans. La Première ministre Élisabeth Borne devrait en faire l’annonce officielle ce jeudi 15 décembre.

    Ou du moins, de quoi faire plaisir à presque tout le monde car de son côté, François Bayrou n’achète ni les excédents annoncés par le COR ni la réforme gouvernementale, trop brutale, trop 49.3 et pas assez expliquée aux Français à son goût. Dans une note publiée le jeudi 8 décembre dernier, il s’est justement donné pour objectif de clarifier les chiffres , histoire de donner à chacun des éléments de réflexion précis sur la situation réelle des retraites.

    À noter qu’il confirme parfaitement les conclusions auxquelles étaient arrivés l’iFRAP et l’Institut Molinari quelque temps auparavant, à savoir que le système global, loin de dégager un excédent de 3 milliards d’euros cette année, est en fait en déficit structurel de 30 milliards d’euros par an au minimum. Un déficit essentiellement concentré sur les régimes du secteur public et qui risque en outre de s’aggraver considérablement dans les années à venir du fait des évolutions démographiques prévisibles.

    D’où vient l’écart avec le COR ?

    D’une petite imprécision essentielle sur le triple rôle de l’État dans le financement des retraites :

    En tant qu’employeur, il verse chaque année de l’ordre de 25 milliards de cotisations patronales. Rien de plus normal.

    En tant qu’artisan de politiques publiques redistributives, il verse également aux caisses de retraite la compensation exacte des exonérations de cotisations qu’il autorise par ailleurs pour favoriser l’emploi, la compétitivité, etc., soit 90 milliards d’euros annuels de plus. Là encore, contribution justifiée (à partir du moment où l’on avalise les politiques précitées).

    Et puis, mélangé à tout le reste comme si c’était parfaitement naturel, comme s’il s’agissait de cotisations retraite normales, il verse aussi de quoi équilibrer les régimes de la fonction publique et les régimes spéciaux tels ceux de la SNCF et de la RATP, soit encore 30 milliards d’euros par an. Et nous voilà à l’équilibre pour les retraites mais via la grande illusion des déficits et de la dette publique qui pèsent sur les contribuables d’aujourd’hui et de demain.

    On peut rendre grâce à François Bayrou d’avoir effectué ce travail de remise à plat. N’étant pas spécialement étiqueté libéral comme l’iFRAP ou l’institut Molinari, peut-être parviendra-t-il à obtenir une certaine écoute chez les commentateurs économiques et dans l’opinion publique.

    Le problème, comme souvent, c’est qu’à la justesse du constat, au discours de vérité sur la dramatique réalité de la situation, succèdent des propositions de remède soit inexistantes soit nettement insuffisantes. François Bayrou se retranche derrière l’idée de dire que les Français doivent disposer de toutes les données pour aborder le débat sur les retraites mais jamais il n’évoque le fait que le système par répartition dans lequel nous nous enfermons par fausse appréciation de ce que signifie vraiment justice sociale porte en lui-même tous les germes des déficits et des injustices qu’il en est venu à occasionner.

    Comme la plupart des politiciens, comme la Cour des comptes, comme Emmanuel Macron, comme le gouvernement et comme les oppositions, il ne songe qu’à sauver notre modèle social, lequel est sous perfusion aux frais des contribuables depuis plusieurs décennies. Voilà typiquement un domaine où quelques vigoureuses mesures de fin de vie seraient pourtant les bienvenues…

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      Croissance, pouvoir, puissance : les trois âges du mal idéologique

      Pascal Avot · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 7 December, 2022 - 03:40 · 10 minutes

    À la chute du Mur de Berlin , nombreux furent les théoriciens qui affirmèrent que l’idéologie de gauche allait s’effondrer. Moscou, la Mecque du socialisme pendant 70 ans, redeviendrait une capitale comme une autre. Privées du soutien idéologique, logistique et financier de l’Union soviétique, les filiales du Komintern allaient s’éteindre les unes après les autres. Sans le soutien électoral des communistes, le socialisme était voué à disparaître. En France, l’effondrement du PCF actait, croyait-on, la victoire des idées libérales.

    Jean-François Revel , pourtant, prévenait : « La bête n’est pas morte. Elle traverse un coma léger. Elle reviendra, et son nouveau visage nous surprendra tous. » Il avait raison. Trente ans plus tard, la gauche hante l’Occident sous des masques inédits, insensés, sans cesse renouvelés, qui feraient presque passer l’ancienne langue de bois stalinienne pour un moindre mal, plus stable et plus compréhensible.

    Jeunesse d’un monstre

    Que s’est-il passé ? L’idéologie de gauche est embryonnaire pendant la Révolution française. Elle entre dans une phase de croissance au XIX e siècle : elle s’approfondit philosophiquement, s’étend géographiquement et se durcit encore politiquement. D’un conglomérat d’idées confuses sous Robespierre , on se dirige vers les grandes architectures marxistes. La multiplication de groupuscules nihilistes dans toute l’Europe sert de tête de pont aux grands partis à venir. L’idéologie investit deux univers qui vont faire sa gloire : l’intellectualisme et le terrorisme.

    Cette phase de croissance a un centre de gravité : le Russe Mikhaïl Bakounine . À la fois théoricien bavard, prophète illuminé des grands bains de sang à venir et activiste souterrain, Bakounine incarne parfaitement l’incubation du mal idéologique moderne. Il a pour protégé – et peut-être pour amant – Sergueï Netchaïev, un terroriste adolescent dont le Catéchisme du révolutionnaire , ouvrage bref, glaçant, ouvertement maléfique, servira de bréviaire à une myriade de psychopathes communistes et anarchistes au siècle suivant.

    La bête prend le pouvoir

    Mais le chaos qui sort de la tête de Bakounine ne suffit pas à fonder une politique. Avec Marx, l’idéologie se dote d’un maître définitif. Son esprit de système historique et économique va offrir à la pensée idéologique une structure extrêmement cultivée et sophistiquée. Marx se trompe-t-il ? Oui, sur à peu près tous les sujets, mais il est logique, méthodique et convaincant. Il apporte à la pensée de gauche un immense décor aux apparences rationnelles – et mieux : scientifiques. Ce qui manqué à Robespierre et aux Communards est là, enfin prêt à l’emploi, adulte. La phase de croissance s’achève. La phase de pouvoir commence.

    En kidnappant la Russie en 1917, Lénine inaugure cette deuxième saison de l’aventure idéologique : des improvisations et des abstractions, on passe à la pratique disciplinée. Inutile de rappeler ici les catastrophes provoquées par ce leader politique à nul autre pareil, puis par ses disciples sur les cinq continents. Censure, terreur, déportations de peuples entiers, exécutions arbitraires de masse, anéantissement des économies et des cultures, destruction de toutes les institutions et de toutes les traditions : le léninisme au pouvoir ne laisse pas pierre sur pierre.

    La machine à détruire

    De Staline à Mao, de Castro à Pol Pot, de Ceaucescu à Andropov, les styles changent, les techniques de coercition changent, mais la ruine et l’épouvante sont les mêmes. Sans compter les conflits que le communisme déclenche ou aggrave : guerre civile russe, Deuxième Guerre mondiale, de Corée, du Viet-Nam, d’Afghanistan, la liste est longue. Aujourd’hui encore, Xi Jinping et Kim Jong Un maintiennent en bon état de marche la machine à détruire les civilisations, avec l’aimable collaboration de Cuba et de quelques autres contrées à parti rouge unique.

    Le XX e siècle fut le siècle de Lénine et nous entendons ses échos jusque dans nos vies quotidiennes. Un exemple ? Le directeur général de l’OMS depuis 2017, Tedros Adhanom Ghebreyesus , a appartenu à une organisation marxiste-léniniste et terroriste, le Front de Libération du Peuple du Tigray. Les accointances contemporaines de Tedros avec la Chine de Xi Jinping ne sont plus à démontrer : elle a financé sa campagne pour prendre la tête de l’OMS et, en échange, il a soutenu sans faillir la stratégie chinoise de confinement au début de la pandémie de Covid-19, laquelle politique a été aveuglément imitée par tous les pays du monde. Nous devons, pour une bonne part, la dureté de la politique sanitaire d’Emmanuel Macron au léninisme de ses initiateurs.

    Mais l’ère du pouvoir idéologique, sans être pleinement achevée, semble laisser place à une troisième phase : celle de la puissance. À ce stade, l’idéologie n’a plus besoin de monopoliser les ministères, ni d’emprisonner ses proies, et encore moins de tirer sur ses opposants : elle se diffuse de manière immatérielle, sans visage. Qu’observons-nous ? Un envahissement des esprits par le gauchisme dans toutes les strates de la société occidentale, y compris en des lieux où sa présence était autrefois inimaginable.

    Le capital et l’Église en PLS

    Prenons deux exemples : le capitalisme et le christianisme.

    Théoriquement, le capitaliste lutte bec et ongles contre ce qui veut détruire sa richesse. Mais ça, c’était avant. De nos jours, les services corporate et marketing des grands groupes industriels et commerciaux regorgent de jeunes idéologues dont l’obsession est de faire rendre gorge au capitalisme. Et d’injecter dans chaque artère du profit des doses maximales d’écologisme, d’antiracisme, de féminisme, de crétinisme post-bolchévique, comme si Google, l’Oréal ou Renault étaient des antennes de l’Internationale.

    Jamais, dans toute l’histoire de l’entrepreneuriat, de la production et des services, on n’avait vu les piliers de la richesse dénoncer de manière aussi acharnée le monde du profit. Jusque chez HEC, l’altermondialisme est au menu. Le résultat est une bureaucratisation galopante de la sphère économique privée, qui cherche désespérément à ressembler à une ONG progressiste. Les milliardaires miment Mélenchon. L’État les applaudit et les encourage à redoubler d’efforts, évidemment. Les cadres supérieurs votent Sandrine Rousseau .

    Pour ce qui est du christianisme, il suffit de citer un nom : le Pape François.

    Il est à l’Église ce que la Responsabilité Sociale et Écologique est à l’entreprise. Il n’a de cesse de culpabiliser l’Occident , de tracer des parallèles oiseux et toxiques entre charité et socialisme, de promouvoir les idéaux collectivistes, de couvrir d’anathèmes l’individualisme, de coiffer d’auréoles toutes les Greta Thunberg du moment, et de livrer sur un plateau les fidèles chinois à Xi Jinping. Si bien que de plus en plus de croyants se demandent si leur baptême se résume à une adhésion au gauchisme. Et, ce qui est peut-être plus grave encore, par réaction horrifiée, les traditionalistes voient en François un envoyé de Satan, plongent dans la mentalité apocalyptique et se réfugient dans les nuages d’encens envoûtants de Poutine. À force de mimer Che Guevara, le Pape joue avec les feux du schisme et de l’hérésie.

    Ce ne sont que deux exemples. Les signes allant dans le même sens fourmillent chaque jour dans les médias. La culture, la famille, l’éducation, ou ce qu’il en reste, sont arc-boutées sous un déluge de délires idéologiques, de réglementations, de lois, de censures et d’injonctions de gauche, au point que, pour tenter de donner une identité au phénomène, la droite parle de totalitarisme soft . Or, l’expression est tronquée, car il n’est de totalitarisme qu’assassin. Ni Biden, ni Macron, ni van der Leyen, ni Soros, ni Schwab, ne sont des tueurs de masse. Nous n’avons pas affaire à un totalitarisme, mais au passage de l’idéologie de l’état de pouvoir à celui de pure puissance.

    En termes clairs : elle n’a plus besoin de prendre le pouvoir pour l’exercer. Elle n’a plus besoin de la pyramide administrative pour nous dominer. Elle est libérée de ses propres carcans institutionnels. Aussi aberrante et hystérique qu’à ses débuts, mais avec l’acquis d’un siècle de conquêtes et d’expérimentations. Et la pensée libérale toute entière se trouve prise à contrepied.

    Comment réagir ?

    La première réaction à notre disposition est d’adopter la posture du martyr. De proclamer que ce nouveau stade de l’idéologie est plus brutal que le précédent, que toute liberté d’expression a disparu, qu’Armageddon n’est plus devant nous, mais sous nos pas et qu’in fine, nous sommes d’ores et déjà dans la même position que les Coréens du Nord. Voire même encore plus malheureux qu’eux, suivant le théorème imbécile et déshonorant de « C’est encore pire parce que c’est plus sournois ».

    Par désespoir, par désir adolescent de se sentir héroïques, par inculture historique, par incompréhension de ce qu’est vraiment le totalitarisme, beaucoup de libéraux foncent dans ce piège qui les valorise, confondent la souffrance et l’agonie, et font montre de la même frénésie que les communistes détectant dans la plus petite baisse de la bourse une preuve indiscutable que le capitalisme rend son dernier soupir. Ils se trompent. Leur détresse dessert leur cause. Leur fragilité est une reddition. Leur orgueil de victimes autoproclamées les décrédibilise.

    La deuxième voie, qui accompagne le libéralisme depuis déjà longtemps comme le démon suit le pécheur à la trace, est de générer une contre-idéologie. En termes clairs, de transformer la pensée libérale en dogme sectaire : de la doter de la systémie, la rigidité, l’aveuglement propres au communisme, au nazisme ou au djihadisme. On trouve fréquemment ce type de tentation chez certains libertariens et certains randiens. Ce qu’ils ne voient pas, c’est qu’en armurant, bottant et casquant les théories libérales, on les tue. On leur arrache leur âme : leur sens de la mesure, de l’équilibre et de l’indulgence, leur nature horlogère, et non bûcheronne, leur refus de diviser l’humanité en classes et de voir en chaque fonctionnaire un monstre. « Le libéralisme n’est pas une idéologie contraire, c’est le contraire d’une idéologie », dit Alain Besançon. Qui perd de vue cette boussole perd tout.

    Réfléchir

    La dernière voie est de réfléchir. Patiemment, prudemment, de chercher à comprendre ce qui nous arrive. De tenter de cadrer cette phase de la puissance idéologique, cette « ère de l’après-pouvoir » qui nous prend de court, nous encercle et menace de nous ensevelir, parce que nous n’avons pas les armes pour l’affronter. Ce sera long et difficile, mais le jeu en vaut la chandelle, et rien n’est plus laid qu’un abandon de poste.

    Citons encore Alain Besançon : « Le premier mouvement du libéral est d’accepter le réel tel qu’il est ». Acceptons donc cette mutation de l’ennemi, qui le rend impossible à localiser et omniprésent, terriblement fluide et souple, ce tsunami de néant qui se glisse dans tous les interstices de l’Occident. Il y faudra de la lucidité, du courage intellectuel, de la minutie dans la logique – et, très certainement, un retour en force de la métaphysique, cette grande dame que le libéralisme contemporain a une vilaine tendance à envoyer en maison de retraite.

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      Travail : la grande évasion

      Pierre Robert · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 6 December, 2022 - 04:30 · 7 minutes

    La notion de « fuite devant la monnaie » est familière aux économistes.

    Celle de « fuite devant le travail » pourrait bientôt s’imposer dans le champ de leur réflexion au vu de la situation de pénurie de main-d’œuvre observée dans de nombreux secteurs et de l’émergence de comportements sociaux dévalorisant l’effort.

    Cherche conducteur de tramway désespérément

    On sait que l’hôtellerie et la restauration peinent à attirer des candidats . Mais on observe aussi des difficultés aiguës de recrutement de professeurs, de soignants, de soudeurs, d’électriciens, de plombiers, de menuisiers et même de conducteurs de transport en commun que les opérateurs ont de plus en plus de mal à trouver .

    On en est arrivé au point où une compagnie comme Keolis, une filiale de la SNCF, est réduite à embaucher des étudiants et des jeunes retraités pour conduire ses tramways en Île-de-France. Dans une annonce parue sur son site le 22 novembre dernier elle propose des contrats à durée indéterminée à temps partiel pour transporter les passagers sur la ligne T9 qui relie Paris à Orly.

    Outre ses offres de primes et de treizième mois, l’entreprise s’engage formellement à trouver l’« organisation de travail la mieux adaptée (aux) contraintes personnelles » des nouvelles recrues, une promesse tout à fait en phase avec l’esprit du temps. Comme le montrent de nombreuses enquêtes internationales reprises par l’ASMP, dans leur grande majorité les salariés français attendent énormément de leur travail sans être toujours disposés à donner beaucoup en échange. C’est ce que confirment les résultats d’une enquête récente menée par la fondation Jean Jaurès.

    Génération flagada

    Publiée le 21 novembre dernier, elle s’intitule « Les jeunes et l’entreprise : quatre enseignements . »

    Selon son auteur, Jérémie Peltier, la crise sanitaire a marqué un tournant, « un moment d’interrogation sur le travail, sur la qualité de vie au travail, sur la place du travail dans la vie des individus. Il y a eu comme une relativisation de la place du travail dans la vie des jeunes. Il est moins statutaire, moins identitaire. Il y a une dimension sacrificielle qui existe beaucoup moins qu’avant ».

    Il est en effet frappant de constater que pour la majorité des 18-24 ans (certains encore étudiants, d’autres ayant un emploi), l’entreprise est avant tout « un lieu du vivre ensemble », une entité ayant pour mission de s’engager dans la défense de la planète , un outil pour faire avancer certaines causes (égalité homme/femme, lutte contre les discriminations)

    Pour 40 % d’entre eux le rôle principal d’une entreprise est de favoriser l’épanouissement de ses membres, c’est-à-dire de leur donner les moyens « d’acquérir la plénitude de leurs facultés intellectuelles et physiques » tout en leur permettant de mener une vie de famille épanouie.

    La valeur qui leur donne le plus envie de rejoindre un employeur est dans 57 % des cas « le respect ». Si leurs valeurs personnelles ne sont pas respectées, nombre d’entre eux croient dans les vertus du quiet quitting , attitude consistant à systématiquement en faire le moins possible. Manifestement les positions de David Graeber estimant que 80 % des emplois sont des bullshit jobs n’ayant aucun sens ont cheminé dans les esprits. Cela n’empêche nullement les sondés de déclarer que leur principale attente vis-à-vis de leur employeur est d’être bien payé.

    À l’évidence, il leur échappe qu’une entreprise est avant tout un lieu de production de biens et de services, que comme toute organisation elle impose des contraintes à ses membres et qu’un travail hautement productif est la condition sine qua non de la prospérité. Voyant dans l’entreprise un outil de développement personnel, il est logique qu’ils critiquent leurs ainés en estimant qu’ils ont beaucoup trop sacrifié leur vie privée à leur vie professionnelle. C’est pourtant au travail des générations passées qu’ils doivent les conditions matérielles d’une existence bien plus douce qu’autrefois.

    La France, une URSS qui aurait réussi ?

    On peut raisonnablement faire l’hypothèse que ces attitudes et ces comportements ne sont pas sans lien avec le degré très élevé de socialisation de notre économie : très faibles coûts des études universitaires, gratuité de nombreux services publics, omniprésence de l’État providence, multiplicité des aides et des revenus sociaux.

    Dans ce contexte la France se rapproche désormais dangereusement d’une situation à la soviétique où les gens ne sont plus motivés à travailler.

    Dans la défunte URSS où chacun était autoritairement affecté à un emploi, le chômage était inexistant.  Mais en l’absence de motivation au travail et d’innovation, les gains de productivité étaient très faibles et le pouvoir d’achat stagnait à un très bas niveau dans un contexte de pénurie généralisée. Ce cercle vicieux nous menace aujourd’hui, à l’heure où le rêve d’un pays sans usine tourne au cauchemar. Il y a une quarantaine d’année nos élites ont de fait enclenché une série de décisions qui nous ont conduit là où nous sommes arrivés, un pays déserté par l’industrie et peuplé de personnes allergiques au travail, un pays autrefois sûr de lui mais aujourd’hui surendetté.

    La pénurie d’électricité qui nous menace de coupures à répétition cet hiver est un symptôme de plus de cette évolution funeste. Si le parc nucléaire dont nous avons hérité du travail et des impôts des générations précédentes est dans un si lamentable état, c’est le fruit d’une politique énergétique délibérée. L’industrie nucléaire où nos entreprises ont jadis brillé a été jugée à l’aune de critères politiques et moraux biaisés : trop centralisée, trop polluante, trop dangereuse, il fallait impérativement réduire son emprise. Aujourd’hui nos centrales fonctionnent à la moitié de leur potentiel. Pour les remettre en état il faut faire appel à des soudeurs étrangers en grande partie américains car nous avons négligé de former le personnel compétent.

    En misant tout sur les services et la création d’emplois tertiaires, en accablant l’industrie de taxes trop lourdes et de normes environnementales trop contraignantes, on l’a laissé filer à l’étranger. Exit donc l’industrie qui pue, qui pollue, qui est mauvaise pour la planète, cette entité mystérieuse dont il faut aveuglément « prendre soin ».

    En revanche, la finance a prospéré enrichissant au passage tant de nos anciens hauts fonctionnaires passés avec armes, bagages et pantoufles dans le privé. Cette caste a donné un très mauvais exemple en cumulant de très hautes rémunérations, des parachutes dorés, des retraites chapeaux et autres moyens d’enrichissement rapide. Après des décennies d’économie dirigée, ce qui a émergé de cette fusion entre la haute administration et les milieux d’affaires c’est un capitalisme de connivence pas si lointain de celui qui s’est imposé en Russie dans l’ère post soviétique.

    Le grand public a retenu que le travail n’était pas le meilleur moyen d’améliorer sa condition, que l’idéal était de trouver un moyen de faire fortune très vite et très jeune et que si on n’y parvenait pas il restait le loto.

    Une apathie dangereuse

    La population active se compose aujourd’hui en majorité de personnes du tertiaire effectuant si possible en télétravail des tâches de plus en plus dématérialisées. Dans cet environnement, elles tendent à perdre le contact avec les réalités économiques de base, d’autant plus que l’enseignement d’économie qu’ils ont pu recevoir a été le plus souvent indigent . Cela les incline à croire dans les vertus de l’argent magique et dans la toute-puissance de l’État pour les protéger en dernier ressort.

    Si on se tourne vers le passé, la chute de l’ex-URSS devrait pourtant leur donner toutes les raisons d’en douter. Une économie qui ne fait pas de gains de productivité et dont la production n’est pas compétitive est vouée à s’effondrer.

    Si on se tourne vers l’avenir, le tableau n’est pas plus rassurant.

    Comme souvent, une œuvre de science-fiction permet de s’en faire une idée. Dans Zardoz , un film de 1973, John Boorman met en scène une société d’individus vivant éternellement jeunes dans un univers où ils sont protégés de tout et même de la mort grâce à une intelligence artificielle. Mais, avec le temps, ils ont fini par sombrer dans l’apathie et leur bulle est détruite par des brutes venues du monde extérieur.

    Pendant que nous nous querellons pour savoir s’il faut ou non travailler plus longtemps ou constitutionnaliser l’IVG , la Chine s’arme massivement, les États-Unis se réindustrialisent à grande vitesse en utilisant tous les leviers de leur hégémonie et la Russie post-soviétique envahit ses voisins…

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      Et si notre modèle social adoré était en fait l’artisan de nos difficultés ?

      Nathalie MP Meyer · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 24 November, 2022 - 05:00 · 5 minutes

    Les rapports de notre propre Cour des comptes comme ceux des grands organismes économiques internationaux se suivent et se ressemblent : la France doit impérativement mettre un terme à sa fuite en avant dans la dépense publique, les déficits et la dette.

    Qu’on s’illusionne tous collectivement au point de voir dans cette folle cavalcade de notre modèle économique et social l’aboutissement sublime de la solidarité , de l’égalité et du « quoi qu’il en coûte » propre à une France supérieurement juste et généreuse ne change rien à l’affaire. Faute de procéder enfin et en profondeur à de vraies réformes structurelles, le pays manquera de marges de manœuvre budgétaires pour encaisser les chocs à venir ; il verra ses services publics se dégrader encore plus et il s’enfoncera pour longtemps dans une atonie économique désastreuse pour la prospérité de ses habitants.

    Aujourd’hui, c’est le FMI qui nous le dit. Dans un rapport publié lundi dernier (21 novembre 2022), il suggère à la France de mettre un frein au « quoi qu’il en coûte » tous azimuts, de mieux cibler ses aides et de faire baisser son déficit dès l’an prochain afin de commencer à stabiliser la dette et non pas attendre 2024 comme prévu par le gouvernement (le déficit resterait plongé à 5 % du PIB en 2023 comme en 2022).

    Si rien n’est fait, le FMI prévoit que la France se retrouverait avec un déficit de 5 % toujours en 2027 (et non 3 % comme espéré par Bercy) et donc avec une dette désespérément calée sur une trajectoire de hausse, tandis que dans le même temps la zone euro reviendrait en moyenne à 2,5 % de déficit et l’Allemagne à 0,5 % (voir graphe extrait du site Les Échos ).

    Quelles actions prendre pour contrecarrer cette évolution déprimante et appauvrissante ? Toujours les mêmes, ressassées depuis des années par l’Union européenne , l’OCDE ou la Cour des comptes , mais perpétuellement oubliées, reportées ou négligées.

    Compte tenu de la « pression fiscale déjà élevée » qui prévaut en France, ce sont les dépenses qu’il faut absolument réduire, les courantes, les exceptionnelles et les structurelles. Et cela passe inéluctablement par une réforme des retraites, une réforme de l’assurance chômage, une « rationalisation » des aides fiscales et sociales, une« rationalisation » des effectifs de la fonction publique et une « rationalisation » de l’organisation de nos nombreuses administrations. Ajoutons les lourdeurs persistantes de notre marché du travail qu’il conviendrait de lever ainsi que les faiblesses scolaires criantes de nos élèves qu’il faudrait réparer de toute urgence.

    À utiliser ainsi à plusieurs reprises le terme de « rationalisation », ne dirait-on pas que le FMI suggère sans le dire que la France évolue dans un système parfaitement irrationnel ? Probablement pas. Même les acteurs publics ne parlent que de rationaliser leurs actions et d’introduire de l’efficience dans le service public. Même notre Cour des comptes n’envisage nullement de remettre en cause notre modèle économique et social. Ses remontrances récurrentes n’ont d’autre objectif que de l’amender afin d’en assurer la pérennité.

    C’est pourtant exactement ce que je pense ; nous vivons, la France vit dans l’irrationalité la plus totale.

    Rappelons à toutes fins utiles qu’en 2021, la France a terminé l’année avec un taux de dépenses publiques sur PIB de 59 % , un taux de prélèvements obligatoires de 44,3 % , un taux de déficit public de 6,5 % et un taux de dette publique de 113 % , soit un niveau particulièrement élevé, parfois le plus élevé du monde développé pour toutes ces grandeurs ( ici comparaison OCDE sur les dépenses publiques en 2020). Ce n’est pas pour rien que la France est connue pour être la championne du monde des taxes et des dépenses. Ce n’est pas pour rien qu’on a vu surgir la colère des premiers Gilets jaunes .

    Rappelons que son taux de chômage, le plus bas depuis longtemps, mais néanmoins le double de celui de ses grands voisins, se situe aux alentours de 7,4 % contre 3 à 3,5 % pour l’Allemagne et les Pays-Bas.

    Rappelons que tous les tests internationaux sans exception placent la France à la traîne de ses pairs quant au niveau éducatif des élèves. Rappelons en outre que la dégringolade des connaissances et des compétences observée dans nos écoles depuis plus de 30 ans affecte les enfants de tous les milieux socioprofessionnels dans un nivellement par le bas des plus trompeurs.

    Rappelons enfin que notre système de santé, quoique allant de plan de sauvetage en plan de sauvetage qui se comptent en centaines de millions d’euros, est perpétuellement en crise et de moins en moins attractif pour les soignants. Les pénuries de médicaments ne sont pas rares et les délais pour obtenir des rendez-vous chez les spécialistes s’allongent.

    Et bien sûr, pas question, ou si peu, d’aller chercher de l’éducation, de la santé ou des formules de retraite en dehors de nos monopoles étatiques, au nom de cet état d’esprit « collectif » issu du Conseil national de la Résistance qui serait moralement si supérieur à l’initiative privée et à la prise de responsabilité individuelle.

    Résultat des courses, plus la France dépense, plus elle s’enfonce. Plus elle porte haut les valeurs de solidarité et de justice sociale, plus elle est injuste . Plus elle redistribue, plus elle est en réalité inégalitaire. Plus elle est stratège, plus les ratés industriels s’accumulent. Plus elle veut protéger les citoyens, plus elle les infantilise . Tel est le douloureux paradoxe français.

    D’où la question : et si notre modèle économique et social adoré était en fait le principal artisan de nos difficultés ? Voici le débat qui aurait dû prendre la première place lors de la campagne pour la dernière élection présidentielle. Voici le débat que je n’hésite pas à qualifier de civilisationnel et qu’il faudra bien lancer un jour. Mais aujourd’hui, à l’Assemblée nationale, on préfère examiner le cas crucial de l’abolition de la corrida . Vous parlez d’une révolution ! Ça promet.